Ah mais ce titre ! Juste pour ce titre enchanteur, j'ai eu envie de lire ce recueil de nouvelles ; cent micro-nouvelles, en fait, 100 quand même !
Bon d'accord, il existe de nombreuses définitions de l'Amour, chacun et chacune a la sienne, certainement que chacun.e en a même plusieurs. L'Amour peut être de nature différente aussi : sentimental, sexuel, conjugal, amitié, amouritié, passionnel, platonique, tarifé, hétérosexuel, homosexuel, lesbien, raisonnable ? ;-) ... L'amour des feintes, l'amour des astres, celui des jeux de mots qui ont un sens ... mais je m'éloigne du sujet.
L'auteur se glisse, à la première personne du singulier, dans la peau de tous & de toutes. Il a observé tant d'amoureux et d'amoureuses, tellement différent.e.s les un.e.s des autres. Il est alors question aussi de ruptures, de jalousie, d'usure du temps, de baise, de chance, de rencontres, de souvenirs, de légèreté, de désirs, de fantasmes, de couples, de liberté chérie, de mariage, de célibat, de tête-à-tête, de corps-à-corps ... etc. Peut-être même, nous invite-t-il à raconter nos histoires d'amour ? Les nôtres, celles qu'il n'a pas écrites ... l'infinité qu'il n'a pas écrites.
Lectures facile et fluide, dans laquelle on picore surtout pour découvrir « les autres ». Leurs tranches de vie, drôles ou tragiques, poétiques aussi, touchantes, infiniment touchantes. Et pour, parfois, au détour d'une phrase, se retrouver soi-même.
Sans doute que ce n'est pas vrai, voire illusoire, mais ce serait assez juste de le vouloir ; Que le poids du monde ne soit qu'Amour. Allez, salut ... Et gros bisous.
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Un nouvel excellent conseil de la libraire!
Ce livre, ses textes sont de parfaits petits bonbons. Des tranches, brèves, de vie, d'amour ou de désamour. L'émergence du sentiment, la plénitude de l'amour partagée, la solitude de son absence, la force de sa présence, l'absolu parfois, les blessures, les échecs et les réussites, la fin triste ou joyeuse, la rémission ou pas, le physique, l'irrationnel, le rationnel... 100 fragments qui se dégustent d'une traite ou à picorer, comme on aime.
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En cent micro-fictions ciselées, David Thomas dresse la carte du tendre contemporaine. du célibat de la jeunesse à la solitude subie de l'âge mûr, il narre les mille et une variations , fluctuations de l'amour et son livre peut donc se lire comme un roman, où un seul "Je" (mais à multiples facettes: homme, femme, homo, hétéro, jeune, vieux...) prend la parole, assurant ainsi la continuité et la fluidité.
La structure est donc assurée, mais pourrait tourner à la mécanique, façon Exercices de style, s'il n'insufflait autant de vie à ses personnages, variant les tonalités (tendresse parfois rugueuse, humour, poésie...). L'exercice de la nouvelle est souvent périlleux, mais David Thomas, en funambule expert, se tient toujours sur le fil, et nous réjouit le coeur.
à lire, relire, un petit bréviaire amoureux qui file sur l'étagère des indispensables !
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Il était magnifiquement beau, se déplaçait avec une sensualité de fauve et possédait un humour qui allégeait ces petites appréhensions qui précèdent parfois le sexe. J’ai beaucoup aimé la façon dont il m’a embrassée, avec douceur et au meilleur moment, ni trop tôt (manifestation d’impatience et de précipitation), ni trop tard (signe de timidité et de maladresse). Nous avons commencé à nous déshabiller dans le salon, puis il m’a portée jusqu’à la chambre sans la moindre expression d’effort, souriant seulement joliment. En fait il n’était pas magnifiquement beau, il était divinement beau, si beau que ça donnait envie de rire, comme on éclate de joie quand on reçoit un cadeau inattendu ou que la vie vous offre ce que vous n’aviez jamais osé espérer. Et oui (!), mes copines n’avaient pas menti, ce garçon était le coup du siècle. Je ne vais pas entrer dans les détails parce que chacun jouit à sa manière, mais pour moi, ça avait été parfait, et même plus. Aussitôt, je me suis demandé si je le reverrais, s’il me rappellerait et si j’aurais droit, le week-end suivant par exemple, de revivre autant de délices. Après ça, nous avons discuté en fumant une cigarette, nus, dans le salon. Je savais que mon sommeil allait être profond et enveloppant. Mais une fois retournés au lit, il a voulu remettre ça. Un seul baiser lui suffisait pour le refaire bander comme un cerf. Or, moi, après un orgasme, il ne faut plus me toucher, mon sexe devient hypersensible, le moindre effleurement me fait sursauter et ensuite il me faut plusieurs heures pour retrouver du désir.
