C' est vers 1890 que Guy de Maupassant a écrit " L' Inutile beauté", il s' agit en
réalité d' un recueil contenant un ensemble de nouvelles telles que : L' inutile
beauté- Le champ d' olives-Mouche-Le Noyé-L' Epreuve-Le Masque-Un portrai
-L' Infirme-Les Vingt-cinq francs de la Supérieure-Un cas de divorce-Qui sait ?
Et c' est la première nouvelle du recueil qui donne le titre éponyme du livre .
Toutes les nouvelles citées ci-dessus ont leur importance mais je vais focaliser
et centrer mon commentaire sur la première nouvelle du recueil c' est à dire :
" L' Inutile Beauté ".
Dans cette nouvelle, il s' agit de la comtesse de Mascaret, femme très belle
et fringante qui est mariée depuis onze ans et a sept enfants .Elle est toujours dans la plénitude de sa beauté et elle veut vivre sa vie comme toute femme sans être tenue à concevoir des enfants et toujours des enfants ! Elle en a marre de cette vie alors un jour pour se venger de son
jaloux mari, elle va avec lui à une église, fait une prière et puis fait face à
mari et elle lui déclare : " IL y a un des onze enfants qui n' est pas de toi ! "
Et, lui dit, encore : " Tu ne sauras jamais lequel de tes enfants n' est pas de toi ni qui est son géniteur ! "
Alors devinait que sera l' état d' esprit de ce mari violent et jaloux ?
- Il est incompréhensible que cette femme-là ait eu sept enfants ?
- Oui, en onze ans. Après quoi, elle a clôturé, à trente ans, sa période de production pour entrer dans la brillante période de représentation, qui ne semble pas près de finir.
- Les pauvres femmes !
- Pourquoi les plains-tu ?
- Pourquoi ? Ah! Mon cher, songe donc ! Onze ans de grossesses pour une femme comme ça ! Quel enfer ! C'est toute la jeunesse, toute la beauté, toute l'espérance de succès, tout l'idéal poétique de la vie brillante, qu'un sacrifice à cette abominable loi de la reproduction qui fait de la femme normale une simple machine à pondre des êtres.
Mon Dieu, les gens pudiques vont s'indigner beaucoup! Pourquoi? Quelle est la courtisane en vogue qui n'a pas une dizaine d'amants, et quel est celui de ses amants assez bête pour l'ignorer? La mode n'est-elle pas d'avoir un soir chez une femme célèbre et cotée, comme on a un soir à l'Opéra, au Français ou à l'Odéon, depuis qu'on y joue les demi-classiques. On se met à dix pour entretenir une cocotte qui fait de son temps une distribution difficile, comme on se met à dix pour posséder un cheval de course que monte seulement un jockey, véritable image de l'amant de cœur.
– Les pauvres femmes !
– Pourquoi les plains-tu ?
– Pourquoi ? Ah ! mon cher, songe donc ! Onze ans de
grossesses pour une femme comme ça ! Quel enfer ! C’est toute la jeunesse, toute la beauté, toute l’espérance de succès, tout l’idéal poétique de vie brillante, qu’un sacrifice à cette abominable loi de la reproduction qui fait de la femme normale une simple machine à pondre des êtres.
– Que veux-tu ? c’est la nature !
– Oui, mais je dis que la nature est notre ennemie, qu’il
faut toujours lutter contre la nature, car elle nous ramène sans cesse à l’animal. Ce qu’il y a de propre, de joli, d’élégant, d’idéal sur la terre, ce n’est pas Dieu qui l’y a mis, c’est l’homme, c’est le cerveau humain. C’est nous qui avons introduit dans la création, en la chantant, en l’interprétant, en l’admirant en poètes, en l’idéalisant en artistes, en l’expliquant en savants qui se trompent
mais qui trouvent aux phénomènes des raisons ingénieuses, un peu de grâce, de beauté, de charme inconnu et de mystère.
Dieu n’a créé que des êtres grossiers, pleins de germes des maladies, qui, après quelques années d’épanouissement bestial, vieillissent dans les infirmités, avec toutes les laideurs et toutes les impuissances de la décrépitude humaine.
Il ne les a faits, semble-t-il, que pour se reproduire salement et pour mourir ensuite, ainsi que les insectes éphémères des soirs d’été. J’ai dit « pour se reproduire salement » ; j’insiste.
Qu’y a-t-il, en effet, de plus ignoble, de plus répugnant que cet acte ordurier et ridicule de la reproduction des êtres, contre lequel toutes les âmes délicates sont et seront éternellement révoltées. Puisque tous les organes inventés par ce créateur économe et malveillant servent
à deux fins, pourquoi n’en a-t-il pas choisi d’autres qui ne fussent point malpropres et souillés, pour leur confier cette mission sacrée, la plus noble et la plus exaltante des fonctions humaines.
La bouche, qui nourrit le corps avec des aliments matériels, répand aussi la parole et la pensée. La chair se restaure par elle, et c’est par elle, en même temps, que se communique l’idée. L’odorat, qui donne aux poumons l’air vital, donne au cerveau tous les parfums du monde : l’odeur des fleurs, des bois, des arbres, de la mer. L’oreille, qui nous fait communiquer avec nos semblables, nous a permis encore d’inventer la musique, de créer du rêve, du bonheur, de l’infini et même du plaisir physique avec des sons ! Mais on dirait que le Créateur, sournois et cynique, a voulu interdire à l’homme de jamais anoblir, embellir et idéaliser sa rencontre avec la femme. L’homme, cependant, a trouvé l’amour, ce qui n’est pas mal comme réplique au Dieu narquois, et il l’a si bien paré de poésie littéraire que la femme souvent oublie à quels contacts elle est forcée. Ceux, parmi nous, qui sont impuissants à se tromper en s’exaltant, ont inventé le vice et raffiné les débauches, ce qui est encore une manière de berner Dieu, et de rendre hommage, un hommage impudique, à la beauté.
Mais l’être normal fait des enfants ainsi qu’une bête accouplée par la loi.
Oh ! Regardez les yeux bleus des femmes, ceux qui sont profonds comme la mer, changeants comme le ciel, si doux, si doux, doux comme les brises, doux comme la musique, doux comme des baisers, et transparents, si clairs qu'on voit derrière, on voit l'âme, l'âme bleue qui les colore, qui les anime, qui les divinise.
Paul fournel Imagine Claudine - éditions P.O.L -Où Paul Fournel tente de dire de quoi et comment est composé "Imagine Claudine" son nouveau recueil de nouvelles et où il est question de Claudine et de Chamoison, De Maupassant et Jean-Noël Blanc, du plaisir d'écrire des nouvelles et de la page blanche, à l'occasion de la parution d'"Imagine Claudine" aux éditions P.O.L à Paris le 29 avril 2024
"Le temps passe, le village change. La ville se rapproche et Claudine devient riche.
En ville, être riche c'est aller au massage, se faire livrer à manger par de jeunes cyclistes, c'est faire les vitrines chaque jour, c'est porter une robe différente par semaine, c'est aller au restaurant quand ça vous chante, c'est arrêter un taxi d'un geste de la main.
Au village, être riche consiste à cacher son argent et à s'arranger pour donner des imaginations, des envies et des jalousies sournoises à tout le monde.
Entre les deux, Claudine hésite."
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