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EAN : 9782914458290
188 pages
Entre Temps (16/06/2015)
4.5/5   5 notes
Résumé :
Introduction de l'édition de 1936 :
" Ce livre a vingt ans. Il parut en avril 1916. La moitié de ses pages étaient blanches. On y lisait, à la place du texte interdit, ces quatre mots :
" Coupé par la censure ". C’était la guerre ; et la guerre tue la liberté de penser, d’écrire, de juger, et même de pleurer, afin de pouvoir tuer les hommes [...] Quand le sang coule, la sagesse est proscrite, la compassion interdite et la justice reniée. [...] Marcelle... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
S'il y avait deux figures féminines du pacifisme à retenir pour la Première Guerre mondiale, ce serait l'institutrice pantinoise Hélène Brion et Marcelle Capy la journaliste née à Cherbourg d'une famille originaire du Quercy (région où elle passa la dernière partie de sa vie). Cette dernière est militante à la Ligue internationale contre l'antisémitisme dans l'Entre-deux-guerres. Notons que son pacifisme intégral la fit tomber, comme entre autres Robert Jospin et Claude Jamet, dans la Collaboration entre 1940 et 1944.

Dans cet ouvrage paru en 1916 sous le simple titre d'"Une voix de Femme dans la mêlée", avec l'autorisation exceptionnelle d'Aristide Briand (alors président du conseil), l'auteure décrit les dures conséquences de la guerre pour essentiellement la population civile. Toutefois le livre fut largement censuré (en partie pour tout ce qui touche aux malheurs des réfugiés des départements envahis), aussi l'éditeur nous propose-t-il deux calligraphies différentes afin de repérer ce qui fut lu en 1916 et ce qui fut vingt ans plus tard lorsque l'ouvrage put être publié dans son intégralité.

Marcelle Capy rassemble ses courts textes en plusieurs chapitres : "Ceux qui se battent", "Ceux qui pleurent", "Ceux qui sauvent", "Les morts", "Les grotesques", "Temps de guerre". Chaque chronique d'une unité est basée sur l'observation des activités d'un personnage principal sur qui pèsent les conséquences du conflit.
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La guerre est une affaire d'hommes qui touchent les femmes.
Ces articles sont parus dans des journaux et des revues, avant d'être une première rassemblés en volume en 1916. Une partie disparut sous les ciseaux de la censure ; en 1936, le recueil reparaît, aux frais de l'auteur. En 2015, enfin, la version de 1936 revient dans les librairies, avec dans une typographie différente, les parties censurées. Certains articles avaient purement et simplement disparus. Principalement ce qui montre les soldats allemands avec un aspect humain et ce qui peut gêner politiquement. Parce qu'après tout une femme n'a pas à se mêler de politique, ce qui fut un des arguments de la censure.
A 100 ans de distance, ces articles permettent de prendre conscience de la difficulté de vivre à l'arrière pour beaucoup : travail féminin peu développé et peu payé, séparation d'avec les enfants, peu de solidarité familiale possible en ville, mais aussi les femmes de bonne famille qui jouent aux infirmières... Des demandes sociales, de la reconnaissance de mode de vie différents comme le concubinage et la critique des embusqués prompts à vendre la vie des milliers d'hommes, surtout s'ils sont pauvres mais en refusant de voir la misère et les blessés qu'ils vont créer. Quand à prendre en compte leurs souffrances... C'est une écriture directe, incisive, parfois ironique, qui gratte là où ça fait déjà mal ; j'étais étonnée qu'il n'y ai pas plus de censure, pour le coup.
Un grand merci à Babelio et aux éditions Entre-temps pour l'envoi de ce livre !
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La réédition des articles de Marcelle Capy permet de (re)découvrir cette autrice pacifiste et féministe.

Parus la première fois en 1916, en pleine guerre, les articles de Marcelle Capy avaient été censurés et amputés de la moitié du texte. Une édition intégrale, publiée en 1936, à l'initiative de la journaliste elle-même qui sentait revenir le péril de la guerre, rétablit le texte complet avec une préface de Romain Rolland : « Ce livre a vingt ans. Il parut en avril 1916. La moitié de ses pages étaient blanches. On y lisait, à la place du texte interdit, ces quatre mots : " Coupé par la censure ". C'était la guerre ; et la guerre tue la liberté de penser, d'écrire, de juger, et même de pleurer, afin de pouvoir tuer les hommes.» L'édition actuelle, à l'occasion du centenaire de la Première Guerre, reprend cette édition.

