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EAN : 9782330014100
224 pages
Actes Sud (02/01/2013)
3.49/5   47 notes
Résumé :
Sept ans. Le coup de fil du père tombe après sept ans de silence et c’est une sommation, une convocation. Contre tous ses instincts, Elise répond à l’appel et saute dans l’antique R5 de sa mère disparue, direction Marrakech. Entre eux qui sont devenus Deux étrangers, il y a pourtant bien plus que des kilomètres à franchir. Voyage intérieur vers l’impossible pardon des trahisons intimes et des blessures d’enfance, où même le vacarme de l’actualité ne couvre pas l’éch... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
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Lecture en janvier 2013- Relecture 19 juillet 2019

Je poursuis mes tris, rangements... je n'en vois pas le bout... Je mets de côté des ouvrages appréciés pour offrir et transmettre autour de moi, dont celui-ci, bouleversant , offrant une analyse des plus percutantes sur les "liens du sang" ! !

Le noyau de ce roman est la complexité terrifiante des rapports entre
une fille, Elise et son père... qui fut un tyran domestique... Tous les dégâts, chagrins rentrés induites par une famille totalement toxique...Un père despote, une mère trop soumise, un frère aimé, mais qui , pour se protéger, s'évade en apprenant "l'escalade", et l'amour des cimes !

"J'ai quitté mon enfance comme on s'échappe d'un pays dans lequel on a trop souffert, en se jurant de ne plus jamais y refoutre les pieds, mais c'est ce pays-là qui d'entre tous me manque le plus. "(p. 85)

Cette jeune femme, mère de famille de deux enfants, reçoit de façon inopinée un coup de fil du Maroc, de ce père redouté, au bout de plusieurs années de silence...où il lui intime l'ordre de le rejoindre avant la fin du mois, à Marrakech...
Les sentiments les plus contrastés l'habitent entre un espoir insensé et une colère ancienne impossible à calmer !!!

"Moi, je n'ai jamais réussi à voir notre père autrement que depuis ma taille d'enfant. D'ailleurs, c'est toujours en levant la tête que je le regarde. Rien de ce que j'ai fait dans ma vie ne m'a libérée de la peur que j'avais de lui. "(p. 27)

Notre narratrice prend la vieille voiture de sa mère... qu'elle chouchoute, étant le seul souvenir direct qui lui reste d'elle... Elle prend la route vers le Sud... en essayant de faire le point sur ses réminiscences avec son père... Mais le négatif, la violence , les injures paternelles restent blessantes et toujours aussi insupportables....La peur et la rancune subsistent !

Sa mère est décédée... son frère est parti, fait de l'escalade depuis qu'il est gamin, sans doute, sûrement même...pour prendre de la hauteur par rapport à ce père qu'il écarte ainsi de sa sphère...pour survivre, échapper à la terreur !


Quand elle retrouvera son père... elle se demandera quelle urgence l'a fait appeler... Il fera un geste... mais l'affection, la réparation du passé se révélera impossible...même si l'auteure tente à tout prix de trouver des traces de transmission paternelle positive... et cela sera, entre autres, la cuisine marocaine, les mets de son pays d'origine , qu'ils partagent !

"Ce sont tous les plats de mon enfance. Et ceux de la sienne [du père ]. ce sont les plats qu'il avait enseignés à ma mère en souvenir de sa vie là-bas, et nous nous mettons à les dévorer comme deux gamins affamés. Je me dis alors qu'il est possible d'habiter une terre, une langue, mais aussi une cuisine. Je me dis que nos racines à nous ne sont peut-être pas ailleurs que dans nos assiettes, en tout cas c'est ce que nous avons le mieux réussi à nous transmettre, ce qui nous reste en partage, et pour la première fois il me semble que ce n'est pas rien. "(p. 266)

Des retrouvailles qui ne colmateront pas les souffrances, les humiliations de l'enfance, les incompréhensions...mais que la narratrice tente de transformer en positif...en dépit de et malgré tout... pour continuer au mieux le chemin !!


