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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ouvrage reçu en avant-première (il ne sortira en librairie que début avril), dans le cadre d'une opération Masse Critique privilégiée, je tiens tout d'abord à remercier babelio ainsi que les éditions du Seuil pour l'envoi de cet ouvrage car sans eux, moi aussi, j'aurai oublié trop vite ou peut-être même jamais entendu parler de Letizia Storti et pourtant...

Letizia Storti est une femme d'environ 51 ans à l'époque où commence ce récit. Elle travaille, et ce, depuis près de 35 ans pour l'entreprise pharmaceutique UPSA et est très appréciée de ses collègues, notamment pour son engagement sans borne auprès ds syndicats afin de faire valoir les droits des salariés. En 2017,année de sa rencontre avec Anne Plantagenet à l'occasion du festival de Cannes pour un film dans lequel Letiza a joué auprès de Vincent Lindon et du réalisateur Stéphane Brizé. Intitulé "En guerre", celui-ci avait pour vocation de dénoncer les cruelles conditions de travail de certains salariés et notre héroïne avait postulé pour ce casting sans trop y croire au départ puis passant de simple figurante à silhouette jusqu'à avoir même des répliques dans le film, en tant que syndicaliste. Les cinq semaines qu'elle passa sur le tournage furent pour elle une révélation, un moment inoubliable, un moment où elle se sentait enfin exister et visible aux yeux des autres - non pas ceux qui la côtoient tous les jours mais de tous les autres qui la croisent, la connaissent puis aussitôt après l'oublient. Les deux femmes, Letizia et Anne, l'auteure de ce magnifique récit ont tout de suite sympathisé à Cannes, la première y assistant pour son interprétation dans le film "En guerre" et l'autre pour faire un reportage dans le cadre de son travail sur ce dernier. Puis, les conditions de travail se sont dégradée pour Letizia. Refoulée de service en servie suite suite à une fragilité extrêmement gênante et handicapante au poignet. Malgré sa reconnaissance en tant que "personnel handicapé", sa direction n'a rien fait pour lui proposer un poste adapté mais Letizia s'accroche. Elle, elle veut à tout prix travailler mais ses signaux d'alerte ne seront pas entendus.

