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EAN : 9782073014924
312 pages
Gallimard (09/02/2023)
4.27/5   30 notes
Résumé :
Traduit de l'italien par Francine de Martinoir, Jean-Baptiste Para et Gérard Macé. Préface de Violaine Huisman et Gérard Macé.

Cristina Campo, qui a peu écrit, déclarait qu'elle aurait voulu écrire encore moins. Livre admirable et d'une rare incandescence, Les impardonnables réunit une part essentielle de son œuvre. Qu'elle explore les contes de fées, les Mille et Une Nuits, le chant grégorien, l'art du tapis ou qu'elle consacre sa méditation à Chopin... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Prodigieux ouvrage de Cristina Campo, je lui reconnais le style des grands mystiques, simple et profond à la fois. Sa lecture m'a beaucoup rappelé la correspondance de Simone Weil, qui a mon sens avait des qualités littéraires de même ordre, et dont j'ai appris plus tard qu'elle était l'une des principales références de Cristina Campo. Parfois, certes, les références sont un peu obscures, mais pour mon cas, ça m'a plutôt donné envie d'en apprendre plus, notamment sur les contes des Mille et une nuits, que je connais très mal. Pour ce que je connais, la sprezzatura, ou encore Marcel Proust, les raisonnements de Cristina Campo sont lumineux.
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Qui n'est pas marqué par un catholicisme traditionnel verra les rapprochements osés avec les oeuvres littéraires qui comptent pour CC, les contes ancestraux, la liturgie et le dogme catholique comme exercice abscons. Mais quelle écriture « inspirée » porte cette quête d'absolu qui « transmue sa terre en cette nature nouvelle que nous ne connaissons pas »!
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Ecriture au style précieux, un rien ridicule, empesé.
L'auteur assène avec raideur une culture superficielle et creuse.
Du coq à l'âne il y a si peu de pas qu'ils nous y mènent à chaque fois.
Je dois en ce jour être mal luné , puisque tant de lecteurs s'en sont enthousiasmés.
Je la leur abandonne de bon gré. Laissons place au lecteur suivant.
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critiques presse (2)
Telerama
09 mai 2023
L’Italienne Cristina Campo écrivait sur les poètes absolus, qu’elle admirait. Et parmi lesquels elle aurait eu toute sa place.
Lire la critique sur le site : Telerama
LeMonde
27 mars 2023
émoin unique de sa vision, Les Impardonnables (1992), miraculeuse suite d’essais illuminés par une terrible ascèse intérieure, où se condense sa vision, toute rilkienne, du secret littéraire.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
AVEC DES MAINS LÉGÈRES

Du mot italien sprezzatura, nous trouvons dans les dictionnaires plusieurs définitions différentes, très belles et très vagues, le noble substantif n’ayant pas de synonyme ou d’équivalent. « Franchise, aisance », suggère le Fanfani, « le contraire de l’affectation et de la préciosité, ce qui parfois aide la beauté. » Le Zingarelli, qui restitue au mot son blason intellectuel, y voit « une manière négligente de faire ou de dire », la sprezzatura étant « le propre d’un maître sûr de lui ». Le Petrocchi le classe, c’est une évidence, parmi les comportements typiques de l’aristocratie : « sprezzatura aristocratique », mais le restreint, non sans admiration, aux attitudes volontaires : « manière pleine de négligence magistrale ». Il en déduit un axiome discutable : « La sprezzatura est un art. » Parmi tous ces dictionnaires, merveilleux précis de clairvoyance linguistique, aucun n’oublie (comment serait-ce possible ?) la sprezzatura dans le costume qui, nous l’avons déjà dit, « aide parfois la beauté », et l’on comprend aisément que « la définition s’applique aussi aux créations de l’art et aux œuvres de l’esprit ».
...
La sprezzatura est en réalité une attitude morale qui, comme le mot, participe d’un contexte à peu près disparu dans le monde d’aujourd’hui, et qui risque de connaître une éclipse définitive. ...
