Nous nous verrons en août
À paraître en français la semaine prochaine, nul doute que ce roman posthume va faire un tabac, evenemement littéraire dit-on. Sur un fond plutôt sulfureux qui fait déjà recette chez nos amis de langue espagnole, nous n'allons pas bouder notre « plaisir » de lire ce livre inopiné dont je ne connais pas encore aucune feuille.
15 mars 2024 :
Ana Magdalena Bach, âge 45 ans, belle - c'est fortement suggeré - nous gâte avec sa culotte en dentelle, chaude comme la braise des Caraïbes. le ventilateur au plafond (à la mode coloniale) de sa chambre d' hôtel brasse de l'air chaud, et regarder par la fenêtre nous montre des hérons sur la lagune ou les marais, je ne sais plus ; en tout cas je m'étonne que la belle qui anime le bal de son feu ardent n'invoque pas les moustiques ? C'est sur un chemin paradoxal qu'elle nous entraîne avec elle, chemin qui nous mène au cimetière où est enterrée sa maman qui était tout pour elle.
Une fois par an, Ana emprunte strictement le même itinéraire, à l'aveugle pourrait-on dire, achète des fleurs à la même fleuriste, se paie une traversée de quatre heures qui fut en hors-bord et aujourd'hui en bac . Dans ce parcours mécanique dont elle s' extrait par la lecture d'un livre qui chemine vers la tombe de sa maman, c'est assez tape-cul à la longue , mais elle lit : on ne va pas la contrarier notre chère Ana. À sa maman, elle va tout lui dire, sait sa bienveillance infinie et va lui raconter son aventure adultère avec un homme qu'elle a rencontré à l'hôtel la fois précédente à l'issue de sa visite au cimetière lors d'une soirée dansante au son d'un orchestre de jazz qui la déshinibe totalement. Elle se jette à corps perdu sur ce qu'on pourrait appelercsa proie de son élan de femme fatale. L'homme manifeste même quelques signes d'inquiétude, mais un homme reste un homme, l'appétit vient vite en mangeant. de cet homme, elle n'en saura fichtrement rien. Après une scène torride dans la chambre d'hôtel d'Ana, l'homme après le repos du guerrier va lui glisser à son insu dans le livre qui l'occupa pendant la traversée un billet de 20 dollars. de ce « tarif », elle va en concevoir humiliation et étonnement. Mais qu'à cela ne tienne, elle veut revoir cet homme qui l'a consommée sans amour au cours d'une nuit durant, selon sa propre expression, mais c'est elle qui l'a cherché !
Entre deux traversées syncopées, Ana éprouve le besoin se s'interroger sur elle-même qui justifie un tel acte de première entorse conjugale en 25 ans de mariage. Elle nous présente son mari, une force de la nature .. sa fille qui veut entrer dans les ordres .. on se sent glisser dans un monde à double sens, le chaînon manquant se révèle à nous dans une frénésie à la Marquez sans nul doute. Je n'en dirai pas plus, sinon je vais tout dire. Sans oublier tout de même de dire que toute la famille trempe dans la musique à des degrés divers dans un maelström encore une fois très tropical qui fait figure de monde à part.. nous tombons sous le charme d'un boléro enivrant et érotique ou d'une musique plus éthérée de Tchaikovski !..
Pour ceux qui ne peuvent pas voir en peinture ma prose, à supposer qu'ils me lisent jusque là, il y a la 4 eme de couverture des
Editions Grasset qui éclaire peut-être mieux ce que je me propose de dire sur cette oeuvre posthume pour le moins inattendue et jouissive du grand
Gabriel Garcia Marquez, prix Nobel de littérature colombienne.
Incursion dans le texte:
« Alors, elle (Ana) le regarda de nouveau par dessus son épaule, non pour découvrir qui était le maître de cette voix, mais pour le harponner d'un regard des plus beaux yeux qu'il verrait jamais. »
« Le deux-pièces en soie noire, tubulaire et un peu trop long pour la mode, allait bien avec sa coiffure ». On dirait une escort-girl !
« Ce n'était là rien de nouveau : ils avaient su conserver certaines de leurs habitudes d'amants, parmi lesquelles celle de se doucher ensemble » (Ana et son mari)
C'est drôle cette histoire d'amants !
« Ana Magdalena monta à sa chambre (d'hôtel) portée par une frayeur délicieuse qu'elle n'avait plus éprouvée depuis sa nuit de noces »
Contrepoint 18 mars 2024
Habituellement je n'attaque pas la lecture d'un livre comme ça quand il s'agit d'une oeuvre posthume (éditée ici 20 ans après la mort de son auteur) sans me pencher sur ce qui nous vaut un tel décalage hétérogène, la plupart du temps échaudé par des opérations mercantiles d'éditeurs qui nous promettent la chose comme l'affaire du siècle.
En enquêtant rétrospectivement, j'apprends d'une interview donnée par Marquez en 1999, à propos de ce dernier écrit , que celui-ci amoindri par l'âge et la maladie, ne répudiait pas l'idée d'évacuer de son registre cette oeuvre qui lui paraissait alambiquée et de toute manière coupée d'un projet plus vaste « l'Amour chez les gens âgés » avec 3 volets supplémentaires dont il entrevoyait vu les conditions du moment incertaine sa réalisation. Il fit lecture du premier chapitre de «
Nous nous verrons en août » et basta..
Il semble que son texte ait été remanié aux fins de publication, et pas toujours avec bonheur si j'en juge d'après un extrait original.
Je vais être honnête, bon le type était peut-être dans le coaltar, mais il y a une réflexion tout de même ; j'ai trouvé plaisir à lire ce délire bien enlevé, mais j'ai effectivement tiqué sur certaines formulations.