Certes, mon frère était bipolaire. Mais il n’était pas fou. Au contraire, durant certaines périodes, sa lucidité était implacable. Au sortir des phases dépressives, il notait les conséquences des dernières crises et des traitements. Les kilos en trop, les doigts réfractaires, la somnolence, les trous de mémoire quand il recommençait à jouer. L’effort surhumain d’apprendre et réapprendre les partitions dont les anxiolytiques avaient effacé la trace.
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