Me voilà bien embarrassée devant un titre qui semble faire l'unanimité mais pour lequel j'ai du mal à comprendre l'engoûment.
Le sujet et l'idée sont d'une originalité déconcertante et l'on est en droit d'attendre d'un "
Journal d'un corps" une oeuvre différente, destabilisante, grandiose. Hors, je n'en ai rien trouvé, à mon grand désespoir.
Je me suis ennuyée à mourir devant cet enfant tout ce qu'il y a de plus commun, qui happe ses muscles, se chie dessus, et qui étale le tout dans mon livre... j'avoue, j'ai le même à la maison et ça me suffit !
J'ai reconnu n'importe quel adolescent bavant devant la féminité, se réveillant en sursaut de ses rêves sensuels, pratiquant le plaisir solitaire à tout bout de champ... non pas qu'il m'ait déplu... mais bien plutôt qu'il n'a rien d'original ! J'ai aussi le même à la maison...
J'ai eu un peu honte pour ce cadre sup que se pissait sur les doigts pour vérifier la température, qui hésitait dans son débat métaphysique entre l'odeur du pet et celui du rot, et dont l'expulsion du polype m'a laissée de marbre. Je ne sais pas si j'ai le même à la maison, mais ça ne m'amuserait pas...
Enfin, je n'ai pas même vibré devant ce vieillard débordant de sagesse dont l'"agonie" n'en est pas une et qui prétend rapporter le journal de son corps là où il oublie tant de détails. J'ai eu le même à la maison, au combien plus humain que celui-ci !
L'éciture est la même du début à la fin et la plume du garçon de treize ans ne diffère pas de celle de l'homme de 70 ans ; voilà qui est bien improbable et qui retire à la beauté de ce journal. Les ficelles tendues au lecteur (car il y a des ficelles) sont tellement visibles qu'elles en sont prévisibles (la varicelle de Grégoire est annoncée dans son enfance, par exemple...). Si bien qu'aucune surprise ne m'a tenue en haleine durant ce long périple d'un corps qu'on cherche à incarner sans vraiment y parvenir.
Reconnaissons néanmoins ces grands moments de littérature dans lesquels l'on décèle la plume, si fière et si talentueuse, de
Pennac, mais celle-ci se noie entre deux saignements de nez, perdant de sa saveur et de sa beauté. Ce
journal d'un corps m'a ennuyé à mourir et n'a fait qu'encourager le mien à se manifester comme il le fait depuis plusieurs années, comme de chacun d'entre nous le fait depuis toujours.