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EAN : 9782743622848
320 pages
Payot et Rivages (02/11/2011)
3.95/5   38 notes
Résumé :

Au temps du cinéma muet, un jeune scénariste ambitieux tente de se faire une place dans un studio hollywoodien. Mais l'irruption du parlant, l'industrialisation du cinéma et la toute-puissance de l'argent vont venir bouleverser le quotidien du studio. Entre ceux qui plient et ceux qui résistent, la guerre est déclarée. Jusqu'à la folie. Un roman noir et flamboyant, une atmosphère angoissante, à mi-chemin entre ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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"C'est ça qui est extraordinaire dans le monde du cinéma : c'est le royaume de l'illusion. Tous les jours on change l'eau en vin, le celluloïd en or massif. Pense-y, Tommy. le cinéma, c'est la magie. Et seuls les dieux font des miracles."

"Le crépuscule des stars" de Robert Bloch (que je n'ai plus besoin de vous présenter) est une pure merveille, on pourrait même le qualifier de chef-d'oeuvre pour qui aime le cinéma des années 20 (ou le cinéma tout court) ou pour qui souhaiterait le découvrir. Écrit en 1957, ce n'est que onze ans plus tard qu'il est édité. Comment un tel roman a-t-il pu rester enfermé si longtemps dans dans un tiroir faute d'éditeur ? Robert Bloch ne manque pas de nous l'expliquer en même temps qu'il nous livre la genèse de son roman dans la magnifique préface signée François Guérif (entre nous j'ai rarement lu plus belle préface) et il nous dit une chose essentielle, qui à elle seule pourrait résumer ce roman : "Le cinéma était une fenêtre ouverte sur le monde." Bien sûr, ajoutait-il : "La vision n'était pas juste mais elle correspondait à mes rêves".

Il peut être intéressant de préciser que Robert Bloch, même s'il avait déjà eu l'occasion de visiter la capitale du cinéma en 1937, n'avait jamais posé les pieds dans un studio de cinéma quand il écrivit ce roman et c'est ce qui le rend si fascinant car "Le crépuscule des stars" est avant tout un un rêve, merveilleux ou pas le lecteur sera libre d'en juger, et ce rêve c'est celui de Tommy Post, personnage principal de ce récit dont l'intrigue n'est ni policière ni horrifique, point de tueurs psychopathes à la Norman Bates dans ces pages mais seulement une belle histoire d'amour, un amour absolu, un amour fou pour le cinéma. Ici le crime est passionnel et non prémédité, un seul coupable : l'industrie du cinéma qui par son évolution va provoquer l'agonie puis la disparition du cinéma muet.

Atmosphère sulfureuse dans la cité des rêves en cette période d'âge d'or du cinéma muet, à chaque crépuscule la belle Hollywood se pare de ses habits de lumière pour une énième représentation avec un seul but : vendre du rêve, du rêve pour tous, la terre promise, un monde sans contraintes, et déjà les prémices de l'American way of life... Robert Bloch nous fait pénétrer en catimini dans les coulisses des plateaux de tournage des prestigieux studios Coronet : comment concevoir, écrire, produire, mettre en scène, diriger acteurs et actrices, choisir les costumes, construire les décors, superviser les tournages, c'est ce que nous découvrons à travers le regard de Tommy Post, le narrateur de ce récit. Tommy Post qui du haut de ses 19 ans veut sa part du rêve lui aussi et parvient à se faire engager comme porteur de scripts pour 12 dollars la semaine au sein de l'équipe du non moins prestigieux metteur en scène Théodore Harker. Nous sommes en 1922, le cinéma muet arrive à son apogée mais ce que Tommy Post ne sait pas encore c'est que très bientôt il disparaîtra, ébranlant toute la profession, laissant place à une nouvelle vague d'acteurs et à la révolution du monde parlant. En attendant notre jeune ami qui semble avoir compris ce qui fait le sel de la réussite à Hollywood ne lésine pas sur les efforts, travailleur acharné, idéaliste, il n'hésite pas à se rendre indispensable, son acharnement et son culot finissent par payer, son ascension est fulgurante : il scénarise son premier film en 1925, touche du doigt son rêve et savoure ses premiers succès en même temps qu'il rencontre ses premières désillusions amoureuses en la personne d'Aurora Powers, jeune brebis égarée et portée aux nues du jour au lendemain dans un monde dans lequel elle refuse de maîtriser les codes car ses rêves sont bien plus modestes que ceux de Tommy et surtout ils sont ailleurs, loin, très loin des studios de Hollywood. Ces deux là parviendront-ils à accorder leurs rêves ? Méfiance Tommy, si belle Hollywood réalisera tes rêves ; si cruelle Hollywood pourrait bien les briser en un claquement de doigt.

