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sur 1000 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Qu'il semble difficile de juger ce roman. Mais faut se décider, donc go : j'ai choisi de l'aimer. Non, de l'encenser.

J'ai choisi de me laisser captiver par les vies mouvementées de ce pdg de bonne famille juive ou pas, on ne sait plus. de sa femme journaliste amoureuse, plus amoureuse, re-amoureuse etc... bref une femme. de l'amant d'icelle (c'est joli icelle, je me fais plaisir), donc de cet amant banlieusard neuf-troisien converti en soldat et ravagé par la barbarie des guerres. de cet ex-animateur social blackos (quota oblige) devenu conseiller à l'Elysée (quota oblige), puis ex-conseiller, on ne sait plus.
Ok je l'accorde : l'encensement annoncé n'est pas évident à première vue. Oh, ben si quand même. Et allons plus loin, respirez donc cette belle odeur de clichés sociaux. Hmm, que ce roman fleure bon la caricature à pleines narines. le juif et son argent, la femme et la romance, le 93 et ses emmerdes, l'islam et le terrorisme, le média fouteur de m... trouble, le black et le racisme. Bref, ça transpire le trop. de là à le reprocher à madame Tuil, il n'y a qu'un pas. Pas que je ne franchirai pas et avis qui ne m'a même pas titillé l'azerty quelques secondes. Car j'ai choisi d'aimer ai-je dit. Faut suivre. Et donc d'aborder ce roman sous un angle différent que celui du cliché. Et ce, grâce au magistral talent narratif de Karine Tuil, son écriture accrocheuse, son oeil incontestablement juste sur une réalité sociétale qui dérange.

Place donc à quatre personnages aux parcours atypiques, progressivement brossés. Bien-né, mal-né, chacun porte sa croix et traîne son lot de casseroles. Qui forgeront des caractères forts, solides, ambitieux en apparence, mais aux fragilités qui exsudent subtilement sous une plume ingénieuse. Quatre personnages en quête d'un destin déjà écrit ou à écrire. Fil conducteur patiemment brodé : peut-on échapper à ses origines? Ceci au travers de thèmes de société bien actuels : rang social, religion, médias, pouvoir, identité, communautarisme sont scrupuleusement autopsiés avec intelligence et méthode. La fiction au service du cash investigation. Ne voir qu'une caricature serait être finalement bien aveugle à ce monde qui nous entoure...

Roman explosif ancré dans un XXIème siècle explosif.
Par une Karine Tuil impériale de précision.
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Le 7 janvier 2015, je suis frappé par un entrefilet publié dans un quotidien. Dans ces quelques lignes, Karine Tuil fait un voeu pieux pour la nouvelle année, celui de voir les Hommes s'élever vers un idéal fraternel. Convaincu, je partage le texte sur les réseaux sociaux. Deux heures plus tard, deux hommes armés pénètrent dans les locaux de Charlie Hebdo. La suite, vous la connaissez. L'idéal fraternel s'est pris du plomb dans l'aile et la France se retrouve démunie face à l'émergence d'une violence incontrôlable.
«L'insouciance » reprend les controverses qui divisent la société française. Le roman se déroule au début des années 2010. L' angoisse sécuritaire et l'obsession identitaire prennent de l'ampleur, excitées par un Président et son conseiller de l'ombre. Les conflits du Moyen-Orient réveillent les vieilles haines ; il y avait des classes, il y a désormais des communautés. Comme l'écrit l'auteure, « tout est vu à travers le prisme identitaire. On est assigné à ses origines quoi qu'on fasse. »
Karine Tuil parle aussi des relations amoureuses, de la guerre et de la politique. Elle enchevêtre les destinées de quatre personnages qui finiront par se réunir au cœur du chaos : un officier traumatisé par sa mission en Afghanistan, un grand patron, une journaliste et un militant associatif plongé au cœur du pouvoir. Karine Tuil raconte la fragilité de ces êtres confrontés de plein fouet aux violence de toutes formes : médiatiques, économiques, politiques, et terroristes. Sur le front, dans les affaires, à la tête d'un Ministère ou dans le cœur de son amant, l'être humain reste vulnérable.
En débutant l'écriture de ce roman, Karine Tuil souhaitait raconter notre société. A mes yeux, c'est une réussite. Si le livre est dense, c'est parce qu'il aborde de nombreuses problématiques qui déchirent notre pays. C'est un roman contemporain qui nous aide à mieux comprendre les événements récents. Le livre m'a fait penser à "Dawa" de Julien Suaudeau qui partageait la même ambition. Au final, Karine Tuil nous laisse peu de raisons d'espérer. Les violences ont chassé l'insouciance. Bon moi, de mon côté, je garde mon idéal fraternel au chaud, quelque part entre mon cœur et ma tête.
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Le lieutenant Romain Roller est en séjour de décompression à Chypre. De retour d’Afghanistan où, lors d’une embuscade, il a perdu quelques uns de ses soldats, il est complètement dévasté, atteint psychologiquement. Il a une liaison avec Marion Decker, la journaliste qui les a suivis en mission. Marion est aussi l’épouse de François Vély, l’un des plus grands « capitaines » de l’industrie française. De retour en France, Marion et Romain entretiennent leur liaison dans le plus grand secret. François, quant à lui, commet une erreur de communication en posant sur une sculpture représentant une femme noire. Il est victime d’un lynchage médiatique, salissant sa réputation et compromettant l’avenir de son entreprise. C’est alors qu’Osman Diboula, fils d’immigré devenu un politicien proche du président, prend publiquement sa défense, se projetant ainsi dans la lumière du pouvoir. …