Certains prétendent que l’amour ne dure qu’un temps, d’autres affirment même qu’il ne peut dépasser trois ans. Je t’ai toujours dit que je ne partageais pas cette opinion, je pense que l’amour, au risque de t’apparaître grandiloquente, ne s’achève qu’avec la disparition du survivant d’un couple. Je t’ai aimé avant de te connaître, convaincue que tu existais, je t’ai cherché. Je savais que, quel que soit le temps que cela prendrait, je te trouverais. Je t’aimerai jusqu’à ce que je m’éteigne, cela ne fait aucun doute. Si j’aime être avec toi, ce n’est pas ta présence que j’aime, c’est toi. Ce ne sont pas tes qualités, ce n’est pas ce que tu m’as donné, ce n’est pas ton sourire, tes mains, ta démarche, ton odeur, ton sexe, l’éclat de ton rire, le timbre de ta voix, la clairvoyance de ta pensée, ta curiosité...
J’ai vingt-huit ans et je suis très jolie. C’est pas que je me la pète mais une belle jeune femme sait très bien les pensées qu’elle suscite chez un homme. Et ce que je provoque chez eux me touche. Même quand ils sont laids ou vieux. Surtout quand ils sont laids ou vieux. Mes voisins savent qu’ils ne coucheront jamais avec moi, mais je suis certaine qu’ils y pensent. Il ne me viendrait jamais à l’idée de descendre mes poubelles en espadrilles trouées et en vieux pull trop large. Ils font rarement l’amour, ces types-là, alors il faut pas les décevoir, il faut être fraîche et attirante en toute circonstance. Quand on sonne chez moi, je vérifie ma chevelure et me repasse un peu de rouge sur les lèvres, ça mange pas de pain et ça peut faire que plaisir. J’essaie toujours de leur donner de quoi rêver un peu à mes petits bonshommes.
Le monde est à moi et tel que je veux qu’il soit, je n’ai pas de contradicteur et je le réinvente comme une petite fille décide du sort de ses poupées. Je suis libre. Même mes amants ne s’en doutent pas. En six ans, j’en ai eu quelques-uns, trois ou quatre chaque année, ce n’est pas mal pour mon âge. Toute ma vie est organisée autour de ce mensonge. Si je dîne chez des amis ou en famille, je ne bois pas plus que ce qu’il est convenu de boire, j’attends qu’on me resserve mais ne demande jamais que l’on remplisse mon verre. Je sais qu’une bouteille m’attend à la maison, c’est d’ailleurs ce qui donne toujours un peu d’excitation à mes retours. Parfois, je m’en frotte les mains dans ma voiture. Quand, il y a deux ans, un homme est resté six mois dans ma vie, il ne s’est aperçu de rien.
Lorsqu’on aime, on accueille chez soi tout ce qui donnera envie de mettre cette personne dehors. Pas d’amour sans enlisement. Nos dérèglements sont les fruits de ceux de nos parents, qui ont eux-mêmes subi ceux des leurs, et nous ignorons toujours quelle épaisseur nous transmettrons à nos enfants. Il n’y a pas d’amour léger et la douceur des soirs de juin ne dure pas. Pourtant, l’amour est une boue aurifère dont on peut tirer toute la lumière et la richesse que chaque homme est en droit d’attendre de la vie. Mais il est parfois impossible de se sortir les jambes de cette fange qui nous aspire. Et puis, vient un temps où l’on n’a plus la force de lutter, et on se laisse descendre, lentement, doucement, dans cet abysse humide, gras, collant et nauséabond.
La communauté du prix Orange du livre a récompensé "Un silence de clairière", de David Thomas (Albin Michel), roman choisi parmi une sélection de 6 ouvrages découlant d'une pré-sélection de 35 livres.