Un roman envoûtant au charme magnétique qui se déroule sur une décennie (1919-1929) dont la destinée des personnages va se jouer en même temps que l'apparition du cinéma parlant : Kurt Lozoff, Karl Druse, Théodore Harker, Tommy Post, ont tous un seul et même rêve : décrocher leur étoile à Hollywood. Un roman hommage qui ne manquera pas de nous rappeler que c'est au travers de notre mémoire, du regard que nous portons sur le cinéma que continuent encore aujourd'hui de vivre les vestiges du rêve hollywoodien et que tant que nous, spectateurs, leur permettrons d'exister : "le crépuscule des stars continuera de briller de mille feux en nous racontant comment naissent et meurent les rêves".

Je referme ce roman avec des étoiles plein les yeux, je me remémore la poésie touchante des films de Chaplin qui sans aucuns dialogues parvenaient (parviennent encore) à nous toucher de manière si unique. Je me rappelle au bon souvenir de tous ces grands acteurs qui ont marqué de leur empreinte cette époque fabuleuse : Charlie Chaplin, Lon Chaney, Buster Keaton, Erich von Stroheim, Greta Garbo... dont les ombres planent avec élégance sur l'ensemble de ce roman et je n'ai qu'un seul regret, qu'il n'y ait pas eu un vrai rôle pour eux dans l'histoire de Tommy Post.

Le soleil s'est couché ce soir dans les nuées.
Demain viendra l'orage, et le soir, et la nuit ;
Puis l'aube, et ses clartés de vapeurs obstruées ;
Puis les nuits, puis les jours, pas du temps qui s'enfuit !

Et Hollywood restera...
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Le crépuscule tombe brutalement sur Los Angeles, le crépuscule des dieux du cinéma muet, du Hollywood des Roaring Twenties. « Je cherchais en vain les personnages familiers d'autrefois: les cameramen à la casquette en arrière, les réalisateurs en leggings, les musiciens d'ambiance, les clochards barbus sur les bancs des figurants. Ils étaient soudain dépassés, anachroniques, comme les Keystone Cops. Dans quelques années, ils ne seraient plus que des silhouettes, les caricatures d'un passé lointain et imprécis. »

Ni polar, ni roman noir, comme pourrait le laisser croire la couverture des éditions Rivages, le roman de Robert Bloch se veut plutôt une chronique des débuts de la grande industrie du rêve, à travers les yeux du jeune et rêveur Tom Post, grouillot de service pour le compte de Theodore Harker, réalisateur qu'il admire. Grace à son ambition et à de bonnes rencontres au bon moment, Tom devient scénariste, monte les échelons, croise acteurs, journalistes, metteurs en scène, traverse les années et les succès, jusqu'à l'avènement du cinéma parlant, qui fera table rase du passé et transformera Hollywood en impitoyable machine à fric. Tom Post observe, apprend, passera de « l'artisanat » à l'industrie, connaîtra l'envers du décor, la banalité des vedettes au quotidien, les vices traqués par la presse à scandale, les cadavres dans les placards, les pères la morale qui commencent à mettre leur nez hypocrite dans les scénarios et la vie privée des employés des studios (Code Hays…).

