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4.03/5 (sur 18 notes)

Nationalité : Royaume-Uni
Né(e) : 1983
Biographie :

Engagé dans des organisations non gouvernementales comme Médecins Sans Frontières, Paul Duke effectue, depuis une quinzaine d'années, des missions dans le monde entier auprès des populations les plus vulnérables (Afgha+%nistan, Irak, Mali, Soudan du Sud, RDC…).

Sous le sol de coton noir est son premier roman.

Source : https://www.editionsdurocher.fr/auteur/fiche/55673-paul-duke
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Paul Duke nous présente son premier roman, "Sous le sol de coton noir", en librairies le 12 janvier 2022. Un roman géopolitique, très réaliste, qui plonge le lecteur au cœur de l'action humanitaire pour mieux en exposer les rouages, les risques d’instrumentalisation. Sans oublier les querelles internes et le goût des humanitaires pour l’aventure ! Un beau roman, riche et instructif, inspiré de l'expérience de l'auteur.


Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
— Je vous remercie tous d’être venus, commença Ezekiel dans un anglais approximatif. Vous avez été témoins hier soir de nombreux échanges de tirs, très violents, entre les troupes de l’Armée de libération du peuple du Soudan, le SPLA, et le groupe rebelle local Aguelek. Ce groupuscule fait partie du mouvement illégal d’opposition IO créé par le traître nuer, M. Riek Machar.
Son discours pue la propagande. Nous sommes une quinzaine de représentants des ONG dans la pièce, entourés d’une vingtaine de personnels gouvernementaux sud-soudanais, tous plus ou moins membres du SPLA. Tout le monde sait que c’est l’armée qui dirige le pays, mais nous préservons tous le mensonge, car le démentir créerait un incident diplomatique. Pour les humanitaires, aller à l’encontre de la volonté des autorités reviendrait à devoir quitter le pays. Nous sommes donc tous assis là, sur des chaises en plastique en mauvais état, dans cette petite maison en torchis au centre de Malakal qui constitue le bureau d’Ezekiel.
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Je mets un pied devant l’autre. J’avance dans ce marché mort, où tout semble avoir été purifié par une boule de feu, qui n’a rien épargné dans son sillage. Je parcours cette cicatrice, en laissant traîner le regard, comme si je cherchais quelque chose. Bien entendu, je ne vois rien à des kilomètres, seulement une vaste étendue de brûlis. Au-dessus de la ligne d’horizon se dresse un ciel de la même couleur anthracite que la terre. J’évolue dans un monde de poussière grise et morte.
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 La pire fin pour toute mission humanitaire, quand les conditions de sécurité ne pouvaient plus être assurées, que le contexte partait complètement en cacahuète, et que nous n’avions d’autres choix que de fuir le plus vite possible. Malgré la bonne réception de notre travail par les gens que nous aidions, la situation nous dépassait tous. Nous savions pertinemment que de nombreuses personnes se feraient tuer, nos employés locaux inclus, mais nous étions impuissants. Nos collègues du pays devaient se débrouiller pour mettre leur famille à l’abri, alors que nous, nous avions la possibilité de rentrer à la maison par avion. Rester aurait été inutile, mais partir malgré la menace et la peur, nous peinait. 
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Arthur avait écrit également à des ONG de droits de l’homme et des centres de conseil légal pour migrants. En Grèce, dans les Balkans, sur les nombreuses étapes de la route migratoire européenne. Lampedusa, Vintimille, Guevgueliya, Idoméni, Athènes, Lesbos… Visiblement, il n’avait encore rien organisé de concret. Parmi les réponses qu’il recevait, je sentis une différence dans le niveau d’engagement envers les migrants, selon les centres. Certains n’en avaient clairement rien à foutre, d’autres voulaient vraiment aider Arthur à dévoiler au monde entier les conditions dans lesquelles ces réfugiés politiques prenaient la route. J’appris que des escrocs vendaient aux familles des sandwichs à cinquante euros sur les frontières. La cupidité humaine n’avait pas de limites. Certains migrants se retrouvaient à camper dans le no man’s land entre deux pays et ne relevaient donc de la responsabilité d’aucun d’entre eux. Les gouvernements faisaient preuve d’énormément de créativité dans l’art de se laver les mains des problèmes humains, voire de profiter de la misère. La Turquie se vantait d’accueillir le plus grand nombre de réfugiés syriens alors qu’elle prenait part au conflit. Facile, quand on percevait d’énormes subventions de l’Union européenne pour empêcher les réfugiés du MoyenOrient de passer la frontière. Ce gouvernement ne valait pas mieux que celui du Soudan du Sud, qui massacrait son propre peuple. Le nettoyage ethnique pouvait prendre de nombreuses formes. Le déguiser en un conflit civil ou en une lutte contre une rébellion n’était qu’une tactique parmi d’autres. Ces efforts débordaient parfois en violences gratuites, en viols, en enlèvements, en persécutions, en mutilations, en infanticides… À croire que les auteurs de ces violences y prenaient du plaisir, qu’ils avaient oublié l’objectif premier de remporter la bataille et qu’ils s’acharnaient à infliger le maximum de souffrances à leurs victimes.
