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EAN : 9782140251887
92 pages
Editions L'Harmattan (18/03/2022)
4.67/5   9 notes
Résumé :
Ainsi, sans bruit, sans éclat, entend-on le chant de ceux qui n’ont pas de voix, ou qu’on ne voudrait pas entendre, parce qu’ils naissent, vivent et meurent trop humbles pour qu’on y prête attention. Et eux-mêmes finissent par croire qu’ils ne sont rien. Que ce rien n’a rien à dire. Ainsi entendrait-on peut-être le chant de ceux qui, après être nés, après avoir vécu, restent encore trop humbles dans la mort. Et ce chant couché – sans monter vers le ciel comme font l... >Voir plus
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« Je n'existe pas
Je n'ai voix que de vos vies »

C'est ainsi que commence Humble chant, ce recueil de poèmes que nous délivre Philippe Pratx.
C'est un hommage, c'est une ode, c'est un chant qui convoque les plus humbles, ceux qui n'ont pas de voix, un texte pour leur en donner enfin une.
Philippe Pratx convoque les mots, le ciel, des plaines immenses, les horizons lointains, le ruissellement des rivières, le vol des colibris...
Il le fait sans bruit, sans éclat, il redonne naissance à celles et ceux qui parfois n'existent plus, ceux qu'on ne veut plus entendre, à qui l'on ne prête pas attention parce qu'ils sont considérés comme insignifiants, écrasés, méprisés, oubliés. Ils naissent, vivent et meurent ainsi.
Philippe Pratx leur offre une autre vie, tout en jetant un cri de révolte sur le sort qui leur est donné. La souffrance, les rebuffades, la répression...
C'est une litanie, c'est une prière, je dirai même que ce texte généreux est un acte d'amour.

« vous nous traitez comme des ombres
vous ne comprenez pas que l'on puisse être humble
à notre humilité vous ne savez répondre que par
l'humiliation »

L'écriture de Philippe Pratx met du baume au coeur. Poète des abîmes, il veut combler la détresse sidérale des laissés-pour-compte.
Mais Humble chant montre aussi un chemin.
En lisant ce texte, nous voyons bien que Philippe Pratx s'adresse aux peuples de Colombie, plus précisément aux minorités de ce pays. Pourtant, je ne peux pas m'empêcher d'y voir ici une portée universelle.
Ce texte est véritablement un chant puissant, il y a une force incantatoire dans ses mots.
Ne pas avoir peur de l'infini, des abîmes solitaires...
Certains poèmes sont douloureux et obscurs, d'autres attirent le soleil et la joie, c'est une alchimie verbale, onirique, sensuelle.
C'est un texte qui sent l'odeur de la peau, le soleil écrasant par-dessus les pages, la peau comme un territoire qui mugit.

« je ne suis rien
ce je n'est rien
si ce n'est cette volonté d'être
en dépit et malgré
si ce n'est cette peau
cet oripeau
qui cache plus qu'il ne montre
qui montre plus qu'il ne cache
ces rides aux coins des yeux
ces entrées de cave sous les yeux
ces taches qui grandissent
ces rides encore ces autres rides
ces effondrements »

C'est une terre singulière où faire escale ressemble à un coeur qu'on délivre enfin.
Faire parler ces autres jusqu'ici aux voix mutilées, c'est aussi exister à travers leurs voix enfin entendues. Leurs vies.
En lisant ce texte, en l'aimant, en abordant ses rivages, nous devenons tous des enfants d'Amazonie.
Je remercie Philippe Pratx pour m'avoir fait confiance une fois de plus en m'adressant ce texte torturé et attachant, empli d'humanité, que j'ai beaucoup aimé.
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Philippe Pratx est un auteur discret qui se renouvelle à chaque parution. Son dernier ouvrage est un recueil de poésie avec en toile de fond la Colombie.

Philippe Pratx est le porte-voix des anonymes, des humbles. Des personnes tellement insignifiantes qu'elles oublient de raconter ce qu'elles sont. L'auteur nous offre de belles pages, les mots sont simples mais nous touchent en pleine poitrine. Il nous relate la vie simple, la souffrance, la mort, de laissés pour compte. Beau, authentique et indispensable.
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‌ Héraut des humbles de Colombie, ce chant résonne des silencieux, Indiens autochtones, mais aussi descendants d'esclaves noirs, paysans ou citadins pauvres. La révolte noyée dans le sang il y a 2 ans ressurgit à travers les prénoms de ceux qui y sont restés, qui n'étaient pas dans le programme au goût furieusement cosmopolite : "l'art de vous élever au prix de cent bassesses".