La chronique s'achève dans le bruit fracassant du succès du Chanteur de Jazz et du krach financier de 1929. le Crépuscule des stars (titre français pour The Star Stalker) nous évoque le Boulevard du Crépuscule et la démence de Norma Desmond, la star déchue, au nom inspiré par le réalisateur et acteur William Desmond Taylor, assassiné en 1922, et son amie Mabel Normand, qui ne se remettra pas du scandale qu'évoque l'auteur dans le roman. C'est donc un cénotaphe élevé à la mémoire des D.W Griffith, John Gilbert, Pola Negri…. C'est un cri d'amour au cinéma muet écrit par le prolifique Robert Bloch, maitre de l'horreur fantastique, et auteur du culte Psychose plus tard adapté par Hitchcock, qui fait dire à l'un de ses personnages, avant la fermeture en fondu sur le mot Fin:
« Cela avait de la valeur, et cela en aura de nouveau, un jour ou l'autre. le jour où l'on se penchera sur les vieux films pour recréer une culture, où l'on s'en servira pour reconstituer l'histoire de toute une époque. (…) Les films muets, c'est l'Amérique, celle de la prodigieuse décade des années 1919-1929. Ils font tout autant partie de notre vie que les cow-boys et les pionniers. »
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Pas une nouveauté, loin de là !!

Écrit en 1957, ce livre ne trouva aucun éditeur aux USA et ne fut publié pour la première fois que onze ans plus tard et directement en format de poche, sous un autre titre et sous une couverture sans rapport avec le texte.

Enterrement de première classe : Un four.

Exhumé et réhabilité en 1984 en France, il put enfin sortir de l'ombre mais seulement le temps d'une éclaircie, l'éditeur bleu/blanc/rouge faisant faillite. Dur pour un roman noir !

La scoumoune.

C'est finalement en 2008 que ce crépuscule se fit enfin une place en pleine lumière, plus de cinquante ans après son écriture et sous la forme où on le trouve aujourd'hui.

Tout arrive à point pour qui…

Quand l'histoire d'un roman semble déjà en être un puisqu'on à failli faire taire à jamais un ouvrage qui parle du cinéma muet !

Un comble.

Un comble aussi quand on pense qu'en 2012, Jean Dujardin remportait l'Oscar du meilleur acteur pour ‘The artist' qui s'intéresse à ce même sujet : le fracas assourdissant que fut l'avènement du parlant pour les stars adulées du cinéma muet.

Moteur ! Ça tourne ! Action (réveille le noir et blanc)

Hollywood 1922.

Tommy Post, dix-neuf ans est un jeune homme pressé à l'ambition aussi démesurée qu'est longue une année sans travail pour un figurant au chômage en quête d'un contrat.

Tommy rêve de devenir scénariste et s'est donné deux ans pour caracoler au sommet de la notoriété !

Diantre !

Bien sûr, rapidement un hasard bien exploité va lui permettre d'appuyer sur le bouton ‘start' de sa destinée forcément fulgurante. Y aurait-il roman sinon ?

Cachés dans son ombre projetée par les lampes à arc, nous pénétrons, impressionnés, dans les glorieux studios où les tournages en cours vont bientôt alimenter l'usine à rêves en bobines de cellulose pour que tintinnabulent bruyamment les innombrables dollars aux nombreuses caisses des multiples salles obscures qui ne désemplissent pas.

L'âge d'or, ne le réveillez surtout pas.

Les archétypes des évanescents fantômes du muet qui alors faisaient se déplacer les foules éblouies et hurlantes défilent sous nos yeux ébahis, du parvenu directeur de studio dictatorial à la hautaine et vénale star aussi capricieuse qu'impénétrable (quoique), en passant par le génial acteur maudit ou la favorite catapultée star malgré son évident manque de talent et pire encore, de désir.

Tous sont là, tous !

Bien sûr notre Tommy saura tracer sa route enchantée et produire un Post Hit dont bruissera le pré carré du tout Hollywood.
Fraîcheur de vivre !