Elle a dénoncé à mantes reprises la dégradation des conditions de travail suite au suicide d'un de ses collègues mais là encore, l'on ne l'a pas écouté. Délaissée, effacée de la mémoire de tous, elle est devenue une anonyme. Qui donc se souvient encore d'elle pour son interprétation dans le film de Stéphane Brizé, expérience qu'elle réitérera d'ailleurs quelques temps après mais où elle ne sera cette fois-ci que figurante ? Personne ! Qui se souvient de cette femme italienne et très fière de ses racines qui s'est battue toute sa vie pour le bien-être des salariés ? Personne ! Elle est devenue une ombre parmi les ombres et à travers ce récit bouleversant et extrêmement bien écrit que nous livre ici Anne Plantagenet, elle reprend vie...enfin un peu !
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Ce n'est pas un roman, c'est la vraie vie, celle des vrais gens, celle des gens vrais. C'est l'histoire d'une aventure humaine, extraordinaire, tragique.
Letizia Storti, 56 ans est ouvrière syndiquée FO chez UPSA depuis plus de 34 ans. Anne Plantagenet raconte l'histoire de cette femme, fille d'immigrés italiens, que le film de Stéphane Brizé, « En guerre », va sortir de l'anonymat des masses laborieuses en l'engageant comme figurant, jusqu'à sa disparition, rattrapée par la machine infernale d'un capitalisme cannibale et impitoyable.
Le talent de l'auteure et sa plume adroite font de cette histoire le témoignage poignant de ce combat pour la sauvegarde d'une certaine humanité que mènent chaque jour nombre de syndicalistes et son texte enterre bien des clichés ou des idées reçues sur la question. C'est là aussi tout l'intérêt de « Disparition d'une femme de 56 ans ». On ne soupçonne pas suffisamment la violence physique mais aussi psychologique qui peut sévir dans certaines entreprises.
On ne peut qu'être ému par cette femme combative qui a connu son « quart d'heure Warholien » mais finira brisée par un système cruel que dirigent une brochette d'imbéciles égoïstes, arrivistes carriéristes et autres actionnaires ignorants et cupides.
Merci à babelio masse critique et aux éditions du Seuil pour la découverte de cette auteure talentueuse et de cette histoire dramatique. C'est un livre très bien écrit, court, qui témoigne du sacrifice et de l'abnégation dont font preuve nombre de travailleurs, ces héros du quotidien.
Je recommande vivement cette lecture, c'est une leçon de vie !
Editions du Seuil, 153 pages.
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En 2017, Letizia Storti obtient un rôle de figurante dans un film de Stéphane Brizé. Elle a alors 51 ans et travaille comme ouvrière à UPSA (Union de Pharmacologie scientifique appliquée), une entreprise pharmaceutique d'Agen. Stéphane Brizé cherche des figurants ayant une expérience syndicale puisqu'il va raconter, dans En guerre, la violence du monde du travail, les dégâts provoqués par des conditions de travail dégradées et une tension qui aboutit à la division du monde syndical. Pendant le tournage, l'autrice, Anne Plantagenet, contacte Letizia Storti et d'autres ouvriers figurants, pour qu'ils lui parlent de cette aventure extraordinaire qui les mènera jusqu'aux marches de Cannes. Toute l'équipe assite à la projection du film avec l'autrice et l'équipe de tournage, dont Vincent Lindon, acteur principal des trois films que l'on connaît aujourd'hui sous le titre de la Trilogie du travail. La personnalité de Letizia a touché l'autrice. Elle la découvre attachante et pleine de charisme. Les deux femmes sympathisent, et elles resteront en contact pendant quelque temps, de loin en loin, même après cette aventure. Mais ce type de relations est fragile et rarement durable. Si Anne Plantagenet continue indirectement de prendre des nouvelles de Letizia, elles ne se voient ni s'écrivent plus. L'autrice se retrouve désemparée et se sent coupable de n'avoir pas gardé le contact avec cette femme entière et passionnée quand elle apprend sa disparition.
***
Pendant le reportage de l'autrice sur l'expérience du tournage, outre la personnalité attachante et sans concession de Letizia, des origines italiennes communes ont sans doute contribué à rapprocher les deux femmes : les deux parents de Letizia sont des immigrés italiens, comme l'étaient le grand-père de l'autrice. Cet héritage est beaucoup plus prégnant chez Letizia qui souffre encore des moqueries que subissait sa mère illettrée et handicapée par la polio. le parallèle entre les deux familles fait ressortir la différence entre le destin des deux femmes. le récit met l'accent sur certains aspects de la vie de Letizia : sa solitude, son engagement syndical, son sérieux au travail, son amour pour son fils, et l'entracte magique que constituent les auditions, le tournage du film et l'aventure cannoise. Elle s'achève d'ailleurs par une déception: malgré sa qualité et l'ovation recueillie en salle, le film ne sera pas primé. Parallèlement, nous vivons la rapide détérioration professionnelle que subit Letizia. Après la vente d'Upsa à des Japonais, les conditions de travail se durcissent malgré les promesses. Un banal accident handicape provisoirement Letizia qui est alors en butte à des pressions insupportables. La situation s'aggravera encore après la revente du laboratoire aux Américains, et Letizia finit par craquer.
***
Anne Plantagenet relate avec talent, empathie et une pointe de culpabilité la vie de cette anonyme, de cette invisible, soumise un instant à une mise en lumière passagère qui, brièvement, lui donnera l'impression d'exister autrement. Ce récit provoque, je crois, les mêmes sentiments que les films de la Trilogie du travail : une révolte devant les pratiques qui ont cours dans ce milieu. Dans le livre, à cette révolte s'ajoute une froide colère nourrie par la compassion que l'on éprouve pour Letizia, et le sentiment d'injustice ressenti s'incarne dans la personnalité de cette femme courageuse. le récit réussit à transmettre l'enthousiasme de Letizia autant que ses doutes, sa révolte et sa déception. On comprend aussi les regrets de l'autrice et la culpabilité qu'elle éprouve d'avoir laissé leurs relations se distendre, puis disparaître. Jusqu'aux lettres écrites par Letizia qui s'effaceront… Bravo pour le choix de l'illustration de couverture de Gideon Rubin qui suggère, grâce à l'échelle, à la fois le travail et la prison qu'il peut devenir.
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J'aurais préféré que ce livre soit un roman.

