Je passai la journée à écouter la mer, tel un naufragé, sauf que je n'avais pas d'épave à laquelle m'accrocher. Je restais là, à soliloquer et à jeter des cailloux aux flots. Les heures se succédaient au ralenti. L'horizon était peuplé de mes morts. Je pensais à ceux que nous avions laissés sur la terre de leur martyre, aux gueules cassées, aux handicapés qui hantaient les hôpitaux et aux spectres hagards errant dans les hospices psychiatriques. De parfaits inconnus, qu'on ne s'attendait pas à croiser un jour, nous étaient devenus aussi précieux que nos fratries.
Un chien se mit à japper sur la plage en tournant autour d'un couple, heureux comme un enfant amusé par le vol saccadé d'un papillon.
Il etait temps, pour moi, de rentrer à la caserne.