Extrêmement jeune et moderne pour un vieil ouvrage âgé de 65 ans, ‘le crépuscule des stars' aborde des thèmes encore très actuels aujourd'hui comme l'ambition démesurée, l'avidité, le harcèlement (dont sexuel, on croirait y reconnaître Harvey Weinstein), l'avortement et sa perception dans la population, le pouvoir supposé écrasant des juifs dans le monde des affaires, l'entre soi propre au milieu du 7ème art, les compromissions avec la presse, les coups de jarnac entre studios, le poids de l'industrie, de la finance et de la bureaucratie triomphantes face à la création artistique, la difficulté de mener une vie amoureuse équilibrée lorsque l'on mène un métier passion étouffant, l'heure de la retraite quand se pointe la relève…

Amusant, également, pour s'immiscer subrepticement dans l'étroit microcosme régi par les magnats des grands studios historiques, de suivre une intrigue digne d'un scénario typique des mélodrames de l'époque où les interprètes, maquillés comme des tacots volés, ouvrent des yeux ronds comme des soucoupes de tasses à café pour exprimer caricaturalement l'effroi ou la surprise.

Grandeur et décadence d'un art que la technique galopante a forcément écrasé tel un rouleau compresseur lancé dans une pente raide et qui broie, au passage, ceux qui furent adulés jadis !
Vacuité du succès et des ovations !!

Un bon roman qui n'a de noir que ce qui fait contraste avec le blanc de l'écran où sont projetés tous les fantasmes nés du mythe créé de toutes pièces pour remplir le vide abyssal des simples existences et faire naitre le rêve qui, moyennant quelques pièces, veut nous faire croire que tout est possible.

Une représentation sans concession du miroir aux alouettes qui ne peut que pâtir et tomber sur le bec après l'immense plaisir que m'avait procuré ma lecture précédente, ‘le garçon' de Marcus Malte.
Un très bon moment de lecture cependant que je dois à Sachka (Merci)
 
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Le crépuscule qu'évoque Robert Bloch dans son titre, est celui qui engloutit les stars des débuts du cinéma, l'obscurité dans laquelle sombrent ceux qui n'auront pas su négocier le passage du muet vers ce qui allait être la révolution cinématographique de la fin des années 20 : l'apparition du "parlant".

Début de la décennie en question : Tom Post est un jeune homme quelque peu naïf mais entreprenant. Cet orphelin élevé par son oncle et sa tante vit à Hollywood, où il est factotum au sein des studios Coronet, pour le compte du metteur en scène Theodore Harker. Il passe ses journées à porter des scripts et, comme tous ceux qui occupent dans cet univers mirifique qu'est le monde du cinéma une place modeste, il rêve...
Il rêve de devenir scénariste, et sa rencontre avec Kurt Luzovsky, un figurant d'origine polonaise, qui a connu une existence mouvementée, va lui permettre, peu à peu, d'atteindre son but.

Robert Bloch nous introduit au coeur de l'illusion, là où la plus insipide des actrices se métamorphose en personnage enchanteur grâce à la magie de la mise en scène, là où de simples décors de carton pâte se transforment en Colisée lorsque la caméra tourne...
Et même si, en déambulant dans ce "rêve éveillé" qu'est le cinéma, on réalise que les étoiles sont factices, que les stars sont finalement des individus comme les autres, avec leurs vices et leurs faiblesses, on ne peut s'empêcher de succomber à cette illusion, de se laisser éblouir par le tour de passe-passe qui permet à quelques hommes maîtres d'une simple technique, de transfigurer la réalité, de nous emmener ailleurs...

Avec l'arrivée du parlant, on a le sentiment que le combat qui se joue va au-delà d'un antagonisme entre nostalgiques du muet et adeptes des nouvelles technologies. C'est toute la manière de jouer qui s'en trouve bouleversée... finie la grandiloquence, les expressions surjouées pour faire passer les émotions.
Et puis, en même temps que la parole, apparaissent dans l'univers du cinéma certains éléments qui vont le transformer en une véritable industrie. Tous les studios finissent par avoir leur producteur, et un producteur n'est pas un artiste... C'est un homme d'affaires, qui coordonne, organise, et surtout qui calcule, qui réfléchit en terme de rentabilité, de bénéfice.
Les films fabriqués à la chaîne, produits de consommation sans originalité, mais dont on est assuré qu'ils satisferont au quota d'entrées, remplacent peu à peu les oeuvres ambitieuses et artistiques de cinéastes mis au rebut.

