Sarah Gysler, auteur de "Petite" aux éditions des Equateurs sera l'invitée de 7h50 de Frédéric Métézeau
France Inter
Le voyage a rassuré mes peurs. Une à une.
Mon père dit que l'adolescence est un tunnel, j'imagine plutôt un gouffre, un vortex qui nous aspire et nous recrache tout cabossés cinq ans après.
Voyager seule, c'est ouvrir grandes les portes , s'écouter ,se faire confiance . C'est un coup
d 'audace qui mène à soi. Aujourd'hui je sais que les filets ne servent à rien, ils sont illusoires. Sans filet ,on ne tombe plus .
Ouvrir les yeux à 20 ans a été mon grand avantage. Au fond, le monde appartient à ceux qui rêvent tôt.
Mes premiers souvenirs d'enfance sont liés à la séparation de mes géniteurs, j'avais 3 ans. Un histoire de fidélité approximative. En même temps, il fallait s'en attendre: mes parents étaient tous les deux facteurs.
Aujourd'hui je sais qu'il est possible d'aimer sans savoir se le dire, d 'aimer maladroitement, de travers. Ce que nous faisons extrêmement bien.
Je m'étais transformée en mutante acnéique, je ne faisais plus confiance à personne et ressentais une profonde colère. J'en voulais aux adultes d'être si lâches, aux adolescents d'être impitoyables, à l'enfance de ne pas avoir voulu me garder plus longtemps. Et bien sûr, je m'en voulais à moi d'être si bizarre, de ne pas savoir m'adapter. Est-ce cela l'adolescence ?
En Algérie, c'est une plus-value d'avoir un passeport suisse, en Suisse c'est un malus d'être arabe.
Aujourd'hui, je sais que si la vérité blesse, ce sont les silences qui tuent les couples.
Souvent, j'essaye de fermer les yeux, de me préserver. Mais, très vite, la réalité me rattrape. Elle est partout, la garce, et elle court vite.