Le jour où j’ai fait cette promesse à notre mère, Florie, j’avais quinze ans. T’en avais que dix-neuf. Comment pouvait-elle penser que nous, ses enfants, pourrions vivre sans amour le reste de nos jours? C’est pas parce que notre père était un ingrat et un lâche que nous devons en payer le prix pour toujours. Ne vois-tu pas comme c’est ridicule de nous contraindre à une telle vie? Cette femme à mes côtés me rend heureux comme je l’ai jamais été.
En quelques semaines, en effet, Clémentine avait vu sa santé se détériorer. Obligée de consulter un médecin, elle avait appris qu’elle était atteinte de diabète et avait dû faire le deuil d’une santé parfaite. Son visage enfantin devint encore plus sérieux. Elle n’aimait pas discuter de sa maladie avec son amoureux. Mais il avait raison, elle se devait de manger pour éviter une baisse de sucre dans son corps et risquer une hypoglycémie sévère.
Ça sert à rien de se mettre la tête dans la sable comme disait ma femme. En fait, c’était plutôt… Don’t put your head in the sand!
Deux sœurs, deux opposés qui discutaient souvent en parallèle sans parvenir à s’entendre.
Pourtant, renchérit l'homme, on est tous certains que c'est l'air vicié, qui parvient jamais à sortir de la mine, qui cause les problèmes. Et je suis convaincu que nos conditions de travail peuvent être améliorées. Mais encore faut-il que nos patrons aient envie de nous garder en vie!
Mais ce qui était pire, c'était de devoir garder le secret, même avec Kristoff. Pourtant la femme craignait que s'il connaissait la mère biologique de son fils, il cherche à savoir qui en était le père.
Bon, je sais que je vais mourir bientôt. Je vous aime, tous les quatre, et je veux pas vous voir souffrir comme moi. Vous devez me faire une promesse. Puissiez-vous tous avoir la force, le courage de la tenir jusqu'à votre dernier soupir... Promettez-le-moi. Promettez-moi de ne jamais vous marier, de ne jamais choisir d’époux ou d’épouse qui risque de vous abandonner, de vous briser le cœur, ni d’avoir d’enfants. Je ne peux pas quitter cette terre sans ce serment, avait insister Rose à bout de souffle sur son lit de mort.
Dans le village, les tabaculteurs avaient l’habitude de s’entraider lors de chaque début de saison, et encore plus depuis que les jeunes avaient commencé à s’enrôler. La main-d’œuvre se faisait rare obligeait les hommes à se soutenir encore plus. Lanaudière était la capitale du tabac dans la province, et les familles en étaient bien fières.
Adèle était sans contredit la plus entêtée et la plus ambitieuse. Comme son père Antoine Gélinas, l’artiste en elle prenait toute la place. L’écriture la sauverait d’une vie sans nuances, puisque la promesse faite à sa mère le jour de sa mort allait pour toujours conditionner son existence. Adèle se dévouait intensément à sa passion.
Vêtue comme elle l’était – jupe trop courte, chandail trop serré –, ses cheveux auburn formant un halo de feu autour de son visage, tous portaient immédiatement un jugement : ce devait être une femme de mauvaise vie. Surtout que le quartier foisonnait de ces prostituées, qui vendaient leurs charmes au coin de la rue. Mais Alice ne changerait pas sa façon de se vêtir, juste pour éviter de voir les airs offusqués des passants. De toute manière, elle aimait bien provoquer ! Un son aigu annonça l’ouverture de la porte et elle s’engouffra à l’intérieur en souriant à un vieil homme, qui leva son chapeau pour la saluer. Un long escalier devant elle permettait d’accéder à un premier palier, où elle s’arrêta en cherchant son souffle.