Sur certains portraits — visages perdus, visages qui sous peu ne seront plus reconnaissables, et même reconnaissables seront impardonnables, tant ils s'avèrent désormais étrangers au contexte qui les entoure —, sur certains portraits encore cachés dans de vieilles demeures, on découvre cette qualité mystérieuse et légère qui, selon moi, n'est pas séparable du style.
...
La sprezzatura est un rythme moral, c'est la musique d'une grâce intérieure : c'est le tempo, voudrais-je dire, dans lequel s'exprime la liberté parfaite d'un destin, inflexiblement mesurée pourtant par une ascèse cachée. Deux vers la renferment comme un écrin l'anneau : « D'un coeur léger, avec des mains légères / prendre la vie, laisser la vie...»
...
Avant toute chose, la sprezzatura est en fait une façon alerte et aimable de ne pas entrer dans la violence et la bassesse d'autrui, c'est une acceptation impassible — pouvant à des yeux novices apparaître comme de la sécheresse — des situations auxquelles on ne peut rien changer et dont la sprezzatura décide paisiblement « qu'elles n'existent pas » — ce qui est une manière indéfinissable de les modifier. Toutefois, on ne saurait la transmettre ni la conserver durablement si elle ne se fonde pas, comme une entrée en religion, sur un détachement presque complet des biens de ce monde, une constante disposition à y renoncer quand on en possède, une indifférence évidente à l'égard de la mort, un profond respect pour ce qui est plus haut que soi et pour les formes impalpables, ardentes, ineffablement précieuses qui en sont ici-bas l'emblème. A commencer par la beauté, intérieure avant d'être visible, la noblesse d'âme qui en est la racine et l'humeur joyeuse.
...
Assimilerons-nous la sprezzatura à la géométrie délicate et féroce qui rend possible la danse de la libellule ? Ou au métronome inflexible, tierce présence toujours en mouvement dans les leçons de Frédéric Chopin, sur lequel se mesuraient impitoyablement les tendresses et les turbulences, les rubato, les tourments, l'extase elle-même et l'atroce pressentiment ? « Que la main gauche soit votre maître de chapelle et garde toujours la mesure », recommandait ce Racine du piano qui ne tolérait pas les glissando, les ralentis, les jeux de pédales, les effets de sonorité, les transports, les révolutions, les revendications. « Que rien ne transparaisse du fond de notre coeur, que rien ne soit connu de nous excepté le sourire. » Guermantes musical au plumage intact, au pied ailé, au regard « moins rêveur que spirituel et doux, dépourvu de toute amertume » — mais non d'ironie —, il appelait sèchement Scherzos les regards qu'il lui arrivait de jeter sur les ossuaires et les fosses. « Facilement, facilement », était sa maxime tandis que, promenant ses pas d'un mur à l'autre du salon, un mouchoir imprégné d'eau de Cologne sur les lèvres ou buvant à petites gorgées de l'eau de gomme pour pouvoir parler, il astreignait ses élèves à l'étude de ce traité d'ascèse, Le Clavecin bien tempéré.
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La sprezzatura, dans ses aspects les plus ancrés dans le siècle, est certainement un des traits de caractère de l'aventurier : un tempérament mercuriel, ambigu, impondérable, où persiste néanmoins la semence de la grâce.
...
On pourrait dire que la grâce est la matière première de la Grâce et sans aucun doute les saints aventuriers, les brillants héros de légende qui, d’un cœur léger, avec des mains légères, jetèrent leur vie dans l’immuable étaient taillés dans cette étoffe. Joy, largüeza, proeza – les canons de la courtoisie provençale marquèrent profondément la jeunesse de François d’Assise. Ses compagnons se souvenaient de lui comme d’un homme « prodigue, faisant commerce avec autant de prudence que de munificence, altier et généreux, léger et d’une rare audace, supérieur en grandeur d’âme, riche dans ses dons ». Dans le songe de sa conversion, il vit uniquement des symboles chevaleresques. Converti, poursuivi par les foudres de son père et cité devant son évêque, il déploya une sprezzatura éblouissante en se déshabillant en plein évêché et en jetant à terre ses vêtements. (L’évêque s’accorda admirablement à ce geste en le couvrant de son manteau.)
