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Critiques de Sébastien Rutés (91)
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Mictlán

Mictlán, en langue nahuatl, famille des langues uto-aztèques, et actuellement la langue indigène la plus parlée au Mexique, signifie « le lieu des morts », où les défunts accèdent à l'oubli après un long voyage à travers le monde d'en bas.

Le titre de ce thriller, peu conventionnel, de par sa traduction résume assez bien l'âme de celui-ci.

Dans un pays d'Amérique latine, jamais nommé, même si Sébastien Rutés a pris comme point de départ un fait divers mexicain datant de 2018, où la criminalité, comme les inégalités et la pauvreté ont explosé, les élections approchent. le Gouverneur, candidat à sa propre réélection, doit tenter de cacher tous ces cadavres victimes de la violence ordinaire, « vu que les chambres froides des morgues et des hôpitaux et même des boucheries-charcuteries sont pleines, et les cimetières aussi ... ».

Deux hommes, au passé sombre, Gros et Vieux ont accepté de prendre le volant de ce semi-remorque chargé de 157 cadavres. Ils ont l'ordre du Commandant de rouler 24 heures sur 24, sans jamais s'arrêter sauf pour faire le plein de carburant et alors, interdiction d'ouvrir la remorque réfrigérée.

C'est donc à ce voyage que nous sommes conviés, dans cette cabine où les deux protagonistes se relayent et se surveillent. L'auteur nous laisse entendre les points de vue de ces deux hommes hantés par leur passé de misère et de violence livrant leurs pensées, ainsi que celui du narrateur, tout au cours de ce voyage hallucinant et sans pause, comme la longue phrase que constitue le premier chapitre.

Mais le lieu où les morts peuvent enfin accéder à l'oubli, est encore loin et les embûches vont être nombreuses et il va falloir faire face aux narcos, aux gangs, aux flics, aux militaires... Nous sommes plongés dans un pays en proie au chaos le plus total, dans un monde inhumain, où tout est hostile, où la violence, la terreur et la mort règnent : pour survivre, il faut tuer.

C'est un roman noir, très noir, avec cependant des petits instants de beauté et, vers la fin du voyage, une lueur d'humanité et comme une sorte d'apaisement.

Ce petit opus très sombre, assez éprouvant, dérangeant, bouleversant, au style épuré mais non sans une certaine poésie, ne peut en aucun cas laisser le lecteur impassible.

La forme littéraire est en complète adéquation avec le fond du roman, ni trêve, ni respiration : un véritable exploit !


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Mictlán

Quelle aventure ! Quelle histoire remplie de cadavres où la mort est omniprésente, passée ou à venir ! La citation de B. Traven, un auteur dont j’ai beaucoup apprécié La révolte des pendus, La charrette et Rosa blanca, cette citation placée en épigraphe m’a fait tout de suite penser que j’allais plonger dans un drame mexicain et je n’ai pas été déçu.



Mictlán, le lieu où les morts peuvent enfin accéder à l’oubli, est encore loin quand Sébastien Rutés m’embarque dans la cabine d’un camion semi-remorque frigo transportant cent cinquante-sept cadavres que le Gouverneur veut cacher en le faisant rouler constamment.

Pour conduire ce transport macabre, deux hommes : Gros et Vieux, comme l’auteur les appelle. Ils ne s’entendent pas vraiment mais cohabitent par force sous la menace du Commandant qui couvre son supérieur visant sa réélection.

Ici, je dois tout de suite parler du style d’écriture particulier de ce roman très noir découvert dans le cadre des Explorateurs du Polar de Lecteurs.com, un livre édité par Gallimard dans sa collection La Noire. Sébastien Rutés m’a étonné dès les premières lignes en écrivant sans finir ses phrases, les mots et expressions s’enchaînant sans cesse dans le mouvement de ce camion qui roule, qui roule vingt-quatre heures sur vingt-quatre dans le désert. Surpris, au début, j’ai ensuite bien apprécié le style, la pertinence des réflexions, leur à-propos ainsi que les informations distillées au fil des pages.

Enfin, il faut bien s’arrêter pour faire le plein dans une station-service et là, je retrouve un chapitre classique, des phrases courtes, des paragraphes. Cela permet de souffler très peu car les événements se précipitent, nos deux compères reprennent leur périple et le style s’adapte aussitôt à la route qui défile.

Roman noir intrigant, palpitant, angoissant, macabre, Mictlán fait réfléchir au sens de la vie, à la misère, au pouvoir qui sacrifie les humains et autres êtres vivants sans état d’âme, enfin à la mort qui nous attend tous et toutes.

Souffrir, ne pas souffrir, faire du mal à ceux qu’on aime, Gros y pense, revoit tout cela dans ses rêves agités lorsqu’il peut enfin dormir dans la cabine surélevée du camion pendant que Vieux conduit. Chacun revoit sa femme et sa fille ou sa mère et sa sœur mais il est temps de chercher un peu de paix, de trouver un peu de quiétude pour les vivants comme pour les morts.

À la fin du livre, l’auteur qui publie son sixième roman, explique qu’en novembre 2018, un camion semi-remorque contenant cent cinquante-sept cadavres a été retrouvé près de Guadalajara, au Mexique. Ils étaient tous morts de mort violente. Ils étaient là parce que les morgues étaient pleines.



C’est cette information qui a été le point de départ de son écriture, écriture que Sébastien Rutés conduit magistralement à son terme.
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Pas de littérature !

L'argot du ricain !

En 1950, les traducteurs des polars amerloques pour la Série Noire devaient coloriser l'English façon patois de zinc. Il fallait inventer une langue des rues sans avoir jamais mis ses petits petons chez l'oncle Sam et tata flingueuse. Parfois, ils « Statisaient » même les noms d'auteurs bien de chez nous pour vendre du rêve américain. Traverser l'Atlantique avec des romans de gare force le respect.

Grégoire Centon est une de ces plumes de l'ombre au service du grand patron du polar de chez Gallimard, Marcel Duhamel.

Pas très doué pour les langues vivantes mais à l'aise avec les morts violentes, c'est son épouse qui traduit de façon académique les romans et il se charge ensuite de la réécriture pour répondre au cahier des charges de la boutique : Argot, Violence, Humour. La psychologie reste aux vestiaires. Freud est bâillonné avec le torchon du barman pour laisser causer les brèves de comptoir.

