La voix de l'étranger, lorsqu'il s'exprima, donna à l'humain l'impression que l'univers lui chuchotait des secrets au creux de ses os.
Ils étaient morts, mais lui ne l'était pas, et tous regardaient désormais par-dessus son épaule, espérant qu'il résolve l'énigme dont ils n'avaient pu venir à bout.
Des civilisations entières naissent et meurent le temps que nous corrigeons nos trajectoires.
Pourtant ,d'un autre côté ,ce souvenir lui paraissait dater de temps immémoriaux, calcifié et cassant comme du corail.
A l'extérieur,il se surprenait à regarder l'espace, surtout lorsque le soleil glacé était bas et que les étoiles du crépuscule commençaient à parsemer le ciel couleur caramel.
Les décès au sein de la lignée étaient affreux et rares.
Pourquoi moi? Demanda-t-il à voix haute. Pourquoi est-ce à moi de subir ça ?
"Tu crois savoir ce dont je suis capable ?
- J'ai écouté un trop grand nombre de vos histoires pour ne pas avoir une opinion de vos aptitudes"...
Manipuler les concepts de la cosmologie classique requérait de l'imagination, mais également une capacité à considérer l'espace et le temps comme les facettes d'un même objet.
Je devais avoir l'air à peu près aussi convaincant qu'un clochard aviné se vantant de ses prouesses sexuelles.
Il comprit aussitôt, non sans une certaine sérénité, que ces choses étaient vivantes et qu'elles avaient conscience de lui.
Et tu crois appaiser les tensions en menaçant de tout faire sauter ?
Galiana était en hibernation, à une température où les processus métaboliques avaient cessé.Pourtant, les cubes noirs avaient trouvé Galiana. Ils avaient pénétré le métal du sarcophage, remplissant l'espace entre la paroi intérieure et son corps. Quand le sarcophage fut démonté, on vit que les cubes formaient une coquille noire mat autour du corps de Galiana. Pourtant, il n'y avait pas le moindre doute quant à son identité : l'imagerie médicale pouvait voir à travers la coquille et décrire la structure de son squelette, correspondant parfaiatement avec ce que l'on savait d'elle. Le corps ne semblait avoir souffert ni dommages ni déteriorations pendant le vol, et les senseurs étaient même en mesure de détecter de faibles émissions des implants cérébraux de Galiana. Bien que les signaux soient trop faibles pour communiquer quoi que ce soit de spécifique, il était désormais clair que quelque chose dans ce cocon était encore capable de pensée, et essayait de communiquer.
(...)
... ils commencaient à comprendre mieux ce qui était arrivé à Galiana. Les machines noires avaient pu pénétrer sa tête, mais leur présence semblait être plus bénigne que dans le cas des autres membres d'équipage. Skade avait l'impression que les cubes avaient appris comment envahir des crânes, et que ce n'était qu'avec Galiana qu'ils avaient appris à le faire sans endommager l'hôte.
(...)
L'équipe de Skade commenca à enlever la dernière couche de cubes, commencant à ses pieds; ils étaient satisfaits de voir que les tissus sous-jacents n'étaient pratiquement pas endommagés, et continuèrent leur progression jusqu'au cou. (...) Mais quand ils commencèrent à dégager son visage, ils apprirent que leur travail ne faisait que commencer. Les cubes se mirent en mouvement sans prévenir. Glissant, se bousculant et ondulant, la dernière partie de la coquille entra dans Galiana comme une flaque vivante. Le quasi-liquide entra par sa bouche, son nez, ses oreilles et ses yeux, coulant autour des globes oculaires.
(...)
"Je ne mens pas", dit Skade doucement " mais je ne peux pas laisser nos esprits communiquer. Il y a quelque chose dans ta tête, vois-tu. Quelque chose que nous ne comprenons pas, si ce n'est qu'il s'agit d'une chose probablement étrange et hostile."
"Je ne pense pas ..." commenca Galiana. Mais la pression derrière ses yeux devint tout à coup aigue. Galiana eut l'étrange expérience d'être poussée de côté, usurpée, mise dans un petit coin de sa propre tête. Quelque chose d'incroyablement sinistre et ancien prit le devant de la scène, juste derroère ses yeux.
Elle entendit sa propre voix.
"Moi, vous voulez dire?"
Skade semblait n'être que modérément étonnée.
"Peut-être. Et qui êtes-vous, d'ailleurs?"
"Je n'ai pas d'autre nom que celui qu'elle m'a donné."
"Elle?" Skade semblait amusée.
" Galiana," répondit l'entité. "Avant que je pris son contrôle. Elle nous a appelé - nous, mon intelligence - les loups."
(pp.10,11,12,18)
Shen contemplait le vaisseau cartillagineux avec l'expression révoltée d'une végétarienne qui se voit offrir un pignon de poulet entamé.
Il était désormais certain d'être le dernier homme en vie, après avoir abandonné tout espoir qu'il reste des survivants sur Terre. N'était-il donc pas obligé, en définitive, de découvrir ce que signifiait être humain, de parvenir à une ultime synthèse de tous les sujets évoqués dans les livres à sa disposition?
Dans la vie, on ne choisit pas ses amis ; la vie s'en charge.
Ici et là paraissaient des amas de cubes noirs, de dimensions variables et orientés différemment. Ils semblaient avoir été forcés dans la coque comme dans de la pâte à modeler; de façon à être à moitié enfouis dans le métal du fuselage. Ils se terminaient par des queues faites de cubes plus petits, formant d'élégantes structures fractales.
(p.3)
Elle forma une hypothèse. C'était facile. Les cubes s'étaient agglutinés à l'extérieur du vaisseau de Galiana. Ils s'étaient multipliés, absorbant et convertissant le matériau du fuselage. (...) Les cubes s'étaient introduits
dans la fusée, puis avaient formé des structures faisant office de combattants. Ces soldats avaient tué l'équipage, dans leur lente avancée au départ des pénétrations du fuselage. D'après leurs restes, ils devaient être des entités diformes et asymétriques, davantage des conglomérats que des corps solides. Capables de passer par la plus petite ouverture, et de se réassembler de l'autre côté. (...) selon Skade, la conquête du vaisseau avait du s'étaler sur plusieurs jours. Des semaines, même.
(p.7)
Je ne ne suis peut-être pas très belle ,mais je suis entière.
— Qu'est-ce qu'il se passe ? lança Topolsky dont le lourd vêtement froissé par le vent ruisselait de son passage sur le pont.
— Une urgence médicale, maître Topolsky.
— Le docteur va lui forer le crâne, expliqua Mortlock avec autant d'enthousiasme que s'il venait de passer chirurgien assistant. Son cerveau ne peut plus respirer, vous voyez, donc il lui comprime les pensées.
— Un résumé louable, dit madame Cossile en joignant le bout de ses doigts.
Au tout début de sa carrière , elle s'était entraînée pour ce genre de décompression d'urgence mais , depuis , elle avait eu le temps d'oublier à quel point l'air pouvait être bestial , comme un animal engagé s'échappant de sa cage en dechirant tout ce qui lui tombait sous les griffes.