...
« D'un coeur léger, avec des mains légères...» Une vie pure est entièrement rythmée sur cette musique aérienne et véhémente, faite entièrement d'oubli et d'attention, de sourire et de piété. Il fut un temps où les rites, la liturgie constituaient le lieu géométrique et collectif de ces rythmes ineffables. Dans la plus simple des cérémonies d'autrefois, il y avait la grande allure de la vision : cette élégance de flamme vive, ce dialogue serré où tout se succède en tempo rubato et s'élève entre les puissances de l'âme et l'invisible, cette tombée de silences interstellaires — autre écriture du Dieu, plus pressante, qui ouvrait dans le bloc aveugle du monde mille points de fuite vers le royaume de la beauté surnaturelle : qui est le royaume des miroirs redressés et des chaînes brisées, où prendre et laisser sont une seule et même extase.

pp. 127-143
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La poésie n’aide pas à vivre si ce n’est en vertu de la pure beauté, c’est-à-dire de la nature.
...
Et pourtant j’aime le temps où je vis car c’est le temps où tout s’évanouit et que c’est peut-être, justement pour cela, le vrai temps du conte. Certes, je ne fais pas allusion ici à l’ère des tapis volants, des miroirs magiques, détruits par l’homme pour toujours dans l’acte même de les construire, mais à l’ère de la beauté en fuite, de la grâce et du mystère sur le point de disparaître, comme les apparitions et les arcanes du conte : tout ce à quoi certains hommes ne renonceront jamais, portés par une passion encore plus profonde quand cette présence semble vouée à la perte, à l’oubli. Tout ce vers quoi l’on part pour le retrouver, fût-ce au péril de sa propre vie, comme la rose de la Belle en plein hiver. Tout ce qui chaque fois se dissimule sous une carapace de plus en plus impénétrable, au fond de labyrinthes où s’exaspère l’effroi.
...
Maturité : ni fulgurations ni voix. Mais un avènement inopiné, biologique voudrais-je dire : un point que doivent toucher ensemble tous nos sens, afin que la vérité se fasse nature. Comme se réveiller un beau matin en sachant une langue nouvelle. Et les signes, vus et revus, deviennent parole.

La maturité, c’est découvrir et démêler sans relâche dans le monde, qui de toutes parts nous presse et nous sollicite (même et surtout le monde de la beauté), cela seulement qui est nôtre depuis les origines, « donc par destination ».


CONTE ET MYSTÈRE – Le Parc aux Cerfs, 2 (pp. 181-6)
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Enfance, mystère des limites illimitées. Des frontières incertaines, magnifiées par la courte stature (à l'instar des paroles magiques, lentement épelées dans le livre de contes). C'était le tertre, velouté par un rai de soleil et inaccessible aux pas minuscules, au-delà duquel devait s'étendre le pré sans pareil, la clairière de Brocéliande. C'était la grille toujours close, le boqueteau dont on ne franchissait pas l'orée, le mail interminable. C'était, pendant la promenade au crépuscule, la ruine d'un château vertigineux et statique dont les virages de la route modifiaient sans fin le profil. C'était la grotte, précisément, le présage de la mousse, le cours d'eau caché. C'était "la fin du parc"*

* Ecrit en français dans le texte.
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A quoi se réduit désormais l'examen de la condition de l'homme, si ce n'est à l'énumération, stoïque ou terrifiée, de ses pertes? Du silence à l'oxygène, du temps à l'équilibre mental, de l'eau à la pudeur, de la culture au règne des cieux. (...)