Pour trouver l'inspiration des bas-fonds, Grégoire se met à fréquenter les bas-côtés et à fricoter avec des gens du Milieu. Oxymore et balles au centre. Les personnages semblent sortir des romans d'Albert Simonin, hauts en couleur et haut les mains face à une flicaille qui a recyclé de l'ancien collabo.

Grégoire compte les balles comme un arbitre de Roland Garros sans filet (oui, j'écris ce billet tout en suivant la petite balle jaune à la télé), se fait « otager » par des bandes rivales, embauché de force pour traduire les mémoires d'un truand en quête d'une postérité littéraire.

Plus un hommage qu'un pastiche de ces romans populaires, cette merveille d'humour aux dialogues qui sont des fusillades de bons mots, raconte aussi les tourments et les états d'âme des traducteurs. Sébastien Rutés connait d'ailleurs son sujet car il est lui-même décodeur de plumes latino-américaines.

Seul bémol au formol, l'auteur m'a parfois un peu perdu dans ses personnages infréquentables. Avec tous ces alias, je ne savais plus qui poursuivait qui et je mélangeais les porte-flingues. Certains sont un peu trop restés incognitos.

C'est chercher la petite bébête car j'ai vraiment apprécié de sentir à quel point l'auteur avait pris du plaisir à écrire ce roman. Joie communicative qui s'échappe de ses métaphores. Traits de plume et traits d'esprit.

Ne pas se fier au titre ! C'est de la littérature.

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Mictlán

Cela fait des jours qu’un semi-remorque frigorifique blanc, totalement banalisé, parcourt inlassablement le désert mexicain, ses deux chauffeurs Vieux et Gros se relayant sans interruption, de façon à ne s’arrêter que pour les pleins de carburant. A son bord s’entassent cent cinquante-sept cadavres, tous victimes de la violence, certains non identifiés, en tous les cas interdits de crémation tant qu’une enquête peut encore les concerner. La criminalité saturant morgues et cimetières dans tout le pays, le gouvernement en pleine période électorale cherche ainsi à gagner du temps avec les morts dont il ne sait plus que faire…





Cette histoire surréaliste est inspirée d’un fait réel survenu au Mexique en 2018. Les premiers chapitres sont déconcertants : une seule et même interminable phrase y tourne en boucle au fil des pensées ressassées par Gros et Vieux, au cours de leurs longues heures de divagation sans but sur les routes droites et sans fin qui traversent la torpeur du désert. L’on y comprend peu à peu leur histoire et cette présence perpétuelle de la mort, dans ce pays où la vie ne pèse rien, et où chacun doit être prêt à tout pour préserver sa peau un jour de plus.





Puis le rythme change, alors que les incidents viennent interrompre les réflexions désabusées des deux hommes, transformant leur traversée hallucinée d’un pays aux allures de purgatoire en une véritable plongée en enfer qui n’est pas sans évoquer Le salaire de la peur de Georges Arnaud. Dès lors, tout dérape, entraînant les deux chauffeurs dans une glissade mortelle où ils tenteront comme ils peuvent de conserver le plus longtemps possible l’équilibre, en tout cas le fragile souffle qui les différencie encore de leur silencieuse cargaison.





Le récit est du noir le plus pur : implacablement désespéré, le ton décapant ne laisse aucun répit, flirtant avec l’absurde dans un humour qui fait autant rire qu’il atterre le lecteur. L’on est ébloui par la maestria de l’auteur, qui, tant par le style que par la construction du roman, a su si bien rendre l’atmosphère de peur qui pèse comme une chape sur une société résignée et terrée dans une passivité impuissante. Chacun espère y passer à travers les gouttes en fermant les yeux, n’hésitant pas à donner lui-même la mort pour éviter de la recevoir, avec pour « unique droit et seule liberté : gagner un peu de temps avant la fin. »





Déroutante au début, cette lecture s’avère une claque magistrale, une plongée saisissante dans le dangereux enfer d’une société mexicaine qui vit dans l’ombre de la mort perpétuellement en embuscade. L’on en ressort sidéré et groggy, durablement marqué par un désespoir si noir, qui n’exclut pourtant ni drôlerie ni poésie. Ce livre me marquera autant que le terrifiant 2666 de Roberto Bolaño.


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La vespasienne

« La vespasienne représentait un petit bout de zone libre, plus libre encore que la zone non occupée: sans pétainistes ni gaullistes, sans personne, elle n'appartenait ni à Paris ni au présent, elle perpétuait la liberté d'autrefois (…) La vespasienne, c'était le plaisir. Or, selon les idéologues de tout poil, les martyrs par vocation et les chantres de la nation, le plaisir appartenait au passé »

Celui qui observe les pissotières depuis sa fenêtre, c'est Paul-Jean Lafarge, un bourgeois féru de poésie, directeur de la très confidentielle Revue des lettres. Nous sommes en 41 et il est bien seul. Sa femme a quitté Paris, comme la plupart de ses connaissances. Sa revue n'intéresse même pas la censure allemande. Les seules fois où l'Occupation se rappelle à son bon souvenir, c'est quand la résistance plastique une librairie allemande. La coopération culturelle, Lafarge y est favorable, et les rares fois où on l'invite dans des soirées mondaines, il prête une oreille attentive aux derniers ragots sur Montherlant ou Brasillach.

Lorsqu'il est seul, Paul-Jean devient un autre homme. Car le poète a une âme de renifleur de petites culottes. La journée, il épie sa très jeune secrétaire Colette depuis le trou de la serrure. La nuit, depuis la fenêtre de son appartement, il observe la vespasienne, les allées et venues des prostitués et de leurs clients, descend y respirer les miasmes, s'enivre des odeurs âcres, de la saleté et de l'urine. Paul-Jean Lafarge est un soupeur (pratiques sexuelles que je découvre ici).

Un soir cependant, les fantaisies olfactives et érectiles de Lafarge-le-croûtenard vont prendre brutalement fin, lorsqu'il va tomber sur un pistolet, des chargeurs, et des résistants.

