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3,83

sur 328 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Jean-Christophe Rufin revient avec une de ses spécialités : le roman d'aventure. Dans « D'or et de jungle », il confirme son talent de narrateur en parvenant à nous passionner à un thème pas vraiment séduisant, en théorie. Il a dû s'appuyer sur son expérience de diplomate et produire un travail de recherche incroyable afin d'arriver à vulgariser toutes ses données et à en extraire une histoire captivante. Et même si je ne connaissais rien du sultanat de Bruneï, de sa dictature, de son fonctionnement et encore moins des manipulations géopolitiques, je me suis régalé de bout en bout.

Grâce à des personnages charismatiques, au passé mystérieux, réunis dans une agence qui l'est tout autant, on entre dans le récit pour ne plus le lâcher. Comme dans un roman d'espionnage, on est entrainé dans les rouages de cette opération secrète. En jonglant entre les protagonistes, l'académicien nous dévoile les différentes étapes du plan. Les dominos tombent un à un au service de la grande mécanique. Au fil des conséquences successives, le suspense devient grandissant. Je suis resté sous tension constante jusqu'au dénouement.

Cette fiction sur les grands patrons du numérique pourrait faire sourire si elle n'était pas réaliste. Elle en dit malheureusement long sur notre monde et ça, ce n'est pas rassurant ! Ce texte érudit, fascinant et un poil badin, nous raconte les enjeux de demain, menés par l'avidité des puissants. Avec sa plume de haut vol mais accessible, son scénario parfaitement maîtrisé, sa dimension économique et sociale, Jean-Christophe Rufin nous offre une lecture enrichissante et divertissante à la fois.

Pour ma part, j'ai pris un véritable plaisir à me faire embarquer dans les coulisses de ce coup d'état et je n'ai qu'un seul conseil à vous donner en ce début d'année : Jetez-vous sur ce livre et participez à cette folle aventure du bout du monde !
Lien : https://youtu.be/XD1ozWF2SUQ..
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Après un coup d'essai retentissant à Magagascar qui a viré au drame, Ronald retente un coup de poker avec un nouveau concept : un Coup d'Etat clés en main, permettant à ses richissimes investisseurs du numérique de prendre possession de Brunei, où toutes les questions financières et éthiques seraient balayées...
Un roman qui pourrait s'appeller le guide du parfait coup d'état, réaliste au possible et tellement alarmant sur le nouvel ordre mondial qui débarque à grand pas avec les géants du numérique.
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Ses multiples et brillantes carrières inspirent le respect. Docteur en neurologie, diplômé de l'Institut d'études politiques, Jean-Christophe Rufin exerce comme médecin aux Hôpitaux de Paris et s'investit dans des ONG humanitaires qui le conduisent un peu partout dans le monde. Des expériences qui l'amènent à la diplomatie, jusqu'au poste d'ambassadeur de France. Il construit en même temps une oeuvre littéraire abondante, comptant plusieurs romans, dont l'un lui vaut de recevoir le prix Goncourt (Rouge Brésil, 2001).

Son dernier roman, D'or et de plomb, relate la genèse, la préparation et la mise en oeuvre d'un coup d'Etat, organisé de nos jours par une agence de mercenaires, pour le compte de multinationales de la Tech en quête d'une souveraineté. L'opération est mûrement élaborée. Sans tirer un coup de feu, en usant de simples manipulations et de fake news, elle consistera à ébranler les institutions d'un petit Etat. L'intention est de déclencher une réaction en chaîne jusqu'à l'effondrement du pouvoir en place, afin d'y substituer un autre, ouvert à la création d'une nouvelle Silicon Valley « libérée ».

J'ai été captivé par toutes les étapes de la machination, dès le deal de départ entre l'aventurier et le milliardaire. La constitution de l'équipe — théoricien, stratège, séductrice, hackers, baroudeurs… — est présentée avec finesse et humour. La tension monte lentement, car l'auteur développe ses intrigues en prenant son temps, n'omettant aucun détail, profitant des moments d'attente pour raconter des scènes plaisantes et servir de jolies descriptions de l'environnement naturel.

