Bénédicte Rousset au micro de Guillaume Sautet - Juin 2018
L’hypocrisie est une sorte de suspension du jugement. Elle peut faire du bien, lubrifier la vie. Sans elle, nous ne sommes que des animaux.
Félix, tu es devenu mon oublié des livres d'Histoire, mon héros extraordinaire, mythique, par ta douceur timide et ta détermination inflexible à causer malgré toi, mon bonheur.
C'est comme si les mots me permettaient de sortir tout entière de mon temps de ma condition.
Un sentiment indéfinissable, mais tellement palpable !
Aristote a si justement dit :"Les histoires ne deviennent vrais mythes qu'une fois faites tragédies".
- C'est à l'asile qu'est la place de cet aliéné.
- Sa mère refuse. On peut comprendre, dit Clémence. Il est mieux auprès d'elle que…
- Certains traitements expérimentaux montrent leur efficacité, la coupa-t-il.
- Son intelligence n'est pas “normale” mais il est doué d'une certaine sensibilité.
- Cet individu n'a pas de cervelle ma chère, seulement un cervelet, qui suffit à la vie bestiale.
Comment osait-il ?
Tout le reste, chez elle, relevait de la perfection. Sa chevelure, d'un roux flamboyant, presque trop piquant, rehaussait des pommettes saillantes et sublimait sa singularité. On ne voyait que cela avant, ses cheveux bouclés et son visage moucheté de taches de rousseur. On aurait dit que Dieu, en lui infligeant cette blessure, avait voulu rectifier un tir trop bien aligné, retirant un peu de beauté là où il en avait trop mis.
Clémence fixa le garçon dans un sourire attendri. Quel gentil benêt ! À chaque fois qu'il venait au Domaine avec ses parents, il ne la lâchait pas. Heureusement, grâce à lui, elle pouvait chevaucher des heures. Comme elle devait être accompagnée pour s'éloigner et que personne ne se dévouait jamais
-les domestiques étant inaptes-, la compagnie d'Émile l'arrangeait, d'autant qu'il ne parlait pas.
- Quel sacrilège!
- Dieu n'existe pas.
- Tu sais bien que si.
Pauline croisa les bras, l'air effronté.
- Papa et maman disent que non, et c'est en eux que je crois.
Le front de Clémence se plissa.
- Tu es triste ?
- Triste de joie.
La mélancolique beauté de la scène l'enveloppa de tendresse.
En quittant son bienfaiteur, Naïs sautille sur le goudron. Bientôt, le tableau ornera son appartement et, sous cet angle, l’existence est légère, si légère ! Philou va râler, mais pour une fois, elle s’imposera. D’ailleurs, pourquoi se montrer pessimiste ? C’est une si belle œuvre. Il sera fier lui aussi.
C'est toujours dans les yeux de l'autre qu'on est cinglé. Moi, je ne me vois pas comme ça.
C’est décidé, je vais amasser assez de cache pour tout plaquer. Avec le pactole de la vente de médicaments, on se tirera sur une île paradisiaque avec Lili. On y vivra de mes divers placements financiers ou bien, j’y monterai un autre business – pourquoi pas honnête, celui-là – où je développerai le mien à grande échelle. À l’étranger, personne ne m’emmerdera avec mon casier et je n’éveillerai pas les soupçons.