AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Jérôme Beaujour (Collaborateur)
EAN : 9782070387175
192 pages
Gallimard (26/08/1994)
3.92/5   167 notes
Résumé :
Ce livre n'a ni commencement ni fin, il n'a pas de milieu. Du moment qu'il n'y a pas de livre sans raison d'être, ce livre n'en est pas un. Il n'est pas un journal, il n'est pas du journalisme, il est dégagé de l'événement quotidien. Disons qu'il est un livre de lecture. Loin du roman mais plus proche de son écriture - c'est curieux du moment qu'il est oral - que celle de l'éditorial d'un quotidien. J'ai hésité à le publier mais aucune formation livresque prévue ou ... >Voir plus
Que lire après La Vie matérielle : Marguerite Duras parle à Jérôme BeaujourVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (21) Voir plus Ajouter une critique
3,92

sur 167 notes
5
6 avis
4
9 avis
3
3 avis
2
2 avis
1
0 avis
Acquis à la S. F. L. Odéon-en août 1988 - Relectures en 2014 et mai 2024

Une relecture très prenante..comme si j'avais tout oublié de cet ouvrage de Marguerite Duras, qu'elle qualifie de très différent de ce qu' elle "propose" habituellement à " ses lecteurs"...

Les relectures sont parfois de vrais coups de poker : déception par rapport à la première lecture ou au contraire , nouvelle révélation, avec des éléments essentiels à côté desquels on est resté insensible!

C'est ce qui s'est un peu passé avec cette relecture, comme si je lisais cet ouvrage pour la première fois. Cette observation, en constatant combien je ne soulignais pas aujourd'hui les mêmes extraits...que dans le passé !

Ce livre aborde tous les thèmes récurrents de l'oeuvre et du parcours de l'auteure d' " Un Barrage contre le Pacifique "...
Des multiples sujets: de l'anodin au plus sombre...

Parmi ceux-ci : l'enfance, la douleur de vivre et la douleur d'écrire , la sexualité, les rapports aux hommes, l'alcool, les cures de désintoxication, ses amours, et aussi son exaspération vis à vis de l'envahissement des autres par rapport à sa notoriété..son oeil acéré sur l'actualité, le monde, sur le sens de la vie, lorsqu'on la dépense dans un travail peu gratifiant...etc.

"Perdre le temps

Chaque existence est un problème insoluble.
Les voisins de palier rangés verticalement dans les immeubles, on se demande comment c'est possible et on fait partie des rangées.
Ce qui remplit le temps c'est vraiment de le perdre.
Tous ces jeunes qui sont plantés devant les églises, les places publiques, Darty, le Forum des Halles, et qui attendent, finalement ça fait moins de mal à voir que les rangements des travailleurs dans les H.L.M.des portes de Paris, que les sonneries des réveille- matin dans la nuit de l'hiver afin d'aller travailler pour continuer à être vivant."


Dans cet ouvrage pouvant paraître trop éclaté, éparpillé, les sujets qui m'ont le plus interpellée sont ses rapports complexes, douloureux parfois et mystérieux avec ce besoin de l' ÉCRITURE , sa relation torturée avec une Mère omnisciente aussi admirée que redoutée, et puis de très belles pages sur l'importance vitale d'une " Maison à soi", une maison- refuge, qui réunit et protège ceux qu'on aime ...

"La maison, c'est la maison de famille, c'est pour y mettre les enfants et les hommes, pour les retenir dans un endroit fait pour eux, pour y contenir leur égarement, les distraire de cette humeur d'aventure, de fuite qui est la leur depuis les commencements des âges. (...) Cette entreprise démente que représente une maison. Celle de la recherche du point de ralliement commun aux enfants et aux hommes. "

Je dois avouer que certains passages me sont restés hermétiques, mais je ne m'en formalise plus, Marguerite Duras exprimant elle-même la difficulté de ses écrits, reconnaissant qu'elle est, par périodes dépassée par ce qui ressort de mystérieux et douloureux, de sa quête à travers l'écriture !

Je pense que chaque relecture de ce texte foisonnant, peut apporter autant de grilles de lecture ,chaque fois différentes, élargies ou non !

Un sujet que j'ai omis : Marguerite Duras parle aussi de ses complexes, de son manque de confiance dès sa toute jeunesse, de son sentiment d'étrangeté par rapport aux autres...