Dans La pissotière, Warwick Collins s'était déjà intéressé à ce microcosme unique, lieu de rencontres furtives parfois tarifées. Sébastien Rutés fait de la vespasienne le symbole de la France occupée et nous offre un roman très original sur cette période délétère à travers les mésaventures d'un inoffensif voyeur piégé par ses fantasmes. Lafarge n'a rien d'un héros. Il est ennuyeux, s'accommode de tout, se contentant de vivre dans une sorte d'éternité du temps poétique. Lorsqu'il se retrouve plongé dans une situation périlleuse qui le dépasse, il est prêt à tous les compromis afin de retrouver sa chère routine, quitte à balancer son ami allemand Witold Silcher, officier et poète, façon « Au bon beurre » de Jean Dutourd.

Avec ce nouveau roman Rutés nous montre qu'il est aussi habile dans le roman psychologique que dans le polar, décrivant avec finesse le cheminement d'un homme pour lequel la guerre et l'occupation n'étaient qu'un vague bruit de fond, et qui se retrouve littéralement extirpé de son sanctuaire. Le mateur va devoir devenir acteur à son corps défendant. La vespasienne de Rutés, c'est la guerre à contrecoeur, sans tambour ni trompette, et dans les lieux d'aisance.
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Pas de littérature !

Tu as la flemme de lire Steiner et Derrida? Tu veux tout connaitre des affres de la traduction, de la trahison du texte, de la complexité du langage, à travers le parcours d'un romancier sans succès qui cachetonne en traduisant des polars américains sans bien connaître l'anglais et qui met à jour son argot dans des bistrots auprès de truands parigots?

Lis donc le dernier roman de Sébastien Rutès, l'une des voix les plus singulières du noir français (dont je recommande chaleureusement le beau Monarques) qui a assez d'humour pour placer dans cet opus une allusion à l'un de ses romans « Une histoire alambiquée de toilettes publiques dont j'imputais l'échec aux circonstances historiques exceptionnelles ainsi qu'au sort qui s'acharnait contre ma vocation » (La Vespasienne, que je recommande chaleureusement).



La traduction est la fois impossible et nécessaire, comme disait Jacques D., et c'est là qu'est l'os. Dans les années 50, Gringoire Centon -alias Gregor G. Senton pour faire américain- tente de traduire, pour ne pas dire réécrire des polars pour Marcel Duhamel, mythique créateur de la Série noire chez Gallimard. « Vous en faites un beau, d'agent double ! Et même triple. Un traducteur, ça fait cocu deux langues. Vous, vous réussissez à trahir l'anglais, le français et l'argot. Vous êtes le Mata-Hari des langues vivantes ! »

Le monde est en pleine mutation, c'est le début de la Guerre Froide, la France à la papa se prend de plein fouet une vague d'American Way of Life, et Boris Vian écrit des polars sous pseudonyme anglo-saxon. « La langue évolue, le monde aussi. Traduire, c'est rendre compte du temps qui passe ».


Gringoire se retrouve à son corps défendant plongé dans un imbroglio politico-truandesque, auprès d'un vrai malfrat à l'ancienne mais fin lettré qui n'est pas sans rappeler l'un des personnages des Tontons Flingueurs.

Cette histoire foutraque est prétexte à un festival sémantique réjouissant via la confrontation des univers, des langages, des bonnes et des « mauvaises"  littératures, des vocations (traduction versus création), et à un hommage au roman noir. Sébastien Rutès, lui même traducteur, a le style truculent, on pourrait citer des passages entiers de Pas de littérature!

Moralité: « Il faut toujours mentir sur ses lectures. Les lectures, c'est comme des aveux signés. Pas besoin d'interrogatoire, c'est le sérum de vérité. Rien ne vous trahit autant qu'un livre. »

Je remercie Gallimard et Babelio pour l'envoi de cet ouvrage reçu dans le cadre d'une opération Masse Critique.

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Le linceul du vieux monde

Le linceul du vieux monde, tiré des paroles du Chant des Canuts, d'Aristide Bruant (« Nous tisserons le linceul du vieux monde Car on entend déjà la tempête qui gronde ») place ce polar historique sous le signe de la révolte sociale et donne au lecteur l'impression de suivre un feuilleton quotidien dans Le Siècle, La Presse ou La Patrie, dans lequel des personnages hauts en couleur luttent dans le Paris de 1899.



Alors qu'un mystérieux piqueur de fesses agresse des femmes dans les tramways, et les tue, les As de la police, dont le fameux Rossignol (connu pour avoir été poignardé par l'anarchiste Duval, et à qui l'on doit des Mémoires sur ses années de service), ainsi que des scribouillards n'ont qu'un mot à la bouche, « les anarchistes ».

Coupables tout désignés, ils ont pourtant été laminés par la guillotine sèche. L'Affaire Dreyfus divise la France, La Ligue et Les Patriotes s'agitent à Fort Chabrol, ça chauffe à Paname.



Pendant ce temps, Oscar Wilde, ruiné, épuisé, n'est plus que l'ombre de lui-même. Exilé à Paris sans le sou, il mendie des verres en échange de quelques vers, et rêve de faire sauter la Tour Eiffel, avant l'Exposition Universelle. Et le voici plongé dans cette sombre affaire de piqueur aux côtés de Nino, un vieil anar qui tente d'organiser la résistance face au harcèlement policier.



Le linceul du Vieux Monde est une incursion dans le Paris populaire et les milieux libertaires où cohabitent des Hachischins, les Panthères des Batignolles, et même Bibi la Purée, le compagnon de Verlaine. C'est un polar qui fait l'éloge de la solidarité et qui fleure l'absinthe. Qui plus est, Sébastien Rutès, dont on ne dira jamais assez de bien du poétique et beau Monarques, et de La Vespasienne, manie la langue verte comme un Apache des Fortifs.

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Mélancolie des corbeaux

Sébastien Rutès, voilà un nom que je n'oublierai pas. Une semaine déjà que je l'ai ouverte cette "Mélancolie des corbeaux" et j'y ai gagné des maux de tête, une incomparable sensation d'ennui, un sommeil facilité ralentissant sévèrement ma lecture.



C'est vraiment pas gentil tout ça. C'est vrai mais cette semaine je n'étais pas vraiment d'humeur à me laisser engluer par quoi que ce soit et pourtant je l'ai lu jusqu'au bout... Vous savez comme un enfant a qui on dit que le feu ça brûle et qui ne comprend vraiment qu'au moment où il pose sa main sur la plaque de cuisson, aïe ! Et bien j'ai fait pareil, c'est vous dire si j'ai gardé mon âme d'enfant.



Brièvement je vous explique les problèmes que ce livre m'a posés :

- Il a la couleur du polar, il a l'étiquette du polar mais il n'a pas du tout le goût du polar.