Mais non. C'est un récit, un témoignage de l'autrice qui raconte qui était Letizia Storti, la disparue du titre.

C'est en 2017 qu'Anne Plantagenet rencontre Letizia. Alors âgée de 51 ans, cette fille d'immigrés italiens est ouvrière dans l'entreprise pharmaceutique UPSA à Agen. Plus de trente ans de bons et loyaux services et surtout d'engagement syndical acharné pour faire valoir les droits des salariés dans l'entreprise. Une vie dans l'ordinaire et l'anonymat de la classe laborieuse.

Jusqu'au jour où elle apprend que le réalisateur Stéphane Brizé cherche des figurants pour son prochain film, « En guerre », avec Vincent Lindon. Un film en immersion dans le monde du travail ouvrier, en tension permanente et souvent violente avec la direction et l'actionnariat. Letizia est engagée pour quelques répliques dans un rôle qu'elle connaît à fond, le sien: déléguée syndicale.

C'est à l'occasion de ce tournage que l'auteure a rencontré Letizia, dans le cadre d'un reportage sur la manière dont les figurants avaient vécu cette expérience de cinéma. Les deux femmes ont sympathisé, ont maintenu le contact jusqu'au festival de Cannes où le film est présenté, puis le lien s'est peu à peu distendu.


Grâce à ce film, Letizia connaîtra son quart d'heure de gloire. Une fois les feux de la rampe cannoise éteints, elle retourne à son quotidien grisâtre, avant qu'une chute domestique amorce sa descente aux enfers : sa fracture au poignet la laisse partiellement handicapée, et le retour au travail se passe mal, puisqu'on la balade d'un poste à un autre, sous prétexte de trouver celui qui lui conviendrait le mieux. Sauf qu'on ne lui laisse jamais le temps de s'adapter et qu'on lui reproche en conséquence son inefficacité. En clair : humiliations, perte de dignité, harcèlement moral, et toute la souffrance psychique qui en découle.

Quand Anne apprend la disparition de Letizia en juin 2022, elle ignore tout de ce que celle-ci a traversé à UPSA après le festival, son accident, sa tentative de suicide, son séjour en hôpital psychiatrique. Ce qu'elle découvre alors la bouleverse et la pousse à écrire ce texte, pour lutter contre l'effacement dans lequel Letizia a glissé peu à peu jusqu'à l'anéantissement. Elle a voulu rendre chair et consistance à cette femme joyeuse et battante, dont l'engagement syndical ressemblait furieusement à une revanche à prendre sur les humiliations et le racisme subis par sa propre mère – une autre femme effacée: "Je veux savoir. Comprendre ce que j'ai raté, à côté de quoi je suis passée. [...] Je ressens un malaise grandissant à la lecture de tous ces communiqués, ces articles, ces déclarations dans la presse. J'ai l'impression qu'ils ne parlent pas de Letizia, de Letizia Storti, de sa trajectoire spécifique, de son histoire unique, de ce qui fait sa singularité et la distingue de toute autre personne. Ai-je lu quelque part que Letizia a souffert dans son enfance de voir sa mère qu'elle adorait moquée parce qu'elle ne parlait pas français et était handicapée, et qu'à cause de cela elle revendique haut et fort ses origines italiennes? Ai-je lu ou entendu qu'elle a été révoltée de voir ses parents exploités toute leur vie et que pour cette raison sans doute elle s'est engagée dans le syndicalisme dès qu'elle a obtenu un CDI? Qu'elle s'y est investie corps et âme? Qu'elle a eu un courage de dingue pour se présenter à un casting et s'est battue pour être choisie? Qu'elle aime les vide-greniers, et l'histoire, et faire du vélo, et voyager? Ai-je lu quelque part que Letizia aime la vie? Qu'elle est un peu plus qu'"une salariée", puis "la salariée" qui a tenté de se suicider sur son lieu de travail? Ces communiqués, ces articles, ces déclarations effacent son identité pour la réduire à un statut social, un geste, ce saut dans le vide, acte ultime et désespéré, objet depuis d'une tentative de récupération et d'un enjeu sordide, comme si toute sa vie devait inévitablement conduire et se résumer à cela. Comme si Letizia Storti ne devait laisser aucune autre trace de son passage sur terre qu'une silhouette qui chute indéfiniment".

