Arthur Adamov. le théâtre d'Adamov.
Je découvre ces cinq pièces , les lis, les entend et les aime infiniment. Crissements rayonnants de l'absurde à travers «
La Parodie » . Tout le monde se parle, personne ne se comprend, tout le monde se cherche, et tout le reste se perd. Parodie de vie, de comportements, d'humains, autisme global, interchangeables personnages, gargarisme livide des sentiments. Régurgitation stérile d'un cannibalisme bourgeois dans l'Invasion, lâcheté, obéissance, compromission, tout se vaut tout se retranche rien ne se retient ( « la grande et petite manoeuvre »), illusion, farce, petits egos sous dimensionnés qui ne cessent de s'estimer à la valeur de leurs titres, de leur place, de leur pouvoir et de leur or, petits vers peu reluisants qui astiquent les meubles du passant.
Il n'y a pas de héros au théâtre d 'Adamov. Et si il devait en avoir un il aurait l'intelligence de quitter la scène. Fuite ou suicide, ce qui revient au même, il faut être surhumain pour faire face à l'absurde, théâtre de l'absurde peut être, mais d'une efficacité redoutable. D'une acuité, d'une précision, d'une actualité étonnante.
Écrites au début des années 50, le lecteur ne peut qu' y retrouver son pesant.
Cela fonctionne, on bascule, quitte à en avoir le vertige, la nausée.
La pièce « Tous contre tous » est pour moi la plus sidérante. J'ai cru qu'Adamov était parmi nous. Avant de comprendre que pleins de la
jeunesse de notre nouveau siècle nous n'avions en fait pas changé, nous n'avions rien changé, surtout rien de ce que nous portions en nous.
L'Autre, cette altérité effrayante, cet autre qu'on accepte qu'on prend qu'on remercie qu'on congédie qu'on chasse qu'on repousse qu'on refuse qu'on utilise qu'on extermine, cette altérité qu'on soumet à la grimace à force de lui demander de nous ressembler sans jamais nous confondre. Folie sacrificielle, paranoïa viscérale, générale « Ma terre, mon or, ma femme, ma place, ma peau, mon eau, mon ciel, mon air,... » ...Possédés. Possédés par l'absurdité généralisée. Une pandémie. « Tous contre tous », un monstrueux
jeu de massacre. Une pièce qu'on aimerait tellement voir jouer en ce moment. Une nécessité.
Qui a dit que le théâtre de l'absurde n'était pas réel ? Au théâtre c'est comme dans la vie, c'est pas parce qu'on est en avance que le drame ne va pas se jouer.
Arhtur Adamov donc. Étonnamment seul. Incroyablement contemporain.
Théatre I :
La Parodie ( 1947) -L'invasion ( 1949) - La grande et la petite manoeuvre ( 1950) – le professeur Taranne ( 1951) - Tous contre tous ( 1952) -
Reste à découvrir le reste de son oeuvre.
Astrid Shriqui Garain