Coup de poing en pleine face, les os du nez craquent, le sang coule.
Haine, violence, misère, frustration, privation voici le cocktail explosif de
Mungo.
Mungo c'est un ado de quinze ans, qui n'a pas encore bien compris qui il est. Nous le suivons dans les mois décisifs de son adolescence, qui vont le faire grandir d'un coup, beaucoup trop vite.
Mungo, c'est avant tout une atmosphère, le Glasgow des années 90, protestants contre catholiques, une ambiance poisseuse de fin de pub, de trop de bière, de regards torves, …
Mungo jusqu'à présent subit, endure, les absences de sa soi-disant mère Maureen dite Mo-Maw, mère célibataire trop jeune, grand-mère à 34 ans, incapable de s'occuper d'elle-même, alors de ses trois gosses… D'ailleurs le plus âgé, Hamish est déjà parti, il n'est pas allé bien loin après avoir mis enceinte Sammy-Jo qui a quinze ans. Hamish c'est le chef de bande, le caïd qui règne sur son petit monde, qui est là pour casser du catholique à ses heures perdues et vit de trafics de drogue.
Jodie, elle, c'est la cadette, elle protège son petit frère, le nourrit comme elle peut grâce à son petit boulot de serveuse après les cours quand Mo-Maw les laisse se débrouiller tout seuls pendant des semaines. Jodie est révoltée par les déficiences de sa mère, et elle n'a qu'une envie, quitter Glasgow au plus vite en faisant des études supérieures.
Mon petit coeur a été broyé, laminé, réduit en miettes devant toute cette violence crue, cette brutalité pourtant si réelle, si tangible, cette si grande difficulté voire incapacité à aimer pour la plupart des personnages.
N'allez pas croire ici à une quelconque fiction, ce récit sonne trop vrai, trop juste pour avoir été complètement inventé. Les mots percutent, me laissent sonnée, groggy, titubante, au bord de la nausée.
Je ne vous ai pas encore dit un détail de taille, dès le début le compte à rebours est lancé, on sait que
Mungo va vivre un cauchemar, lui qui n'est pourtant que candeur et naïveté.
Mungo est innocent et tendre, et surtout amoureux. Mais il n'a pas compris que dans le Glasgow des années 90 on ne peut pas tomber amoureux impunément d'un garçon.
Ce Glasgow défavorisé des années 90 j'y ai mis les pieds, une courte journée, mais qui m'a laissée un souvenir indélébile. Des barres de HLM, du béton partout, pas un brin d'herbe, des jeunes de quinze ans livrés à eux-mêmes en pleine après-midi, complètement défoncés au pied d'une fontaine qui n'a pas vu d'eau elle non plus depuis longtemps, une misère incroyable. Des sortes de magasins-prisons, toute la marchandise et le gérant derrière des grilles pour se protéger des vols et de la violence. le thatchérisme a mis l'économie de l'Ecosse à plat, le tiers de hommes se retrouve au chômage, c'est la chute du modèle social et ouvrier qui était en place depuis un siècle… Les statues du patriarcat tombent de leur piédestal avec fracas, dans l'indifférence des élites anglaises, le modèle social est définitivement bouleversé, nombre de familles sont brisées, entre honte, perte de repères, grande pauvreté, horizon bouché qui empêche toute mobilité, de se projeter dans un ailleurs, un autre endroit, une autre vie.
Les sentiments sont si puissants, si justes, l'emprise du grand frère, la violence des normes sociales et physiques sont si oppressantes et si bien décrites, que je ne peux que penser que ce récit est en partie autobiographique.
Cependant
Mungo n'est pas que noirceur, c'est parfois des respirations, des envolées de tendresse, des bouffées d'amour de
Mungo pour sa mère, son frère et sa soeur, et bien sûr, James, celui qui décille les yeux de
Mungo avec toute la patience d'un premier amour. le retournement de situation final m'a ravie.
Je n'ai pas lu
Shuggie bain, du moins pas encore… Je vais avoir besoin de temps pour me remettre de ma descente aux enfers… Et puis, à tout hasard, un bon conseil, évitez de faire du camping au bord des lochs en Ecosse…
Malgré tout, une question reste sans réponse à ce jour, mais pourquoi ce livre aussi bouleversant n'a-t-il pas plus de lecteurs sur Babelio ? Vous savez ce qu'il vous reste à faire …