Un texte scarifié par chaque entaille faite aux légendes qui comblaient les peuples millénaires.
On suit les rêveries de l'auteur le long des chemins des peuples du Soleil, anciennes tribus Calima et Muisca, des chemins faits aux pieds de toute une vie ; arbres et montagnes aux visages familiers, écorces lues en braille.
Se gargariser d'un paysage-animal fait de muscles et de peau, un être vivant dont le pouls donne l'heure et le sens à chaque pulsation.
"Fouler cette terre en sachant en sentant tous les corps tous les esprits toutes les âmes que je suis".


Ah la cabane au sable fin ! Comme il nous tarde d'y poser la tête, les paupières traversées par les silhouettes des chevaux enfuis.
Un texte célébrant les courbes, voussures et encolures , sinuosités des veines-rivières. Elles saperont un jour sans défaut la course rectiligne du métal propulsé vers nulle part des modernes civilisations mangeuses d'hommes, mondes sans légendes.

Merci à l'auteur d'avoir partagé ses rêves de paix et de silhouettes glissant entre les arbres.
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Je remercie en premier lieu Philippe Pratx pour la confiance qu'il m'accorde en m'offrant ses oeuvres à leur sortie. Je suis toujours admirative de sa façon d'écrire sur tous les sujets. Aucun livre ne se ressemble. Et que ce soit de la prose ou de la poésie, il a une plume reconnaissable entre toutes.

Passée l'adaptation à l'absence de majuscules et à la mise en page avec des espaces répétitifs, je me suis laissée emporter par la poésie, par la magie des mots. Sous des dehors modernes, les messages restent intemporels : misère, souffrance, répression… ce qu'ont pu vivre les peuples d'Amérique latine, d'une part, mais également toutes les minorités opprimées. Les poèmes sont à lire à plusieurs degrés.

Ce recueil est à lire absolument !
Lien : https://promenadesculturelle..
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CANTO HUMILDE – CHANT HUMBLE - PHILIPPE PRATX*****

« Je n'existe pas
Je n'ai voix que de vos vies », quelle meilleure façon d'exister ?

J'étais partie loin, très loin, dans des contrées où le passé est mort, sauf dans la mémoire, où la terre a souffert, elle s'en souvient encore, où l'herbe a brûlé et d'autres vies avec elle, les cendres en parlent, où la vie demeure puisqu'elle porte ce nom, et dans ces contrées éloignées et tellement proches j'ai revécu la colère et embrassé les humbles, j'ai crié ma rage et mon impuissance, j'ai souri aux humbles et serré leurs mains, les guambianos et les koguis, j'ai appris leur langue, le ticuna, maintenant un isolat, et monté à cru les plus beaux étalons, me suis accrochée à leur crinière face au vent et aux grandes étendues et suivi les cours des rivières, je me suis arrêtée chez les wayuus, ils m'ont offert un alijuna, cadeau précieux.

C'est la Colombie et ses peuples, c'est la terre entière qui crie, gémit, sous le poids lourd de l'indifférence du mépris et de la cupidité, c'est la vie qui s'éteint, ce n'est pas pour demain, vous dites, c'est vrai c'est pour après-demain.
Des chants comme une prière, une litanie, un amour entier pour ceux dont la vie a creusé des rides plus profonds qu'ils ne veulent montrer, dont la peau s'est tannée au travail sous le soleil de feu et dont la voix est celle des « los nadie »(personne) .

L'endurance des llaneros va au-delà des vastes plaines herbeuses et au-delà du temps dont les marques la rendent encore plus forte et plus solide.
De tous les noms dont la beauté s'est fait baptiser, elle a choisi ici, dans les plaines aux horizons lointains, les noms de dureté, chevaux et poésie, j'ai accompagné leur solitude, celle qui ne fait pas mal, car « ce qui fait mal/c'est une douceur menteuse/une douceur violente/.../nous étouffe et nous vide/.../elle pèse sans poids », et dans notre solitude nous avons chanté la guajira accompagnée du son plaintif des guitares.