J'ai lu d'une traite ce récit poignant, déchirant, plein d'humanité et d'empathie, porté par une très belle plume. Il témoigne avec beaucoup de sensibilité du destin tragique d'une femme détruite, et de la déshumanisation à l'oeuvre dans le monde du travail.

En partenariat avec les Editions du Seuil via Netgalley.
#Disparitioninquiétantedunefemmede56ans #NetGalleyFrance
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Immense merci aux Editions du Seuil et à Babelio pour cet envoi dans le cadre de la Masse critique
« Elle s'appelait Letizia Storti. Je l'ai un peu connue. Ce livre tente de lui redonner un visage et un nom. » Anne Plantagenet a magnifiquement accompli la mission qu'elle s'était assignée. En sera-t-elle consolée pour autant ?
Ce témoignage, trempée dans une encre poignante et humble, dresse le portrait de cette ouvrière au destin tragique. Un livre au style différent mais tout aussi marquant que peut l'être « A la ligne ». L'auteure rappelle les circonstances de sa rencontre avec Letizia, décrit le parcours de cette femme modeste, ses rêves, ses projets, les blessures de l'enfance et puis l'usine. Ce lieu qu'elle aime et qu'elle pense pouvoir changer, parce que la chaîne, c'est pas du gâteau. le combat syndical, elle connaît Letizia. Cet engagement qui, indirectement, l'amènera aux marches du Palais. Cannes… Son faste… La lumineuse Letizia, l'imaginaire italien en bandoulière, est autant éblouie qu'effrayée… Tomber déjà… Dans ce grand escalier. Un rêve passe. le strass s'efface et revient le stress… La dégringolade… Anne Plantegenet s'interroge… Davantage de questions mais aucune réponse… Actionnaire, ton univers impitoyable, bien sûr. Les carences de la législation du travail, peut-être. Les jalousies ? Les faux amis de F.O ? Mais, plus sûrement, le sentiment que l'on est seule. « La terre s'est ouverte, là-bas quelque part et le soleil est noir… ». Toujours ces pourquoi, ces hypothétiques parce que… A quel moment bascule-t-elle dans le désespoir, Letizia ? Quel sens donner à cet acte ? Et comme les doutes, les ombres persistent, alors, au moins, tenter de rappeler qui fut cette enfant, cette femme, cette mère, la collègue, l'amie, l'apprentie actrice… Parler de celle qui ne fut qu'une chute dans les journaux et qui était tellement autre chose. Les pages que l'auteure nous offre sont la preuve que, dans notre ultra moderne solitude, face à la dictature des chiffres, du froid profit, les mots restent un moyen irremplaçable pour combattre l'oubli… Pas les mots des réseaux, ceux de la littérature. Cette littérature, quand elle est don comme ici, qui en devient thaumaturge…
En refermant ce livre, j'ai pensé à Enzo, le fils chéri en espérant que ce livre apaisera, un tant soit peu, ses blessures.
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C'est toujours un plaisir de se voir proposer une Masse critique privilégiée. C'est encore mieux quand on est sélectionné(e) ! Mais alors quand en plus on a adoré le bouquin, c'est le jackpot !
Donc un très très grand merci à Babelio et aux éditions du Seuil.
.
J'étais intriguée par le titre et je me suis lancée. Comme l'auteure, je vais apprendre à découvrir Letizia Storti. Je vais découvrir sa vie. Il aurait mieux valu que ce soit un roman plutôt qu'un récit.....
L'auteure a rencontré Letizia dans le cadre d'un tournage où étaient recherchés des ouvriers qui serviraient de figurants. Letizia militante, élue, qui bataille au quotidien pour les ouvriers d'UPSA près d'Agen est sélectionnée. On va découvrir cette femme, empathique, joyeuse, motivée. Et on va découvrir la suite, le rachat d'UPSA, les nouvelles méthodes de RH, l'accident et la chute, lente, difficile, douloureuse.... Horrible et détestable. Tristement réel. Violemment réel. Douloureusement réel.
J'en ai pleuré. Touchée au coeur....
.
L'auteure via Letizia rend un hommage marqué aux ouvriers, souligne leurs conditions de travail, devenues pires années après années dans la recherche perpétuelle du profit. Ce livre est difficile, ce livre est nécessaire.
J'ai mesuré ma chance de ne pas travailler dans ces conditions. Et puis je me suis dit que ça ne devrait pas être une chance mais une réalité pour toute personne qui travaille.
Malheureusement, Letizia a disparu et ce livre chronique cette triste histoire.
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Une lecture à partager.
C'est la chronique d'une ouvrière invisible.
Elle le restera, malgré un film et Cannes.
Elle ne prendra corps que lorsque le sien disparaîtra.
C'est une enquête avec quelques redites,
mais un réel soucis d'écrire vrai.
L'auteure et l'ouvrière se sont rencontrées,
ont sympathisé, ont gardé un lien,
qui s'est effiloché au fil du temps ...
Cette histoire ressemble à un film de Stéphane Brizé
Ces films qui nous extirpent larmes et rages...
Brizé, qui l'a sélectionnée dans deux casting
pour interpréter son rôle à l'écran;
une déléguée syndicale...
Elle est restée attelée 36 ans
sur une chaîne d'UPSA à Agen.
A fabriquer, contrôler, emballer, expédier
ces comprimés effervescents
pour soigner nos bobos
Mordillat aurait pu écrire cette histoire..
C'est la Loi du Profit, celui des actionnaires...
C'est un récit détaillé,
soucieux de rendre hommage
à la belle personnalité de Letizia Storti.
Tout est politique dans son histoire.


