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EAN : 9782818054918
208 pages
P.O.L. (18/08/2022)
3.61/5   31 notes
Résumé :
Car à vrai dire, en cette chaude journée parmi les premières du mois de septembre, il n'y a guère que moi à traîner sans raison dans les parages.
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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« L'eau des ornières a gelé, des primevères jaunes ou mauves fleurissent par endroits, et sur le ciel encore teinté par le lever du jour se profile la silhouette des tours de la Défense, ou celle du mont Valérien. À l'entrée de Chanteloup-les-Vignes, quand on vient de Maurecourt par les chemins, la sente des Beaunes côtoie ce qui doit être le dernier vestige de cette culture à laquelle la ville doit son nom : vestige si précieux qu'en dépit de sa taille très modeste on y a mis pas moins de deux épouvantails, l'un et l'autre anthropomorphes. Et c'est de là aussi que se voit pour la première fois le château d'eau dominant le site de PSA, ou de Stellantis puisque c'est désormais le nom de cette marque d'automobiles. Bien qu'il soit situé sur la rive opposée de la Seine, il semble s'élever de la plaine nappée de brume qui s'étend à l'intérieur d'un méandre entre Chanteloup-les-Vignes et Carrières-sous-Poissy ».

Jean Rolin doit avoir la bougeotte. Pendant les confinements, alors que beaucoup d'entre nous s'étaient assignés à domicile où sa proximité immédiate, il a décidé de chercher et de suivre les limites entre ville et campagne tout autour de la région parisienne. Il n'y a pourtant pas, semble-t-il, de frontière vraiment établie entre ces deux univers. L'auteur est revenu sur des sites déjà découverts quelques mois plus tôt et qui pourtant avaient changés, les accès et les usages de ces terres étant fluctuants.

Les noms de lieux et de rue sonnent comme une litanie dans ce récit. Jean Rolin est sensible à la nature, la faune et la flore mais aussi aux cultures agricoles plus ou moins bien entretenues qui se maintiennent dans cet environnement pollué. Les lignes de haute-tension, les dépotoirs sauvages, les bâtiments parfois laissés à l'abandon et squattés, les zones commerciales interminables, les chemins privés jamais évidents à trouver et à franchir, tout cela forme un texte puissant mais tout de même répétitif. Quelques rencontres d'humains émaillent les jours et les mois, mais pas toujours pour le meilleur !

