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EAN : 9782226318114
288 pages
Albin Michel (19/08/2015)
3.08/5   108 notes
Résumé :
« La vie d’un hypermarché bat au rythme de l’humanité manipulée. Et cela fait vingt ans qu’elle participe à cette manipulation. »
Elle attend et n'exige rien du destin. Elle laisse glisser les heures, elle ne participe pas, elle est là, peu influente, jamais déterminante et sans rancune. Elle est en parallèle, attentive, mais pas impliquée. "Elle", c'est cette jeune femme de 22 ans qui entre comme stagiaire au rayon textile d'un hypermarché, pour y devenir tr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (51) Voir plus Ajouter une critique
3,08

sur 108 notes
Ressources inhumaines, percutant roman de cette rentrée littéraire 2015 édité chez Albin Michel, est comme son titre l'indique, est une critique au vitriol du monde de l'entreprise.

Le metteur en scène Frédéric Viguier, pour sa première expérience littéraire s'acharne à décrire sans concession aucune un système qui broie l'être humain pour le transformer en machine dépourvue de la moindre empathie.

Prenant pour décor principal comme plusieurs films récents l'ont fait un peu avant lui ( "Discount", "La loi du marché", "Jamais de la vie", étrange que ce secteur interesse autant les artistes), la toile de fond d'une grande surface la plus quelconque possible, ce livre nous dit tout des coups bas et des injustices dans un monde du travail qui ne jure que par recherche du profit et d'un meilleur rendement, au détriment du bien être de ses employés.

A travers le parcours d'une jeune stagiaire qui va vite comprendre comment fonctionne les rouages et les subterfuges pour gravir les échelons de son ascension professionnelle et qu'on va retrouver dans la seconde partie du roman, à une étape charnière de sa vie et face à un autre stagiaire qui lui renvoie l'image de ses débuts et qui va lui montrer qu'une autre façon d'appréhender les choses pourrait être possible.

Une écriture froide et acérée, un manque de densité psychologique parfois gênant (un reproche assez inhérent aux romans français), mais un regard juste et percutant sur un milieu qui tranche par sa violence, sa nocivité, et sa radicalité…

A lire pour bien comprendre ce mécanisme insidieux mais qu'un nombre d'entre nous a forcément rencontré une fois au moins dans sa carrière…
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Un titre qui annonce parfaitement la couleur et à l'arrivée, une démonstration glaçante et implacable sur un monde du travail qui ne propose aucun sens, confine parfois à l'absurde et parvient à fabriquer des monstres. Mais il ne faut pas se tromper, le monde du travail - en l'occurrence l'hypermarché - pris ici comme cadre de l'intrigue n'est que la reproduction miniature de la société dans son ensemble. Constat terrible parce que très juste.

"Toi, tu as tout compris". Cette phrase l'héroïne - que l'on ne désigne que par le pronom "elle"- l'entend régulièrement murmurer sur son chemin au fur et à mesure qu'elle franchit les échelons, passant de stagiaire arrivée un peu par hasard dans ce rayon textile d'hypermarché à Chef de secteur. Pourtant, elle donne l'impression de naviguer à vue, sans ambition, sans envie particulière, sans beaucoup d'estime d'elle-même. Mais elle trouve dans l'entreprise un univers auquel se raccrocher, un écosystème dans lequel elle a enfin l'impression d'exister, elle qui se sent comme "une poche qui a besoin d'être remplie". La façon dont l'auteur dépeint l'entreprise est malheureusement parfaitement réaliste, le trait à peine forcé pour les besoins de la démonstration. Rapports humains faits de méfiance, de crainte et de représentation. Des jeux de rôles plutôt qu'une réelle implication dans son travail, à cause de méthodes de management où le vocabulaire brillant est là pour cacher la vacuité de l'ensemble.

Elle passe vingt ans à protéger son statut, à éloigner les petits ambitieux qui voudraient prendre sa place comme elle-même s'y est employée avec l'arrogance de ses vingt ans. Elle se raccroche à ce qu'elle peut : un statut, la proximité avec la direction qui symbolise le pouvoir et lui procure l'illusion de la réussite. Même la liaison qu'elle entretient avec un ancien cadre de l'hypermarché n'est qu'un mensonge qu'elle refuse de voir. Au point de passer à côté de sa vie de femme et de ne pas savoir saisir l'occasion d'un possible bonheur lorsqu'elle se présente.

