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EAN : 9782246833062
176 pages
Grasset (08/03/2023)
4.28/5   16 notes
Résumé :
Il existe des souvenirs minuscules comme on parle de vies minuscules. Frédéric Vitoux se souvient de cette « assiette du chat », objet de disputes entre son frère, sa sœur et lui, au tout début des années 50. Aucun des trois enfants ne voulait cette assiette pour lui, au prétexte qu’elle aurait servi, quarante ans plus tôt, au chat qui avait colonisé l’appartement, du temps de leur grand-père.
Mais les souvenirs minuscules sont-ils si minuscules que ça ?>Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Dédié à Zelda (2008-2021) « la dernière, sans doute, des chats de ma vie, des chats au long cours de ma vie », ce roman nous penche sur l'assiette de Fagonette, le chat du grand-père Vitoux, avant la première guerre mondiale. Cette soucoupe de faïence décorée d'un moulin à vent rebutait Frédéric, Isabelle et Philippe Vitoux ; aucun enfant ne voulait être servi dans «l'assiette du chat ».

Ce souvenir remémore la présence de ses parents et de ses grands parents, celui de Clarisse, l'élève passionnée d'Henriette Rouyer, sa grand-mère décédée en 1933, qui venait dans l'appartement jusque dans les années 1970 ainsi qu'Odette, fille naturelle d'une domestique de ses grands parents, qui financèrent ses études.

Odette est elle le fruit d'une relation ancillaire du grand-père ? Est elle ainsi la demi soeur de son père ? Est elle la cause de la séparation de ses grands parents ?

Interrogations, mystères, secrets de famille, qui évoquent la quête perpétuelle d'un Patrick Modiano courant derrière l'ombre paternelle.

L'oncle Jojo, qui vivait à Marseille avec un policier, est un autre souvenir affectueux ; son héritage permit au père de l'auteur d'acquérir l'appartement de l'Ile Saint Louis.

Autant de pièces d'un puzzle entamé avec les précédentes réminiscences de l'académicien … cette assiette du chat semble flotter devant lui sur un océan de silence et d'obscurité.

« Le passé est un trou noir à la formidable puissance d'attraction » conclut le romancier au terme de ce témoignage riche en anecdotes qui lui permettent de revenir notamment sur sa contribution au magazine de cinéma Positif.

PS : ma critique de "Longtemps, j'ai donné raison à Ginger Rogers"
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Frédéric Vitoux, l'auteur du Dictionnaire amoureux des chats, dédie cet opus à la regrèttée Zelda. Baptisée Zelda, comme un clin d'oeil à l'épouse de Francis Scott Fitzgerald, apprend-on à l'entrée intitulée :Les chats de ma vie.

Le titre intrigue. Quel mystère entoure cette assiette du chat, « une soucoupe de faïence » avec décor hollandais. ? A qui appartenait-elle ?
Pourquoi déclenchait-elle des hostilités parmi sa fratrie au moment de la mise du couvert? Personne ne voulait manger dans cette assiette !
Finalement quelqu'un se dévouait.

L' académicien brosse le portrait de son père, déjà familier à ceux qui ont lu ses livres. Par exemple dans le Grand Hôtel Nelson il est question des clichés pornographiques du grand-père Vitoux auxquels il est fait allusion dans ce livre.

Il se souvient d'une chatte Fagonette et subodore que sa grand-mère lui aura trouvé un autre toit, sous prétexte de l'asthme de son fils, (père du narrateur).
Un père «  vieux comme le monde ou incompréhensible comme le monde. »
Un homme taciturne qui a caché son enfance, qui a verrouillé ce qui le concernait.

Dans ce livre, le romancier revisite sa propre enfance, évoque celle de son père en alternance . Il convoque également sa mère, sa fratrie et ses grand-parents.
Une famille de taiseux, où on ne parlait pas.

Frédéric Vitoux a donc été «  élevé dans « un désert de chat » ! Ceux qu'il croisait , c'étaient ceux qui déambulaient le long des quais, dans le quartier de l'île Saint-Louis. Peu de ses amis d'enfance avaient un animal, alors les chiens de ses camarades de classe le fascinaient. Enfant , c'est surtout par la littérature qu'il a connu les animaux , la nature, la forêt.
Il se remémore les jeux en famille à table, autour de Tintin. Il décrypte leur rapport père/fils .Il évoque son parcours scolaire, (l'aide aux devoirs), les espérances des parents : le voir embrasser une carrière d'officier de marine ». Ces attentes deviennent «  un fardeau » pour l'adolescent. Toutefois il a bénéficié finalement d'une grande liberté au moment de ses orientations et de ses engagements. Lui dont les opinions étaient à l'opposé de son père, « homme de droite », aux positions conservatrices.
Puis, il retrace sa carrière, ses débuts à la revue Positif avant son entrée à la rédaction du Nouvel Observateur.
Il s'interroge sur le silence qui a régné quai d'Anjou et tente de percer les énigmes.