- C'est une fable, un conte interminable et anthropomorphique mais n'est pas George Orwell qui veut.

- Je ne connais pas bien le nom des figures de style, c'est bien la mon moindre défaut, mais ce dont je suis sûre c'est qu'il y en a pléthore/trop dans ce livre.

- La portée du livre est d'évidence philosophique mais le message se perd hélas dans le trop plein de détails... et de figures de style. Le prétexte animal pour la critique des comportements humains manque, à mon goût, de subtilité.

- La fin ce n'est même pas "Ouais trop bien, génial je ne m'y attendais pas du tout !"



Voilà, bon j'ai fait en 5 points comme @Sphilaptere, en plus je copie, j'espère qu'il ne m'en voudra pas, je promets de ne plus recommencer :'(



Bref, je n'ai pas aimé mais comme on dit chez moi «Si tu n'aimes pas n'en dégoûte pas les autres» alors ça m'a fait du bien d'évacuer cette déception mais Sébastien Rutès écrit très bien et sa philosophie en vaut largement une autre. Je ne peux donc que vous encourager à le lire et à vous faire votre propre opinion (enfin si vous avez du temps devant vous quand même...) quant à moi je jure mais un peu tard qu'on ne m'y prendra plus ;-))
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Bandits & brigands

Rien ne me laissait présager une telle lecture, malgré une très belle et originale réalisation éditoriale. C’était sans compter avec la présence, parmi les 8 auteurs, de Linda Lê, dont j’ai décidé de ne rater aucun texte.



Ici, elle consacre une petite vingtaine de pages à la figure de Phoolan Devi, découverte par moi, dans un livre lu grâce à ma fille, Culottées 2, de Pénélope Bagieu. Phoolan Devi, dont la vie fut marquée par une extrême violence, est une des deux seules femmes du livre (avec Maria Bonita et les si héroïques cangaceiros, des bandits de la région du Nordeste, au Brésil).



La plume de Linda Lê, m’a encore séduite. Usant, sans abuser, de la formule « Il faut imaginer », Linda Lê tisse « un conte cruel et une épopée impressionnante ».



Après cette lecture âpre, mais sublimée par le style inimitable de Linda Lê, j’ai poursuivi la lecture dans le désordre, j’avoue.



J’y ai donc appris essentiellement que : « Le concept de banditisme social fut crée par Eric Hobsbawn pour différencier ce banditisme du vol ordinaire, ou de la criminalité organisé comme la mafia ou les gangs. Bien évidemment, la frontière entre ces catégories est plus floue dans la pratique. »



Ce livre appartient à la collection Lampe-tempête des éditions L’échappée, dirigée par Jacques Baujard : « Par un travail de redécouverte de textes de fiction méconnus ou oubliés, augmentés de commentaires critiques et politiques, cette collection entend donc montrer que la littérature peut être instrument de prospection, à la recherche des possibles, les meilleurs comme les pires, ceux qui gisent dans le passé comme ceux que nous réserve l’avenir. »



Bien entendu que Panaït Istrati est cité dans la préface, car sa contribution est indiscutable : « […] la dimension littéraire apportée par l’auteur de Kyra Kyralina aux récits des bandits sociaux balkaniques a permis de faire découvrir à un large public la vie tragique de ces révoltés ». En effet, ce livre s’inscrit bien dans cette lignée. Des pages qui s’apparentent à des vrais récits d’aventures.



Les 8 figures téméraires de ces justiciers sont brièvement présentées pp. 14-16 et leur liste reprise par la quatrième de couverture.
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Pas de littérature !

"Pas de Littérature "- le 17 avril 2022



Un immense Merci à Babelio , à une Masse critique privilégiée ainsi qu'aux Editions Gallimard… pour cette lecture légère et facétieuse !

Une pause bienvenue de dérision et de fantaisie, après un certain nombre de lectures passionnantes mais éprouvantes !...



Avril 1950… Gringoire Centon gagne péniblement sa vie comme traducteur de policiers américains pour la Série Noire. Ce “Gringoire”, il faut le dire est un bien piètre traducteur , pour ne pas dire un véritable “glandeur”, véléitaire à souhait; heureusement, son épouse le sauve en l'aidant énergiquement dans ses traductions et dans les corrections, pour rendre sa "copie" dans les temps.



Lui, rêve indéfiniment au Livre qu'il voudrait écrire; en attendant je ne sais quoi..., il lui faut trouver un moyen de se distinguer dans ses modestes travaux de traducteur, en truffant exagérément ses “translations”, d'argot… qu'il va enrichir dans des bistrots glauques, pour " faire plus vrai"... !



S'ensuivent évidemment des aventures et mésaventures, dont les principales sont occasionnées par “un détective” aussi amateur et “glandeur” que lui, dans son domaine !



Une sorte de comédie déjantée, pétrie d'humour, de dérision, de “pieds de nez”, de loufoqueries … autant sur la société française d'après-guerre, que sur l'Eldorado que représente l'Amérique pour les français, que sur le métier ingrat de traducteur, que sur les mirages véhiculés par la Littérature…Une flopée de thématiques abordées !



Dans cette véritable sarabande, allant dans tous les sens, nous croisons un grand nombre d'individus louches, interlopes, fictifs que de personnages véritables; en tout premier, Duhamel, le créateur de cette célébrissime Série Noire de Gallimard, et patron de notre médiocre traducteur, avec les coulisses de la “Rue Sébastie Bottin”!...Sans oublier, Jean Meckert, Boris Vian, que notre auteur égratigne en passant…



La passion de Grégoire pour l'Argot nous vaut quelques pages savoureux sur François Villon…



En arrière-fond, nous “relisons” l'actualité très mouvementée de cette période d'après-guerre, où il faut reconstruire, et fermer les yeux sur certains comportements détestables des années de conflit avec l'Allemagne , collaboration, résistants de la dernière heure, repentances plus ou moins sincères,prolifération de voyous en tous genres, etc.



Avec cet ouvrage, je découvrais pour la toute première fois Sébastie Rutés, au parcours fort riche… ainsi que très habité par le genre policier, l'argot… la traduction…le monde de l'édition, et la Littérature dans son ensemble...