C'est un bel hommage que Robert Bloch rend là au cinéma. Et la force de cet hommage réside en grande partie dans sa capacité à recréer une atmosphère évocatrice des débuts du septième art, et à en imprégner le lecteur. Il parvient ainsi à nous faire admirer une magie dont il dévoile pourtant les ficelles et les dessous.
Ses personnages, dont certains sont si passionnés qu'ils vivent leur existence comme s'ils tournaient un film, ont l'envergure de héros de cinéma. La dynamique de son intrigue, qui fait alterner épisodes dramatiques et scènes parfois cocasses, est parfaitement maîtrisée.

Bref, un très chouette moment de lecture !
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Au temps du cinéma muet on criait simplement "MOTEUR".
Tout changea quand "SILENCE, ON TOURNE" devint la règle.

Résumé succinct:
Hollywood. 1922. Tom post est coursier sur les premiers plateaux de tournage. Par amour du 7ème art il va gravir tous les échelons de l'industrie du cinéma muet. de coursier à rédacteur des intertitres (textes insérés entre les plans ou les séquences filmés); jusqu'à scénariste en chef. de l'Hollywood des pionniers jusqu'au crack boursier de 1929, en passant par l'avènement du parlant.

L'auteur:
En 1957, Robert Bloch, jusqu'alors nouvelliste fantastique et romancier policier en devenir, écrivit le premier tome d'une trilogie qui ne vit jamais le jour dans son intégralité. Seul le premier opus parut et non sans difficultés. Aucun éditeur américain n'y crut avant 1968. le projet ne correspondait pas au profil de Bloch auprès de son lectorat.

"Si je ne devais pas gagner ma vie en faisant peur aux gens, c'est ce genre d'histoires que j'écrirais" Bloch,1979

En trois tomes ("Colossal", "Gigantesque" et "Stupéfiant"), l'ambitieux projet prévoyait de décrire Hollywood des premiers pas du muet jusqu'à l'émergence de la télévision. le propos n'était pas tant l'Histoire du cinéma US que l'évocation romancée de "La Machine à Rêves" via les destins de personnages imaginaires mais crédibles. Son but n'était pas de révéler certains scandales retentissants accolés à certains grands noms de l'époque.

L'objectif était de vider Bloch de tout l'immense amour qu'il ressentait pour le 7ème Art made in US.

"Si j'avais du choisir entre Hollywood et le Paradis, je n'aurais pas hésité une seconde."

Seul "Colossal" vit le jour, et encore pas sous ce titre...
Première édition aux USA, en 1968, soit 11 ans plus tard et, par défaut en format poche, sous le titre trompeur de "Star-stalker" (le chasseur d'étoiles). Une pin-up aguicheuse trônait en une de couverture. Contenant et contenu désormais sans rapport aucun.

Bloch ne dit rien, il s'était résigné à l'enterrement sans fleurs ni couronnes de son roman préféré. Et pourtant...

... "Colossal" sort en 1979 en version française sous le titre "Le crépuscule des stars" dans la collection Red Label (PAC ed.), puis en 1985 aux Nouvelles Editions Oswald dans la collection "Le Miroir Obscur".

Certains chefs d'oeuvre peinent à émerger. Ce roman en fait partie. Commence ainsi pour lui une nouvelle carrière...

"A Hollywood, on ne sait pas trop pourquoi, le soleil semble toujours être au zénith - même la nuit, lorsque le néon donne l'illusion que l'on est en plein midi"

Le "Crépuscule des stars" traite de l'Age d'Or du cinéma muet, il raconte la décennie hollywoodienne fabuleuse des années 20. Bloch y décrit l'amateurisme inspiré et visionnaire des débuts, le bricolage à l'arraché et le Système d'sans cesse à l'oeuvre. Bloch nous promène, dix ans durant, des premiers hangars-studios jusqu'aux coûteux complexes cinématographiques d'avant-guerre.