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L’impact de l’aide humanitaire ne se jouait pas sur le terrain, dans les villages de pays en développement, mais en réalité dans des salons luxueux comme ceux du palais Brongniart, place de la Bourse, à Paris. Les pontes du milieu avaient troqué le gilet de pêcheur et le baggy à poches pour le costume. Les ONG clamaient haut et fort leur indépendance afin de conserver une image qui inspire confiance auprès de leurs donateurs actuels et potentiels. En réalité, si elles percevaient les fonds des États, elles ne s’insurgeaient plus contre leurs actions plus ou moins discutables et se laissaient instrumentaliser par ces mêmes États à des fins politiques. Les guerres se répercutaient inévitablement sur les populations et leurs besoins essentiels, mais tant que les intérêts de l’État et de ses entreprises chéries étaient saufs, ce n’était pas si grave. La France pouvait agir pour mettre un terme au conflit au Yémen. Pour ce faire, elle vendait des armes à l’Arabie Saoudite, dont le bilan en matière de Droits de l’homme donnait peu cher de sa peau. De grandes fondations saoudiennes se vantaient ensuite de financer la reconstruction du pays et les ONG européennes, comme Action Internationale, se bousculaient au portillon pour essayer de grappiller une miette du gâteau. Ce n’était qu’un exemple de ce qui se tramait dans les conférences comme Synergies.
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Le devoir de neutralité nous empêche, nous humanitaires, de dénoncer haut et fort les fautifs. Nous ne traitons pas les causes des crises, mais leurs conséquences. Nous ne pouvons pas mettre en péril nos opérations d’aide aux populations en disant que les autorités qui nous accueillent sont les mêmes qui commettent les exactions sur leur propre peuple. Les gouvernements que nous sommes censés aider instrumentalisent les humanitaires, qui ne deviennent alors que de vulgaires pansements sur des jambes de bois. Ils nous voient comme un outil politique en tolérant notre présence. En revanche, en faisant appel à des journalistes, nous marchons sur des œufs, mais parvenons tout de même à faire savoir au monde que le gouvernement est en train de massacrer son propre peuple. Les ONG apportent une réponse concrète aux maux de populations vulnérables, mais changent moins les choses que les journalistes, qui lèvent le voile sur les crimes commis.
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Quand t’y penses, les Afghans n’ont jamais connu autre chose que la guerre et la misère, donc ils cherchent à vivre une vie normale malgré la tristesse de leur sort. L’un d’entre eux m’a dit cette phrase : « Notre passé est tellement inexistant que nous ne pouvons pas imaginer le moindre avenir. »
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À l’intérieur du POC, le seul signe d’une quelconque vie était le marché. La rue principale, qui séparait les ethnies shilluk et nuer, était le lieu d’échange. Parfait exemple de l’humour humanitaire, nous avions surnommé cette rue les Champs-Élysées. Seules les femmes pouvaient sortir du camp pour aller faire un peu de commerce en ville, car elles ne seraient pas accusées de rébellion. Les soldats postés en dehors se réservaient également le droit de les violer quand elles empruntaient le chemin d’un kilomètre à travers la brousse, entre le camp et la ville. Tout ce qui se trouvait sur le marché était ce que ces femmes avaient pu rapporter. Sur une photo, on en voyait une, triste et cadavérique, derrière son étal pitoyable de paquets de cigarettes locales, de gâteaux secs et rassis importés du Soudan, ainsi que quelques oignons qu’elle avait réussi à faire pousser. Habillée d’un drap bleu noué sur une épaule, elle contemplait les passants tout en essayant de surveiller son étal d’un œil vigilant. C’était son seul gagne-pain, ou son « moyen d’existence », comme disaient les humanitaires. La tristesse de ce terme ne m’affectait pas autant à l’époque. C’était le jargon. On encourageait des gens partout dans le monde à développer leurs « moyens d’existence ». Pour cette femme sur la photo, avec son maigre étal, je ne donnais pas cher de son existence. L’autre particularité frappante de cette photo était la couleur. La terre argileuse de cette région du monde, nommée Black Cotton Soil, ou sol de coton noir, était d’un gris anthracite qui accentuait l’atmosphère glauque. En saison des pluies, ce sol devenait un bain de boue qui rendait toute circulation, même à pied, extrêmement difficile. En arrière-plan, des tentes blanches, mais couvertes de cette boue grise à cause des précipitations. Entre la femme drapée de bleu, les abris et les passants, on avait affaire à une multitude de couleurs, mais contaminées par la terre. Dans ce camp, ces nuances de tons n’étaient qu’une illusion parmi d’autres. La faible saturation de la photo réduisait les couleurs au silence, tout comme les personnes qui les arboraient.
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Dans un souci d’impartialité, notre ONG fournit des services d’assainissement aux déplacés, mais également aux habitants de la ville, principalement d’ethnie dinka depuis la purge. Une bonne moitié d’entre eux sont des soldats du SPLA. Les compromis auxquels doivent se soumettre les ONG peuvent les contraindre à fournir des services aux belligérants, à l’origine des exactions, voire de la crise qui les fait intervenir. Le serpent se mord la queue une fois de plus. Si l’État nous tolère, c’est à la fois parce que nous apportons des services à leurs soldats, mais aussi pour donner au monde l’image d’un gouvernement qui veut aider son peuple. En réalité, tout le monde sait que ce sont eux qui tuent une partie de leur population.
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Paris - Mai 2017
L'impact de l'aide humanitaire ne se jouait pas sur le terrain, dans les villages de pays en développement, mais en réalité dans des salons luxueux comme ceux du palais Brongniart, place de la Bourse à Paris. Les pontes du milieu avaient troqué le gilet de pêcheur et le baggy à poches pour le costume. Les ONG clamaient haut et fort leur indépendance afin de conserver une image qui inspire confiance auprès de leurs donateurs actuels et potentiels. En réalité, si elles percevaient les fonds des Etats, elles ne s'insurgeaient plus contre leurs actions plus ou moins discutables et se laissaient instrumentaliser par ces mêmes Etats à des fins politiques...
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