Parmi les thèmes traités par la science-fiction, celui des univers parallèles est sans doute l'un des plus riches par ses possibilités spéculatives, et aussi parce qu'il touche au rapport que nous avons à notre destin individuel en ce qu'il a de plus intime.
Avec la mécanique quantique (tout au moins selon certains de ceux qui y comprennent quelque chose, soit probablement pas plus d'une douzaine de mes contemporains ; personnellement, après de longues réflexions, je n'ai toujours pas réussi à mettre les choses au clair avec le Chat de
Schrödinger. Sale bête, va!) le concept accepte à un début de justification théorique possible ; en effet, si j'ai bien comrpsi, à chaque choix binaire, chacune des deux possibilités ouvertes se réalise effectivement donnant ainsi lieu à un univers distinct, et ainsi de suite à chaque choix binaire dans chaque ligne de possibilité depuis la création de l'univers ; le résultat est vertigineux, et il faut bien comprendre que le nombre de choix résultant de l'existence et de la place et du volume de n'importe quel grain de sable entraine la naissance d'une infinité d'univers aussi infinie (si cela veut dire quelque chose) que celui résultant de choix de beaucoup plus de portée ou qui nous semble tel.
Et il en résulte ceci : puisque votre personne actuelle est le résultat d'une infinité de bifurcations binaires effectuées dans le passé, qu'elles résultent de choix délibérés ou conçus comme tels ou de circonstances extérieures, que vous en ayez eu ou non connaissance, il existe en ce moment une infinité de versions plus ou moi différentes de votre version qui me lit en ce moment, que cette différence porte sur d'infimes détails, ou sur des choix substantiels ; par conséquent, il existe au moins une version de vous dans laquelle tous les choix binaires dont vous résultez se sont produits pour le mieux (à côté d'une infinité de versions meilleurs mais moins parfaites ; mais ne compliquons pas encore les choses).
Et maintenant imaginez ! Si déjà à tel moment vous n'aviez pas dit ou fait telle chose...eh bien il existe une infinité d'univers où vous ne l'avez pas dit ou fait. Et si vous pouviez échanger votre destin contre celui de la version de vous qui en résulte ?
Justement, dans cet univers-là (disons qu'au départ c'est celui que partagent au moins nos versions actuelles en ce moment) on a trouvé le moyen de le faire.
Et certains vont vouloir en profiter. Mais bien sûr ce n'est pas si simple ; c'est le sujet du livre, et je m'arrête là car j'ai déjà suffisamment spoilé, mais c'était impossible sans le faire un minimum.
Qu'en est-il du traitement du sujet ? Dans l'ensemble l'auteur se débrouille assez bien avec le maniement de ses postulats de départ ; peut-être n'a-t-il pas suffisamment tenu compte de l'infinité des réalités possibles, qui aurait peut-être permis de trouver d'autres solutions au dilemme final.
On a comparé défavorablement le livre au
Replay de
Ken Grimwood ; même si ce dernier livre lui est supérieur, il ne s'agit pas en réalité de la même chose, puisque là les variations se situent dans un cadre temporel ; il existe d'excellents romans sur le thème des univers parallèles, je pense par exemple aux Colmateurs, série malheureusement inachevée de
Michel Jeury, ou à la série de la Longue Terre de
Terry Pratchett (qui est d'ailleurs devenue un peu longue sur la fin...), mais finalement relativement peu qui se soient attachés à le traiter de leur effet sur les destins individuels.
Et finalement je ne vois guère dans la même veine que l'excellent Univers en Folie de
Fredric Brown, sans doute son chef d'oeuvre, et l'un des chefs d'oeuvre de la SF tout court, ou peut-être la série Stranger Thing
Je serai plus sévère sur la question du traitement romanesque ; les péripéties sont peu répétitives, les invraisemblances matérielles (postulat de départ mis à part bien sûr, puisqu'on l'accepte par définition) parfois gênantes, ainsi que la psychologie et les réactions des personnages.
Quant au dénouement avec le balai de personnages courant dans tous les sens, sur lesquels je ne peux trop donner de détails sous peine de spoil, il est d'une comique hélas involontaire qui confine au burlesque.
Précisons pour terminer que le livre,, paru une première fois en France en 2017, vient d'être réédité chez Gallmeister en raison de la sortie en France de la série télévisée qui en est tirée, et que je regarderai pas, les séries de SF, même tirées de bons livres, étant généralement assez navrantes en raison des modifications que les réalisateurs et les scénaristes ont cru devoir y apporter, par exemple 22/11/63 (où apparaissent au deuxième épisode un groupe de personnages qui n'a rien à y faire et menacent de parasiter l'histoire ( c'est là d'ailleurs que j'ai abandonné).et Good Omen également abandonné pour des raisons similaires.
Mais si je commence à parler des adaptations à l' écran que j'ai détestées, nous n'avons pas fini; mieux valent sans doute les séries non Issues de l'adaptation d'un livre, même si les scénaristes, dans le but de se renouveler,se mettent à faire n'importe quoi. On le sent venir dans la dernière saison du pourtant excellent Stranger Things
Il y a quelques livres de vulgarisation scientifique sur la possibilité d'