Mais la perte suprême, germe et circonférence de toutes les autres, est celle dont on ne prononce pas le nom. Il en va toujours ainsi. D'ailleurs, comment serait-il possible que des créatures, une fois mutilées de l'organe même du mystère - de l'oreille de l'âme, dirait Pasternak -, réalisent avoir perdu leur "propre destin"?
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Les cerfs enfermés dans un parc, offerts hagards et pleins de grâce aux regards distraits, ne se demandant pas pourquoi avons-nous perdu la grande forêt et notre liberté, mais : pourquoi ne nous chasse-t-on plus ?
Une jeune main parfois les caresse : "Le roi Arthur est mort, expliquent aux cerfs les enfants et avec lui les chasses et les tournois, les duels prodigieux et les saintes réjouissances. Jamais plus un cerf ne sera poursuivi par les douze Cavaliers, jamais plus on ne ceindra son encolure d'une couronne d'or. Jamais plus il n'arrêtera une meute en faisant se lever entre ses bois la croix du Sauveur, ni son corps ne sera nourriture à la cène du Saint Graal. Désormais, plus rien ne menace votre harde - et voilà, c'est de nos mains que vous recevrez votre pâture."
Les cerfs inclinent la tête. De leurs cornes massives, ils heurtent à coups légers les grilles de l'enclos. Mais la nuit une douce fièvre les prend, ils brament, ils s'appellent. Ils entendent, ou croient entendre, le cor d'Arthur. "Il n'est pas mort, se disent-ils, il reviendra. Et de nouveau notre vie sera suspendue à la pointe d'une flèche."
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Vidéo de Cristina Campo
« Cristina Campo, pseudonyme de Vittoria Guerrini (1923-1977), déclarait elle-même qu'elle avait peu écrit mais qu'elle eût aimé avoir encore moins écrit. Prise entre la fascination du silence et celle de l'expression […], elle ne pouvait proférer que des paroles exactes et rares. […] Ses réticences, autant que la brièveté de sa vie, expliquent et justifient l'économie de l'oeuvre : quelques poèmes dispersés dans des revues, deux petits textes en prose publiés de son vivant, puis une oeuvre posthume au titre énigmatique, Les impardonnables, qui rassemble des articles écrits entre 1962 et 1972. le tout tient dans un volume de taille moyenne, mais un volume qui peut se permettre d'être unique. À son propos la critique italienne a parlé de «fleur indéfinissable et inclassable». […] […] En lisant les étranges poèmes de Cristina Campo, très peu nombreux, si denses, tellement clos sur eux-mêmes qu'on les pénètre par autre chose que par la raison, on comprendra que leur auteur définisse la pure poésie, « grand sphinx au visage illuminé», comme hiéroglyphe et beauté, inséparables et indépendants. […] le lecteur se trouve en face de germes de réponses, proposées, jamais imposées, à la vaste question que pose le Livre unique de Cristina Campo : « Comment prendre le monde? » Jeune femme au corps fragile (malformation cardiaque), moitié-sainte moitié-poète, elle tente avec toute la force de son esprit d'introduire dans le concert assourdissant de notre monde le son de la flûte, sa propre voix […]. » (Monique Baccelli)
« Un poète qui prêterait à toute chose visible ou invisible une égale attention, pareil à l'entomologiste qui s'ingénie à formuler avec précision le bleu inexprimable d'une aile de libellule, ce poète-là serait le poète absolu. » (Cristina Campo, Les impardonnables)
0:00 - 1er poème 0:49 - 2e poème 1:49 - 3e poème 2:11 - Sindbad 3:01 - Été indien 3:52 - le Tigre Absence 4:22 - Générique
Référence bibliographique : Cristina Campo, le tigre absence, Éditions Arfuyen, 1996
Image d'illustration : http://outsidersweb.it/2018/03/14/un-reading-elena-stancanelli-ricordare-cristina-campo/cristina-campo-4/
Bande sonore originale : Dream Machine - Digression Digression by Dream Machine is licensed under a CC-By license.
Site : https://icones8.fr/music/search/digression
#CristinaCampo #LeTigreAbsence #PoésieItalienne
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