L'Etat choisi comme cible est le sultanat du Brunei, un tout petit pays enclavé dans la partie malaise de l'île de Bornéo. de la forêt vierge émergent les coupoles dorées de la grande mosquée et celles de l'immense palais présidentiel. le sultan, qui a longtemps prétendu être l'homme le plus riche du monde, est à la tête d'un régime dont l'auteur, bien documenté, révèle la brutalité, l'obscurantisme, les turpitudes et les failles. Résistera-t-il ?

L'aventure fictive racontée par Jean-Christophe Rufin est d'autant plus savoureuse — et inquiétante — qu'elle est très réaliste. Elle pourrait vraiment survenir demain.

Les commanditaires sont crédibles. L'auteur s'inspire ouvertement de velléités affichées dans l'univers des GAFAM. A leurs têtes, des hommes propulsés en quelques années du statut d'adolescents bricoleurs de génie à celui de multimilliardaires, patrons d'entreprises aux moyens quasi illimités. Ces ascensions fulgurantes les ouvrent à toutes sortes d'aspirations cosmiques ou métahumaines, aussi délirantes soient-elles. Des ambitions aujourd'hui bridées par les cadres juridiques, fiscaux et éthiques des Etats. La souveraineté sur un territoire les débarrasserait de ces entraves.

Pour l'officine assumant la maîtrise d'oeuvre du projet, l'auteur s'est inspiré des agences privées de renseignement et des groupes paramilitaires indépendants dépourvus de scrupules et de sens des responsabilités, qui parcourent le monde à la recherche d'opportunités.

Un roman passionnant, facile à lire et en même temps instructif. Il suffit d'en transposer les éléments d'intrigues sur des événements historiques ou actuels, pour percevoir la fragilité de nos institutions démocratiques. Méfions-nous des manipulations orchestrées par des personnes mal intentionnées.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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De véritable à vraisemblable cela se joue à rien....
Même nombre de syllabes, même initiale, même terminaison....
Selon mon dictionnaire préféré
Véritable signifie qui est réel...
Vraisemblable est ce qui paraît vrai, qui a l'apparence de la vérité, qui pourrait être vrai...
De possible à plausible, il n'y a qu'un son infime qui change tout...
Et c'est sur ces infimes différences que Jean Christophe Rufin construit son nouveau roman, et c'est une formidable réussite...

Après quelques digressions consulaires, après quelques années d'attente, son dernier "vrai" roman datant de 2017, mais ce point est purement subjectif, Jean Christophe Rufin nous revient au meilleur de sa forme.

Lui qui a toujours dit «Je fais profondément la différence entre les écrivains qui se mettent en scène eux-mêmes et se promènent dans une chambre tapissée de miroirs où ils ne font que se regarder, et ceux qui ouvrent les fenêtres et regardent les autres».
Ce roman ne, déroge pas à cette règle...
Après le risque bactériologique et l'éco-terrorisme dans le Parfum d'Adam, Les percées djihadistes au Sahel dans Katiba, l'avilissement contre la sécurité dans Globalia, le voici qu'il se plonge dans l'univers des GAFAM.
Ceux pour qui tout doit aller très vite, voire trop vite....
Ceux pour qui le temps est une notion toute relative, ceux pour qui notre temps à une valeur loin d'être négligeable...
Ceux pour qui l'argent généré leur donne la possibilité de dépasser les limites, ceux pour qui l'argent que nous leur générons leur donne des envies sans limites...
Ceux pour qui éthique rime avec cynique....
Ceux pour qui la réalité ne suffit pas au point de vouloir l'augmenter....
Ceux pour qui la terre ne suffit pas au point de vouloir rêver de nouvelles chroniques martiennes...
Ceux pour qui l'intelligence humaine ne suffit plus, au point de vouloir en trouver une artificielle...
Ceux pour qui l'avenir est de nous proposer des implants cérébraux pour pouvoir composer des e-mails ou aller sur internet grâce à leurs yeux et à leur cerveau...

