AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Cigale17


« Il a taggué, sniffé, fumé, juré, volé, tranché, cogné, fui, sauté, démoli une Ford Escort, détruit une boutique, saccagé une barraque, pété un nez, planté un couteau dans le doigt de son beau-père, mais ça fait un bail qu'il n'a pas fugué. C'est du taf et du stress » (p. 15). Une fugue ? une évasion plutôt, non ? Ni l'une ni l'autre, ou un peu les deux, c'est selon : on comprend vite ce qu'il a en tête. Avec un sac à dos qui pèse une tonne, rempli à craquer de lourdes pierres, des silex dans cette région, leur a dit Steve, il s'éloigne de L'École de la Dernière Chance où il a été placé en dernier recours. Ce manoir du XVIIe siècle, bâtiment magnifique, classé et, dit-on, hanté, doit prochainement être transformé en appartements de luxe. Juste avant de partir, il a gravé sur une des poutres apparentes de sa chambre son nom, Shy, et l'année en cours, 95. Il a 16 ans, il est fou de musique et horriblement mal dans sa peau.
***
Tout dans ce bref et brillant roman de Max Porter concoure à traduire l'agitation et la détresse de Shy. le rythme de l'écriture d'abord : on passe de phrases isolées à de brefs paragraphes pour se plonger ensuite dans de très longues phrases qui courent sur plusieurs pages, mais qui ne présentent aucune difficulté de lecture grâce aux virgules ; le ton ensuite, de l'humour grinçant au plus profond désespoir ; le style aussi, de la poésie à la vulgarité ; la narration : on change fréquemment de narrateur, passant du monologue intérieur de l'ado aux paroles des potes, des éducateurs, de la mère, du beau-père (ah ! le beau-père), à la voix off d'un documentaire, pour revenir à Shy ou à un narrateur à la troisième personne. La conception graphique est originale et remarquable (Cyriac Allard) : la mise en page, les changements de polices, de tailles et d'attributs de caractères. Dans deux passages, le texte commence sur la belle page pour continuer sur la fausse page… On adopte le rythme du garçon, ses hésitations, son mal-être, sa dépression, ses rancoeurs comme ses espoirs. Oui, il y a pourtant de l'espoir malgré les difficultés et…deux blaireaux morts, prétextes, entre autres choses, à une reconnexion avec la nature. Il ne m'a pas fallu plus de deux heures pour dévorer ce bref roman. Je l'ai lu il y a un mois, mais le livre étant sous embargo, j'ai attendu pour en faire la critique. Je me demandais si mon engouement tiendrait. C'est le cas. Tentez le coup !

Merci à Nathan de Babelio, à l'opération Masse critique privilégiée et aux éditions du Sous-Sol pour ce formidable roman.
Commenter  J’apprécie          423



Ont apprécié cette critique (40)voir plus




{* *}