"quel le meilleur gagne" tout est dis dans le titre et le meilleur l'a écrit.
Enfin un bouquin qui parle de sport, de vrai sport dans tout ce qu'il a d'inégal, d'injuste mais de vivant.
Pas cette parodie d'activité édulcorée où tout le monde a sa chance.
Et non tout le monde a la chance de participer mais pas celle de gagner.
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Qu'est-ce que l'estime? Le sentiment de la valeur de l'autre. Qu'est-ce que le respect? Le sentiment de sa dignité? Dès lors que tous les êtres humains sont égaux en droit et en dignité, ils méritent tous le même respect. Cela ne veut pas dire qu'ils méritent tous la même estime ou la même admiration!
Le vrai champion zen, le maître de sagesse qui serait par ailleurs un sportif, se reconnaîtrait à ceci qu'il n'espère pas la victoire, qu'il n'a donc pas peur de la défaite ; il n'en est que plus attentif, que mieux concentré. Alors que celui qui pense à la victoire ou qui craint la défaite est séparé de son acte par le fruit qu'il en attend ou en redoute. Il est séparé du présent par l'avenir, du réel par l'imaginaire, de l'acte par le mental, de tout par l'égo ! Au contraire, celui qui s'est libéré, au moins provisoirement, de l'espoir et de la crainte, vit tout entier au présent, est tout entier dans son acte. Il sera beaucoup plus redoutable, comme le samouraï qui est d'autant plus à craindre que lui ne craint rien ! Il n'espère pas la victoire ni n'a peur de la défaite : il se bat, et celui lui suffit.
Le but et la fin (skopos et télos), p. 48-49
Tous les êtres humains sont égaux en droit et en dignité (vos adversaires ont les mêmes droit et la même dignité que vos coéquipiers) ; donc tout ce qui conduit à faire une différence entre vos adversaires et vos coéquipiers ne relève pas de la morale, mais d'autre chose. De quoi? De la convergence des intérêts, donc de la solidarité! Vos coéquipiers ont le même intérêt que vous ; la victoire, que vous ne pourrez remporter qu'ensemble. Vos adversaires ont des intérêts opposés aux vôtres : si vous gagnez, il perdent, et inversement; Là encore, il me semble que le sport peut avoir une vertu pédagogique, à condition qu'on ne fasse pas de la solidarité une vertu morale, à condition qu'on explique que la solidarité est une convergence d'intérêts, laquelle ne relève pas de la générosité mais de l'égoïsme bien compris. Elle n'en est pas moins légitime (on a le droit de défendre ses intérêts!) ; elle en est plus efficace (on les défend mieux à plusieurs que tout seul!). Maxime de la solidarité : plutôt que d'être égoïste seul, bêtement et les uns contre les autres (par exemple, le joueur qui joue "perso" au foot), soyons égoïstes ensemble et intelligemment, soyons égoïste - selon le sport pratiqué - à cinq, sept, onze ou quinze! Il me semble que cela pourrait aider nos jeunes gens à progresser, leur faire comprendre la différence qu'il y a entre générosité, qui est désintéressée, et la solidarité, qui est une convergence d'intérêts, comme aussi entre la solidarité, qui les unit à leurs coéquipiers, et le respect, qu'ils doivent avoir également pour tous les joueurs, y compris pour eux-mêmes, mais pas plus pour leur coéquipiers que pour leurs adversaires.
Tous êtres humains sont égaux en droits et en dignité, ce qui veut dire qu'ils méritent tous le même respect; Mais tous ne sont pas égaux en fait et en valeur : tous ne méritent pas la même estime ni, a fortiori, la même admiration. Ce mot de "respect" est d'ailleurs employé, dans le sport, le plus souvent à contresens. Tel capitaine d'une équipe de football, parlant de la prochaine équipe qu'il doit affronter, dira : "J'ai beaucoup de respect pour eux." Sous-entendu : c'est une bonne équipe, ils peuvent nous battre, ont le sait bien, on fera donc attention.
Mais la question n'est pas là! Quand bien même ce serait la plus nulle des équipes, quand bien même notre footballeur serait absolument certain que se propre équipe va les vaincre, il devrait tout de même avoir du respect pour eux! On peut avoir de l'estime ou de l'admiration pour les bonnes équipes ; ont doit avoir du respect pour tout être humain, quand bien même il serait incapable de marquer le moindre but.
Le foot est un sport imparfait, comme la vie, et cela explique une partie de son succès.
Le football, d'autant plus populaire qu'il est imparfait, p. 83
Peut-on être matérialiste et défendre une conception stricte de la morale ou de la vertu ? Oui, selon le philosophe André Comte-Sponville. Ce dernier s'appuie notamment sur son expérience d'ancien croyant devenu athée pour affirmer qu'on peut se passer de Dieu pour connaître le bien : "Il n'y a pas de lien entre la morale et la métaphysique."
André Comte-Sponville s'est confié sur le sujet lors de la masterclass qu'il a donnée pour Philosophie magazine, en décembre 2023. Pour revoir cette "Fabrique des idées" dans son intégralité, rendez-vous ici :
https://www.philomag.com/articles/replay-revivez-la-masterclass-dandre-comte-sponville-pour-philosophie-magazine
Et pour assister à la prochaine masterclass, avec le philosophe allemand Heinz Wismann, le 28 mai prochain à 18h30, c'est par ici !
https://mailchi.mp/philomag/20240528masterclass-peter-sloterdijk
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