Ceux pour qui l'argent permet de tout "s'offrir", de tout "réaliser", de tout "dépasser".
Alors quand vous avez déjà tout, et que
"Tout va trop vite. Moi, on me propose des idées. Plus elles sont folles et plus elles m'excitent. Les petits programmes sans envergure, je les laisse aux ingénieurs. Mon boulot, c'est de repérer le truc impossible, énorme et de mettre un paquet d'argent dessus pour le réaliser.
— Tu t'intéresses à un secteur en particulier ?
— Les biotechs. La santé, la biologie, le corps humain, si tu préfères. On a tous nos marottes. Musk veut aller sur Mars, ce nigaud de Zuckerberg claque tout son fric pour créer un métavers."

Que reste-t-il de plus fou à faire ?
Prendre le contrôle d'un état....
Réaliser un coup d'État....
Et le tout sans le moindre coup de feu... Complètement fou, direz-vous... Et pourtant en 2024, les nouvelles technologies ont remplacé les fusils. C'est à grand renfort de fake news, et sans tirer un coup de feu, que l'on peut désagréger une société et un État.
"Nous nous contentons de révéler la violence interne d'une société, de la faire apparaître au grand jour. Comme au judo, nous utilisons l'énergie de l'adversaire pour le renverser.". Cela paraît tellement simple et plausible, tellement terrifiant et possible.
Reste à bien choisir sa cible, dans le cas présent ce sera le Sultanat de Brunei.

L'auteur le dit lui-même : « C'est fascinant, Brunei. Un carrefour de civilisations – malaise, chinoise, indienne. J'ai toujours voulu écrire une histoire qui se passerait par là-bas. Je m'y suis donc rendu, et me suis vite aperçu que ce n'était pas vraiment un endroit où passer ses vacances. Tout est immobile et la seule chose qui semble pouvoir arriver, c'est un coup d'État. » Et comme il ne s'est rien passé de tel lors de son séjour, Rufin l'a imaginé. « Dans les rues, sous les ponts, je repérais les endroits où ils poseraient les explosifs, tout avait l'air fait, prêt pour le chaos. »

Et de s'emparer magistralement de tout ces ingrédients pour construire son roman. On pense à Technique du coup d'État de Malaparte, dans lequel à la suite de cette lecture je me suis rapidement replongé - car l'auteur y fait immanquablement référence - qui faisait le constat que, pour conquérir un état moderne, la bonne méthode n'était pas vraiment politique ou idéologique, mais essentiellement technique.
Le professeur, eminence grise de coup d'état, ne déroge pas à cette notion :
"— C'est de la physique, dit-il.
Tous les yeux se braquèrent sur lui
— Ni plus ni moins. de la physique nucléaire. La réaction en chaîne. Exactement.
— Que voulez-vous nous dire, professeur ?
Delachaux sursauta et se tourna vers Ronald.
— Le processus que nous avons enclenché ressemble à ce qui se passe dans un réacteur nucléaire. C'est cela que je veux dire. Voilà pourquoi, au début, on a l'impression qu'il ne se passe rien. Une petite interaction, une autre puis une autre encore. Rien ne bouge, mais le choc des atomes va s'accélérer. La chaleur va monter. Tout va se mettre à vibrer et, d'un seul coup… boum !"

Lui qui aime à se plonger dans Machiavel pour de détendre
" Ici, je me calme un peu en lisant les classiques. Tenez, Machiavel. Il est le seul à me donner de bonnes nouvelles. Écoutez ceci, il parle des États sous un prince tout-puissant : « Si la race de ce prince est une fois éteinte, les habitants, déjà façonnés à l'obéissance, ne pouvant s'accorder sur le choix d'un nouveau maître, et ne sachant point vivre libres, sont peu empressés de prendre les armes, en sorte que le conquérant peut sans difficulté ou les gagner ou s'assurer d'eux. » "

