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3.82/5 (sur 195 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Geoffroy de Lagasnerie est philosophe, sociologue et chargé de cours à l'IEP.

Source : babelio
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Rencontre animée par Antoine Idier Le sort réservé à Joseph K dans le procès de Kafka a de quoi épouvanter : on y découvre un monde régi par un pouvoir « omniprésent et sans règle, effrayant et illogique, tout-puissant mais insaisissable ». Très loin du nôtre a priori. Et, pourtant, nous y reconnaissons quelque chose. Quel est ce « quelque chose » ? Et n'y a-t-il pas matière à nous méfier de cette identification spontanée ? Ce qui nous semble kafkaïen (injuste, arbitraire et donc opaque et imprévisible) ne retrouve-t-il pas une terrible clarté quand on s'extrait de l'appréhension subjective pour penser avec la sociologie ? Joseph K n'est personne en soi ; mais à lui donner un visage, une classe sociale et le cauchemar kafkaïen devient funestement réel, permettant à Geoffroy de Lagasnerie d'interroger la nature même du système judiciaire dans nos sociétés, y compris la notion de jugement et de culpabilité. « Sans doute est-ce parce que chacun d'entre nous ressent au plus profond de lui-même que notre monde est opaque, que les institutions avec lesquelles nous devons composer pour vivre nos vies sont dotées de fonctions cachées et mystérieuses, (…) que nous cherchons sans cesse, dans la littérature ou la théorie, dans l'art ou la psychanalyse, des interprétations qui pourraient nous dire la vérité de ce qui est – nous révéler ce qui se joue derrière la façade trompeuse des apparences. » Geoffroy de Lagasnerie, Se méfier de Kafka À lire – Geoffroy de Lagasnerie, Se méfier de Kafka, Flammarion, 2024.

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"La relation amicale n'existe réellement qu'à condition que l'ami se pense comme être disponible à l'autre. C'est une relation structurée par la possibilité permanente de l’interruption si l'autre en a besoin."
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Depuis une vingtaine d'années, la volonté de réguler les pratiques intellectuelles s'est faite de plus en plus forte et de plus en plus hégémonique.

http://wp.me/p5DYAB-1cc
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Nous ne devons jamais, comme dit Adorno, confondre ce que nous sommes et ce que la société a fait de nous. Nous ne sommes pas de toute éternité ce que nous avons été amenés à devenir.
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Ne vivons-nous pas dans un champ politique tel que l’expression de la dissidence est déjà inscrite dans le système et donc en un sens programmée par lui ?
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Combien épousent à 30 ans une vie qu'ils s'étaient promis à 20 ans ne jamais avoir – se marient, ont des enfants, s'installent dans un pavillon individuel...
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Je dirais qu’il y a dans l’affect propre à l’amitié le désir de s’augmenter, d’apprendre, d’envisager d’autres projets – l’aspiration à une sorte d’éducation permanente de soi au sens que donne à ce mot la tradition du perfectionnisme moral, à l’opposé donc de l’approche naïve de l’amitié comme espace désintéressé où chacun aime en l’autre un autre soi-même ou ses pures vertus, qui traverse toute la pensée depuis Cicéron.
Au point que l’on pourrait presque être amené à se demander si, d’un point de vue sociologique, l’amitié ne pourrait pas être comparée pour la vie d’adulte au rôle que remplit l’École pour la vie d’enfant – le lieu possible de la transformation du sujet et du devenir autre ?
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[ Le piège familial ]

L’inscription de soi dans la parentalité traditionnelle produit presque systématiquement une orientation de l’investissement psychique vers le foyer et le privé, que l’on ne saurait nommer autrement que comme un repli et une restriction. La sociologie a largement mis en évidence l’existence d’une modification brutale des liens que les individus entretiennent au cours de leur vie à la suite du mariage et de la naissance du premier enfant. « Un homme âgé de 18 à 35 ans sort en compagnie d’un tiers en moyenne 212 fois par an. S’il se marie, il ne sort plus que 58 fois par an avant 35 ans, 36 fois entre 36 et 60 ans. » C’est tout l’univers mental qui bascule avec le basculement de soi dans la vie familiale – une sorte de grand renfermement, d’appauvrissement du tissu relationnel dont on peut se demander s’il n’est pas également nécessairement lié à une modification profonde du rapport à la vie et au dehors et donc aussi à la politique.