L'amour et la poésie sont inséparables sous la plume et dans le coeur de Philippe Pratx. Amour sensuel qui caresse et embrasse, amour hommage aux fils de la terre, amour révolte contre le saccage, et amour tristesse et nostalgie après le désastre, devant les ruines et devant cette certitude "de ne rien pouvoir. »

La colère bouillonne dans mon ventre, elle m'étouffe mais je continue à lire :
« et vous nous contemplez
non pas nous
ce serait trop d'honneur pour nous
mais notre posture d'impuissance...
vous nous traitez comme des ombres
vous ne comprenez pas que l'on puisse être humble...
vous souvenez-vous que vous êtes nos semblables ?
vous chassez ça
tout de suite de votre esprit...
parce que vous êtes plus vieux que nous
vous croyez être plus respectables
parce que vous êtes jeunes
vous nous prenez pour de vieux cons
parce que vous êtes riches
vous nous prenez pour des ratés
parce que les frigos
de vos têtes
sont pleins de certitudes
vous jouissez de voir les
convulsions de nos doutes affamés
vous n'êtes pas
plus forts que nous
mais vous savez tricher...
mais vous n'avez jamais
honte d'oser
quand il n'y a pas de risque et
beaucoup à gagner...
votre indifférence plus méprisante que le mépris. »

Cinq lettres meurtrières ESMAD, et tant de morts, mais leurs paroles et leurs noms resteront vivants : Angie, Nicolàs, Brayan, Maicol, Jesus, Alison, Einer, Marcelo, Cristian, Llucas, Dilan. Pour le souvenir, ils sont la vie.

« ce monde meurt
sans apocalypse
cela peut prendre encore des siècles
la sagesse
l'humilité
aurait pu le faire vivre
plus longtemps
avec plus de bonheur. »

Le grand suicide de l'humanité entière est en train de se faire, la vie crie au secours :
« car la vie quand même !...
celle qu'on entend et celle qu'on n'entend pas
celle qui te ligote les chevilles
pas pour les immobiliser au contraire
pour insuffler la frénésie le souffle le feu...
penser à tout ce qu'on peut faire
de sa vie
les rêves oh ils ne sont pas tous bien reluisants
mais ça te donne la rage de vivre .»

Où trouver des mots plus justes plus éloquents, plus forts pour parler du Canto humilde - Chant humble de Philippe Pratx ?
Dans le texte même témoin d'un style qui martèle l'ignominie et panse les plaies, d'un rythme qui suit les battements du coeur, les pauses de respiration, le recueillement, et l'énergie d'un vie rebondissant à chaque vers et à chaque page.

Le texte est témoin d'un poète qui ne pourra peut être pas sauver le monde mais en tout cas l'éveille, transmet, ne laisse pas mourir des voix d'un passé inconnu par un grand nombre, dont je fais partie, et donne aux humbles la place respectée.

Toujours le texte est témoin d'un chroniqueur authentique, connaisseur de l'histoire d'un peuple dont il partage la vie.

Je souhaite, tout comme Juan Sebastian Rojas qui a préfacé tes chants, que le plus grand nombre de lecteurs lisent tes pages et s'empreignent d'un cri de révolte, d'un chant d'amour, d'un style dont la poésie, la noirceur et la lumière viennent d'une profonde obscurité et portent la cape du talent et la voix de tous les humbles frères humains.
Magistral !
Un énorme merci, Philippe, pour tout.
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Chanson triste

La musique est douce et les fleurs sont tressées,
Le soleil se lève sur une belle journée.
Pendant toute la nuit les lumières ont brillé ;
La chambre et le lit sont si parfumés.

Famille et amis sont ici rassemblés.
Souvenirs, murmures et gestes feutrés...
Dehors, les enfants se sont mis à jouer ;
On entend des rires sous les cerisiers.

Refrain
Ton sourire est tendre, éternel,
Tes beaux yeux, noirs comme le ciel.
L'orage s'en va vers le nord,
On dirait juste que tu dors...

Toutes tes photos, ta robe de mariée,
Tout est à sa place, tout est bien rangé,
Sur la nappe blanche de la salle à manger,
La viande et le vin, mais je n'ai rien touché.

Ce soir à six heures tout sera terminé.
Je resterai seul au milieu des regrets.
J'éteindrai les lampes, je m'allongerai.
Et demain la vie doit continuer.