Un texte, à plus d'un titre, qui offre de nombreuses réflexions sur le Monde de la Littérature, des éditeurs, de l'Ecriture comme des subtilités du rôle du Traducteur…mais aussi sur tous les flottements existant dans un pays, après une guerre mondiale, et des profondes fractures au sein de l'état de ce même pays !



Un bémol, cependant, qui ne concerne que mes attirances toutes personnelles : il y a “surenchère” dans les “délires argotiques”...dans la dérision; comme si l'auteur , en voulant “amuser son public”, en rajoutait trop !!



En dépit de l'ensemble qui reste réjouissant, j'ai senti monter comme une sorte de lassitude et de décrochage...vis à vis des rebondissements aussi rocambolesques que surabondants, à mon sens ?!.



Je n'étais visiblement pas “le bon public”…; Ce qui m'a le plus intéressé ce sont les multiples digressions pleines de dérision, d'humour noir ou de lucidité... sur les livres, les bibliothèques particulières, sur le réel et la fiction, sur le genre du “Polar”,sur le dur métier très fantasmé d'écrivain, etc.



Pour conclure cette chronique "mitigée", j'ai choisi un extrait amusant mettant en parallèle le "Polar"... et ce que toute bibliothèque peut révéler d'intime:



"-Pourquoi m'avoir menti ?

-Il faut toujours mentir sur ses lectures.Les lectures c'est comme des aveux signés. Pas besoin d'interrogatoire,c'est le sérum de vérité. Rien ne vous trahit autant qu'un livre.Alors,si on lit peu,il faut faire croire qu'on lit beaucoup,pour que l'adversaire vous surestime. Si on lit beaucoup, c'est le contraire, pour qu'il vous sous-estime. (...)Il faut garder dans sa bibliothèque des livres qu'on ne lira jamais et brûler ceux qu'on aime,pour tromper l'ennemi."(p.229)
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Mictlán

Deux hommes qui ne sont jamais nommés autrement que par ses qualificatifs suivants , le Vieux et le Gros, sont chargés d'une mission assez singulière: ils doivent transporter au fin fond d'un desert d'un pays qui n'est lui non plus nommé un convoi d'un genre bien particulier puisque c'est 147 cadavres humains qui sont à l'intérieur du camion.



En effet, le Gouverneur, tête de l'éxecutif de ce pays qu'on imagine pas sous le sceau de la démocratie ne veut pas, en ces périodes électorales que ces cadavres encombrants soient portés à la connaissance de l'opinion publique.



Voilà donc notre Gros et notre vieux chargés de rouler sans jamais s'arréter pour transporter ce colis parituclièrement mal venu on ne sait trop où..



Partant d'un fait divers qui s'est réellement déroulé- un camion a été découvert au Mexique transportant un charnier de 300 cadavres, des morts privés de cimetière-, le romancier Sebastien Rutes passionné d'Amérique du Sud propose un voyage hallucinatoire, un road trip frénétique et funeste, teinté d'absurde, d'une certaine poésie morbide et même de spiritualité.



Il faut savoir que le Mictlán, du titre désigne dans la mythologie asteque « le lieu des morts », où les défunts accèdent à l’oubli après un long voyage à travers le monde d’en bas. En effet, nos deux protagonistes, le gros et le vieux, totalement désabusés et en fin de parcours, aspirent encore à rejoindre ce lieu symbolique histoire d'apaiser leurs esprits.



Cette intrigue, taillée à l'os , rappelle parfois le Salaire de la peur ( le film de Clouzot avec Montand et le roman de Georges Arnaud dont Jaenada a récemment glosé dessus )dans la Serpe.



Assurément, les amateurs de roman noir exigeant, qui cherchent une lecture singulière seront tentés par ce voyage littéraire sidérant et obsédant.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Mélancolie des corbeaux

Une bien belle découverte "Babelio" que ce roman/fable.

Le narrateur et personnage central est un corbeau.

Non pas un anonymographe, mais un véritable corbeau avec bec et plumes.

Il se nomme Karka, et ce vieux sage va devoir s'engager dans la résolution d'une problématique énigme : la présence à Paris de lions errants.

C'est peut-être ce côté "enquête" qui explique la publication de ce roman difficilement classable dans une collection policière.

Quoi qu'il en soit, impossible de ne pas penser à Jean de la Fontaine en lisant "Mélancolie des corbeaux", surtout quand on parle du conseil des animaux où se réunissent oiseaux, chats, chiens, rats...

Pour ma part, j'ai eu présentes à l'esprit pendant tout ma lecture les illustrations de Grandville, Doré ou encore de Benjamin Rabier, des oeuvres du célèbre fabuliste d'ailleurs cité dans le roman.

Quant au style de Sébastien Rutés, il est recherché sans être pompeux.

En voici un aperçu : "Les blessures de la nuit s'étaient refermées. Un silence apaisant les pansait. Quelques larmes perlaient encore comme des étoiles. Sans lune pour la réconforter, La nuit endeuillée était aussi noire que mes pensées."

Un livre que je vous conseille chaleureusement, si vous aimez les animaux, et la belle écriture.
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Monarques

Et si dans l'histoire d'une belle jeune fille au teint blanc comme la neige, aux lèvres rouges comme le sang et aux cheveux noirs comme le bois d'ébène on pouvait deviner les desseins expansionnistes du Reich allemand?



C'est en envoyant des lettres enflammées à sa maîtresse allemande Loreleï Luger (tout un symbole) que l'artiste mexicain Augusto Solis fait par hasard la connaissance de Jules Daumier, garçon livreur à L'Humanité. La belle a quitté son logement parisien et Jules le nouveau locataire décide de répondre à l'amant inquiet qui ronge son frein dans la capitale mexicaine.

De 1936 à 1937, les deux hommes vont correspondre et tenter de résoudre le mystère Loreleï. Cette quête va les conduire à une sombre affaire d'espionnage, des soirées parisiennes à la guerre d'Espagne, et de Berlin à Hollywood. Un complot se tramerait-il dans l'univers ouaté de Walt Disney?

Quelques soixante-dix années plus tard, c'est par courrier électronique que les descendants des deux hommes échangeront pour donner corps à ces fantômes que sont devenus Augusto et Jules. En se confiant l'un à l'autre par écran interposé, Daniel et Nieves tenteront de comprendre d'où ils viennent et qui ils sont.



