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Jean Starobinski (Préfacier, etc.)
EAN : 9782070317875
190 pages
Gallimard (26/05/1971)
4/5   86 notes
Résumé :
Résumé
« À l'approche de ces poèmes s'éveille une confiance. Notre regard, passant d'un mot à l'autre, voit se déployer une parole loyale, qui habite le sens, comme la voix juste habite la mélodie. Nulle feinte, nul apprêt, nul masque. Nous pouvons accueillir sans ruse interposée, cette parole qui s'offre à nous sans détour. Un émerveillement, une gratitude nous saisit : la diction poétique, le discours poétique (mais délivré de tout artifice oratoire) sont d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Je remonte le temps avec le poète. J'ai d'abord lu ses recueils les plus récents. Me voici maintenant entre 1946 ( il a alors 21 ans) et 1967.

le " je" y est un peu plus présent, notamment le " je" amoureux, mais tout en discrétion, en pudeur:

" Si tu m'aimes,
retiens-moi, le temps de reprendre souffle, au moins,
juste pour ce printemps, qu'on nous laisse tranquilles
longer la tremblante paix du fleuve, très loin "

On trouve dans ces textes de jeunesse déjà l'angoisse de la mort, et cet effacement devant la nature observée minutieusement. le choix des mots est toujours juste, précis. C'est la première partie" L'effraie" qui m'a attirée le plus.

Poète du passage, de la nuit au jour, des saisons, de la parole aussi, j'admire le souffle de ses mots, mêlés au vent, à l'air, aux oiseaux. Et aussi son attrait pour la terre, le vert, la lumière qui émerge, éphémère, pour transcender les peurs.

Ces deux vers, pour conclure, en témoignent:

" Fragile est le trésor des oiseaux. Toutefois
puisse-t-il scintiller toujours dans la lumière !"



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Quelle belle découverte poétique ! Grâce à un autre Babelionaute qui m'a envoyé ce recueil.

Il y avait longtemps que je n'avais plus eu tant de plaisir à lire un style poétique que je ne connaissais pas.

Courrez, volez, vous qui aimez des vers sans prétention, sans paillettes, épurés, sans roublardise, foncez.

J'ai beaucoup aimé.
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Philippe Jaccottet a construit une oeuvre poétique multiple, exigeante, entre doute et émerveillement.
Dans ses poèmes, il y a un accord merveilleux entre les sonorités, les images, les sentiments et les sensations.
Son langage est épuré, sans concession, à la recherche de la justesse et de la clarté.
C'est assez sombre, souvent désespéré, ce désarroi produit une émotion sans pareille.
De la très grande poésie.
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Philippe Jaccottet a reçu le prix mondial Cino del Duca 2018 pour l'ensemble de son oeuvre, ce qui m'a donné une nouvelle occasion de le relire. Étrangement – et plutôt heureusement – on ne reçoit jamais deux fois de la même manière un poème : soudain nous sommes surpris de ce qu'il nous révèle, sa richesse éclairant une pensée jusqu'alors à l'état de veille en nous, que nous n'avions pas encore ressentie et qui se présente donc à nous, comme décantée par la sensibilité d'un autre.
Rien de plus simple que de se laisser bercer par la musicalité discrète des vers de Jaccottet. Pas d'effet, une ligne fluide qui file vers une émotion qui sera à peine effleurée. Pourtant, dans le jeu des transparences et des chatoiements de la lumière, se dessine une inquiétude et une mélancolie profonde face à l'anéantissement qui attend chacun.
J'aimerais beaucoup que Gallimard offre à Philippe Jaccottet une édition digne de son talent. Bien sûr son oeuvre est parue dans la bibliothèque de la Pléiade mais pour ceux qui, comme moi, aiment tenir entre leurs mains un petit volume soigné, on rêverait d'un recueil à la manière de ceux que proposent les Éditions La Part Commune.
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Philippe Jaccottet aborde dans ce recueil des thèmes souvent douloureux: obsession de la mort, peur du vieillissement, tristesse devant la mort d'un proche... et toujours le sentiment pour le poète que les mots ne peuvent saisir au plus près les sensations, les chagrins. Mais dans cet aveu d'impuissance renouvelé, Jaccottet parvient pourtant à toucher juste. Il s'efface de ses poèmes pour parler de faits qui nous concernent ou nous concerneront tous.
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Citations et extraits (62) Voir plus Ajouter une citation
LA PROMENADE À LA FIN DE L'ÉTÉ

Nous avançons sur des rochers de coquillages,
sur des socles bâtis de libellules et de sable,
promeneurs amoureux surpris de leur propre voyage,
corps provisoires, en ces rencontre périssables.

Repos d'une heure sur les basses tables de la terre.
Paroles sans beaucoup d'écho. Lueurs de lierre.
Nous marchons entourés des derniers oiseaux de
l'automne
et la flamme invisible des années bourdonne
sur le bois de nos corps. Reconnaissance néanmoins
à ce vent dans les chênes qui ne se tait point.