L’écriture est très belle, les métaphores puissantes, le vocabulaire riche. Je pense que c’est ce qui sauve ce long, trop long, peut-être, roman. En toile de fond, politique, religion, argent, pouvoir, racisme, sont tissés ensembles pour créer un cocktail explosif. Or, l’explosion est attendue, dans un lent et passif récit. Chaque chapitre est un personnage, un lien entre eux se déroule, le lecteur attend la confrontation qui tarde à arriver. Nous sommes baladés entre Romain, Marion, François et Osman. Choc des cultures, des origines, des milieux sociaux. Tous les personnages sont emplis de doutes, de craintes, aucun n’est positif, optimiste. Les forces s’érodent, les certitudes s’envolent. Même la violence est passive, sournoise, psychologique. L’ennui n’est jamais loin mais le style, l’intrigue vous pousse à continuer la lecture de leur histoire étouffante, pessimiste, profondément intimiste. Au final, nous retrouvons les personnages profondément abimés, aux vies écorchées. Une lecture qui n’épargne pas le lecteur, qui vous marque de son sceau d’angoisse. C’est glauque, c’est d’une noirceur opaque. Mais, je le répète, quelle belle écriture.
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L'Insouciance : titre détonnant pour ce roman qui, dès le prologue, nous plonge dans une période historique tourmentée, celle de l'après 11 septembre 2001 avec la riposte américaine en Afghanistan et les débuts du mouvement terroriste.
L'insouciance n'est pas non plus ce que partagent les héros de cette histoire. François Vély, l'élu des Dieux, un pur produit de cette France des élites à qui tout réussit, va du jour au lendemain, être chassé du paradis... Osman Diboula, pur produit des banlieues, arrivé, à force d'intelligence et d'ambition, jusqu'à l'Olympe présidentiel va, lui aussi être renvoyé brutalement à ses origines. Romain Roller, lieutenant de l'armée française, va rentrer "mort-vivant" comme il le dit lui-même, d'Afghanistan. Deux femmes pour ce quintette : Marion Decker, journaliste et romancière (un double de l'auteure ?) épouse de Vély et amante de Romain Roller ; Sonia, la compagne d'Osman, symboliserait pour moi la réussite "méritocratique" à la française, par son parcours sans fautes jusqu'aux arcanes du pouvoir.
Ce qui pour moi fait la force de ce roman, c'est, tout d'abord, la dénonciation, à travers l'histoire de ces personnages, de l'inanité, de la violence et de l'horreur sans failles liées aux guerres internationales contemporaines : celle d'Afghanistan et celle d'Irak d'ailleurs ouvre et ferme le roman. Karine Thuil alterne avec brio des styles différents. Une écriture journalistique parfaitement bien documentée, par exemple, lorsqu'elle décrit tous les mécanismes mis en place pour le recrutement des forces spéciales en Irak ou les enjeux du "capitalisme de guerre". Sa plume se fait véhémente, polémique, vibrante de colère lorsqu'elle évoque l'horreur au quotidien des combattants. Elle sait aussi nous plonger dans l'émotion avec l'évocation du vécu traumatique de Romain Roller face à un ennemi qui peut être n'importe qui et peut frapper n'importe où. Cette paranoïa au quotidien ne le quittera plus et va le poursuivre faisant de son retour à la vie civile un enfer.
Mais l'enfer n'est pas seulement celui de la guerre sur le terrain des grands conflits internationaux. Il en est une autre plus sournoise, qui ne dit pas son nom, celle qui se livre dans le cercle des élus de la République et dont Karine Thuil nous dévoile, à travers les personnages de François Vély et Osman Diboula et leur chute, les relents nauséabonds, les noirceurs. Elle le fait en mêlant humour noir et ironie féroce. Et on la suit presque joyeusement, tant elle se plaît à évoquer de façon masquée bien sûr, la trajectoire de femmes et d'hommes appartenant à la sphère médiatico-politique à travers celle des personnages du roman. Mais ne nous y trompons pas, c'est bien d'une satire politique et sociale sans concessions qu'il s'agit. Culte du sérail, guerre féroce des élites pour qui la trahison et une certaine paranoïa sont des armes incontournables pour arriver au pouvoir ou s'y maintenir, collusion médiatico-politique qui font et défont les réputations, rien ne nous est épargné. Et l'on suit avec effarement le "lynchage médiatique" de François Vély redevenu François Lévy, victime d'une campagne antisémite sans pitié ; le boycott impitoyable d'Osman Diboula, renvoyé à une "négritude" qu'il n'a jamais revendiquée en tant que telle.
Un gros pavé comme celui-là présente, bien sûr, quelques points faibles. J'avoue que j'ai moins bien accroché à toute la partie "romance". Les scènes de rencontres amoureuses entre Marion et Romain par exemple, frôlent parfois le mélo. La structure du roman aussi m'a un peu gênée par sa trop grande régularité : alternance systématique de chapitres consacrés à chacune des héros.
Petits bémols pour un roman qui m'a beaucoup plu par sa force, sa remise en question tous azimuts des dysfonctionnement de notre République et plus généralement des sociétés occidentales auxquelles nous appartenons.
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Après « L'invention de nos vies », Karine Tuil nous propose un dixième roman. “L'insouciance” revient sur des thèmes chers à l'auteur : le poids des origines, le repli identitaire, la violence du monde d'aujourd'hui.