"...transformer le celluloïd en or massif..."

La suite sur mon blog...
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Mon histoire d’amour avec Hollywood commença très tôt, dès mon plus jeune âge.

À cette époque, au temps du cinéma muet, la majorité des jeunes – ici aux États-Unis et dans le monde entier – était fascinée par les écrans cinématographiques. La télévision n’existait pas, la radio en était encore à ses débuts, et les films étaient notre fenêtre sur le monde. À une époque où peu de gens avaient les moyens de voyager de par le monde, c’était le cinéma qui nous donnait un aperçu fugitif de pays lointains. C’était le cinéma qui nous enseignait l’Histoire et nous en donnait une version romancée, le cinéma qui faisait notre éducation morale et nous offrait une image du comportement des adultes. Hollywood faisait rire et pleurer les jeunes Américains, agissait sur nos sympathies et nos passions, comblait notre désir d’enchantement, de frissons et de sensations fortes.

Nous adorions le cinéma et ses stars, et cela n’a rien d’étonnant… le fougueux Douglas Fairbanks, la réservée Mary Pickford, la royale Pola Negri, la sophistiquée Gloria Swanson, le terrifiant et macabre Lon Chaney, le romantique Rudolph Valentino, l’héroïque Tom Mix, l’infâme Erich von Stroheim, et les maîtres du comique comme Charlie Chaplin, Harold Lloyd et l’incomparable Buster Keaton.

Quant à Hollywood, c’était la capitale magique du monde… son influence était infiniment plus grande que celle de La Mecque, de Jérusalem ou d’autres lieux saints.



Robert Bloch dans la magnifique préface.
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Brusquement, quelqu’un ouvrit une porte, dans le hall, et j’entendis un bruit de voix. À ma surprise, l’une de ces voix était celle d’Harker. Je pensais qu’il était déjà dans la bibliothèque avec Luzovsky, mais ce n’était pas le cas, apparemment, car c’était une femme qui lui répondait. Et maintenant, je les entendais tous les deux, clairement et distinctement.

J’en ai jusque-là, disait la femme, ça ne peut plus durer !

— Alors, va-t’en. Va-t’en, et ne te crois pas obligée de revenir, cette fois.

— Oh, ne t’inquiète pas. je ne risque pas de revenir. J’en ai assez soupé de toi et de ta foutue astrologie !

— Tu n’as pas besoin de hurler, Mabel. Il y a des invités dans cette maison.

— Mais pour qui te prends-tu donc, à me donner des ordres ? Monsieur Théodore, le Grand Harker… Quand je pense que je t’ai connu petit colporteur d’élixirs à la noix !

— Et toi, quand je t’ai connue, tu faisais le trottoir à deux dollars la passe.

— Dis donc, espèce de salaud…

— Fous le camp, et ferme-la ! Je dirai à Rogers d’emballer tes affaires.

— Ce n’est pas la peine, je pars tout de suite. Va faire joujou avec tes boules de cristal, espèce de charlatan minable ! 

Une porte claqua. J’entendis le bruit de chaussures à talons hauts martelant le sol. Les pas se rapprochaient, et je me plaquai au mur.

Je vis Mabel se diriger vers la porte.

Mabel ? C’était Maybelle Manners.

"Quand je t’ai connue, tu faisais le trottoir à deux dollars la passe." Non, ce n’était pas possible, la reine était infaillible, la Joconde n’avait jamais hurlé comme une poissarde. Mona Lisa n’avait jamais été une prostituée…
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Dans un asile de fous, il est courant d’entendre des voix. C’est ce qui m’arrivait.

