« Parasites » de Nicolas Framont lu par Nicolas Matthys I Livre audio
C'est pourquoi les organisations patronales comme le CPME ou le Medef en redemandent toujours plus. Le patronat français est aujourd'hui complètement assisté par ces dispositifs d'aide, et l'entrepreneuriat qu'on érige en héroïsme individualiste et audacieux n'est autre , dans notre pays, que l'art de gratter tous les dispositifs d'aide publique possibles, tout en mordant dès que l'on peut la main que l'on nous tend.
Le patronat, pire assisté de France? Assurément, si l'on considère la part du budget de l'Etat que nous dépensons pour eux. Un quart du budget de l'Etat est dédié à ces multiples aides aux entreprises privées contre 3,2% à la solidarité, l'insertion et l'égalité des chances.
Les régimes fascistes européens des années 30 (Allemagne, Italie, Espagne) ont été choisis par les élites qui cherchaient avant tout à éviter la prise de pouvoir communiste et ont été rendus possibles par des régimes parlementaires justement peu démocratiques. Et en France, le patronat et de grandes figures du monde intellectuel ont massivement collaboré avec l'occupant.
Ils sont l'administration du mensonge: tout comme l'Union soviétique avait sa bureaucratie et ses commissaires politiques, le monde capitaliste a ses consultants en costume qui viennent raisonner les collectifs de cadres à coup de PowerPoint, afin qu'ils mettent en oeuvre le sale boulot et contribuent à renforcer la remontée des dividendes.
Par ailleurs, la jalousie implique un certain degré d'égalité. On peut être jaloux d'un ami, d'un collègue, mais peut-on l'être vraiment de Vincent Bolloré ? Absolument pas. Nous ne faisons littéralement pas partie de la même société que lui. Nous n'avons ni la même jeunesse, ni les mêmes parents, ni le même réseau. Il est impossible pour la plupart des gens d'être jaloux de Vincent Bolloré. Si les bourgeois voient de la jalousie dans notre colère envers leur règne, c'est d'abord, évidemment, pour décrédibiliser celle-ci. Mais c'est aussi et, je le crois, surtout, parce qu'eux-mêmes se jalousent énormément. La bourgeoisie vivant en vase clos, elle souffre de la comparaison permanente entre ses membres.
Il en faut, de l'énergie et des moyens, pour arriver à raconter aux autres qu'un empire familial acquis par la tricherie et le détournement de fonds publics est le résultat de son audace et de son talent ! C'est pourtant ce que font la majorité des grandes fortunes françaises et internationales. Les membres des classes laborieuses ne sont pas des saints, loin de là, mais ils sont moins menteurs, et donc moins ridicules, que les bourgeois.
Henri Ford a assujetti la classe ouvrière et brisé les travailleurs en les privant du sens qu'ils pouvaient donner, jadis, à leur métier. Édouard Leclerc a réduit les acteurs du petit commerce à une réserve de main-d'œuvre commerciale sous-payée et sous-syndicalisée, tout en ayant contribué à l'enlaidissement des territoires et au déclin des centres-ville de petite et moyenne catégorie. Travis Kalanick, fondateur de l'entreprise Uber, a quant à lui ouvert la voie à la transformation du salariat en pseudo-main-d'œuvre indépendante et précaire, créant une sorte de nouveau lumpenprolétariat au cœur même des pays les plus riches du monde.
La grande démission est donc le symptôme autant qu'une tentative de remède. Ce phénomène est un caillou dans la chaussure de la bourgeoisie, dont le gouvernement aux ordres n'a pas tardé pour tenter de lui retirer. En octobre 2022, le Parlement a voté le durcissement de l’allocation chômage, pour faire de la reprise d'un emploi à n'importe quel prix et dans n'importe quelle condition la norme. Il s'agit de discipliner la main-d'œuvre française et de la forcer à occuper les emplois qu'elle fuit. Dans le même temps, gouvernement et députés ont compliqué le départ des salariés au bout du rouleau : il n'est désormais plus possible de toucher des allocations chômage après un abandon de poste.
La féodalisation est là : il est plus rentable d'être bien vu par sa hiérarchie que de bien faire son travail. Le « savoir-être » (soumis, docile, admiratif, enthousiaste) est devenu plus important que le « savoir-faire ». Il faut dire que la psychologie positive et ses consultants sont passés par ici : être dans le bon « mindset » est essentiel, et bien récompensé.
Toutes nos grandes entreprises savent s'attirer les bonnes grâces de celles et ceux qui conçoivent la loi et la font appliquer. L'exemple de la cession complaisante de la CGM à la CMA n'en est qu'un parmi d'autres. Nous, contribuables de toutes les générations, nous payons le plus souvent pour le triomphe et la réussite que les grandes entreprises s'attribuent à elles-mêmes, tout en soutenant des formations politiques qui réclament constamment des coupes dans nos services publics.
D'un seul coup, les députés gagnent des indemnités qui les font basculer de leur condition à celle des 5% des Français les plus riches. On leur paie tout, on leur parle bien, grâce aux bons soins d'un personnel un poil obséquieux. Ceux qui tranchent par leur origine sociale sont rapidement rappelés à l'ordre. Caroline Fiat, députée insoumise qui exerçait le métier d'aide-soignante avant son élection en 2017, recevait le surnom de "bac -10" par ses homologues macronistes.