Monarques est un roman à tiroir né d'une idée un peu folle que l'on doit à l'écrivain mexicain Juan Hernandez Luna, l'homme qui a rendu célèbre la ville de Puebla dans de chouettes polars, et le Français Sebastien Rutes. Cette oeuvre atypique et touchante (Luna est décédé au début du projet) mêle lettres, télégrammes, notes, récit d'aventure et envolées lyriques. On se surprend à se jeter sur des lignes griffonnées à la hâte sur une table de cuisine pour en apprendre un peu plus sur leurs aventures. "Louis, je pense que c'est le début d'une belle amitié », disait Claude Rains dans Casablanca. La relation entre Jules et Augusto tout aussi fascinante, pousse les deux hommes à braver les dangers et les distances pour trouver leur « Lorelei »...

Chaque partie du roman possède son charme. La première nous offre une belle radiographie de la France du Front populaire. Au détour d'une phrase apparaît devant nous le Paris du Vel d'Hiv', des lutteurs et des cyclistes, des bistrots, des ouvriers… La deuxième est une échappée belle où s'aventurent un nain érotomane accro aux sécrétions d'escargot, un nazi borgne,Goebbels, un Joyeux des Bat' d'Af, Maurice Tillet, le catcheur connu comme le « French Angel « (qui aurait inspiré le personnage de Shrek), Millan Astray, Walt Disney (Blanche neige était un des films préférés de Hitler), tout ça à un rythme échevelé sur fond d'"Opération Feu Magique"... . Ce feuilleton feuilletonnant s'achève sur une note d'émotion pure qui répondrait à une citation d'Antonio Porchia citée dans la seconde partie du livre, "On vit dans l'espoir de devenir un souvenir ».

Les plus grands hasards font souvent les plus belles rencontres...



La magnifique photographie imprimée sur le bandeau de cet ouvrage reçu dans le cadre de l'opération Masse critique est une oeuvre du photographe mexicain Manuel Alvarez Bravo.



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Pas de littérature !

Je suis généralement bon client pour les livres hommages, les pastiches, les « à la manière de », les « livres dans le livre », les énièmes degrés… Et c’est à quoi s’attaque Sébastien Rutès dans Pas de littérature.



Dans les pas de Gringoire Centon, traducteur d’auteurs US – bien aidé par son épouse - pour la flamboyante Série Noire en train de forger sa légende en ce début des années 50, Rutès nous entraîne dans une double spirale d’intrigue polardesque et d’exercice de style.



Côté polar, la quête d’un manuscrit disparu va le plonger au cœur d’un conflits de malfrats et le voir se confronter pour de vrai à ceux qu’il décrit pour de faux livre après livre.



Côté style, il tente le tour de force de flirter avec tous les genres déjà décrits plus haut, de placer son personnage au cœur de tous les codes des livres de l’époque, d’écrire le livre de son livre au fil de l’eau, et de livrer quelques réflexions bien senties sur les auteurs et le monde de l’édition.



« La Série Noire, c’est la littérature sans auteur. Une arnaque parfaite. »



C’est à la fois touchant, tellement les clins d’œil sont nombreux, confusant dans le fil de l’intrigue qui m’a vite échappé et étourdissant face à la profusion d’allusions dont je n’ai probablement pas saisi le quart de la moitié d’entre-elles.



Pas convaincu donc, même si l’ambiance générale du livre vaut assurément le détour pour les fans de la Noire. Et je vous laisse sur cette réflexion qui m’a un peu occupé l’esprit…



« Voler un voleur n’est pas voler, dit le proverbe, mais corriger un traducteur ? »

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Pas de littérature !

Traduire c’est trahir”, cet aphorisme qui court chez Gallimard, Gringoire Centon aurait peut-être dû le prendre au mot.



L’obscur traducteur de romans de la Série Noire, la nouvelle collection littéraire chère à Duhamel, lui, Gringoire Centon va se retrouver dans un mic-mac de trahison en pleine guerre froide et des gang en même temps.



Des ricains et de la vodka, des cocos et du coca, du Jazz et quelques truands qui ont de la littérature dans le cœur.



Sébastien Rutès, qu'on avait découvert d'humeur plus sombre avec son précédent roman, Mitclan, connait son sujet sur le bout des doigts.



Vrais truands, faux traducteurs, détectives et espions, François Villon et Boris Vian en guest, entre humour et légèreté, nostalgie d’une époque où la géopolitique faisait tout son possible pour éviter une troisième guerre mondiale.



« C’est comme la traduction, intervins-je. La langue évolue, le monde aussi. Traduire, c’est rendre compte du temps qui passe . Ce sont les voitures qu’on fabrique à la chaine, pas les traductions. D’accord pour introduire la littérature américaine en France, pas les méthodes de travail. Dites à Duhamel que le taylorisme n’est pas un courant littéraire! “



Pur essai bibliophile et argotique, “ Pas de littérature” est un hommage aux romans mythique de la Série noire,



traduction approximative, jargon de Belleville, louchebem des Halles en prime.



Sebastien Rutes sera présent lors de la prochaine édition de Quais du Polar du 1er au 3 avril 2022.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Mélancolie des corbeaux

Quelle folie de rêver d'une Communauté Animale !



Krarok, le Grand Corbeau, Maître du Conseil des animaux de Paris. Il va charger Karka le corbeau freux à l'aile cassé de mener une enquête en compagnie d'une tourterelle imbue de sa blancheur.



L'histoire se passe à Paris, entre le jardin des plantes, le Parc Montsouris, Notre Dame, la Tour Eiffel et le Bois de Boulogne.



Ici, pas d'humains que des animaux qui vont être dans tous leurs états après que les mouettes aient colporté une rumeur.



Un Conseil va se réunir au grand complet pour donner la parole à chacun : chiens, chats, oiseaux, chauves-souris, rats, écureuils, lapins, taupes, éperviers, faucons, grives, perdreaux, hérissons, furets etc ...

Mais aussi Bubo le Grand-duc, Mao le vieux chat, Trii le roitelet, Karka une séduisante corneille mantelée, Khan le cygne, Ierk la mouette, Yap le teckel défiguré et le fantasque toucan ....



¤ Nos yeux sont dessilés. Nous avons commis un jour l'erreur de penser......



¤ Il veut vivre longtemps

Ne sachant pas encore

Pourquoi vivre un instant.



- Un choix s'offre au vieux lion de la ménagerie du jardin des plantes, finir sa vie en cage en attendant l'injection fatale où être abattu par les humains après une ultime liberté pour aider tous les animaux.