Je n'ai pas vraiment retrouvé le ton de « Les événements », du même auteur, qui est un roman. Cette veine plus vagabonde, il l'avait déjà apparemment dans « le pont de Bezons », que je n'ai pas lu mais dont quelques belles critiques sur Babelio donnent un avant-goût. Je reconnais un beau talent de littérateur à Jean Rolin. Et finalement le sujet importe peu, il m'a intéressé avec ces paysages ravagés, ces friches…
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Quelle mouche a piqué Jean Rolin de vouloir traverser Bondoufle, paisible ville de la banlieue au nom sympathique, plaisant, joyeux, presque même ridicule et qui n'incite pas trop au sérieux ? Il ne faut pas trop compter sur l'énigmatique 4e de couverture pour répondre à cette question : « Car à vrai dire, en cette chaude journée parmi les premières du mois de septembre, il n'y a guère que moi à traîner sans raison dans les parages. »
Et pourtant, tout est déjà là, ce style inimitable mêlant intelligence et élégante ironie, cette invitation à suivre les pas de ce grand voyageur au regard malicieux et acéré.
Avec un titre pareil, on pourrait imaginer un conte de fées ou la réécriture du périple de deux convoyeurs de viande, mais qui transporteraient cette fois des nains de jardin. Féru cependant des écrits de l'auteur, j'ai bien vite oublié ces hypothèses qui n'étaient que jeux d'esprit et dès les premières pages, l'écrivain nous explique que « du moment où [il a] découvert la campagne à la périphérie d'Aulnay-sous-Bois, (…) l'idée [lui] est venue de suivre tout autour de Paris sa limite. » "La Traversée de Bondoufle" décrit ainsi un itinéraire qui décrit lui-même une grande boucle autour de Paris pour essayer de trouver la limite, même incertaine, entre la ville et la campagne, voir ce qui s'y passe, ce qui la caractérise, quel genre d'activités ou de personnes on y trouve. Autant dire que le projet pourrait sembler vain ou mineur en raison du développement continu des villes au détriment de la campagne. Mais cette situation ne rebute pas Jean Rolin, bien au contraire. Équipé de bons godillots, d'une carte IGN et d'un carnet de notes, il va avec méthode et persévérance suivre cette ligne de démarcation. Il ne ménagera pas ses efforts pour coller à sa ligne imaginaire, il fera des détours, reviendra, repassera pour décrire un réel certes peu spectaculaire, mais ce faisant il redonnera une consistance à des territoires négligés avec acuité, ironie et nostalgie.
Dans l'arsenal de notre randonneur affuté, la carte IGN au 1/25000e est un accessoire vital pour trouver son chemin dans le labyrinthe de la banlieue ou pour se justifier auprès de riverains suspicieux. J'adore moi-même me plonger dans les cartes, en étudier la toponymie et j'ai régulièrement consulté Google Maps pour suivre la progression de l'auteur. En la levant haut et en l'agitant, la carte IGN, tel un bouclier, protègera même Jean Rolin d'une éventuelle balle perdue en signalant sa présence auprès de chasseurs de sanglier. le carnet de notes est également indispensable pour ne pas oublier les petits détails, mais il peut prêter à malentendu. C'est ce qui arrive à notre infatigable marcheur lorsqu'il le sort devant un food truck et que les clients présents le prennent alors pour un inspecteur du confinement. Cette aventure m'a amusée, tout comme celle clownesque du petit chien qui le poursuit ou celle burlesque du barrage de gendarmerie qui l'oblige à se réfugier dans une cour de ferme. J'ai bien aimé le récit de ces péripéties pas très dramatiques dans lesquelles Jean Rolin ne se prend guère au sérieux.
J'ai bien aimé également les rencontres anodines, mais malheureusement peu nombreuses qui émaillent le récit. Jean Rolin traverse des paysages plutôt délaissés et les rares rencontres humaines apparaissent comme des bizarreries : des cavaliers jouant au polo, un jardinier kabyle fier de sa production de légumes, un propriétaire terrien agressif recevant le sobriquet de « Marquis de Carabas ». Les rencontres animales ne sont pas en reste avec dès les premiers pas, des lapins, beaucoup de lapins qui nous valent cette facétieuse première phrase : « Lorsque Dieu a créé le lapin, s'attendait-il à ce qu'on le retrouve si nombreux, de nos jours, à Aulnay-sous-Bois ? ». Plus loin, ce sont des alouettes, des éperviers, des hérons, des rossignols, des poules, des vaches, des chevaux qui tous à leur manière indiquent la limite entre ville et campagne.
En outre, le projet de Jean Rolin nous offre la description un peu répétitive des paysages uniformes de cette frontière. On y voit pêle-mêle des champs, des prairies, des forêts, des routes, des ponts, des tunnels, des voies ferrées. Les nombreuses plates-formes logistiques, l'extension des zones pavillonnaires ou des décharges si hautes qu'elles sont « en forme de ziggourat » en disent long sur nos nouveaux modes de vie. Brisant cette monotonie, des lieux de mémoire surgissent au détour d'un bois, une église, un château, des installations militaires désertées, des propriétés à l'abandon. Ailleurs, une ZAD et une ferme avec le slogan « Des légumes, pas de bitume ! » témoignent de luttes et de l'évolution de la frontière ville-campagne au détriment de cette dernière.
Confronté à cette évolution, j'ai souvent senti de la nostalgie dans la prose de l'auteur. Les chapitres s'ouvrent fréquemment avec enthousiasme sur une nouvelle journée, mais finissent avec mélancolie devant le constat d'une humanité qui grignote ou détruit petit à petit son milieu naturel. Heureusement, l'humour pince-sans-rire de notre increvable randonneur pimente le récit de son aventure, lui qui n'a pourtant rien d'un aventurier.
Dans l'ensemble, j'ai aimé cette "Traversée de Bondoufle" même si le texte m'a semblé moins prenant ou moins varié que "Le Pont de Bezons", mais je recommande tout de même à tous les lecteurs qui ont une âme d'explorateur des territoires ordinaires.
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Jean Rolin, écrivain-arpenteur, nous entraîne ici dans un périple sur les franges de la région parisienne, dessinant de saut de puce en saut de puce un circuit dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, sur cet hinterland - ou plutôt arrière-ville - indécis qui n'est plus la ville, mais qui n'est pas encore la campagne. Se succèdent terrains vagues, décharges illégales, entrepôts, aérodromes, terrains militaires plus ou moins abandonnés, zones humides, champs de colza ou de tournesol, camps de Roms, endroits louches, et surtout des routes qu'il faut traverser. On y croise quelques humains, peu, et des animaux, avant tout des oiseaux
Cette promenade devient à la longue un peu monotone. le style sauve l'ouvrage, froid, sec, précis, classique, à peine teinté d'humour pince sans rire. Un style parfait. Trop parfait.
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Deuxième livre de voyage à pied en temps de confinement. Après le Pont de Bezons, publié en 2021, qui racontait des escapades de l'auteur le long de la Seine entre Mantes et Melun, le nouveau Jean Rolin quitte la ligne du fleuve pour adopter une figure circulaire autour de Paris. La première et la dernière page se situent ainsi au même endroit.