On peut étendre l’analyse que Bourdieu consacre à la maison individuelle dans Les Structures sociales de l’économie à la structure familiale et au mode de vie qu’elle emporte. Cet ouvrage est consacré à la question du marché de la maison individuelle, mais Bourdieu le conclut d’une manière quasi prophétique – en prophète de malheur – en soulevant la question des fantasmes sociaux qui se trouvent au principe de l’attachement d’une grande quantité de ménages à posséder voire à faire construire leur propre maison et sur les conséquences psycho-politiques de telles aspirations. Tout ce qu’écrit Bourdieu de l’achat de la maison vaut ici strictement pour l’entrée dans la vie parentale.

L’achat d’une maison est un acte dans lequel se trouve engagé « tout le plan d’une vie et d’un style de vie ». Bourdieu écrit ainsi que la maison individuelle fonctionne en fait comme un « piège » :

Elle tend peu à peu à devenir le lieu d’une fixation de tous les investissements : ceux qui sont impliqués dans le travail – matériel et psychologique – qui est nécessaire pour l’assumer dans sa réalité si souvent éloignée des anticipations ; ceux qu’elle suscite à travers le sentiment de la possession, qui détermine une domestication des aspirations et des projets, désormais bornés à la frontière du seuil, et enfermés dans l’ordre du privé – par opposition aux projets collectifs de la lutte politique par exemple, qui devaient toujours être conquis contre la tentation du repli sur l’univers domestique.

La cellule familiale doit être perçue pour ce qu’elle est : une entité solidaire d’une définition de soi qui s’articule à une idéologie politique : elle engendre une existence centrée sur « l’éducation des enfants » et le « culte de la vie domestique » et incarne le lieu d’une sorte « d’égoïsme collectif ».
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Le projet de Foucault s’inscrit en rupture avec cette position. Le problème qu’il entend poser se veut plus dérangeant. Son intention est plus complexe. Foucault se propose de modifier notre perception spontanée du discours néolibéral. Ainsi, l’une des idées placées au centre de la démonstration menée dans Naissance de la biopolitique, c’est qu’il y a quelque chose de libérateur, d’émancipateur, de critique qui s’élabore et se met aussi en place à travers le néolibéralisme.
(...)
Comment Foucault justifie-t-il cette association entre, d’un côté, le libéralisme et le néolibéralisme et, de l’autre, des mouvements de dissidence ? Qu’y a-t-il de potentiellement émancipateur dans le discours néolibéral ? Ou, plus exactement, en quoi est-il possible de trouver dans ce discours des instruments, des armes pour mener des luttes politiques et démocratiques ?

La potentialité critique inscrite dans la rationalité néolibérale s’enracine dans le fait que cette tradition s’est affirmée dans le cadre d’une opposition à l’État, ou, mieux, à la raison d’État. En effet, à la racine de l’attitude libérale, puis néolibérale, ne se trouve pas un corps constitué d’axiomes théoriques ou philosophiques, ni même quelques principes idéologiques de base. Si l’on voulait caractériser ce qui rassemble les intellectuels néolibéraux au-delà de leurs différences parfois très grandes, il faudrait plutôt invoquer un trait de caractère, un ensemble d’obsessions quasi psychologiques. Car leur pulsion commune, dit Foucault, c’est une « phobie d’État ». Les libéraux sont animés par une hantise de l’État – dont il illustre l’intensité en citant ces propos de l’historien de l’art Bernard Berenson : « Dieu sait si je crains la destruction du monde par la bombe atomique, mais il y a au moins une chose que je crains autant, qui est l’invasion de l’humanité par l’État. » Selon Foucault, le néolibéralisme est traversé par l’idée selon laquelle « “on gouverne toujours trop” » – ou du moins selon laquelle « il faudrait toujours soupçonner que l’on gouverne trop ». En d’autres termes, il y a dans le néolibéralisme la formulation d’une interrogation radicale sur la gouvernementalité étatique. Cette doctrine ne se contente pas de se demander quels seraient les meilleurs moyens, ou les moyens les moins coûteux, d’atteindre des objectifs politiques. Elle questionne la possibilité même de l’État. Elle impose de répondre à ce problème : « Pourquoi donc faudrait-il gouverner ? »