¤ Il poussa un rugissement royal.

Paris trembla. La vie s'arrêta.

A travers la capitale des milliers de vivats : aboyés, miaulés, cancanés, nasillés, feulés, jappés, chuintés, hululés, roucoulés, craillés, croassés, glapis, cacardés, flûtés, pépiés, piaillés, ramagés, jacassés, et trompétés saluèrent le dernier combat .....



¤ le corbeau et le lion en promenade sur les quais enneigés et dans la brume, le lion s'arrête, émerveillé, devant la Tour Eiffel illuminée.



¤ le vieux lion dévala le tertre, traversa la pelouse accompagné de Karka et disparut dans les bois dans un dernier rugissement de joie.



¤ Vivre dans l'illusion protège des désillusions ....



Ce récit est une méditation poétique sur la vie, la mort, la peur et l'instinct de survie.



Mais Karka, le corbeau freux à l'aile cassé aura eu le temps d'avoir des petit corbillats avec la corneille mantelée . Accouplement peu commun entre deux espèces différentes.



Belle balade dans Paris et envoûtant roman où les animaux sont les "rois" et tiennent des discours, tout comme nous autres humains.



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Mélancolie des corbeaux



La Mélancolie des Corbeaux, est-il un roman farfelu ou le portrait naturaliste d'un corbeau dont l'intelligence a maintenant été démontrée par une équipe de chercheurs d'Oxford qui a publié, un article le mercredi 5 août 2009 ?



Téléphonant à l'INRA où l'on enregistre depuis longtemps les cris d'oiseaux, je leur demande si à tout hasard, vous auriez traduit en français les mots d'un certain Krarok le corbeau?

Désolé non pas encore, pas assez fou pour cela. Mais ne cherchez plus nous sommes le seuls à enregistrer les cris des corbeaux en France à Jouy-en-Josas, nous poursuivons les études d'un vieux chercheur pour honorer sa mémoire.



Celui ci a écrit pourtant «  c'est là que je vis sur le plus haut Févier. p9 »



Sébastien Rutès est sans doute passé par l'INRA de Jouy-en-Josas, car sa connaissance des corvidés est stupéfiante, faut il être sous hypnose, s'habiller de plumes noires de surcroît pour écrire un livre. Jean de la Fontaine est abondamment cité par Krarok car il connaissait bien les mésaventures de son arrière grand père.



La généalogie ainsi établie, dans ce roman comme avec son illustre parent, tous les animaux de Paris passent, dans un désordre de cris : "Paris trembla, la vie s'arrêta. A travers la capitale, des milliers de vivats aboyés, miaulés, cancanés, nasillés, feulés, jappés, chuintés, hululés, roucoulés, craillés, croassés, glapis, cacardés, flûtés, pépiés, piaillés, ramagés, jacassés et trompetés saluèrent le dernier combat du Lion.p 231" sans oublier les perdrix qui cacabaient.



C'est bien un conte philosophique. Qui en doutait quand le veux Karka évoque "la conscience et la connaissance sont un vers dans un fruit", "plus le temps passe plus le fruit pourrit".



Je me suis vite désintéressé de l'histoire. Est ce si important cette trame, ce récit qui se limite à quelques événements, fussent-ils des lions échappés d'un cirque ?



Les questionnements foisonnent, jusqu'à ce toucan, au bec si étrange, un immigré qui vient séduire nos femelles, un oiseau venu d'ailleurs qui vient prendre le peu de nourriture qui nous reste en plein hiver.

Vivre libre pour un instant chanté dans le poème, goûter à la liberté, affronter les risques du monde se battre pour sa survie mais être libre.

Où encore comment harmoniser cohabiter, avec de telles différences, un monde juste où chacun aurait un peu pour se nourrir plutôt que s 'en remettre aux hommes comme à une religion unique, un ordre suprême qui nous éviterait d'avoir à penser.



Penser ou se livrer à son instinct et s'éviter ainsi de se poser certaines questions ?

Penser à demain du haut de son févier et aimer la tourterelle ou la mantelée écouter le grand Duc et sa sagesse, une belle idée philosophique pour un simple corbeau.



Tous ces animaux familiers, non certes non, nous ne les verrons plus avec le même bec ni avec le même œil.





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Bandits & brigands

Huit figures du « banditisme social » racontées par huit auteurs. Classique ou contemporain, solitaire ou en bande, sur tous les continents, chacun-e à sa manière s’est érigé-e en justicier-ère.



Émilien Bernard brosse le portrait du « célèbre Ned Kelly, le roi du bush, le Robin des Bois version kangourous », depuis la destruction des registres de prêts hypothécaires jusqu’à sa fin qu’il voulu épique et qui deviendra légendaire.



Rob Roy, brigand des Highlands, est évoqué par Thomas Giraud avec beaucoup de sensibilité et dans une prose d’une inégalable élégance. Convoyant des troupeaux, ce voleur écossais en prélève dans la plus grande discrétion une infime partie. « Ces moutons et ces brebis dérobés, il les redistribue, il égalise. » Puis, un jour, c’est le troupeau tout entier. « Avant Adam Smith et un peu différemment, il se trouve des airs de main invisible dans cette capacité désarmante, et désarmée, à ôter autant avec si peu. » Pourtant, « il ne se sent pas voleur, ce n’est pas ainsi qu’il se nommerait, enfin pas vraiment, pas complètement. Il a une explication là-dessus, solide, définitive et efficace. La voici. Qu’est-ce qu’être un voleur ? D’une, les définitions des livres, des recueils de droit et de jurisprudence n’aident pas, elles confondent la cause et la conséquence. De deux, il a noté que le voleur est toujours celui que les puissants désignent comme tel en identifiant de manière bien opportune des intérêts, des biens qui ne peuvent passer entre d’autres mains sans l’accord préalable des possédants. Celui qui prend de la nourriture pour survivre, juste ce qu’il faut, une pomme pour un repas, un peu de farine pour un pain, est-ce un voleur ? Et celui qui fait un travail et, dans le cadre de celui-ci, prélève un peu plus afin de redistribuer une partie de ce supplément à d’autres, à d’autres qui ont peu, ou beaucoup moins, qui ne mangent pas toujours à leur faim, qui n’ont ni noms, ni couteaux, ni terre ? Est-ce vraiment un voleur ? » Le récit de son errance pour échapper à ses poursuivants est tout simplement sublime.