C'est un véritable tour de force que nous offre Jean-Christophe Rufin, flirter sur un fil invisible entre l'essai et le roman
Pour ce qui ont lu "les Ingénieurs du chaos" de Giuliano Empoli, vous avez l'essai
Pour le roman, faites confiance à l'auteur pour nous embarquer aux frontières du réel...
Bernanos affirmaient  « La plus redoutable des machines est la machine à bourrer les crânes, à liquéfier les cerveaux »
Mais, heureusement il nous reste le rêve, la lecture, l'écriture.
Je reprends en guise de conclusion, les mots de Rufin, en espérant que l'avenir ne lui donne pas forcément raison....
"Reste que l'aventure de Flora et ses comparses, si elle est romanesque, n'en est pas pour autant impossible.
Ailleurs, sans doute.
Demain, peut-être…"
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Selon Machiavel, l'homme, cherche toujours à conquérir le monde et cette conquête constituerait le fondement de la société…

" Tout n'est pas politique, mais la politique s'intéresse à tout."
Nicolas Machiavel

D'or et de jungle, n'est pas un simple livre d'aventure. C'est à la fois un livre qui nous fait voyager, puisqu'on se prend parfois pour des touristes qui découvrent un beau pays, tout en apprenant que la façade cache bien des travers. Mais c'est aussi une étude géopolitique très intéressante, puisque les pages défilent ente les paysages, la politique, son placement géographique et l'intérêt qu'aurait un géant du numérique à s'en emparer ! Car une grande partie du récit tourne autour de l'organisation d'un coup d'état….

Si ici l'idée principale est de permettre à une multinationale d'avoir son propre Etat pour ne plus être dépendante de politiques qui vont à l'encontre de son expansion et bloquent ses intérêts, l'auteur va plus loin que la simple organisation que peut mettre en place une société privée pour déstabiliser un Etat et en faire ce que bon lui semble.

Les intérêts privés sont couplés aux intérêts humains, tout en gardant une certaine humanité tout le long du récit, au point que parfois, on aurait tendance à oublier le sujet principal.

Son expérience de diplomate a certainement permis à l'auteur de construire un récit plausible et captivant de bout en bout, dans lequel le Brunei ne sera plus un secret pour vous.

J'ai parfois eu le sentiment de faire partie de l'intrigue aux côtés de personnages tous aussi intéressants les uns que les autres et j'ai pris un plaisir fou à découvrir le plan qui se met en place tout au long du récit ! C'est parfois machiavélique, incroyable de raisonnement, et cela nous garde sous tensions jusqu'au point final !

Un livre très humain, pour un sujet qui peut sembler loufoque, où les arcanes du pouvoir et ses dérives sont décortiquées, pour notre plus grand plaisir. Jean-Christophe Rufin construit un scénario brillant, porté par une plume accessible, visuelle, réaliste, où la dimension sociale ne peut s'affranchir de la dimension économique, et politique.

Le pouvoir étant entre les mains de multinationales, parfois peu scrupuleuses, l'humain n'est plus qu'un tout petit rouage d'une mécanique dont il ne maîtrise rien.
Ce n'est pas moins qu'un coup d'état clé en main que nous livre Jean-Christophe Rufin et je me suis régalée ! Alors n'hésitez pas. C'est brillant, brillamment écrit, réaliste et amoral puisque cela fait froid dans le dos, car reflet du monde actuel.
Lien : https://julitlesmots.com/202..
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Les enjeux de demain : Pouvoir faire toutes les expériences et recherches possibles sur l'Humain, sans obstacles d'où qu'ils viennent. Et comment y parvenir ? Tout simplement en s'emparant d'un pays où seule l'entreprise décidera de tout, sans politique que la sienne, sans entraves religieuse ou morale, grâce aux technologies de l'information et de la communication.