Si le sujet peut sembler "casse-gueule', le résultat m'a agréablement surprise. Outre la description de l'univers du travail très bien sentie (les petits chefs, la quête du moindre pouvoir, l'épuisement des salariés et leur renoncement seule façon de préserver leur santé mentale...), la structure en deux parties rend le constat vingt ans après encore plus désolant et l'accélération de l'intrigue en fin de livre laisse un peu KO devant tant de gâchis. Enfin, la confrontation des générations apporte la dernière touche de vérité, avec l'apparition de "Il", symbole de la génération Y dont le rapport au travail parle de réalisation et d'épanouissement plutôt que de statut et de reconnaissance. Une génération que le monde de l'entreprise dirigé en majorité par la génération X n'a toujours pas réussi à comprendre. En quelques chapitres, ce roman en dit plus sur le sujet que la plupart des conférences qui lui sont dédiées.

C'est bien le roman du vide dont il s'agit, un thème illustré par les notes de l'héroïne à chaque fin de chapitre. le roman d'une vie absurde, fruit de la société dans laquelle nous vivons. A méditer.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Merci à Babelio et aux éditions Albin Michel pour m'avoir sélectionnée pour cette lecture.

Pour un premier contact avec le monde du travail, une jeune-fille sans aucune aspiration, commence dans un hypermarché comme stagiaire. Ayant vite compris les manigances entre "petits chefs", elle aussi deviendra "chef". Responsable d'un rayon tout d'abord, puis sans diplôme et sans compétence, elle se hissera jusqu'à ce niveau d'une hauteur vertigineuse pour elle de... chef du secteur textile !
Sans compétence ?... pas totalement, puisqu'elle a le don de savoir satisfaire celui qui peut l'aider à grimper et à se maintenir au plus haut poste... elle couche, quoi !
Pathétique... lorsqu'elle s'imagine être comblée par son pouvoir de petit chef ; désespérante... par son incapacité à vouloir autre chose ; écœurante... lorsqu'elle n'a aucun scrupule à nuire si cela sert son ascension ; elle ne vit que pour l'hyper, pour ce petit pouvoir sur ses inférieurs, mais sans réaliser qu'elle n'est aussi qu'un rouage pour la machine qui l'emploie. Et être un rouage ce n'est pas vivre !

C'est une lecture édifiante (mais néanmoins plaisante) sur l'envers du décor de la grande distribution. Une vision assez cynique et s'il y a sûrement du vrai dans cette représentation, j'espère que les individus qui y travaillent sont tout de même un peu plus "humains" que notre héroïne. Tiens, on ne voit plus très souvent la mention "toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé serait purement fortuite" ... j'aurai bien aimé la voir ici, ça m'aurait un peu rassurée.
Dans la seconde partie, ouf ! Il y a un peu d'amour... on espère que notre "grande chef" va évoluer d'une façon positive, que son regard sur les autres va changer. Finalement, elle ...
...mais non ! je ne vous dirai rien d'autre.
Si vous voulez en savoir plus, tentez ce livre... à l'occasion, vous verrez probablement d'un autre œil votre hypermarché.
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Vous connaissez le Bel-Ami de Maupassant ? Histoire de l'ascension sociale et professionnelle fulgurante de Georges Duroy dans les milieux de la presse et de la politique, via les femmes, à la fin du XIXe siècle.
Même chose ici, transposée au début du XXIe siècle : parcours d’une jeune stagiaire de vingt-deux ans dans l'univers impitoyable de la grande distribution. Sans diplôme, elle brûle les étapes et se retrouve très vite « chef du secteur textile ». Poste prestigieux dans un hypermarché qui emploie 650 personnes. Drôle de femme qui se décrit comme « une poche plate et sans relief, parce que vide » qui se sent enfin exister en grimpant dans la hiérarchie, prête à se laisser grimper dessus par le premier venu occupant un poste stratégique, quitte à écraser du monde sur son passage et à affronter l’hostilité des collègues qu’elle a trahis, suscitant à la fois l'admiration et le mépris de ses supérieurs, car personne n’est dupe de ses manoeuvres.