Quatre personnages, quatre destins qui s'entrecroisent au fil des chapitres. Romain Roller, un jeune des cités de Seine-Saint-Denis. Devenu lieutenant de l'armée, marié et père de famille, il est rentré traumatisé d'Afghanistan après avoir vu la mort en face. Romain se sent coupable de ne pas avoir su sauver ses hommes. Osman Diboulaun, fils d'immigrés Ivoiriens, est un ancien animateur social à Clichy-sous-Bois qui est rentré dans le monde politique comme conseiller du Président de la République. Osman doit combattre contre le rejet de cette classe politique, qui sous-entend qu'il s'est hissé au plus haut du pouvoir grâce à la couleur de sa peau au nom de la diversité. François Vély, la cinquantaine, franco-américain, est un homme d'affaires à succès, grand amateur d'art contemporain. Catholique mais issu d'une famille juive, son nom est l'anagramme de Levy. François est trainé dans la boue suite à un reportage ou il est photographié assis sur une oeuvre d'art représentant une femme noire. Marion Decker, jeune journaliste d'origine modeste, est la femme du milliardaire François Vély. Marion fait la connaissance du lieutenant Roller et en devient sa maitresse lors d'un reportage.

Dans une écriture rythmée, formé de courts chapitres le roman nous entraine dans une analyse de notre société post-11 septembre 2001 ou la xénophobie, l'antisémitisme, l'intégration-assimilation, les crispations identitaires provoquent violences et rejets. Karine Tuil se pose la question si on peut finalement échapper à ses origines : « Il y a quelque chose de très malsain qui est en train de se produire dans notre société, tout est vu à travers le prisme identitaire. On est assigné à ses origines quoi qu'on fasse. Essaye de sortir de ce schéma-là et on dira de toi que tu renies ce que tu es ; assume-le et on te reprochera ta grégarité. »

Un grand roman qui brosse un tableau très noir de notre société. Les temps de l'insouciance sont finis.
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Avec un talent incontestable doublé d'une maîtrise spectaculaire, Karine TUIL, juste après le triomphe de l'invention de nos vies, nous plonge ici au coeur de la société contemporaine qui brasse pas mal de thèmes aussi divers que variés : les traumatismes de guerre, la chute d'un géant des télécommunications, l'ascension politique d'un jeune homme - d'origine africaine subissant régulièrement des attaques racistes – le terrorisme et la communication.