En même temps il ressuscite la dynastie des chats qu'il a connus , rappelle les circonstances de leur adoption successive. ( Mouchette, Papageno, Zelda) et quelques anecdotes. C'est son épouse Nicole qui lui a transmis cet amour et cette passion pour les félins, au point de vivre en leur compagnie et de leur consacrer des dictionnaires et l'ouvrage Les chats du Louvre. C'est le coeur serré que l'on assiste à la piqûre létale de Zelda, cette chatte que la famille Vitoux avait sauvée un soir de décembre 2008 puis recueillie. Et définitivement adoptée.


L'auteur nous émeut également quand il relate la maladie de son père et les confusions qu'elle provoque.

En lisant les carnets de souvenirs consignés par son paternel, l'auteur n'a pas réussi à comprendre pourquoi il y a tant de pans de vie occultés. « Les lambeaux de souvenirs de nos enfances ne sont jamais factuels. » Pas de trace de la chatte Fagounette, animal redouté du père. de même Clarisse semble avoir été reléguée de sa mémoire. Pourtant cette femme a joué un rôle primordial dans l'éducation de l'auteur, à la fois nounou, tante. Il lui a d'ailleurs rendu hommage dans une biographie.(1)
Mais pouvait-elle être responsable de la mésentente, de la désunion de ses grands- parents ? Cependant ausculter l'intimité conjugale a des limites. «  Il y a un seuil qu'aucun étranger ne parvient à franchir ».
Le romancier biographe sonde sa mémoire, et se retrouve confronté à une pléthore d'interrogations qui tournent à l'obsession. Une phrase traumatisante, entendue à cinq ans l'a hanté : « On aimerait te manger à la croque-au-sel » !

Parmi les non-dits, on retiendra les points suivants :
L'orientation sexuelle du couple formé par son cousin Jojo et son compagnon Monsieur Félipe, chez qui l'auteur, alors âgé de treize ans, a séjourné à Marseille après un camp de scouts. Dans la famille Vitoux la tolérance et le silence prévalaient.

L'amour inconditionnel de Clarisse pour Henriette Rouyer/Vitoux, son professeur de français et d'anglais avait « quelque chose d'insensé ». Auraient-elles partagé une forme d'amour saphique ? Cette ferveur, cette adoration hors normes ont fait naître chez Clarisse la vocation d'enseigner à son tour.

La filiation d'Odette Lévêque, fille de la domestique des grands parents, présentée comme la soeur de lait. Mais ne serait-elle pas plutôt le fruit d'amours ancillaires au sixième étage du quai d'Anjou ? Donc une demi-soeur. Un secret bien gardé. Exilée aux USA., Odette aimait retrouver le quai d'Anjou. Elle reste une comète qui « a laissé un sillage lumineux, tant sa présence avait été phosphorescente et joyeuse ».


On devine la frustration de l'enquêteur qui n'a plus de témoins potentiels à questionner, qui ne dispose que de cassettes d'interviews inaudibles.
«  Les bandes magnétiques s'effacent, les sons deviennent une bouillie sonore ».
Il se reproche son incuriosité. Pas de courriers à consulter, aucun objet palpable, juste des albums photos que son épouse Nicole se plaît à compulser.
Espère-t-elle y débusquer des indices ?

De nombreuses références littéraires et cinématographiques ponctuent le livre. Rien d'étonnant de voir Céline cité au vu des ouvrages que Frédéric Vitoux a publié. Quant aux héroïnes anglaises de George Eliot et Jane Austen, elles ont alimenté les récits de Clarisse.

L'écrivain signe un récit à la veine autobiographique, pétri de sincérité, teinté de regrets, qui incite à lire ses romans précédents. le chapelet de souvenirs fait revivre les fantômes qui ont taraudé l'auteur. «  le souvenir, c'est la présence invisible » selon Hugo. «  le passé est un trou noir à la formidable puissance d'attraction ».