On sait que les conditions de travail dans la grande distribution sont très difficiles : horaires de dingues, pression, compétition entre salariés (donc délation, manipulation, coups bas pour sauver sa peau)…
Je n’ai jamais remis en cause les situations décrites par l’auteur dans ce récit, « l’inhumanité » des relations entre ces salariés. Par contre, j’ai eu beaucoup de mal à croire au personnage de cette jeune femme glaçon, sans états d’âme, même pas perverse, à la fois fragile, pas très futée, et tellement douée pour tout piger et tirer les ficelles en ayant plusieurs « coups » d’avance. Est-ce une image concentrée de ce qui se passe dans cet univers ou bien le lecteur est-il censé trouver ce personnage crédible ? Je n’ai pas réussi, donc aucune empathie, donc distance…
L’intrigue m’a parfois semblé confuse, je me perdais dans les stratégies commerciales entre centrale d’achat et fournisseurs indépendants, faute de connaître ce milieu, sans doute. On peut s'enliser dans ce récit très répétitif et étouffant – « rayon textile », « secteur textile » apparaissent de manière lancinante – à l’image d’une vie professionnelle aussi aliénante, sans aucun doute, dont on ne s’extrait même pas en rentrant chez soi le soir et le week-end.
J’ai espéré un nouvel élan avec la seconde partie du roman, à mi-parcours, je m’y suis encore plus ennuyée, étant de plus en plus agacée par les comportements de cette femme blindée et lisse qui ne lâche jamais prise.