La Traversée de Bondoufle ne raconte donc nullement une traversée, et ne se passe pas à Bondoufle (commune de l'Essonne), c'est la magie des titres. Il se passe dans les communes d'Aulnay-sous-Bois, de Gonesse, du Thillay, de Bouqueval, de Villiers-le-Bel, de Garges, d'Écouen, etc.

Le but est de suivre la limite entre la ville et la campagne. Faire le tour de Paris d'une manière psychogéographique : suivre la ligne qui marque la fin de Paris. Marcher sur la zone qui opère le passage de l'urbanisation parisienne à la campagne française. le projet n'est pas nouveau mais il reste intéressant et surtout, c'est un régal de lecture.

Pour parler de ce livre, on est tenté de dresser un inventaire de tout ce que le marcheur rencontre et voit : des champs de maïs, des camps de Roms, des fermes, des cèpes, des prisons, des mosquées, des décharges sauvages, des chemins aux noms incroyables, des chasseurs qui forcent le narrateur, pour ne pas se prendre une balle, à traverser un champ en chantant comme un dément.

La plupart des lieux traversés, Rolin y est allé deux fois bizarrement. Il ne cesse d'écrire « la première fois que suis entré à … » ; « le fait est qu'un an plus tard, dans les premiers jours d'août 2020, repassant par le même chemin, je constaterai que … » (38) ; « Après deux tentatives de sortie de Cergy par la campagne … » (70). Ces dédoublements fantomatiques ajoutent à l'ambiance globalement mystérieuse et presque fantastique de la Traversée de Bondoufle. On sait que tout est vrai, vérifiable, et pourtant tout est nimbé de poésie diaphane.

Le narrateur est seul (sauf quand il retrouve la mystérieuse "Celui des Ours" qui l'accompagnait dans le précédent récit). Il est souvent seul, parfois invisible et parfois clownesque, burlesque et objet de moqueries. Certaines scènes sont dignes du cinéma muet. Par ailleurs, si l'auteur n'a peur de rien quant à son style, le narrateur a toujours peur qu'un malheur lui arrive, qu'un délinquant l'agresse, qu'une chienne lui morde les mollets. La raison de cette peur est toujours la même depuis les premiers livres de Jean Rolin : il n'a rien à faire là, ceci n'est pas un territoire touristique, ni un chemin de randonnée, il peut gêner par sa seule présence. En témoignent les mots qui figurent sur la quatrième de couverture.

"Car à vrai dire, en cette chaude journée de septembre, il n'y a guère que moi à traîner sans raison dans les parages." La Traversée de Bondoufle, quatrième de couverture.

Chaque court chapitre est un délice de lecture, tout à l'heure j'ai dit régal de lecture, ce n'est pas tout à fait pareil. C'est le style, le phrasé de Rolin, qui fait toute la différence, c'est pourquoi on ne peut pas en dire grand-chose d'intéressant. Il faut citer ces moments où l'on se prend à rigoler à propos de chevaux et de haras :

"… la traversée d'un cavalier. Lequel m'accusa au passage d'avoir fait peur à son cheval, mais sur un ton si outrageusement snob qu'il ne pouvait s'agir que d'une parodie. En m'éloignant dans la direction de Poissy sur le chemin de la Bidonnière, je ruminais l'incident minuscule qui venait de se produire, me demandant si le cavalier avait effectivement voulu rire en s'adressant à moi sur ce ton." La Traversée de Bondoufle, p. 94-95.