Un femme qui sera ensuite, très vite en quête, par l'écriture, d'un sens existentiel. À elle seule, le talent, le parcours exigeant d'un écrivain, et aussi cette douleur de vivre, perdurante , la tenaillant toute son existence durant..!

"J'étais trop petite pour aller dans des lieux où les femmes étaient grandes . J'étais habillée chaque jour pareillement. Je n'avais qu'une robe noire, noire, celle de la guerre, passe- partout.J'avais honte comme souvent les jeunes gens, de ne pas être " à la page".En somme, pour des raisons diverses la honte recouvre ma vie."

Commenter  J’apprécie          320
Ce que j'aime par dessus tout : sa pudeur, elle me touche lorsqu'elle parle de choses graves sans jamais se complaire. Ce qui me fait sourire : sa mégalomanie lorsqu'elle parle d'elle même à la troisième personne. Ce qui me rend triste : qu'écrire, indissociable de l'être "Marguerite Duras", indissociable de l'alcool, indissociable de la maison, fut autant ce qui l'aidait à vivre que ce qui la noyait.. L'écriture comme surface de contact avec autrui, comme prison tout autant. Je voudrais et espère me tromper, aimerais que l'écriture ait davantage été ce qui la guidait.
Commenter  J’apprécie          390
Si je me suis plongée dans ce recueil de textes de Marguerite Duras, c'est parce que l'adaptation théâtrale de l'un de ses extraits m'a particulièrement touchée.
En effet, j'avais été bluffée en mars dernier, par l'interprétation de Corinne Mariotto, pour La Compagnie de la Dame dans la pièce intitulée La Maison, d'après La Cuisine de Marguerite et La Vie matérielle de Marguerite Duras.
Ne connaissant cette auteure que par L'Amant, je sentais bien alors que j'étais passée à côté de l'essentiel la concernant…

Je découvre dans La Vie matérielle une femme proche et abordable, avec ses moments de faiblesse et de lucidité, avec sa vision aiguisée du monde qui l'entoure… une femme qui avait l'âge d'être ma grand-mère… (Mais ma grand-mère avait une vie beaucoup plus rangée et ne picolait pas…).
Ici, Marguerite Duras ne cache rien de sa façon d'être, de ses retards, de certaines de ses rencontres, de son regard et de ses opinions sur les hommes, sur l'homosexualité et l'hétérosexualité, sur le handicap… Elle écrit sur sa maison de Neauphle, sur la vie parisienne des années 80 notamment dans le sixième arrondissement où elle habitait ; elle ne dit pas tout mais parle, par exemple, de la mort de sa mère, de l'Indochine, de Yann Andréa, du « look Duras » (gilet, col roulé, jupe droite), de son fils, de certaines de ses relations amicales ou amoureuses, de ses manies, de ses angoisses, de ses visions délirantes, de sa façon de conduire... Elle ne cache ni le sexe, ni l'alcoolisme, ni la maladie, ni les mauvais jours et les mauvaises rencontres.
Elle évoque des faits divers, dont l'affaire Villemin, autour de notions comme le sublime ou le pouvoir ultime du langage, donnant la prédominance au littéraire sur l'évènementiel.
Elle nous parle aussi de ses lectures du moment, de littérature en général, de Proust, du théâtre, du jeu superflu des acteurs, des autres femmes auteures ou dramaturges comme Nathalie Sarraute… ; elle évoque l'écriture autour de ses oeuvres déjà publiées, partage ses doutes et ses interrogations, analyse la parole journalistique ou télévisuelle. Elle nous livre des réflexions sur l'art, sur la musique et naturellement sur le cinéma.