Avis mitigé, ma réticence portant essentiellement sur le personnage central que je n'ai pas "senti" - il est souvent fait référence à l'odeur de l'autre dans ce roman.
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Un jeune fille, sans compétences particulières, se retrouve propulsée chef de rayon peu de temps après avoir été embauchée comme vendeuse dans un hyper marché. Elle qui est indifférente à tout, aux autres et à elle même, commence à éprouver une étincelle d'intérêt dès qu'elle sent les effluves du pouvoir émanant des chefs lui chatouiller les narines. La situation lui plaît et elle se fixe un plan de carrière pas trop ambitieux pour ne pas se mettre en danger dans ce milieu où tout faux pas se paie cash. Mieux vaut être prudente et prête à toutes les bassesses pour y arriver .
Ce roman dénonce les méthodes toxiques de management qui font des ravages dans les entreprises en déshumanisant les relations au sein des équipes. Le sujet est passionnant mais je n'ai pas apprécié la façon dont l'auteur l'a traité, je l'ai trouvé beaucoup trop caricatural. Je sais bien que le monde du travail est loin d'être rose mais je ne le crois pas d'une telle noirceur. Cet hypermarché concentre tous les types de comportements propres à provoquer de la souffrance: critiques, humiliations, vexations, évictions et coups bas. De quoi faire déprimer n'importe qui. C'est un tableau bien trop désespérant et effrayant pour avoir envie d'y croire.
Cette lecture m'a quand même rappelé que dans mon hyper préféré, ne travaillent pas que des vendeuses, des caissières, des manutentionnaires et des vigiles. Se cache à l'étage toute une équipe que l'on ne voit jamais et dont la mission est d'élaborer les stratégies destinées à entuber les employés et les clients.
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Citations et extraits (51) Voir plus Ajouter une citation
L'indifférence, c'est l'arme des faibles.
C'est une protection pour pas cher, le genre de carapace que seul le manque de caractère peut fournir. On est nombreux, dans un hypermarché, à pratiquer l'indifférence, et ça marche, puisqu'elle est exclusivement destinée aux employés qui nous sont inférieurs dans la hiérarchie.
Quand le mépris vient d'en bas, il perd très vite de sa force, surtout si l'on sait manier l'indifférence... On peut facilement passer pour un vrai chef, puisque l'indifférence est vite comparée à de l'arrogance et à de la suffisance, qui sont les qualités premières d'un vrai chef, sûr de son charisme et de ses compétences.
Maintenant que je suis chef, j'aurai à cœur de briser l'indifférence qui viendra d'en haut.
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Le soir même, elle était dans la voiture du chef du secteur textile.
Il lui a présenté son sexe comme s'il s'agissait de l'offre de la semaine et qu'il attendait son avis sur son potentiel. Elle l'a imaginé en tête de gondole, avec cette affiche : « Promotion en cours, il n'y en aura pas pour tout le monde ! » bien accrochée au-dessus.
Elle a souri en pensant à ses collègues de travail.
[...]
Ils ont fait l'amour sur la banquette repliée électriquement de la grosse voiture du chef de secteur. Comme elle n'avait jamais éprouvé le besoin de s'intéresser aux hommes avec qui elle avait déjà fait l'amour, elle a pensé à des gestes, à des poses, qui lui semblaient correspondre à ce qu'un homme qui occupe une fonction importante dans un hypermarché peut attendre d'une femme occupant, elle aussi, une fonction importante dans un hypermarché. Elle a simulé l'arrogance, une certaine assurance, et la gestion de son plaisir, comme aurait pu le faire une femme plus âgée et habituée à faire l'amour avec un chef de secteur.
En fait, elle voulait proposer au chef du secteur textile une relation à la hauteur de son statut, en se fichant de son propre plaisir. Elle a pensé à celui de l'homme, elle a imaginé l'attitude qui l'exciterait et elle a pensé avoir eu raison, puisque l'homme lui a dit, dès qu'il eut fini de boucler sa ceinture : « Toi, tu as tout compris... »
(p. 39-41)
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Gilbert ne lui parlait jamais de sa femme. Il ne lui parlait que de ses gosses. Qu'il trouvait trop gros, trop laids, trop bêtes et surtout beaucoup trop cons. Il leur reprochait de ne s'intéresser qu'aux livres. Gilbert avait peur qu'ils ne deviennent pas de vrais hommes. Gilbert avait peur qu'ils s'intéressent à des métiers peu virils, des métiers si éloignés du sien, des métiers qui n'exigeaient pas des valeurs de courage et de force, mais de la fragilité et du sentiment, tout ce qui faisait peur à Gilbert.
(p. 135)
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En tant que stagiaire, sa tâche était simple. Non pas parce qu'elle était simple stagiaire, mais parce que les tâches à effectuer dans un hypermarché sont toutes très simples. Elles se résument en fait à un seul principe : que les rayons ne soient jamais vides.
Dès le premier jour, sa responsable lui a exposé très clairement la philosophie du rayon textile femme : « La nature a horreur du vide, un magasin, c'est pareil. Alors tu me bourres les penderies, les broches et les tablettes, et si tu n'as rien à mettre, tu étales. [...] »
(p. 25-26)
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Si elle avait été ambitieuse, pour elle-même, elle aurait peut-être éprouvé le besoin de se mettre au monde pour tout recommencer. Oublier l'ennui qui ne l'ennuyait pas, et s'extirper de soi, s'expulser, comme un accouchement, sortir de ses propres entrailles, en finir avec cette torpeur qui gelait son âme, et faire naître de ces décombres, une autre qu'elle, celle qu'elle était.
Mais elle n'était pas ambitieuse, elle s'admettait et continuait d'attendre, sans rien désirer. Sa chance, c'est qu'elle avait usé l'ennui
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Video de Frédéric Viguier (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Frédéric Viguier
Interview de Frédéric Viguier pour Lecthot, le magazine des entretiens culturels.
« Je suis laid, depuis le début. On me dit que je ressemble à ma mère, qu?on a le même nez. Mais ma mère, je la trouve belle. »
Ressources inhumaines, critique implacable de notre société, a imposé le ton froid et cruel de Frédéric Viguier dont le premier roman se faisait l?écho d?une « humanité déshumanisée ». On retrouve son univers glaçant et sombre, qui emprunte tout à la fois au cinéma radical de Bruno Dumont et au roman social. Mais au drame d?un bourg désindustrialisé du nord de la France, Frédéric Viguier ajoute le suspense d?un roman noir. Dès lors, l?histoire d?Yvan, un adolescent moqué pour sa laideur et sa différence, accusé du meurtre de son petit voisin, prend une tournure inattendue.
http://www.albin-michel.fr/ouvrages/aveu-de-faiblesses-9782226328793 http://lecthot.com/
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