C'est l'objectif de Roland DAUME qui a réussi à convaincre Martin GLOWIC, qui fait partie de l'élite de la technologie en matière de GAFAM, de rendre possible cet incroyable projet. Un coup de poker magistral. Car pour y parvenir, il faut des moyens. de gigantesques moyens que possède Martin GLOWIC et qui manque à Roland DAUME pour mener à bien son projet et qui n'hésitera pas à utiliser le mensonge pour arriver à ses fins.

Grâce à une équipe chevronnée, dont deux hackeurs juvéniles, d'un vieil universitaire trostkiste secondée par un petit groupe de mercenaires, Jean-Christophe RUFIN demontre comment cette possibilité fait partie des réalités de demain.

Un roman d'aventure actuelle, avec une once de réalité. Une once seulement ? Hum…
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Un thriller d'anticipation sur la dérive possible des géants du numériques dont la puissance pourrait échapper à tout contrôle. Dans la postface du roman l'auteur précise que " chaque brique de cet édifice de fiction appartient à la réalité". le dernier livre de Jean-Christophe Rufin, que l'on ne peut lâcher des mains tant il est captivant, à pour sujet la mégalomanie d'un grand patron du numérique de Californie qui se voit souffler par l'un de ses camarades d'enfance l'idée de prendre le contrôle d'un Etat. Pour ce grand patron libertarien cette perfective est séduisante car elle permettrait de s'affranchir de tout contrôle règlementaire. En 2024 le numérique et les fake news remplacent les fusils...
Le scénario n'a rien d'impossible (personnellement cela m'évoque les liens entre Elon Musk et Donald Trump) et Jean Christophe Rufin puisse évidemment dans ses souvenirs de diplomate. Il pousse le souci du détail jusqu'à avoir fait un séjour au sultanat de Brunei qui sert de théâtre au roman.
le mélange du romanesque et l'anticipation produit un plaisir un brin addictif tout en donnant matière à réfléchir. La mise en garde doit être prise au sérieux. les intuitions de JC Rufin se sont souvent révélées être justes: que l'on se souvienne de celle qu'il proféra lors du déclenchement de la guerre soi-disant humanitaire déclenchée en Lybie en 2011.
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Jean-Christophe Rufin nous avait habitués à d'excellents romans historiques, tressés à la Dumas, la précision historique en plus. Ses romans policiers, avec son improbable détective le consul Aurel , reflétaient les mêmes qualités d'humour, de rigueur et de savoir-faire. En abordant le genre de la fiction politique, il se lançait un nouveau défi. On peut affirmer qu'il l'a pleinement relevé en nous offrant un récit bien construit, parsemé de réflexions subtiles sur les dangers présentés par les géants de la Tech.
Un spécialiste des coups tordus en Afrique, Ronald, après certaines déconvenues à Madagascar qui l'ont amené quelque temps en prison, crée une curieuse agence dont l'objet est de proposer aux géants de la tech (en les y associant) de s'emparer du pouvoir dans un petit pays fragile où ils pourront développer leurs activités totalement librement, débarrassés des carcans administratifs, écologiques et éthiques qui entravent, c'est bien connu, leur développement.
Pour mener à bien son projet vendu au créateur du moteur de recherche Golhoo, Marvin, un ami d'enfance, Ronald développe une antenne de coordination à Nice - pour ce faire il embauche un vieux trotskiste spécialiste des coups d'état-, tout en envoyant une équipe action à Brunei ; car il ne s'agit en aucune façon de déclencher une révolution qui serait contreproductive pour Marvin. Il faut seulement déstabiliser le pouvoir en place par des révélations dérangeantes, soupoudrées de fake-news.
Les personnages sont peints avec un humour qui oscille entre la truculence et la froide distance. Dès l'incipit du chapitre un, le ton est donné : « lorsqu'on s'apprête à rencontrer un des hommes les plus riches du monde, il est vivement conseillé de se composer une attitude digne et même conquérante, surtout si on vient de sortir de prison. » Ou plus loin en présentant les héritiers du sultan de Brunei : « le prince Mohamed, l'aîné, l'héritier en titre. Tout le monde le tient pour un incapable. Un genre de prince Charles, mais sans Diana, et avec les oreilles à plat. »
Je ne vais pas vous divulgâcher la fin du récit (j'adore ce terme canadien pour spoiler). Mais je vous assure qu'elle est superbement développée et que le suspense reste entier à vous rendre cacochyme, jusqu'à la dernière ligne.
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L'or s'avère plutôt noir et la jungle n'est pas uniquement peuplée d'êtres simiesques ; leurs descendants « Homo erectus » se chargeant d'ériger des compétitions machiavéliques depuis qu'ils sont devenus soi-disant « sapiens ».