En ce sens, il ne me semble pas faux de dire que Foucault a perçu le néolibéralisme comme l’une des incarnations contemporaines de la tradition critique. (chapitre 10)
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L'amitié est une forme de vie que l’on pourrait désigner comme purement existentialiste : elle se réduit aux pratiques qui la créent et la recréent chaque jour, elle n’existe qu’à travers la série d’actes qui la font exister. Sans un souci quotidien de l’ami, l’amitié disparaît.
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[ L’amitié comme lieu d’une avant-garde : l’exemple de Manet ]

Notre culture n’a-t‑elle pas tort d’associer la figure du créateur à la solitude ? Et s’il fallait au contraire la lier à l’amitié ? L’amitié pourrait apparaître comme un dispositif de subjectivation qui donne une possibilité concrète de maintenir une certaine extériorité par rapport aux champs culturels institués, de conquérir une relative autonomie par rapport aux injonctions qui s’adressent à tout producteur de biens symboliques, en termes de thématiques, de modes d’écriture, de formes.

Entre 1998 et 2000, Pierre Bourdieu a consacré deux années de cours au Collège de France à Édouard Manet et à la révolution symbolique qu’il a opérée. […]

Bourdieu soulève le problème de ce qu’il appelle la « solitude de l’hérésiarque ». Lorsque quelqu’un décide de rompre ou est de fait conduit à rompre avec les attentes du champ dans lequel il est inscrit, il doit a priori accepter, pour un temps du moins, de se retrouver seul et isolé. Il défie les lois de la reconnaissance et de la sociabilité telles qu’elles fonctionnent dans son champ, il promeut une nouvelle norme de production qui n’est pas encore acceptée comme telle, et il se retrouve donc, mécaniquement, mis à l’écart de tout. Bourdieu dit de Manet qu’il a dû « sauter dans le vide ». Et que, sociologiquement, le problème qui se pose est de savoir comment il est parvenu à « ne pas devenir fou », à tenir « sous une avalanche de violences, d’insultes de mises en questions ».

Prendre de la distance avec les formes instituées de la production et de la circulation des œuvres suppose nécessairement une forme de confiance en soi. Même s’il est insulté, ignoré, rejeté, l’hérétique doit se persuader qu’il n’est pas un artiste raté, mais un artiste maudit. Il doit se donner le droit de dire à l’institution, tout en étant isolé et attaqué : c’est moi qui ai raison, c’est moi qui vous le dit. Un acte hérétique suppose une capacité à défier les lois de la reconnaissance sociale, à se défaire au moins provisoirement de la force de leurs verdicts pour persévérer dans son être malgré l’absence de signe mondain d’élection.

C’est la raison pour laquelle une avant-garde est toujours collective. Celui qui veut rompre avec le nomos du champ auquel il appartient (la définition académique de la peinture dans le cas de Manet) va nécessairement, au moins dans un premier temps, se couper de l’institution et de ses espaces de sociabilité. Il doit donc trouver du soutien ailleurs, à travers son inscription dans d’autres cercles. Il doit non seulement créer son œuvre, mais créer aussi son propre espace de soutien. Et Bourdieu insiste sur le rôle fondamental qu’ont joué pour Manet les quelques amis fidèles autour de lui qui l’assuraient de sa valeur et l’encourageaient (Zola ou Mallarmé par exemple) et des lieux alternatifs de sociabilité, d’exposition et de vente à l’Académie, comme les salons.

[…] Plutôt qu’être appréhendés comme des contre-espaces de la reconnaissance, les cercles amicaux ne devraient-ils donc pas être vus comme des espaces qui font exister une autre éthique de la création, fondée sur les notions d’affirmation et d’autonomie, et qui tentent de donner la possibilité de vivre au-delà de la reconnaissance ?
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