Refrain
Ton sourire est tendre, éternel,
Tes beaux yeux, noirs comme le ciel.
L'orage s'en va vers le nord,
On dirait juste que tu dors...

La chambre et le lit sont si parfumés
Le soleil se lève sur une belle journée.
J'ai pris mon café, il faut bien se forcer.
La musique est triste, les fleurs sont fânées...
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paroles des morts
Cali, 24 mai 2021

(...)
je m'appelais Nicolas je mettais des mots et des
couleurs dans la ville
Cali Valle Del Cauca
des graffitis
il y en a qui disent que ça salit la ville
moi je veux je voulais juste dire ce qu'il faut bien
dire
alors je l'écris je l'écrivais sur des murs
il y en a qui appellent ça de l'art
maintenant je vous parle d'ici
je ne sais pas si c'est de chez nous les morts ou de chez les
vivants
l'ESMAD m'a tuéd'une balle dans la tête
c'était un dimanche le 2 mai
nous étions des milliers à avoir allumé des bougies
à rendre hommage à des morts il y avait déjà des
morts
et je chantais parmi ces milliers
la lumière de la reconnaissance les chants de
l'espérance
et ils m'ont tué d'une balle dans la tête
j'avais vingt-sept ans
(...)
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Ticuna

ça ce sont des légendes
dans les légendes tout
peut se changer en tout
je ne sais plus peut être
dans les légendes
certains arbres peuvent marcher
et ce qui tombe des arbres
peut germer en chair humaine en élytres en toisons
fauves
sortir du sol et parcourir le monde
ou alors
c'est du genou de Yuche que sortirent les humains
quelle guêpe l'avait piqué ?
et l'arbre lui l'arbre Lupuna
dont l'ombre couvrait le chaos
il ne marchait pas non accroché au ciel
il tomba d'un coup
et lui aussi créa le monde
ça ce sont des légendes
...
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car la vie quand même !
la Vie
la musique de la Vie
celle qu'on entend et celle qu'on n'entend pas
celle qui ligote les chevilles
pas pour les immobiliser au contraire
pour insuffler la frénésie le souffle le feu
un écheveau de fils de couleurs
qui t'enserre les chevilles d'une harmonie
en mouvement
dont tu suis les courbes les noeuds la danse
et le musique muette
celle qui te gonfle les poumons là sous les côtes
d'un feu d'un souffle d'une frénésie
la frénésie de vivre
penser à tout ce qu'on peut faire
de sa vie
les rêves oh ils ne sont pas tous bien reluisants
mais ça te donne la rage de vivre
malgré tout
la Vie
car la vie quand même !
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Les soi-disant

Les soi disant, les faux amis,
Les vrais faux culs, les gros pourris,
Les trahisons, l'hypocrisie,
Pour ces gens là, tout est permis.

Hier je t'adore, demain j't'oublie ;
Des faux semblants quand j'te souris ;
Je t'utilise tant qu'j'ai envie,
Puis je te jette, barre toi d'ici !

Y en a des tas comme ça, qui te la jouent par-devant,
Et par-derrière tu t'aperçois que c'était juste du vent.

L'ingratitude, la jalousie,
La prétention ... ça fait partie
De leur petite panoplie,
Leur tass'de thé, c'est le mépris.

Sans oublier l'opportunisme,
L'indifférence, l'égoïsme,
L'arrogance et puis l'arrivisme,
La vanité et le cynisme ...

T'as peut êtr' fait beaucoup pour moi,
Mais maintenant, j'te connais pas,
Je suis trop beau, trop bien pour toi,
'Sers plus à rien, tire toi de là !

Y en a des tas comme ça, qui te la jouent par-devant,
Et par-derrière tu t'aperçois que c'était juste du vent.

Les soi-disant, les faux-amis,
Tchou tchou bidou wa ...
Les vrais faux-culs, les gros pourris,
Tchou tchou bidou wa ...
Les trahisons, l'hypocrisie,
Tchou tchou bidou wa ...
Pour ces gens là, tout est permis.

Hier je t'adore, demain j't'oublie,
Tchou tchou bidou wa ...
Des faux-semblants quand j'te souris,
Tchou tchou bidou wa ...
Je t'utilise tant qu'j'ai envie,
Tchou tchou bidou wa ...
Puis je te jette, barre toi d'ici !
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Extraits de Karmina Vltima mis en voix par Béatrice Machet.
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