C'est ainsi qu'est dressé le portrait d'une France périurbaine qui ne manque pas de charme, qui est un peu dégueulasse par endroits mais qui n'est pas à feu et à sang. Une France où l'on ne rencontre pas grand-monde, au fond, et où les animaux prennent bien plus de place que les humains.

Jean Rolin se fait arpenteur de la limite ville-campagne sans juger, sans fermer les yeux sur les choses désagréables, politiquement incorrectes, mais en essayant de ne pas tenir de discours politique sur les évolutions du pays et de ses territoires. Certains y verront la preuve que le « grand remplacement » est bien en marche, d'autres que le pays est en paix et plutôt harmonieux. Voyez les toutes dernières lignes :

"Dans les jardins se voyaient des cerisiers dont certains étaient chargés de fruits, une circonstance assez rare, cette année-là, en raison des gelées tardives. Et toujours une grande abondance de roses. En approchant de ce bois que la carte au 1/25 000e désigne comme le bois d'Amour, il me sembla entendre des coups de feu, puis j'observai le vol ondulé d'un pic-vert. En contrebas de la route, juste avant le bois, un chemin que je n'avais pas encore emprunté filait droit au milieu des blés." La Traversée de Bondoufle, p. 201.

Lien : https://gthouroude.com/2022/..
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Durant neuf mois entre confinement et "liberté", Jean Rolin parcourt le tracé qui sépare ville et campagne en Ile de France, une ligne circulaire d'Aulnay sous Bois à Aulnay. Versailles, Fontainebleau, Barbizon, belles forêts franciliennes ? Pas du tout, exit les lieux touristiques. Il s'agit plutôt de parcourir cette frontière à partir de gares RER improbables et de mettre en lumière des confins, un no man's land, des lieux dont on ne parle jamais. Dans cette entreprise descriptive, de nombreuses communes, lieux, noms de rues sont cités, Bondoufle en est un exemple retenu pour titre en raison de son nom original.
Des marches à travers des champs, des lieux abandonnés, des carrefours, décharges, plateformes logistiques, pavillons, rien de bien palpitant direz-vous, eh bien non. L'auteur redonne vie à ces lieux, leur donne une existence littéraire, crée du Beau, de la poésie avec du laid ou du banal même s'il peut aussi être surpris par des enclaves rurales, des champs fleuris, une faune et flore belles et surprenantes dans ces lieux.
Peu d'action mais cette description d'une ligne floue, en évolution permanente entre bâti et non bâti dit beaucoup de l'évolution de notre société : désindustrialisation, traitements des déchets, pauvreté (camps roms, travailleurs de plateformes logistiques).
On peut suivre son périple ou une partie grâce à Google maps ou une carte IGN comme l'a fait l'auteur.
J'aime beaucoup ce concept de tirer un objet littéraire, du beau ou au moins du charme avec du banal ou des lieux éloignés des centres de pouvoir ou de tourisme. Loin de la France AAA étudiée par Jérôme Fourquet.
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critiques presse (5)
Telerama
04 novembre 2022
L’occasion de retrouver ce style passionnant et cet humour laconique, qui le rendent irrésistible.
Lire la critique sur le site : Telerama
LeFigaro
13 octobre 2022
L’écrivain voyageur, passionné par la topographie minuscule, convie le lecteur à un va-et-vient parfois brutal entre l’urbain et le rural, le beau et le laid, l’intemporel et l’actuel.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Bibliobs
28 septembre 2022
Mais dans « la Traversée de Bondoufle » (quel titre !), le prix Albert-Londres de « la Ligne de front » a aussi un vrai sujet : localiser la frontière souvent incertaine qui, dans la région parisienne, sépare la ville de la campagne
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LesInrocks
27 septembre 2022
On a toujours un plaisir immense à lire l’inlassable marcheur et merveilleux écrivain qu’est Rolin.
Lire la critique sur le site : LesInrocks
Marianne_
01 septembre 2022
Le romancier français Jean Rolin a été l'un des précurseurs d'un style de récit et d'écriture, désormais foisonnant, qui s'attache aux territoires urbains et périurbains de manière quasi-documentaire. Sa nouvelle destination : cette zone floue où ville et campagne jouent des coudes et se mêlent de façon parfois confuse.
Lire la critique sur le site : Marianne_
Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Sur le segment de la "voie verte " qui relie le quartier de la Coudraie à celui de la Maladrerie, une autre vanesse, de l'espèce dite vulcain, vint se poser sur le quatrième bouton de ma chemise en partant du col et s'y maintint pendant plus d'une minute, ailes déployées, alors même qu'après mettre arrêté un instant pour mieux l'observer (en me dévissant le cou) je m'étais remis en marche.
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Quiconque emprunte la ligne D du RER entre les gares de Garges-Gonesse et de Villiers-le-Bel-Gonesse-Arnouville ne peut manquer de remarquer ceci : en contrebas de la voie, du côté droit, entre les HLM de Garges et les pavillons d'Arnouville, s'étendent des prairies, baignées par un cours d'eau aux berges cimentées, dont on aimerait pouvoir écrire qu'elles sont pues par des vaches, comme c'est le cas, si le dictionnaire ne nous assurait que ce participe passé du verbe paître n'était utilisé qu'en fauconnerie (d'ailleurs, à tout prendre, je préférerais écrire que ces prairies sont paissées par des vaches, plutôt que pues : sans compter que là où paître fait défaut, on a aussi la ressource de se tourner vers pâturer). Enfin toujours est-il qu'il y a des vaches, tout un troupeau, et déployées, quand elle sont de sortie, sur toute la surface de ces prairies, comme une force d'interposition des Nations unies entre deux territoires occupés par des parties en conflit.
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De manière imprévisible, sitôt que l'on avait tourné le coin de ce bois et que l'on atteignait, sur le versant opposé de la colline, les parages de la ferme de Montaubert, on découvrait un panorama à la fois splendide, à certains égards, et consternant : splendide parce que la Butte de Braseux, distante peut-être d 'un kilomètre et occupant la plus grande partie du paysage, pouvait apparaître comme une sorte de pyramide à degrés, un peu aplatie et démesurément étendue, sur les pentes de laquelle, à différents niveaux, s'activaient de diligents archéologues. Consternant, parce qu'un second examen, corroboré par la lecture de la carte, révélait qu'il s'agissait en réalité d'un "centre d'enfouissement technique", c'est-à-dire d'une montagne de déchets, flanquée d'ailleurs d'une énorme usine de traitement de ces mêmes déchets, ou plus vraisemblablement de déchets d'une autre sorte.
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Dans la dernière partie du chemin de Pissefontaine, le 26 janvier 2021 en fin de matinée, celui-ci était creusé de profondes ornières, recouvertes d’une couche de glace assez épaisse pour qu’on ne pût la briser qu’à l’aide d’un caillou, et encore fallait-il que ce caillou fût assez gros et lancé avec assez de force : c’est ce à quoi je me suis employé quelque temps avec succès et en y prenant un vif plaisir, spécialement quand l’impact de mon projectile, en même temps qu’il soulevait dans la flaque un nuage de boue, faisait se propager de grosses bulles sous la couche de glace qui les retenait prisonnières. Dans un extrait de son journal daté du 4 février 1936 et publié dans le premier volume de ses œuvres complètes aux éditions Ivrea, j’ai découvert récemment que George Orwell n’avait pas craint de s’adonner à ce même jeu et de le rapporter en ces termes : « Passé un bon bout de temps à lancer des pierres sur la glace. Un gros caillou aux arêtes vives glissant sur la surface produit un son exactement semblable au sifflement d’un chevalier gambette. » (Comment ne pas aimer, plus que d’autres, un écrivain susceptible aussi bien de risquer sa vie sur le front d’Aragon que de lancer des cailloux sur la glace ou de reconnaître le chant du chevalier gambette ?)
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Après avoir traversé la D 113, ce jeudi 4 février, je me suis engagé sur une route si récente qu’à cette date elle ne figure encore sur aucune carte, pas plus qu’elle n’est ouverte à la circulation, et qui a vocation à desservir le futur centre d’entraînement du Paris-Saint-Germain. Pour faire bonne mesure, et comme tout projet enlaidissant le paysage se doit de comporter un volet de « défense de l’environnement », celui-ci se targue d’aménager en contrebas de l’A 13 « des espaces naturels en faveur de la biodiversité ».
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