"Pourtant l'argent ne réparerait rien. . L'argent ne remplacerait jamais un pardon non plus, mais j'étais heureuse, je ne peux pas le nier, de recevoir enfin quelque chose de sa part. Cet argent représentait toute sa vie. C'était
ce qu'il avait fait de son temps, de ses mains, de son couple, et s'il considérait que nous étions avec mon frère les personnes qui devaient en hériter, alors il nous reconnaissait comme ses enfants. Et j'acceptai cet argent, car à mon tour, je n'avais pas d'autres moyens de dire à cet homme qu'il était encore mon père, malgré tout ce qui nous séparait. (p. 270)

Une lecture très forte qui laisse des traces : un mélange de grande tendresse et de gâchis familial, désespérant...Un père admiré, détesté, effrayant...et une fille qui voudrait tant réussir à lui pardonner, à l'aimer...Notre narratrice, Elise, n'a pas le choix... Il faut qu'elle rejoigne ce père...au Maroc. Road-movie poignant qui permettra des retrouvailles aussi "impossibles qu'essentielles "!!...
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Une famille, ça peut être l'enfer et vous bousiller un individu pour le reste de sa vie.

Elise s'est construite de bric et de broc, élevée par un père toxique qui terrorisait son entourage et une mère aplatie devant le chef de famille. Un individu invivable, égocentrique, violent, colérique, intransigeant, qui a fait le vide autour de lui, et a fait vivre ses enfants dans un état permanent de stress, de rancoeur et de haine, les dépouillant de leur intégrité psychologique et physique.

Son frère a choisi la fuite mais Elise est restée retenue, ficelée comme par un élastique.
Apres des années de silence, l'appel péremptoire paternel la fait prendre le volant compulsivement pour un road movie vers le Maroc, fait de réminiscences amères et de regrets. Avec les souvenirs, peut-elle malgré tout, comprendre et pardonner à défaut d'oublier?
Oublier qu'un jour, elle avait décrété que son père ne l'aimait pas.

Ce livre est addictif sur le fond et la forme. Par chapitres courts et denses, Elise se dévoile, sort sa rage et sa peine par ses tripes, parle de transmission, de judéité, de fonctionnement familial, d'auto-destruction, de quête instinctive de bonheur dans l'enfance pour grandir en sérénité.

La noirceur est souvent fascinante, interpelle et attire. Il y a un effet pervers inexplicable, une étrangeté à aimer se voir raconter ou observer les effets délétères des comportements humains odieux. On se découvre voyeur et, quand le récit a cette qualité narrative et de plume, on ne décroche pas.

Un beau coup de coeur!
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Après sept années de silence, Elise reçoit un coup de fil de son père : "Elise, il faut que je te voie, je suis à Marrakech, je t'attends avant la fin du mois". Ce père qu'enfant elle affublait de nom de dictateur, cet homme qui a pourri son enfance, ce tyran domestique qui imposait ses humeurs et ses envies à toute la famille, ne lui demande pas de venir, il la convoque.
Et Elise obéit. Elle se met volant de sa vieille R5 en fin de vie, la seule chose qui lui reste de sa mère décédée, et elle prend la route, direction le Maroc. Peut-être devrait-elle faire comme si ce coup de fil n'avait jamais eu lieu, peut-être devrait-elle rester à Paris et tenter de recoller les morceaux avec son mari, Simon, peut-être devrait-elle s'occuper de ses fils et essayer d'aller bien, d'aller mieux...Mais au lieu de tout cela, Elise va traverser, la France et l'Espagne pour rejoindre ce père tour à tour, craint, adoré, détesté, adulé, dans le fol espoir de guérir de son enfance.