Journaliste engagée, Marcelle Capy dénonce, en termes simples et incisifs, l'horreur et l'absurdité de la guerre : « Ils avaient vingt ans. Ils aimaient. Ils voulaient vivre. La mitraille les a fauchés. » Elle démasque avec vigueur, parfois avec ironie, le mensonge de la propagande militariste et l'hypocrisie des discours pompeux, loin de la réalité sordide, en donnant la parole aux poilus eux-mêmes : « Les Allemands? Ce sont des hommes comme les autres. » Les articles sont regroupés en plusieurs parties : « Ceux qui se battent », « Ceux qui pleurent », « Ceux qui sauvent ». Elle décrit ainsi, dans des scènes marquantes, les conséquences de la guerre sur ceux et celles de l'arrière, l'enrichissement et le cynisme des « planqués », la misère et l'organisation des soupes populaires. La situation des femmes attire particulièrement son attention : paysannes qui assument seules les travaux de la ferme, ouvrières soumises à des cadences intensives dans l'industrie de l'armement. Comme des années plus tard Florence Aubenas, Marcelle Capy va même jusqu'à s'embaucher comme ouvrière afin de connaitre les conditions de travail dans ces usines. Elle évoque aussi la détresse des réfugiés du Nord de la France ayant fui l'ennemi - comme cet homme venu de Lille à Paris qui n'a emporté, dans sa panique, que son chardonneret ou cette femme contrainte à abandonner son enfant qu'elle ne peut plus nourrir.

L'édition actuelle a fait le choix judicieux de marquer par la typographie les passages supprimés en 1916, ce qui permet de connaitre ce qui avait été jugé insupportable aux yeux des censeurs. Deux thèmes dominent : la mise en accusation des gouvernants et la lassitude, la désillusion des soldats et leurs actions contraires à la doxa patriotique. Ainsi le récit par un soldat de cette scène marquante lorsqu'il se trouve, lors d'une reconnaissance, seul face à un soldat allemand et que tous deux, désireux de vivre, décident de repartir sans tirer. Tout ce qui peut entraîner la démoralisation de la population, tout ce qui considère le « Boche » comme un homme, un égal, est jugé dangereux. Et, plus encore, lorsque c'est une femme qui s'exprime, comme le dit la censure : « Si ce livre avait été écrit par un homme, je vous accorderais l'autorisation car cela prendrait une allure politique […] Ce livre est écrit par une femme et c'est là le danger. Si nous laissons parler les femmes, où irons-nous ? "

Socialiste et féministe, Marcelle Capy espère en des jours meilleurs et exhorte les femmes à la solidarité : « Pendant que la bestialité s'est réveillée hurlante dans la chair de tant d'Européens qui se croyaient civilisés, nous, les femmes, instruisons-nous. […] Cultivons notre esprit. Apprenons. Lisons. Aimons le livre. Il nous rendra meilleures. »

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Etonnante est L Histoire. Cruelle mais fascinante jusque dans ses contradictions.

Quand Marcelle Capy publie "Une voix de femme dans la mêlée" en 1916, le texte est immédiatement censuré de moitié : A chaque texte, des phrases manquent quand ce ne sont pas directement des paragraphes ou quelques chapitres entiers. C'est la guerre, on interdit toute pensée qui peut remettre alors en cause l'effort de guerre ou le gouvernement lui-même, quand bien même le texte se fait plus lyrique que politique. le livre ne paraît du coup que grâce aux soutiens conjugués de la journaliste Séverine et Aristide Briand. L'oeuvre est réédité en 1936 face à une montée des intégristes et de la guerre aussi prévisible qu'inquiétante. Capy, fidèle à elle-même ne change pratiquement rien, précise quelques point ça et là mais il faut attendre cette nouvelle édition 100 ans plus tard (bon sang, 100 ans déjà !) pour pouvoir savourer avec le recul toute la puissance de sa substantifique moëlle. L'éditeur précise d'ailleurs entre crochets et nouvelle typographie quand le texte a été censuré.