( 1) Clarisse de Frédéric Vitoux
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Dans ce livre, le héros, ou plutôt l'héroïne est une assiette du moins « une soucoupe en faïence aux motifs décoratifs d'un bleu délavé » ayant appartenu à Fagonette la chatte des grands-parents de l'auteur, disparue dans des circonstances troublantes, car elle était peu appréciée du grand-père. Grâce à cette assiette, nous entrons dans l'univers, l'intimité de la famille Vitoux.

L'auteur aborde le manque d'intérêt que lui portait son père durant l'enfance, à tel point qu'il se demandait parfois s'il était muet ou simplement distrait, sauf quand il prenait une colère dévastatrice à laquelle, d'un commun et tacite accord, ses enfants avaient décidé de ne pas réagir, ce qui n'a pas empêché l'auteur de le considérer comme le meilleur des pères.

Comment se construit-on avec cette image paternelle que l'auteur explique par l'ombre permanente et autoritaire du grand-père, Georges qui n'avait jamais su être un père et semblait demeurer un étranger dans la maison ? Dans ce couple constitué par les grands-parents, s'était immiscée une troisième personne, Clarisse, profondément amoureuse d'Henriette, la grand-mère, donc difficile de se construire une image masculine, au milieu de ce trio, que l'aïeul regardait de loin,

Les souvenirs remontent, souvent dans le désordre, une pensée, ou un secret devenant soudain perceptibles, ce qui conduit l'auteur à creuser la personnalité de ces grands-parents qu'il n'a jamais connus mais qui ont conditionné son père, (avec l'apparition de fantômes telle Odette alias la soeur de lait du docteur et qui en fait était le fruit d'une union illégitime) puis la sienne. Répétition des scenarii…dirait Sigmund

Frédéric Vitoux examine ce père tour à tour avec ses yeux d'enfant et son regard d'adulte qui tente de comprendre, d'éclairer ce qui l'a perturbé autrefois.

Toujours dans le domaine des souvenirs, l'auteur aborde la période du scoutisme, où il s'ennuyait pendant trois semaines, et qui n'avait rien de sauvage pour lui qui se réfugiait tant dans la littérature, mais à la suite de ce séjour, alors qu'il habitait chez son cousin Jojo, il a découvert la relation homosexuelle de ce dernier avec son compagnon alias Monsieur Felipe. Ce qui nous entraîne sur la sexualité des différents membres de la famille, et du silence qui l'entoure.

J'ai beaucoup aimé la manière dont l'assiette du chat fait remonter les souvenirs, les associations d'idées pour tenter de comprendre surtout la personnalité du père de l'auteur. Ce souvenir, (sous-titre du roman) fait remonter tous les autres. L'écriture, comme le dit si bien Frédéric Vitoux fonctionne comme une analyse sur le divan :

J'écris pour savoir (pourquoi écrirait-on sans cela ?) et c'est l'ignorance, de nouvelles ignorances qui m'attendent au bout du chemin.

J'ai retrouvé, dans ce livre, la verve qui m'a tant plu dans « L'ours et le philosophe », l'humour de l'auteur, une écriture magnifique, ciselée avec le sens du détail, le choix des mots… Je me suis rendue compte que ce n'est pas la première fois que l'auteur aborde sa famille, ou l'importance des chats, ce qui me donne l'envie de me plonger davantage dans ses écrits, (trente-six livres au compteur) en particulier son « Dictionnaire amoureux des chats » ou ses écrits sur Louis-Ferdinand Céline.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m'ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la belle plume de son auteur.