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Letizia Storti a passé plus de 30 ans dans la même usine, sur une ligne de production. Ouvrière et syndiquée, elle est fière des valeurs qu'elle proclame. C'est en partie grâce à ces deux qualificatifs qu'elle participe au tournage d'un film, En guerre, et qu'elle s'épanouit. Mais la réalité la rattrape et son monde devient de plus en plus froid et sombre…

Disparition inquiétante d'une femme de 56 ans est le récit poignant d'une femme forte que l'usine a lâchement abandonné. C'est l'histoire tragique d'une ouvrière de l'ombre, que l'on oublie, que l'on efface, que l'on piétine.

Letizia vit sur Agen, seule, avec un fils architecte sur Marseille. Elle apprécie sa maison, son jardin, les sorties ciné et la routine quotidienne.
Elle travaille depuis qu'elle a 14 ans, aidant ses parents sur les terres agricoles. Elle a une vie simple, qui lui convient.

Particulièrement touchée par le thème de l'exclusion, lié à sa mère venue d'Italie à 34 ans, qui n'a jamais parlé français et handicapée par la polio dont on se moquait ouvertement, elle est engagée syndicalement et défend ses collègues chaque jour.
C'est une femme que tout intéresse et qui fuit la méchanceté de ce monde…

Jusqu'à ce que doucement, insidieusement, sournoisement, l'usine pour qui elle a donné ses jours et ses nuit la rejette. Tout ce qui la définissait s'écroule et Letizia sombre. Personne ne l'entend crier, elle n'existe plus, elle disparaît.

Disparition inquiétante d'une femme de 56 ans est une histoire d'ouvriers, d'hommes et de femmes que la pression abîme, met à terre, dans le plus grand silence. Letizia Storti a lutté toute sa vie contre l'effacement et ces pages lui rendent un hommage des plus lumineux…
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Reçu ce livre dans le cadre de l'opération " masse critique " . merci donc à babelio ainsi qu'aux éditions du Seuil .

Petit livre de 150 pages qui n'est pas un roman mais le récit , hélas véridique de la démolition mentale d'une ouvrière syndicaliste du groupe UPSA . L'émotion du lecteur grandit au fil des pages et des mésaventures de cette femme dans la défense des conditions de travail des autres salariès .

L'écriture est sobre , sans misérabilisme malgré l'effondrement du mental de Laetitia Storti qui finira par en venir au suicide .

Ce livre m'a d'autant plus touché que j'ai moi-même eu des responsabilités syndicales et ai retrouvé dans ce récit toute l'inhumanité dont peuvent être coupables les DRH d'entreprises .

Laetitia croisera sur son chemin le cinéaste Stèphane Brizé qui pour les besoins de son film "En guerre " recherchait des figurants non acteurs professionnels . Elle y fera la rencontre de Vincent LIndon et de l'auteure de ce livre .

Lecture très émouvante dont je recommande la lecture de ce moment de lutte sociale qui anéantira cette femme modeste d'origine italienne .