Cette astuce génialissime permet de repérer donc précisément ce qui a pu gêner le pouvoir en place dans le livre de Capy. Il faut dire déjà qu'à la base, elle n'y va pas de main morte. On évoque la guerre de 14-18 mais pas que : toutes les répercussions de celle-ci sur les proches, à la campagne, les pauvres, les bourgeois, les orphelins, les hôpitaux... tout y est analysé et décrit avec une indignation et une colère froide qui marquent encore aujourd'hui sans mal. On peut même reprendre certains extraits de textes et les adapter à l'époque actuelle pour constater en frissonnant un peu que quelque part, certaines choses n'ont pas vraiment changé... La mainmise des puissants par exemple ou les mensonges des services de médias censés nous informer.

Tout se lit d'une traite car rien n'a pris de ride. C'est passionnant parce que l'orthographe et la langue française en 1916 puis 1936 est telle qu'on la connaît. C'est rapide car le style ne se permet que peu de descriptions. Des saynètes vives et incisives donc. C'est d'autant plus fort et marquant qu'écrit par une femme en avance sur son temps qui prônait déjà l'égalité hommes-femmes par les salaires. Enfin, c'est jouissif car pratiquement tout le monde en prend pour son grade. Si Capy sait être tendre pour les petits faits divers, les détails réhaussés qui n'en prennent que plus de valeurs, elle réserve la dérision et la bêtise aux autres : les moutons qui bêlent avec les loups, les officiers, les riches bien repus, les lâches qui sont prêts à se porter volontaire pour la guerre tout en faisant rédiger une lettre signalant qu'ils sont malades ou autre.

Capy regroupe l'ensemble de ses textes courts en plusieurs chapitres tels que "Ceux qui se battent", "Ceux qui pleurent", "Ceux qui sauvent", "Les morts", "Les grotesques", "Temps de guerre" pour finir dans les dernières pages sur un constat d'autant plus optimiste que constatable encore aujourd'hui : c'est par le livre (le livre ami écrit-elle) et donc la culture qu'on pourra sauver les gens, en forgeant les nouveaux comportements, en éduquant encore mieux face à l'horreur quelle qu'elle soit, mais aussi en y trouvant refuge. le livre, porte vers l'imaginaire, monde toujours plus vivant que la poussière du musée, oeuvre qui aide à supporter la réalité. Quoi de mieux comme conclusion en effet pour les lecteurs convaincus que nous sommes et adorateurs des livres ?
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Ce livre est paru en 1916 mais a subi la censure, de nombreux passages ont été supprimés. Il parait à nouveau en 1936 de manière confidentielle... En 2015, le texte intégral est enfin à nouveau disponible.


Introduction de l'édition de 1936 : " Ce livre a vingt ans. Il parut en avril 1916. La moitié de ses pages étaient blanches. On y lisait, à la place du texte interdit, ces quatre mots : " Coupé par la censure ". C’était la guerre ; et la guerre tue la liberté de penser, d’écrire, de juger, et même de pleurer, afin de pouvoir tuer les hommes [...] Quand le sang coule, la sagesse est proscrite, la compassion interdite et la justice reniée. [...] Marcelle CAPY

Marcelle Capy, fille de militaire, a 23 ans lorsqu'éclate la guerre en 1914. Journaliste, elle ne sacrifie pas ses convictions au profit du patriotisme de "l'Union Sacrée". Suivant le chemin tracé par Romain Rolland ("Une voix dans la mêlée"), elle développe sa pensée dans des tableaux polémistes où "la femme est le refuge de la paix".

Si vous ne deviez lire qu'un livre, enfin deux (...) sur la Grande Guerre parmi la multitude qui paraît et qui va paraître en cette période de centenaire, ce serait celui-là !

Ces textes sont une compilation des chroniques publiées par Marcelle Capy dans des journaux de l'époque. Alors, on peut se demander pourquoi une fois parus dans un magazine, ils ont subi la censure quand elle a voulu les éditer en livre... la réponse est édifiante et vient de l'organisme de censure : " Si ce livre avait été écrit par un homme, je vous accorderais l'autorisation car cela prendrait une allure politique... Ce livre est écrit par une femme et c'est là le danger. Si nous laissons parler les femmes, où irons-nous ?"

Marcelle Capy est une femme en avance sur son temps. Elle aborde de nombreux sujets : la paix, le rôle des femmes, les soldats blessés, les planqués, l'Allemagne, la guerre et ses conséquences... la vie en temps de guerre. Si parfois la manière d'écrire semble un brin désuette en 2015, le message est le plus souvent très fort ! Que ce soit sur sa vision de la guerre, du patriotisme exacerbé qui transforme l'ennemi en monstre, sur la condition de la femme... sur la nécessité de la paix.

