Le Châtiment des fidèles s'ouvre sur une scène de violence extrême, de torture, décrite avec force détails, du point du vue de la victime, mais avec des précisions cliniques. Ames sensibles s'abstenir.
Le roman de
Nadine Matheson se présente comme un polar très classique. Au sud-est de Londres, dans le quartier pauvre de Deptford, sur la rive sud de la Tamise, le cadavre du pasteur Caleb Annan est découvert par une jeune étudiante des pays de l'est, Uliana Piontek, qui fait le ménage dans l'église et aussi quelques prestations d'ordre sexuel au pasteur pour compléter son revenu précaire.
C'est l'inspectrice détective noire Henley et son collaborateur indien Ramouter qui enquêtent. Tous les deux sont en thérapie suite à l'agression, dans leur fonction, d'un certain Olivier, psychopathe. Ils sont aussi victimes de discrimination de la part de leurs collègues.
Les premières recherches montrent que le pasteur – prophète est un personnage assez glauque. Il est connu sous trois pseudo, et a été condamné pour fraude. Henley découvre par ailleurs, dans une pièce dissimulée de l'église, le corps décharné et très abîmé d'un jeune homme inconnu.
L'écriture est précise dans les scènes d'horreur qui pourront choquer certains lecteurs. le langage est parfois familier, voire vulgaire. C'est celui des policiers. Les chapitres courts donnent au récit un rythme soutenu. Certains, consacrés aux scènes d'exorcisme, viennent ponctuer le récit. Ils entretiennent une atmosphère de violence extrême. Les personnages ont une profondeur psychologique qui leur donne une bonne crédibilité. Comme souvent, l'enquête n'est pas le seul sujet. Les policiers ont aussi des problèmes personnels qui occupent pas mal de place. Ce sont des problèmes de couple, pour Henley, et le deuil de sa mère qu'elle ne parvient pas à faire.
A travers son récit, l'auteur aborde des thèmes qui sont des problématiques de société, tels que la discrimination raciale au sein même des institutions, le statut de la femme dans le monde du travail, les dérives extrêmes dans les religions, les abus sexuels, la précarité sociale, les pressions politique et médiatique. Ces questions sont traitées dans le contexte local de Deptford, mais ont une résonnance évidemment plus large.
Le suspense n'est pas bien prégnant. On sait dès le départ que le pasteur Caleb Annan est un personnage trouble, en fait il ne fait aucun doute qu'il est un prédateur sexuel. Pour ce qui est du jeune homme torturé dans l'église, et ensuite du cadavre d'une femme retrouvée dans les mêmes conditions, on imagine une sorte de rituel religieux pratiqué par le même Caleb Annan. Mais il n'agit pas seul. Il faut identifier ses complices. L'énigme du psychopathe Olivier qui semble secondaire grandit aussi au fil du récit. le rebondissement final fonctionne assez bien.
Le Châtiment des fidèles est, en résumé, un polar très dense et intense. Les 558 pages s'avalent très bien, même s'il n'y a aucun intérêt littéraire à y trouver. Chaque page infuse dans le thé – je n'ai pas tenu le compte des tasses offertes ou ingurgitées - pour bien souligner qu'on est à Londres. le couple d'enquêteurs, Henley et Ramouter est plutôt sympathique. Ils forment avec leurs collègues une équipe soudée et solidaire. On imagine que le roman pourrait facilement faire l'objet d'une adaptation à l'écran.