L'insouciance" relate une belle histoire d'amour sur fond de guerre, d'islam, d'antisémitisme, de racisme et de terrorisme, des sujets qui nous ramènent à chaque page au contexte politique actuel avec des personnages loin de l'insouciance clamée par le titre.

,Mêlant habilement ces thèmes brulants d'actualité, le lecteur est incapable, pour son plus grand plaisir, de lâcher son bouquin. le roman de Karine Tuil pourrait frôler l'indigestion mais il n'en est rien.

L 'auteur nous livre là un livre particulièrement dense, et parvient à ne jamais perdre son lecteur au détour d'un chapitre, ces derniers étant rigoureusement bien construits jusqu'à un dénouement assez étonnant!
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Trois hommes engagés sur ses fronts différents : Romain dans l'armée, Osman dans les milieux du pouvoir présidentiel et François à la tête d'une grande entreprise. Exposés, ils vivent les poussées d'adrénaline enivrantes propres aux élites... jusqu'à ce qu'ils se prennent de plein fouet le pépin, celui qui change tout, définitivement.
Incapables de prendre soin de leurs proches, ils se retrouvent seuls quand il faut se battre contre la culpabilité ou des accusations injustes.
Fataliste, l'auteure rend ces personnages exceptionnels humains à travers des histoires fouillées. Elle s'autorise des généralités parfois contestables, mais elle aborde des thèmes en profondeur tel celui des identités : celle qui est attribuée et celle que l'on revendique, ou celui de la fidélité. Elle se situe en France ou en Irak, où l'horreur mène le drame à son point le plus critique.
La fin amène une forme de rédemption, même si les acteurs de ces tragédies restent transpercés par ce qu'ils ont vécus.
Une lecture intense.
Lien : https://partagerlecture.blog..
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Ils sont quatre, trois hommes et une femme, dont les destins vont se croiser et se mêler dans une fresque violente et chaotique, terriblement réaliste.

Romain Roller, soldat appartenant au corps des chasseurs alpins et traumatisé par une mission en Afghanistan, noue une liaison avec Marion Decker, journaliste et romancière, lors de son séjour de décompression en Grèce. Mais la jeune femme est mariée à l'un des entrepreneurs franco-américains les plus puissants de France, François Vély. de retour en France, les amants poursuivent leur passion amoureuse. Romain retrouve également Osman Diboula, ancien éducateur social devenu une figure montante à l'Elysée suite à son intervention comme médiateur lors des émeutes de 2005 dans les cités. Ces quatre personnes vont se retrouver au coeur d'un scandale qui, dans un effet domino, va faire voler en éclats tous leurs repères sociaux, moraux et politiques.

C'est un récit glaçant et passionnant que nous offre Karine Tuil avec « L'insouciance ». Ses personnages principaux évoluent dans un monde contemporain impitoyable, dans une société où les clivages sociaux, religieux et raciaux perdurent, où la loi du plus fort et du plus influent s'impose aux plus faibles. A cela s'ajoute une donnée implacable et ineffaçable, que même le plus puissant ne peut faire disparaître : les origines identitaires. Car malgré l'ascension sociale, intellectuelle, financière ou politique, c'est bien à ce niveau que se joue la destinée de chacun : le diktat identitaire qui ramène chacun là d'où il vient.
François Vély, fils d'un ancien résistant juif, est rattrapé malgré lui par une judéité qu'il n'a jamais reconnue. Osman, fils d'immigrés ivoiriens et enfant des cités, est accueilli dans le cercle intime du Président non pas pour ce qu'il est mais plutôt pour l'image qu'il renvoie, un fils d'immigrés intégré et « assimilé ». Romain Roller, qui avait trouvé sa voie dans l'armée, s'interroge sur la nécessité et la légitimité des guerres face aux pertes humaines. Quant à Marion, marquée par un drame et qui a connu une enfance chaotique placée sous le signe de l'engagement gauchiste de sa mère, elle peine à trouver sa place parmi les nantis.

Autour d'eux, le décor est planté et sa description sous la plume de l'auteur est fascinante : nous voici au plus près de l'exercice du pouvoir, déambulant parmi les puissants et découvrant les règles qui codifient leurs relations. Forcément, le Président, ses conseillers et ses ministres nous font penser à des personnes bien réelles… Dans ce monde clanique où aux privilèges succèdent les bannissements, tout n'est qu'un jeu de paraître où la puissance des médias tient les rênes.
Racisme, antisémitisme, terrorisme, clivages sociaux, jeux de pouvoir, histoire d'amour, pouvoir des médias, question identitaire… le mélange des thèmes est détonnant et maîtrisé à la perfection. Et l'insouciance dans tout cela ? Elle s'est envolée depuis longtemps...