Marcelle Capy parle d'égalité homme / femme : "À travail égal, salaire égal.". Non, ce slogan ne date pas d'aujourd'hui ! Elle parle aussi de l'union libre. Étonnant de modernité ces propos de 1916 !

Cette voix de femme dans la Mêlée apporte un témoignage fort, dérangeant, décapant parfois sur la guerre. Marcelle Capy était une sacrée bonne femme. Il fallait du courage et du culot pour oser parler comme elle l'a fait. Elle mérite que ces écrits ne soient pas noyés parmi la multitude de livres commémoratifs qui inondent les librairies aujourd'hui.

Et le 2eme livre à lire ? Et bien il paraîtra en 2016... gardez en mémoire son titre : Louise, 16 ans, prisonnière civile en Allemagne en 1914. Une nouvelle vision inédite de ce conflit dont on célèbre le centenaire, celui d'une jeune femme au mauvais endroit au mauvais moment...

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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
L’ouvrière, toujours debout, saisit l’obus, le porte sur l’appareil dont elle soulève la partie supérieure. L’engin en place, elle abaisse cette partie, vérifie les dimensions ( c’est le but de l’opération), relève la cloche, prend l’obus et le dépose à gauche. Chaque obus pèse sept kilos. En temps de production normale, 2 500 obus passent en 11 heures entre ses mains. Comme elle doit soulever deux fois chaque engin, elle soupèse en un jour 35 000 kg. Au bout de 3/4 d’heure, je me suis avouée vaincue.

J’ai vu ma compagne toute frêle, toute jeune, toute gentille dans son grand tablier noir, poursuivre sa besogne. Elle est à la cloche depuis un an. 900 000 obus sont passés entre ses doigts. Elle a donc soulevé un fardeau de 7 millions de kilos. Arrivée fraîche et forte à l’usine, elle a perdu ses belles couleurs et n’est plus qu’une mince fillette épuisée. Je la regarde avec stupeur et ces mots résonnent dans ma tête : 35 000 kg.
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Voici un fantassin dont la figure se crispe, un turco qui pour fez un turban de linges, un artilleur qui brandit un bras dont la main est partie.

Ce sont ces mêmes hommes qui passèrent aux jours de la mobilisation dans ces trains aux portières fleuries de branches, d’où montait une tempête de rires et de chants.

Ils reviennent voûtés et vieillis, graves, muets. Ils ont vu ce qu’était la guerre. Ils ne la chantent plus.
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Si une rivalité se dessina entre la main d'oeuvre masculine et la main d'oeuvre féminine, c'est parce que cette dernière ne comprit pas assez la force de l'organisation et du nombre. C'est parce que les travailleuses ne surent pas se rallier autour de la seule revendication qui devait compter : à travail égal, salaire égal. C'est aussi parce que les hommes virent en elles des concurrentes au lieu de soeurs venues au labeur par nécessité et - avouons-le - qu'ils ne firent pas toujours ce qu'il eût été désirable qu'ils fissent pour les ranger à leur côté contre le seul ennemi : l'exploiteur. Les forces étaient éparpillées, il y eut du mal pour tous. Le progrès est lent, l'ignorance si grande et l'égoïsme si puissant...
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Nous sommes des vivants et non des musées ambulants. Nous aimons la vie. Nous essayons de la comprendre, de la goûter sous ses milles aspects. Nous la regardons se jouer sur les choses, sur les âmes comme la lumière sur un prisme. Prenons les bons livres dans lesquels il y a de la vie, de la vie simple, naturelle, éternelle. Les bons livres écrits en français, sans bouffissure. Lisons aussi les bons livres des littératures étrangères. Ils nous apprendront à comprendre, à apprécier les hommes qui, bien que ne vivant pas sous notre latitude, dans notre cadre, sont des hommes tout comme nous.
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Une femme se présente au commissariat de police d'un des quartiers les plus populeux de Paris. Elle porte un marmot sur son bras. Elle vient abandonner son enfant. Réfugiée, elle a juste de quoi ne pas mourir tout à fait de faim.
-Que voulez-vous que j'en fasse, dit-elle, je n'ai même pas de lait !
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