Son écriture est encrée, au sens de l'encre qui sert à écrire, dans une forme d'oralité : c'est un dire à lire, un livre à lire et à dire ou à écouter, à méditer aussi. L'auteure le définit bien mieux que moi dans la quatrième de couverture de l'édition Folio et dans son prologue : « cette écriture flottante […], ces aller et retour entre moi et moi, entre vous et moi dans ce temps qui nous est commun ».
C'est un partage, une conversation, un échange à un moment précis sur certains sujets… Ainsi, pour « La Maison », Marguerite Duras est dans la cuisine de sa maison de Neauphle et prépare une soupe de poireaux tout en pensant tout haut. Tous les sujets qu'elle aborde sont très actuels et toujours d'actualité malgré le temps passé ou, du moins ils nous concernent et nous parlent même si la société a un peu changé depuis 1986. C'est intimiste et, dans la mise en scène dont je parlais en introduction, l'odeur des poireaux qui cuisent, les quelques rires en sourdine dans le public, les hochements de tête appréciatifs, les réactions spontanées, les coups d'oeil partagés traduisent bien cette forme de communion dans le temps commun revendiquée par l'auteure…
Marguerite Duras est né en 1914 ; en 1986, elle avait 72 ans… Ce que je ressens est très personnel… En 1986, j'étais mère pour la première fois et ma grand-mère était venue passer quelques temps chez nous pour m'aider un peu. C'était une femme admirable : en 1986, elle avait 82 ans mais était d'une rare vaillance et nous étions très complices toutes les deux… Voir la pièce citée plus haut et lire le texte dans ce livre m'a fait penser à elle. Je découvre Marguerite Duras comme une grand-mère soucieuse de son entourage, du bien-être de chacun et de la bonne marche de la maison tout en ayant un regard aiguisé sur le monde qui l'entoure. « La Maison » figure parmi mes textes préférés de ce recueil, même s'il n'en est pas le plus représentatif.

La lecture de la Vie matérielle est une formidable rencontre et l'occasion pour moi de me pencher très vite sur d'autres textes et livres de Marguerite Duras.
Commenter  J’apprécie          170
En une mosaïque dont les fragments ne tiendraient ensemble que par l'encre de la plume de Marguerite Duras, ce recueil nous donne à entendre des réflexions très diverses, tous azimuts.

Ce volume présente la particularité d'avoir été conçu, à son origine, comme un dialogue avec l'ami-écrivain Jérôme Beaujour. Mais rapidement les deux complices ont gommé du texte toutes les questions. Il nous reste par conséquent : un monologue, et... une absence !
Un monologue... qui s'adresse à quelqu'un... nous, finalement.

Comme souvent avec Duras, le style et les mots choisis pourraient s'accorder aussi bien au récit d'un événement réel qu'à une fiction (voire à un rêve ?) ... Si bien qu'on flotte ici parfois entre deux eaux, ne sachant pas toujours très bien de quoi relèvent les lignes qui défilent. Et c'est très bien ainsi ! Impression de cheminer sur la crête sinueuse qui sépare fiction et réalité, au bon vouloir de l'auteure.

Se succèdent alors des sujets variés : l'écriture, les hommes, le désir, l'amour, les maisons, la condition des femmes, l'injustice, les rencontres, et puis l'enfance -un peu-, l'alcool -beaucoup-... Ce dernier s'infiltre et sourd entre les lignes de la fin du livre, et donne l'impression d'assister en direct à un naufrage, et aux tentatives de l'auteure de ne pas sombrer. Elle parle très crûment de ce combat. Ne pas laisser la mosaïque voler en éclats...

Une lecture intéressante mais qui n'est pas parvenue à me passionner tout à fait, peut-être parce que les fragments ne dépassent pas deux ou trois pages maximum, ce qui ne laisse pas le temps d'y pénétrer entièrement ? Ou peut-être parce que l'ensemble m'a paru un peu froid, comme désabusé ? J'ai peiné à retrouver le souffle qui me porte habituellement si vivement chez Duras, de page en page et de roman en roman !
Ce texte s'adressera surtout, me semble-t-il, aux familiers de l'oeuvre de l'auteure, les références aux personnages et situations des romans étant assez présentes.
Mais si certains peuvent y trouver une introduction à Marguerite Duras, ce sera tant mieux !
Commenter  J’apprécie          130
N°1848 – Mars 2024.

La vie matérielle – Marguerite Duras- Gallimard.

