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Les Printemps Sauvages » de
Douna Loup (2021, Editions Zoé, 160 p.) est un petit livre qui traite d'oiseaux et de grenouilles comme le dit et l'écrit son éditeur. Bon, l'auteur est suisse, et accessoirement elle parle aussi d'une enfance solitaire au bord d'une mare. Comble de la chance, c'est la même mare que celle où vivent grenouilles et zozios en tout genre. Il faut reconnaitre à l'auteur des excuses. Non pas qu'elle fut suisse de Genève, mais ses parents sont marionnettistes. Même que son nom d'écriture n'est qu'un pseudo par rapport à « Les Bamboches », le nom de la troupe. Mais tout de même, un certain nombre d'années plus tard, quand elle donne un interview, c'est au café Remor, sur la place du Cirque à Genève. C'est tout de même l'épisode de l'apprentissage dans la Drôme, près de Dieulefit, qui la façonne, avec les tournées, les festivals. Un grand atelier dans lequel les costumiers et musiciens répètent et créent ce qui sera le prochain spectacle. « Enfant, j'aspirais à plus de normalité. Je me disais qu'une fois grande, j'aurai un métier régulier qui assure avant tout un revenu stable. J'ai vécu de près l'incertitude financière. Avec le recul, je réalise combien cela m'a apporté d'être entourée de gens qui faisaient et qui font toujours ce qu'ils aiment. Cela m'a donné une grande confiance, la force de croire en ce que l'on fait ».
Après un séjour à Madagascar dans un orphelinat et la découverte de deux poètes de la grande ile, elle revient à Genève, puis du côté de Nantes. «
Les Printemps sauvages » débute comme un regret d'une jeunesse insouciante, passée par la narratrice avec sa mère lors d'un chapitre intitulé « Lacs », suivi d'un « Corps-Forêt ». Puis un long chapitre « Locla-Yom », épisode ilien, pas très loin de la ville de Beyti. Ville où elle reviendra ensuite, en train, avec même des rues et des immeubles, dont « Rue des Pôles ». Puis des chapitres encore différents avec « Vociférons », « La Bleue », « Chuchotons » et « Sentes Sauvages ». Il n'y a donc que très peu de repères géographiques ou même temporels, si ce n'est que le début de l'histoire se déroule alors que la narratrice est avec sa mère. Ainsi débute l'incipit « Personne ne se souviendra plus de nos morsures, de nos jeux dans le noir, de nos pleurs. Tout passe. Ne crois pas qu'une seule trace restera. Seuls cendres et sables. Silence. le souvenir est une ronde et la ronde serpente et puis se perd, comme il est naturel de se perdre dans l'eau des lacs »
On apprendra plus tard qu'elle a au moins un frère, Ores, et que son père, Gil, est parti sans laisser d'adresse. Sa mère, elle aussi, a fui le domaine familial il y a un certain temps. Mais la mère et la fille correspondent par lettres, se trouvent et se retrouvent. Voilà pour le cadre, qui n'est ni la Suisse hélvétique car on s'y baigne dans la mer, ni une ile tropicale, au vu des trains qui transportent les voyageurs.
Dans ce cadre, une évolution de la narratrice, qui s'appelle Olo, mais qui de fait est désignée comme Olo, par Barnabée, transgenre rencontré sur l'ile de Locla-Yom. C'est d'ailleurs le point de bascule du roman, avec la découverte de l'autre, de l'amour, du bien-être. C‘est aussi le mélange des genres qui se fait par des masculins-féminins qui alternent.
Histoire initiatique, oui en quelque sorte surtout que les prémices débutent par la recherche de ce « frère inconnu de derrière les montagnes ». Tout en poursuivant une errance, elle aussi initiatique et sa quête pour « rejoindre cette part sauvage et rieuse de moi-même » et se confronter à l'autre. Donc, à treize ans, sa mère lui annonce « tout quitter pour [se] retrouver dans le mouvement, pour de nouveau naître, vivre et connaître le monde ». Vaste programme, surtout que cette errance va se dérouler principalement dans l'ile de Locla-Yom et la ville voisine de Beyli. Et dans l'ile, point de grenouilles et de zozios annoncés en 4 de couverture. Encore un gadget mercantile pour faire vendre la campagne romande.