#Lassietteduchat #NetGalleyFrance !
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Je découvre un bijou littéraire grâce à ce livre offert à Noël par un de mes enfants. Un livre non seulement beau dans le fond et la forme, mais qui s'avère pour moi indispensable.
Nous suivons la quête d'un homme sur son passé, à partir d'un objet anecdotique, une soucoupe de lait, dont il se rappelle après bien des années les disputes qu'elle engendrait avec sa fratrie et en contraste le silence du père sur la présence de cette assiette de chat .
Pourquoi et comment une simple réminiscence peut-elle nous entraîner vers des divagations, des bifurquations, des interprétations d'un passé familial recomposé avec grâce par un écrivain à l'écriture d'orfèvre.
Je parlais d'un livre indispensable parce qu'il m'a simplement redonné le goût d'écrire.
Si vous aimez la belle écriture, allez-y, c'est un très beau livre.
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Il y a des grands livres, des beaux livres, des gros livres... L'Assiette du chat est un joli livre. Il est à la littérature ce qu'un trio de cordes est à la musique ou une aquarelle à la peinture.
Frédéric Vitoux a laissé remonter quelques souvenirs d'enfance. Des émotions surtout. Ce qui vaut quelques esquisses de portraits et permet d'entrebailler une porte qui ouvre sur les mystères de famille, pour ne pas dire les secrets.
J'ai beaucoup aimé la délicatesse de l'ouvrage. Vitoux ne pose pas, il regarde avec bienveillance, nous prouve qu'on peut aimer des proches malgré ce qui nous séparent d'eux, être lucides sur leurs erreurs sans en faire des tartines, parce qu'on les aime. Cette tonalité là se fait rare à notre époque, c'est bien dommage. Une voix douce est tellement plus mélodieuse que le tapage des incantations, des dénonciations et des polémiques. Merci!
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critiques presse (2)
SudOuestPresse
12 mai 2023
À partir d’un souvenir minuscule, l’académicien revisite son histoire familiale et fait ressurgir secrets et non-dits. Tout en délicatesse.
Lire la critique sur le site : SudOuestPresse
LeFigaro
14 avril 2023
L’académicien se penche sur une mémoire familiale incertaine pour la sauver de l’oubli.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Une observation m’a toujours amusé - ou attristé, selon mon humeur : les tournées de films, quand sont recrutées des centaines de fîgurants pour incarner, un ou deux jours durant, les soldats d'une armée, une foule avec ses bourgeois et ses ouvriers ou encore des prisonniers rassemblés dans un camp, sous la surveillance de gardiens...

Eh bien, à la pause, au moment des repas, ces figurants à qui ont été confiées, de façon arbitraire, des tenues d'offciers ou de simples soldats, de notables ou de prolétaires, de bagnards ou de geôliers, se regroupent spontanément entre eux. Ah ! non, un lieutenant ne va tout de même pas fraterniser avec un trouffion, un notaire avec un charpentier, un repris de justice avec un représentant de l'ordre ! À chacun sa place ! À chacun son grade, sa classe ou son statut !
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Seul m'émeut le silence qui rode autour de mon grand-père et surtout de mon père.

Seul m'obsède le silence qu'il observait quand nous nous disputions en famille à propos de cette fichue assiette du chat, lui qui répugnait à parler de sa vie, de son enfance, de tout ce qui avait pu le blesser, lui le fils unique d'un couple déjà âgé à sa naissance.

Mais peut-on faire d'un silence le sujet réel d'un livre ?
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Un jour, les huit ou dix nieces de Mme de Montcertin lui demandèrent ce que c'était que l'amour ; elle répondit :

« C'est une vilaine chose sale, dont on accuse quelquefois les femmes de chambre, et quand elles en sont convaincues, on les chasse. »

STENDHAL, Souvenirs d’égotisme
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On finit tôt ou tard par devenir orphelin. On se permet d’ouvrir les portes dérobées, sans risquer, cette fois d’importuner qui que ce soit. Les morts ne se réveillent jamais. Leurs chambres sont vides. A nous de les repeupler, si le besoin ou la nécessité nous en prend.
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C’est que les espoirs comme les affections, les espérances ou, pis encore, les attentes de vos parents à votre égard vous alourdissent d’une charge avec laquelle il est difficile, parfois, de vivre ou de grandir. On les reçoit et puis on en est accablé. Impossible, croit-on de s’en défaire.
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Videos de Frédéric Vitoux (29) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Frédéric Vitoux
Frédéric Vitoux "Je veux croire en l'immortalité de l'esprit" (vidéo publiée par KTO TV le 20/04/24)
Parmi les nombreux romans, biographies et essais écrits par Frédéric Vitoux, de l'Académie française, certains ont été récompensés, notamment par le Prix Goncourt de la biographie pour sa « Vie de Céline » (Grasset). Dans son nouvel ouvrage, intitulé « L'Assiette du chat » (Grasset), présenté pour la première fois sur KTO, il invite le téléspectateur à découvrir une sorte de madeleine de Proust, dévoilant les dessous de sa propre histoire familiale. Devant Marie Brette, il accepte de lever aussi le voile sur ses sujets d'inspiration et autres secrets de famille. Bien que se définissant comme catholique, l'écrivain partage ses doutes avec sincérité : « Je suis catholique, ce qui ne m'empêche pas d'être pétri d'incertitude... Je veux croire en l'immortalité de l'âme ».
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