La quatrième de couverture m'interpelle. L'auteure nous présente ce livre comme n'en étant pas un. D'ordinaire, quand je choisis un ouvrage, j'aime qu'il ait du sens, mais après tout pourquoi pas et j'aime aussi beaucoup être étonné.
Au fil de ma lecture je m'aperçois que Marguerite Duras nous parle surtout d'elle à travers un texte confié à Jérôme Beaujour. Pourquoi pas et nombre d'écrivains de renom tels que Philippe Besson, Patrick Modiano, Annie Ernaux, ces deux derniers nobélisés, n'ont pas fait autre chose. le danger est bien évidemment le solipsisme de l' écrivain, mais bien peu ont échappé à ce travers. J'ai donc lu ce livre qui n'en est pas un, cette « vie matérielle », cet « aller et retour entre moi et moi, entre vous et moi-même » comme elle le dit elle-même.
L'ouvrage refermé, il m'a semblé que je venait de lire un amalgame de textes courts qui correspondent à des moments de sa vie, de ses réflexions, une sorte de journal si on veut le caractériser ainsi et qui emprunte à ce mode d'expression informatif son style brut sans beaucoup de recherches littéraires. Un peu en vrac, elle nous parle donc d'elle, de ses livres, le l'alcool, de l'Indochine, de la douleur, de la mort, de la solitude, de l'écriture et de des paradoxes de cet exercice, de l'inspiration et de ses manifestations, de l'intimité qui existe entre un auteur et les personnages qu'il a crées et qu'un lecteur, même attentif ne pourra jamais connaître. Elle évoque le souvenir des ses amours, de ses amants, dont évidemment Yann Andréa, de ses films, des maisons où elle a habité, de sa mère, des écrivains qu'elle a connus et d'autres qu'elle a admirés, des hommes et des femmes, du désir, du fantasme, de sa folie aussi. J'ai eu l'impression qu'elle voulait tout dire d'elle, ne rien cacher, un peu comme si elle ressentait ce besoin de se confier… ou de parler d'elle tout simplement, comme s'il était nécessaire que son lecteur soit informé de tout ce qui la concerne, jusque dans les moindres détails … ou peut-être une volonté d'ajouter un titre supplémentaire à sa bibliographie personnelle…
Je ne suis pas un admirateur inconditionnel de Marguerite Duras mais je la lis par curiosité, pour pouvoir m'en faire une idée parce qu'elle fait partie du paysage littéraire.
Commenter  J’apprécie          60

Citations et extraits (74) Voir plus Ajouter une citation
C'est le théâtre de l'amour qu'on croit extérieur à l'amour et c'est souvent faux....
Je crois que l'amour va toujours de pair avec l'amour, on ne peut pas aimer tout seul de son côté, je n'y crois pas à ça, je ne crois pas aux amours désespérés qu'on vit solitairement.
Commenter  J’apprécie          100
J'ai jeté, et j'ai regretté. On regrette toujours d'avoir jeté à un certain moment de la vie. Mais si on ne jette pas, si on ne sépare pas, si on veut garder le temps, on peut passer sa vie à ranger, à archiver sa vie.
Commenter  J’apprécie          280
Dressées sur les décombres de la guerre, elles parlent de l'Europe Centrale...
Elles avaient entre vingt et trente cinq ans en 1940.
Elles habitent à Passy en France pour quelques-unes.
Des dames, ce mot ne veut rien dire si on ne connait pas celles de la Manche.
L'été, elles rebâtissent l'Europe, à partir de leurs réseaux d'amitiés, de rencontres, de relations mondaines et diplomatiques, des bals de Vienne,de Paris, des morts d'Auschwitz, de l'exil.
Commenter  J’apprécie          190
Le livre ne représente tout au plus que ce que je pense certaines fois, certains jours, de certaines choses.Donc il représente aussi ce que je pense.Je ne porte pas en moi la dalle de la pensée totalitaire, je veux dire: définitive. J'ai évité cette plaie.
Commenter  J’apprécie          190
J'étais trop petite pour aller dans des lieux où les femmes étaient grandes . J'étais habillée chaque jour pareillement. Je n'avais qu'une robe noire, noire, celle de la guerre, passe- partout.J'avais honte comme souvent les jeunes gens, de ne pas être " à la page".En somme, pour des raisons diverses la honte recouvre ma vie.

( P.O.L, 1987)
Commenter  J’apprécie          70

Videos de Marguerite Duras (249) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marguerite Duras
Vidéo de Marguerite Duras
autres livres classés : entretiensVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (584) Voir plus



Quiz Voir plus

Marguerite DURAS

Quel est le bon titre de sa bibliographie ?

L'Homme assis dans le corridor
L'Homme assis dans le couloir
L'Homme assis dans le boudoir
L'Homme assis dans le fumoir

20 questions
190 lecteurs ont répondu
Thème : Marguerite DurasCréer un quiz sur ce livre

{* *}