Cette semaine à lémission Dialogues, le sociologue Jean Carette accueille le Dr Serge Mongeau, médecin et écrivain ainsi que la journaliste Thérèse Miron. Dans un monde dabondance, du prêt à jeter et de léphémère, nombreux sinterrogent sur la consommation sans fin et lépuisement anticipé des ressources naturelles. Il sera question cette semaine du mouvement de la simplicité volontaire. Est-ce un choix ou une résignation? En compagnie de ses invités, le sociologue Jean Carette abordent le mouvement de la simplicité volontaire et son évolution au fil des décennies. Appelée aussi sobriété heureuse, cette dernière a ses fervents défenseurs. Est-ce un choix réel que font les adeptes de ce mode de vie ou est-ce lexpression dune résilience face à une société qui ne peut répondre aux aspirations économiques de tous les citoyens? Le débat est ouvert à lémission Dialogues.
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Il faudrait pouvoir nous désintoxiquer du capitalisme en changeant de style de vie, car c'est en lui et par lui que se concentrent et se reproduisent toutes nos aliénations. Cela serait une véritable révolution. Encore faudrait-il la vouloir vraiment et cesser de croire qu'on peut vivre comme des capitalistes en évitant de tomber dans les horreurs du capitalisme.
• Alain Accardo, 'Les liens', in 'La décroissance' (mars 2013)
Notre planète me fait de plus en plus penser à un organisme vivant dont chacun de nous ne serait qu'une cellule. Cet organisme se comporte de la même façon que notre corps. Quand un des organes ou une partie du corps est touché par la maladie ou fonctionne mal, cela déclenche une réaction de l'ensemble de l'organisme ; tout cela se fait de façon involontaire, sans intervention de l'intelligence. Le même phénomène se produit actuellement sur la planète : les symptômes des atteintes graves qu'elle subit deviennent chaque jour plus évidents, mais de la même façon que nous soignons le plus souvent nos maladies en traitant les symptômes sans toucher les causes, nous cherchons les moyens d'atténuer la crise sans nous préoccuper d'en tarir la source.
[Sur la manière de vivre :]
La plupart des gens s'engagent dans des voies qu'ils ne remettent jamais en question, en particulier parce qu'il est toujours plus facile de refaire la même chose, de développer des habitudes et de se contenter de les suivre. Nombre de personnes - sûrement la plupart - ont des éclairs de lucidité qui provoquent certains regrets ; mais, le plus souvent, elles refusent de voir ce qu'elles sont devenues par rapport à ce qu'elles auraient aimé être ; car cela les obligerait à faire une remise en question trop profonde qui les forcerait à apporter des modifications trop importantes dans leurs vies. Le confort de l'habitude prend le dessus, on écarte la vision critique de soi-même et on continue comme avant.
Ce qu'il faut [pour conquérir la vraie liberté], c'est plutôt se libérer de l'obligation de gagner beaucoup d'argent, des modes et des courants, qui forcent à renoncer à ses différences et parvenir à un esprit communautaire véritable, où l'on ait le goût et la possibilité d'oeuvrer avec les autres quand il le faut.
Il faut de toute urgence trouver des voies de sortie.
Certains se laissent rassurer par les beaux discours
des politiciens, qui année après année promettent la
fin de la « crise ». Les gouvernements ne trouvent ce-
pendant rien de mieux à faire que de suivre servilement
les demandes de l’entreprise privée, qui exige qu’on
concède toujours plus de terrain au « marché » pour
résoudre quelque problème que ce soit. En fait, les
gouvernements ont perdu le sens de leurs responsabi-
lités. Du service du peuple — dans une « démocratie »,
n’est-ce pas le peuple qui doit gouverner ? — ils sont
passés au service des intérêts des groupes de pression
les plus puissants, ceux qui sont riches et contrôlent le
mieux les médias, les deux allant de pair. Et le premier
intérêt des puissants est de garder en place le genre de
dirigeants qui s’y trouvent déjà. Alors, on ne peut
attendre de gouvernants cherchant avant tout leur ré-
élection qu’ils proposent à leurs électeurs les me-
sures radicales pouvant seules avoir des chances d’éviter
la catastrophe inévitable à plus ou moins longue
échéance.
Jamais l'humanité n'a disposé d'autant de richesses, jamais elle n'a possédé de techniques aussi efficaces et puissantes, jamais elle n'a maîtrisé un tel savoir, et pourtant jamais, au cours de l'Histoire autant d'êtres humains n'ont été privés de l'essentiel
Aujourd’hui, je me rends compte que la voie de la simplicité volontaire ne constitue pas seulement le meilleur chemin pour la santé de ceux qui l’empruntent, mais qu’elle est sans
doute l’unique espoir pour l’avenir de l’humanité.
L’homme et la société n’ont plus de liberté de choix,
d’orientation ; le seul choix qui leur reste est de
s’adapter ou de périr. S’adapter aux nouvelles techno-
logies, à la mondialisation libéralisée, déréglementée,
privatisée, compétitive, et aux contraintes des mar-
chés financiers. On considère tout cela (de manière
tout à fait arbitraire) comme étant des phénomènes
exogènes à la société et obéissant à des « lois » qui
leur seraient propres, donc pas modifiables par la
société.
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE La crise des valeurs
CHAPITRE PREMIER Consommer, consommer, consommer
CHAPITRE II La crise
CHAPITRE III La conscience étouffée par la surconsommation
CHAPITRE IV Changer de cap
CHAPITRE V La révolution intérieure
Quantité et qualité
Individualisme et solidarité
Compétition et participation
Dépendance et autonomie
DEUXIÈME PARTIE La vie quotidienne
CHAPITRE VI Une alimentation qui réponde à nos besoins
L’emploi
L’environnement
La santé
CHAPITRE VII La maladie, un moment clé
CHAPITRE VIII Des loisirs qui libèrent
CHAPITRE IX L’automobile : liberté ou aliénation?
CHAPITRE X Se fondre dans l’environnement
CHAPITRE XI Le travail : plus qu’un salaire
L’utilité pour la société
Les conditions d’épanouissement
L’intégration harmonieuse à l’écosystème
CHAPITRE XII Une économie centrée sur les besoins
Les corvées
Les ressourceries
Copropriété, colocation et coopératives d’habitation
Le gardiennage des enfants
Les ateliers communautaires
CHAPITRE XIII Accroître son autonomie
CHAPITRE XIV Se libérer du système
CHAPITRE XV La simplicité volontaire
ANNEXES
I – Un contre-projet au système agro-alimentaire industriel
Brigitte Pinard
II – Pour la création d’entreprises paroissiales
Gérard Bernatchez
III – Quelques adresses en France, en Suisse et en Belgique
Les appels à l’action fusent de toutes parts, pour la justice sociale, pour la solidarité, pour le respect de la nature, mais rien n’y fait : ce sont les entreprises multinationales qui contrôlent le monde et, avec la complicité des gouvernements qui se soumettent à leurs desiderata, établissent les priorités nationales et internationales, lesquelles se résument à « profits », « compétitivité » et «libre-échange».