Je découvre Karine Tuil avec ce roman. Indéniablement, elle se place parmi les grands auteurs. Narration puissante et accrocheuse, intensité permanente de l'intrigue, style très riche, analyse parfaite et très documentée de la société du XXIe siècle, personnages à la psychologie travaillée au scalpel, l'auteur nous offre ici un roman époustouflant. Bravo.
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Le monde est devenu grave. Une gravité qui tourne autour de tous et de chacun jusqu'à ce qu'elle s'insinue et se propage. L'inquiétude comme une obsession. La fuite de l'insouciance. Crainte, insécurité, menace, pression. Des conflits au loin qui s'avancent désormais et retentissent tout près. Des incompréhensions, de l'ignorance, des amalgames, laissant une société française étirée de toute part, embrouillée. le pouvoir qui se prend et se perd en un instant, un vrai jeu où l'on distribue des cartes stratégiques, spéculatives, médiatiques...Manège de la politique qui se déploie entre convenance et apparence, tournant sur le socle de l'Identité, social, raciale, religieuse. La violence engendrée par la différence, l'intolérance entraînée par la rigidité.
Dans ce roman, l'auteure fouille l'intime de quatre personnages, en extrait la noirceur, la douleur, le doute, la contradiction et les sentiments – d'amour, d'amitié, de honte, de colère, de chagrin, de peur... – pour éclairer – et tenter de comprendre – ce qui se passe à l'extérieur. Quatre protagonistes emblématiques : Romain Roller, un soldat tout juste rentré d'Afghanistan où a eu lieu une embuscade faisant de nombreux morts et blessés, détruit psychologiquement, terriblement affaibli, il ne vit plus il survit, la fureur de la guerre le hante sans répit, même sa femme et son fils ne peuvent l'apaiser, seule une journaliste Marion Decker ravive chez lui le désir ; Marion Decker, il l'apprendra assez vite est l'épouse d'un grand patron, François Vély, sur le point de faire affaire avec les États-unis, mais une photographie de lui posant assis sur une sculpture représentant une femme noire, connotée immédiatement de raciste, va entraîner une exécution médiatique ; Ousman Diboula, fils d'immigré ivoirien, ancien éducateur social devenu un proche conseillé du Président de la République, soudainement évincé subissant de plein fouet les affres de la politique, écrira un texte retentissant sur l'affaire François Vély, qui lui permettra de retomber dans les bras du pouvoir...
Une fiction puissante sur une réalité abrupte et sombre. Une lecture dure et intense d'où s'échappe toute de même à la toute fin l'esquisse d'une quiétude.
Lien : https://lesmotsdelafin.wordp..
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Mon programme de cet après-midi : Cinéma, je suis allé voir la tresse de Laetita Colombani, puis j'ai terminé la lecture de l'insouciance de Karine Tuil. Et il m'est venu cette idée que ce roman ressemblait à la tresse en ce sens que ce sont des histoires distinctes qui vont progressivement se mêler pour former une unité.
Il est question d'identité, de parcours de vie, certains s'engagent dans l'armée pour aller combattre en Afghanistan ou en Irak, d'autres arpentent les couloirs élyséens, d'autres encore gravitent dans les hautes sphères de l'entreprise, certains se hissent au sommet pendant que d'autres dégringolent de leur piédestal. On y parle d'amour aussi, des amours impossibles qui transcendent les classes sociales, on y parle de terrorisme, de religion, de racisme et d'antisémitisme, du pouvoir, de trahison.

Comme les cheveux mêlés dans une tresse, nos destins s'entrecroisent, nous devons vivre les uns avec les autres et c'est difficile parce qu'une fois passée l'insouciance de l'enfance, il faut se battre pour se trouver une place dans ce monde, puis pour la garder et on n'est pas préparés à ça. Alors on se bat, on lutte contre les autres, contre soi-même, on tente d'oublier notre condition, nos origines, mais celles-ci nous reviennent come un boomerang.

Un roman dense, documenté, riche sur le plan de la psychologie des personnages, sur la sociologie de notre époque. Des pages mémorables sur l'horreur de la guerre et le syndrome du stress post traumatique. Un grand roman.

« On se déteste, on se déchire
On se détruit, on se désire
Mais au bout du compte
On se rend compte
Qu'on est toujours tout seul au monde »

Les uns contre les autres – Luc Plamondon

Challenge Multi-Défis 2024.
Challenge Pavés 2024.
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