Entre France et Maroc, les kilomètres défilent et avec eux les souvenirs d'Elise : de rares moments de bonheur trop souvent obscurcis par la présence d'un père omnipotent, abusant de son pouvoir sur une épouse follement amoureuse et des enfants obligés au respect. Comment réussir sa vie d'adulte quand un pervers narcissique a bousillé votre enfance? Incapable d'aimer, ce père trimbalait avec lui les blessures de sa propre enfance et ses complexes d'adulte sans savoir les guérir, alors il insultait sa femme et terrorisait ses enfants. Mais le sujet était tabou, Jean-Pierre Amour voulait être un homme fort, sans passé. Alors Elise cherche les circonstances atténuantes en recollant les bribes de ce qui a construit son père : la mort de son père, le départ forcé d'Algérie, sa condition de juif séfarade. Au fil de son voyage, elle va prendre conscience de tout ce qu'il lui a transmis malgré tout, malgré elle et malgré lui. L'antique Renault prend son temps et quand Elise arrive dans un Maroc qui fait sa révolution de printemps, Elise sera prête elle aussi pour le renouveau.
Cette introspection qui prend la forme d'un lent road trip traite de la transmission et des liens familiaux avec beaucoup de sensibilité et de délicatesse. Poignant à certains moments, drôles à d'autres, le récit d'Emile FRECHE touche le lecteur au coeur et interroge sur l'amour, celui qu'on bafoue, qu'on exprime peu ou mal, mais dont on a tellement besoin pour grandir et pour vivre. Un coup de coeur.
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Un seul coup de téléphone de son père veuf, qu''elle n'a va revu depuis sept ans, lui somme de venir la voir au Maroc, et tout vole en éclat en une fraction de seconde !...commence alors une longue introspection pour cette jeune femme, Elise mère deux enfants, que son compagnon est entrain de quitter, et son frère si loin et détaché qu'elle ne voit plus. Elle va devoir alors entamer alors un drôle de voyage physique et mental…

Les relations filiales compliquées parfois, le passé, les histoires que l'on portent dans notre propre sac à dos et qui ne nous appartiennent pas , qui nous entravent quelques fois dans la construction de notre vie et la réalisation de nos projets., voilà l'écho de cette lecture à mes propres réflexions….

Tout est là à fleur de peau mais sans lourdeur ni pathos, l'intelligence de l'écriture est là, les sentiments dépeints avec fluidité. Pas de temps mort, les souvenirs d'enfance, les racines de ce père complexe et tyrannique replonge l'héroïne dans des états d'âme qu'elle seule essaye tant bien que mal de maîtriser; entre l'amour et la haine, that's the question !
Est-on responsable du passé de nos parents, de leur vécu? Des questions complexes qu'Elise va devoir affronter...ces retrouvailles tant désirées, va-t-elle avoir le courage d'affronter ses peurs et pardonner?

Le ton de ce roman sonne juste, la complexité des relations humaines, l'amour filial, le poids de l'éducation : un sujet universel, cette histoire semble vraie et vécue…
Après avoir refermé la dernière page du livre, cette lecture m'aura troublé et le voyage intérieur d'Elise m'aura interpellé, également bufflée par la belle sensibilité de l'auteur qui transpire dans ce roman, ce qui me donne la curiosité de continuer à découvrir d'autres ouvrages.
Je vous souhaite à tous et à tous la même émotion pour cette lecture.
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Elise n'a pas vu son père depuis sept ans. Mais dès qu'il l'appelle du Maroc, elle fonce le rejoindre. Elle prend sa vieille R5, souvenir de sa mère, pour faire la route. Au fil du trajet, on comprend bien que cette voiture est son abri, sa couveuse. Et c'est de là qu'elle nous retrace son parcours, hanté par les souvenirs d'un père brutal et non-aimant, ainsi que celui de son père, orphelin très tôt et déraciné puisque né en Algérie.

Je n'ai pas aimé ce roman.
Je n'aime pas les romans dans lesquels l'auteur ne prend pas soin de ses personnages : Tom, fils d'Elise est âgé de 9 ans... Quelques pages plus loin, il en a 11...

Je n'aime pas les romans dans lesquels l'auteur qui ne prend pas soin de son décor : Elise perçoit le bourdonnement d'une abeille qui s'affaire près d'une grappe de raisin (l'action se situe en mars)...