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Anne PLANTAGENET. Disparition inquiétante d'une femme de 56 ans.

Je remercie sincèrement Alexandrine pour l'attribution ce livre lors d'une masse critique privilégiée et les éditions du Seuil pour l'envoi du document.
Je félicite Anne pour l'écriture, le style et la présentation de cette femme au destin brisé par le mode du travail, les multinationales, le profit, etc, … Elle réhabilite cette salariée exemplaire.

Quatrième de couverture.
Marseille, juin 2022, une femme disparaît.
Elle s'appelait Letizia Storti.

En novembre 2017, l'autrice rencontre cette femme : suite à un casting, elle est sélectionnée pour participer comme représentante syndicale dans le film de Stéphane BRIZE : «  En guerre ». Bien que figurante, Letizia joue un petit rôle aux côtés de Vincent LINDON, film illustrant le monde impitoyable des travailleurs dans une usine en perte de vitesse et devant faire face à leurs licenciements et à la fermeture du site de production. C'est une ouvrière, fille d'origine italienne, qui dès l'âge de 18 ans est entrée à Agen chez UPSA, unité de production pharmaceutique du Dafalgan, de sirop codéiné, de pommades, etc.… Plus de trente cinq années de travail posté, accomplir des centaines de fois le même geste, travaillant une semaine de 5h à 13h et la semaine suivante, de 13h à 21h. Peu de distractions, une vie laborieuse, doublée par sa participation au sein du syndicat FO. Là, elle défend âprement ses collègues, n'hésitant pas à affronter sa hiérarchie, démontrant la dégradation des conditions de travail. C'est une bonne collègue, elle défend les intérêts des salariés, très active syndicalement, également bonne ouvrière, travailleuse.

Lors de sa participation à ce film, elle crève l'écran et sera contacter pour un nouvel essai ; sa joie de vivre a disparu. Letizia souffre, tant physiquement que moralement . Suite à un accident domestique, elle a du cesser son activité. Mais elle désire reprendre rapidement son travail. le médecin-conseil demande à la DRH un reclassement en temps que travailleuse handicapée. La DRH ne va pas respecter cette prescription et Letizia passera de service en service, testant de multiples taches complètement inadaptées à son infirmité… C'est une véritable descente aux enfers pour cette employée modèle, courageuse, vaillante, généreuse et pleine d'empathie pour ces collègues. Les consignes de sécurité ne sont pas respectées et les cadences de travail sont cesse augmentées. Il faut satisfaire les actionnaires au détriment des ouvriers. Un de ses collègues s'est suicidé. Burn-out inhérent aux conditions de travail. L'avenir de l'unité de production, d'américaine passe sous la coupe d'un consortium japonnais. Pour les employés, il n'y a aucune amélioration et la voix des syndicats, les relances des uns et des autres demeurent lettre morte. La fatigue, le chagrin, la hantise du licenciement dû à une incapacité mine Letizia. Elle accomplira, sur les lieux de son travail un geste fatidique ...

Anne rend dans ce récit témoignage un vibrant hommage à cette femme. Ce livre m'a bouleversé. Je l'ai lu en une après midi. J'étais très en colère à la fin de ma lecture et en larmes. J'ai laissé retombé la pression avant d'écrire mon ressenti. Je suis toujours en colère. Je suis offusquée par la façon dont les multinationales traitent ou plus exactement maltraitent la cheville ouvrière…. Ce document nous décrit, de façon magistrale un fait divers sociétal douloureux et tragique. Cette femme a disparu dans des conditions dramatiques. Je pense cependant en toute conscience. Comment, au XXIème siècle, notre société peut-elle ignorer le mal-être de ses employés, ne pas tenir compte de leur burn-out, des difficultés à suivre les cadences dues à leur vieillissement inexorable qui nous atteint tous… Ce livre document réhabilite cette femme, humble mais travailleuse. Âmes sensibles, passez votre chemin, ce n'est pas un récit pour toutes et tous. Mais il est le reflet de la dure réalité du monde du travail qui privilégie les dividendes au détriment des personnes laborieuses.... Je vous souhaite une bonne journée et la joie de découvrir une pépite littéraire que nous partagerons…
( 23/03/2024).
Lien : https://lucette.dutour@orang..
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