"… les frères Christie, les frères Warner, les sœurs Talmadge. Partout, on ne rencontre que le népotisme… " "… pour moi, ça serait plutôt de l’inceste. Après tout, il n’y a pas de mal à ça, ça reste dans la famille… "

"… nous sommes des vers de terre, qui nous tortillons au bout de l’hameçon de Dieu… "

"… tu ne crois pas qu’il serait temps de nourrir ton singe au biberon, mon chou… "

"… le film a rapporté un million et demi et il se plaint encore ! Tout le mal que je te souhaite, c’est d’avoir autant de fric que William Fox… "

"… il n’y a que dans les scènes d’amour qu’il se fait doubler… "

"… mais enfin, bon Dieu, prends donc ce singe par la queue et retire-le de là… "

"… les toilettes sont occupées, essaie plutôt la piscine… "

"… est-ce que quelqu’un a vu Billie ? Elle a dit qu’elle passerait… "

"… je t’avais prévenue, non ? Tire-le par la queue, à moins que tu ne veuilles que les gens te croient enceinte… "

"… mais, bon Dieu, je suis enceinte… "

Debout, au bar, les sens en éveil, j’examinais tout le monde, j’éliminais les voix les unes après les autres, dans le seul espoir de détecter la présence de Lois Payne. Soudain j’aperçus Arch Taylor qui venait vers moi, un verre à la main. Le verre était vide, mais lui était manifestement plein. Quelque part en cours de route il avait perdu sa veste, sa cravate, et son sens de l’équilibre.
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Tout est vrai. avait dit Luzovsky, et il avait raison. Le rêve se réalisait, pour lui, parce qu’il croyait en lui-même. Mais moi, je ne croyais plus – ni à Harker ni aux étoiles qui brillaient sur Hollywood ou dans la ville même. Pour moi le rêve était fini.

Je flânai le long des façades prétentieuses des propriétés de Sunset, puis je m’enfonçai dans le no man’s land du Strip. Dans la lumière violente de l’après-midi, tout paraissait crasseux, abandonné. Ce n’était que le soir que le Strip se réveillait, lorsque les étoiles venaient briller dans leur ciel factice et étriqué, celui des cabarets, des bordels et des casinos. Mais, même la nuit, c’était un paradis frelaté. L’alcool était mélangé à de la gnôle de contrebande, les femmes se faisaient payer pour singer la passion, et les cartes des joueurs étaient truquées, les dés pipés. Tout était minable, vulgaire, y compris mes réflexions sur le sujet. Tommy Post, le Jeune Philosophe. Encore de la frime, comme tout le reste.
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- Je sais tout ce qu'on peut savoir sur le cinéma.
- Je ne savais pas qu'on trouvait tant de choses sur le cinéma dans les bibliothèques, avouai-je.
- Mon jeune ami, ce n'est pas dans les bibliothèques qu'on étudie le cinéma. C'est en allant voir des films.
Et c'est ce que Luzovsky avait fait, nuit après nuit, inlassablement. Certains soirs, il n'avait pas assez d'argent pour manger, mais il fait toujours dix ou vingt-cinq cents pour aller au cinéma. Pour Swanson, pour Arbuckle, pour Bushman, pour Chaplin, et même pour Pearl White. Pour la mise en scène des deux frères De Mille, et du grand David Wark Griffith. Ces pièces de dix et de vingt-cinq cents n'étaient pas dépensées en distraction: c'était un investissement pour l'avenir.
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Vidéo de Robert Bloch
Chronique consacrée aux grands noms de la littérature policière, et animée, depuis octobre 2018, par Patrick Vast, dans le cadre de l'émission La Vie des Livres (Radio Plus - Douvrin). Pour la 25ème chronique, le 07 novembre 2018, Patrick présente Robert Bloch. Patrick Vast est aussi auteur, notamment de polars. N'hésitez pas à vous rendre sur son site : http://patricksvast.hautetfort.com/ Il a également une activité d'éditeur. À voir ici : https://lechatmoireeditions.wordpress.com/ La page Facebook de l'émission La Vie des Livres : https://www.facebook.com/laviedeslivres62/
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