L’enfance de Hend U Merri, l’insoumis kabyle, est racontée par Sarah Haidar, sa rencontre précoce avec la faim, avec l’injustice. Il devient rapidement dangereux et passe à l’attaque, car ne demandait pas « l’amélioration d’un monde mais son abolition ».



La vie de Phoolan Devi est d’une rare violence : « Je suis née moins qu’un chien, mais je suis devenue une reine » explique son autobiographie. Indienne, issue de la plus basse des castes, mariée à 11 ans, violée, rejetée, elle rejoindra les dacoïts et deviendra leur cheffe, pour répandre la vengeance, avant d’être assassinée, en 2001. La postérité s’empare alors de sa légende, des statuettes à son effigie vendues sur les marchés jusqu’à ce récit poignant, imaginé par Linda Lê.



Plutôt que de proposer une classique reconstitution épique et linéaire, chacun des auteurs s’efforce d’utiliser une forme narrative appropriée, relevant bien souvent plutôt de l’évocation. Ainsi Patrick Pécherot glane autant aux sources historiques qu’à la mémoire populaire pour restituer la personnalité de Cartouche, lui donnant tantôt le visage de Jean-Paul Belmondo dans le film éponyme, que celui que lui prête une gravure dénichée sur les quais, dans le bac d’un bouquiniste.



Serge Quadruppani restitue un Sante Notarnicola plus vrai que nature, en partie à l’aide de ses écrits autobiographiques, partant de sa remise en semi-liberté après vingt années passées en prison, remontant à son arrestation, à son procès, à son enfance à Bari, son premier coup avec sa bande, les émeutes de juillet 1962, piazza Statuto à Turin.



Sébastien Rutés s’échine à brosser le portrait de Joaquim Murieta, bandit californien, ou mexicain, ou chilien, grâce à un récit polyphonique dans lequel s’expriment autant Octavio Paz et Pablo Neruda que toutes sortes de personnages imprégnés de sa légende.



Enfin Jean-Luc Sahagian s’intéresse aux célèbres hors-la-loi du Nordeste brésilien, Maria Bonita, Lampião et leur bande de Cangaceiros, selon un procédé assez voisin, rapportant comme des documents d’enquête : témoignages d’un compagnon de route, description d’images collectées dans la presse populaire ou au musée anthropologique de Salvador de Bahia, carnets d’un cinéaste assassiné alors qu’il préparait un film sur eux, article de la Revue de l’institut des sciences sociales de São Paulo qui explique : « Ils sont déjà pure image et cela sera encore renforcé par leur disparition tragique. En effet, leur exécution est pensée avant tout dans l’idée de briser cette image, montrer leur faiblesse, souiller le glamour, en exposant leurs têtes et en diffusant largement les photos de ces atrocités. Mais, paradoxalement, cela jouera en leur faveur, comme pour le Che qui acquiert ainsi, post-mortem, une aura christique. En surexposant leur mort, en tentant de salir, l’État brésilien de Getúlio Vargas ne fait qu’affirmer la part infâme de la répression et l’héroïsme des hors-la-loi. Ils sont même sanctifiés par la manière ignoble dont on a disposé de leurs corps (exposant leurs crânes dans un musée) et, comme des saints, ils deviennent ainsi des corps souffrants mais triomphants, triomphants car souffrants ! »



Une belle collection de hors-la-loi défiant l’ordre économique, social et politique. En espérant que d’autres volumes suivront.



Article à retrouver sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Mictlán

Mictan: inframonde que doivent parcourir les morts , ici c'est au fond d'un camion réfrigéré que des dizaines de cadavres traversent le pays pour, peut-être un jour, trouver le repos.

Dans ce périple, ils sont conduits par deux hommes, le Gros et le Vieux, personnages déshumanisés jusque dans leur nom descriptif; tous deux ayant une histoire de vie tellement proche de celle des cadavres qu'ils prérèrent ne pas en parler, ne pas se parler.

Course contre la montre mais aussi contre la mort tant pour les dépouilles que pour nos chauffeurs car le Gouverneur et le Commandant veillent.



Peu de ponctuation ce qui rend le récit rapide, sans temps mort, comme courrir après le temps, après un reste de vie.



J'ai eu du mal avec les grossièretés et les répétitions donc, pour ne pas abandonner, j'ai lu certaines pages en diagonal; pas que cette lecture ne m'ai pas plus mais c'est un peu comme une oeuvre qu'on sait belle mais qu'on n'apprécie pas à titre personnel.







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Mictlán

Ils ne sont jamais nommés. Ils sont juste désignés comme Gros, Vieux et l’Architecte. Le lecteur monte dans le camion avec eux. Le road-trip est alors lancé ! La lecture se fait au rythme du voyage. Lorsque les personnages sont en train de rouler, les phrases sont longues, très longues. Elles sont ponctuées de virgules, au rythme du roulis du camion. Les mots se suivent, les idées s’entrechoquent, les digressions s’immiscent sans interruption. Successivement, on entre dans le cerveau de chaque protagoniste, qui va nous narrer sa vision de la situation en cours.



Quand le véhicule s’arrête, que les hommes descendent sur la terre ferme, la syntaxe « normale » reprend ses droits. Les phrases retrouvent une longueur classique, comme une pause dans le périple. Mais ces courts moments ne sont pour autant pas reposants, parce qu’ils sont le prétexte à des scènes de fusillades débridées et sanglantes. Et cela ne dure jamais longtemps, on reprend très vite le volant.



Le roman est court et c’est une bonne chose. L’effet de style utilisé par l’auteur est très efficace mais pourrait devenir lassant. Ne pas croiser de points durant plus d’une page est assez déroutant et ne laisse que peu de place à la respiration. Comme ce huis clos est oppressant, cette méthode est très adaptée pour faire ressentir les sensations au lecteur. Seulement, à la fin, on est content que ça se termine pour pouvoir reprendre son souffle.



Sébastien Rutés réussit un livre atypique et maîtrisé qui vous stressera tout au long de la route. Durant les longues réflexions des personnages, il en profite pour parler du côté sombre du pays traversé (qu’on imagine en Amérique du sud) et des us et coutumes peu commodes de ses habitants. C’est angoissant, violent, macabre, désespéré, tout ce qu’on aime dans un roman noir !
Lien : http://leslivresdek79.com/20..
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