Je n'aime pas les romans dans lesquels l'auteur se contredit : Elise, complexée, ne veut pas montrer son corps dodu (elle préfère crever sous le cagnard plutôt que d'enlever son paréo), mais elle se fait bronzer seins nus, le jour où son père lui coupe le pouce avec la tondeuse...

Je n' aime pas les romans dans lesquels l'auteur ne prend pas soin de la construction des personnages : on apprend bien tard que son père trompait sa mère, comme si au fil des pages, Emilie Frèche se disait : "bon qu'est ce que je vais bien pouvoir ajouter là pour rendre le père encore plus moche".

Pourtant, l'auteure a fait des efforts. Elle nous a bien montré ses références culturelles (littéraire, musicale, historique, géographique). J'ai eu l'impression de lire son Bulletin de notes.
Pourtant, la cohabitation des différentes judéïtés (père séfarade, mère juive polonaise) était intéressante ainsi que la description de l'enfance du père.

Mais non, rien à faire, ce roman m'est resté complétement étranger.

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critiques presse (1)
LePoint
11 janvier 2013
Les portraits apparaissent et se diffractent à mesure qu'avance la route, au fil d'un monologue intérieur où la narratrice éprouve la fragilité de sa propre famille. Dans ce road-book sensible et prenant, Émilie Frèche confirme son grand talent de romancière.
Lire la critique sur le site : LePoint
Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
Enfant, j'éprouvais le même étonnement face à la paix des forêts de Rambouillet, de Compiègne, de Fontainebleau. Ma mère nous y emmenait parfois, certains dimanches, pour faire plaisir à Paul qui cherchait toujours de nouveaux sites d'escalade, et je n'en revenais qu'il y ait sur Terre des lieux pareils, sans tension, sans conflit, où l'on pouvait des heures sans entendre la colère des hommes, sans croiser leur regard sévère et humiliant. J'aimais marcher au milieu des arbres, j'avais le sentiment qu'ils me donnaient un peu de leur pays et j'en ressortais grandie. (p. 100)
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Moi, j'aurais adoré que, mon père et moi, nous appartenions à la même famille. Pas celle fondée par les liens du sang, du nom ou des alliances, qui ne veut rien dire, mais l'autre, celle qu'on se choisit, celle dont les membres se reconnaissent au premier coup d'oeil quelles que soient les frontières qui les séparent, langue, couleur, religion, parce qu'ils ont une sensibilité en commun, des codes, des goûts, des valeurs qu'ils seront toujours heureux de partager. (p. 74)
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Et sans doute est-ce là la pire chose qui puisse arriver à deux êtres qui se sont aimés. Ne plus se comprendre, ne plus parler la même langue. Que ces êtres soient des parents, des amis, des amants peu importe, l'inconsolable solitude est toujours la même quand on réalise qu'on est devenu deux étrangers. (p. 17)
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... je reconnais le prospectus que m'a donné la vendeuse. Je l'attrape et le parcours d'un œil distrait. Le petit texte de présentation débute par une définition de "séfarade". Il est écrit que ce mot signifie "espagnol" en hébreu, ce que je savais déjà, mais qu'il peut aussi venir de l'arabe, "safar", qui veut dire "voyage" et qui a donné safari.
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Ce sont tous les plats de mon enfance. Et ceux de la sienne [du père ]. ce sont les plats qu'il avait enseignés à ma mère en souvenir de sa vie là-bas, et nous nous mettons à les dévorer comme deux gamins affamés. Je me dis alors qu'il est possible d'habiter une terre, une langue, mais aussi une cuisine. Je me dis que nos racines à nous ne sont peut-être pas ailleurs que dans nos assiettes, en tout cas c'est ce que nous avons le mieux réussi à nous transmettre, ce qui nous reste en partage, et pour la première fois il me semble que ce n'est pas rien. (p. 266)
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Vidéo de Emilie Frèche
Rencontre en ligne du 25/10/2023 avec Emilie Frèche pour son roman "Les amants du Lutetia" (un endroit où aller, interview de Nathalie Couderc et Frédérique Deghelt)
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