La distribution de cette aventure livresque est emmenée par deux personnages principaux : Flora et Ronald. Flora garde en elle une admiration sans faille pour son grand-père mercenaire. Elle suit ses traces, peu importe le danger et les échecs. Sauf que son destin aurait été tout autre si elle n'avait croisé au large des Galàpagos un requin baleine… Sa nouvelle mission sera de participer à un coup d'état nouvelle génération pour offrir un beau produit clef en main au patron d'une entreprise numérique en Californie. le concepteur 2.0 est un certain Ronald qui a pour devise : tous les coups sont permis.

Pour décor, le sultanat de Brunei : petit par la taille, immense par la richesse avec tranquillité politique garantie malgré quelques soubresauts de temps à autre, mais, sans conséquence aucune. le pays idéal selon les analyses du professeur de géopolitique Delachaux qui a pris l'occasion aux cheveux lorsque Ronald lui a proposé une collaboration.

Faisant référence à Malaparte, Jean-Christophe Rufin offre un roman d'anticipation où un coup d'état ne vient plus d'une force armée mais d'un pouvoir technologique ; bienvenue à l'ère 2.0 des Gafam ! Et le lecteur y croit. Tout est minuté, calculé : un talent d'horloger au service des belles lettres, un Dumas du XXI° siècle qui vous emporte dans une aventure avec moult rebondissements tout en décortiquant la géopolitique et les comportements humains. Captivant mais effrayant aussi.

« L'aéroport de Singapour ressemble à ce que pourrait devenir l'humanité, si une catastrophe la contraignait à se réfugier dans un colossal abri souterrain. Tous les types physiques s'y croisent, perdus dans d'immenses couloirs éclairés au néon (…) Des centaines de boutiques hors taxes vendent plus cher qu'ailleurs des produits inutiles. Les différents secteurs de la fourmilière sont reliés par des trains intérieurs. Avec un flegme qui frise le désespoir, des employés chinois renseignent les égarés, sans leur offrir d'autres perspectives que de marcher encore et encore dans des décors toujours semblables ».

L'Académicien est un écrivain double, il se fond dans la palette d'un peintre, il se glisse dans la partition d'un musicien : descriptions colorées, précises qui vous transportent dans d'autres lieux inconnus devenant presque familiers, et , un tempo qui va crescendo en utilisant un rythme sémantique qui va se terminer en un final explosif ! Tant, qu'il pourrait passer devant vous un éléphant en train de danser le fox-trot sur le Thriller de Mikael Jackson que vous vous en ficheriez comme de votre première corde à sauter !

Malgré le sujet grave, la légèreté est de mise et c'est ce petit plus qui caractérise l'oeuvre de Jean-Christophe Rufin en général et de ce roman en particulier. Que de panache, même pour la description d'un bipède : « Ronald avait vécu son enfance parmi les animaux et c'étaient eux qui lui servaient de référence pour juger les humains. Il avait toujours associé Marwin à une espèce d'écureuil, avec son petit visage pincé, son nez perpétuellement frémissant, ses incisives écartées et une grosse touffe de poils d'un brun roux rabattue sur le front ».
Lien : https://squirelito.blogspot...
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Ce livre est une véritable pépite. A la fois roman et récit d'anticipation, Jean Christophe Ruffin nous plonge dans notre monde des GAFAM si puissants et dont les rêves dépassent les simples ambitions économiques. Et si une entreprise puissante du numérique prenait la possession d'un état?
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