En bas s'amasse l'épaisseur des morts anciens,
la précipitation de la poussière jadis claire,
la pétrification des papillons et des essaims,
en bas le cimetière de la graine et de la pierre,
les assises de nos amours, et de nos regards et de nos
plaintes,
le lit profond dont s'éloigne au soir toute crainte.
Plus haut tremble ce qui résiste encore à la défaite,
plus haut brillent la feuille et les échos de quelque
fête;
avant de s'enfoncer à leur tour dans les fondations,
des martinets fulgurent au-dessus de nos maisons.

Puis vient enfin ce qui pourrait vaincre notre
détresse,
l'air plus léger que l'air et sur les cimes la lumière,
peut-être les propos d'un homme évoquant sa
jeunesse,
entendus quand la nuit s'approche et qu'un vain
bruit de guerre
pour la dixième fois vient déranger l'exhalaison des
champs.
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Je sais maintenant que je ne possède rien,
pas même ce bel or qui est feuilles pourries,
encore moins ces jours volant d'hier à demain
à grands coups d'ailes vers une heureuse patrie.

Elle fut, avec eux, l'émigrante fanée,
la beauté faible, avec ses secrets décevants,
vêtue de brume. On l'aura sans doute emmenée
ailleurs, par ces forêts pluvieuses. Comme avant,

je me retrouve au seuil d'un hiver irréel
où chante le bouvreuil obstiné, seul appel
qui ne cesse pas, comme le lierre. Mais qui peut dire

quel est son sens ? Je vois ma santé se réduire,
pareil à ce feu bref au-devant du brouillard
qu'un vent glacial avive, efface... Il se fait tard.
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Soleil d’hiver
     
Le bas passage du soleil aux mois d’hiver
sur l’écorce des chênes à cette heure t’est découvert :
le bois éclaire, non point brûle, mais révèle,
immobile, sans trop d’éclat, sans étincelles,
tel peut-être un visage qui ne parle point
s’il affronte le défilé du temps très loin…
     
Mais, derrière, l’ombre sur l’herbe est déposée,
non point funèbre ni menaçante ou blessée,
à peine sombre, à peine une ombre, si bas prix,
payé par l’arbre à l’accroissement de son fruit,
légère peine douce elle-même à la terre,
âme de l’arbre due aux pas de la lumière…
     
Une personne en patience et paix tournée
vers l’aveuglant passage d’une à l’autre année,
ayant sa peine derrière elle, son regret,
et l’herbe néanmoins s’apprête, persévère,
l’espace semble illuminer sa loi sévère,
et l’astre tourne, monte et descend les degrés…
Le flambeau passe à peine plus haut que les tables,
plus fidèle que nul esclave à nos soucis,
taciturne incroyablement inévitable,
et nous autres avec bonheur à sa merci.
     
(pp. 80-81)
     
« L'Ignorant (Poèmes de 1952 à 1956) ».
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Les nouvelles du soir
À l'heure où la lumière enfouit son visage
dans notre cou, on crie les nouvelles du soir,
on nous écorche. L'air est doux. Gens de passage
dans cette ville, on pourra juste un peu s'asseoir
au bord du fleuve où bouge un arbre à peine vert,
après avoir mangé en hâte ; aurais-je même
le temps de faire ce voyage avant l'hiver,
de t'embrasser avant de partir ? Si tu m'aimes
retiens-moi, le temps de reprendre souffle, au moins
juste pour le printemps, qu'on nous laisse tranquilles
longer la tremblante paix du fleuve, très loin
jusqu'où s'allument les fabriques immobiles...
Mais pas moyen. Il ne faut pas que l'étranger
qui marche se retourne, ou il serait changé
en statue : on ne peut qu'avancer. Et les villes
qui sont encore debout brûleront. Une chance
que j'aie au moins visité Rome, l'an passé,
que nous nous soyons vite aimés, avant l'absence,
regardés encore une fois, vite embrassés,
avant que l'on crie"Le Monde" à notre dernier monde
ou "Ce soir" au dernier beau soir qui nous confonde...
Tu partiras. Déjà ton corps est moins réel
que le courant qui l'use, et ses fumées au ciel
ont plus de racines que nous. C'est inutile
de nous forcer. regarde l'eau, comme elle file
par la faille entre nos deux ombres. C'est la fin,
qui nous passe le goût de jouer au plus fin.
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INTERIEUR

Il y a longtemps que je cherche à vivre ici,
dans cette chambre que je fais semblant d'aimer,
la table, les objets sans soucis, la fenêtre
ouvrant au bout de chaque nuit d'autres verdures,
et le cœur du merle bat dans le lierre sombre,
partout des lueurs achèvent l'ombre vieillie.

J'accepte moi aussi de croire qu'il fait doux,
que je suis chez moi, que la journée sera bonne.
Il y a juste, au pied du lit, cette araignée
( à cause du jardin ) , je ne l'ai pas assez
piétinée, on dirait qu'elle travaille encore
au piège qui attend mon fragile fantôme.
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L'Odyssée existe dans de très nombreuses éditions, je vous recommande la traduction magnifique de Philippe Jacottet, en poche, aux éditions La Découverte.
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