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Citations de Cédric Sapin-Defour (359)


Je sais que cette vie commune aura ses joies et ses peines mais c’est ainsi, les chemins menant au bonheur sont pavés de bien des affres, les trajets directs n’existent pas ou alors c’est vers autre part que le bonheur.
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– Je connais mes chiens… les chiens. Je sens qu’Ubac est heureux de partir. Je ne dis pas ça pour vous rassurer.
– Vous me rassurez quand même. Le veut-il vraiment ? Est-il heureux ainsi ? Ces questions seront les douces rengaines des années à venir et elles n’auront de réponses que la grandiose et terrible interprétation.
– Avec les gens, au moins, on sait, ils parlent.
– Oui mais ils peuvent dire ce qu’ils veulent.
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Il est ainsi des pics de l’existence qui invitent les géographies de l’enfance, nostalgie d’un temps où les rêves faisaient foi, évidents, irrévocables, insensibles aux monitions des prophètes de pacotille, experts en lendemains malaisés, ceux qu’on appelait les vieux. Ce n’est qu’après, poli par la vie, que l’on pense en contraintes avant tout.
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Les enfants croient en leur toute-puissance, ils sont protégés du doute ; quand ils disent à Ubac de s’asseoir, l’éventualité qu’il ne le fasse pas ne flotte pas dans l’air. Ubac s’assoit. J’applique désormais leur dogme : il faut croire. À ce que l’on dit, à ce que l’on fait, aux vœux que l’on formule. En somme à ce que l’on est.
(Ubac est un chien)
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C’est n’estimer rien qu’estimer tout le monde.
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Il faut pleurer me disait ma grand-mère, les larmes du dedans font autrement plus mal et pourrissent les os. Iko dormait sur la banquette arrière et je me persuadais qu’il n’avait rien compris, que les chiens n’avaient pas conscience de leur finitude ; les bêtes, on jure à leur clairvoyance ou à leur ignorance, selon ce qui protège notre cœur. Un matin, après mille ajournements égoïstes, l’amour l’emporta sur l’attachement. Il fallut décrocher le téléphone pour prendre un rendez-vous qui pique une vie, se rendre chez notre vétérinaire, le sien, le mien et en repartir seul, détroussé, un collier et une poignée de poils comme uniques talismans. En quelques centilitres d’une seringue, l’après s’éteint et rien ne revient. Je crois qu’Iko se plaisait sur notre terre, nous avions d’innombrables projets, pourtant nous le savions, attendre n’est jamais préférable.
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Nous, les hyperconnectés, dans la grande histoire des séparations, avons perdu la plus flatteuse des connexions, chaque balade me le confirme, bientôt les seuls chants d’oiseaux qui soulèveront notre oreille seront les arrivées de message sur nos écrans.
Ce chien me réapprend à lire le vivant autour, à écouter les musiques de la nature, ses amplitudes, ses respirations, à mesurer ses états, à déchiffrer ses codes. L’ai-je su un jour ? Si la vie m’a démontré que, pour connaître un paysage, rien n’est plus fidèle que l’éprouver par le corps, à la longue, humble et en toute saison, Ubac me dit autre chose encore, qu’il faut en être, faire corps et ne pas craindre qu’il nous traverse.
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Surfiler son existence de la présence d'un chien, c'est entendre que le bonheur façonne la tristesse, c'est mesurer comme le manque est mal soluble dans les mémoires aussi vastes et heureuses soient-elles, c'est accepter que chaque minute volatile soit vécue sept fois plus intensément qu'à l'habitude, c'est se cogner à ce séduisant et vertigineux projet de ne saboter aucun instant et de célébrer la vie de manière forcenée.
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Au moment de sortir de la clinique, ce qu’il ne fait jamais car on ne parle ici que du cœur des bêtes, le docteur Forget m’accompagne. Il m’assène quelque chose comme ça :
- Vous n’avez pas à être gêné. Ni de vos joies, ni de vos peurs, ni de vos tristesses. Attendre qu’elles soient comprises ou acceptées, c’est du temps foutu en l’air et c’est faire insulte à votre histoire avec Ubac. Moquez-vous-en !
Je lui dis un merci lent, c’est promis, des visions contraires, je m’en moquerai. Avec bonheur. Puis une phrase classique des fins de consultations où je ne vous dis pas à bientôt malgré le plaisir de vous revoir.
Et nous riions, convaincus que nous tenons là une juste méthode pour ne pas craindre les démesures et nous contenter des vies choisies.
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Un samedi matin, par curiosité plus que par conversion au concept, je suis allé observer un cours d'éducation canine de l'autre côté du tunnel du Chat. Il y avait foule, des tas de chiens différents, des gens de tout rang aussi, du treillis et du mocassin. Les chiens m'avaient l'air heureux d'être cornaqués, certains militaires le sont aussi. Des "pas bouger" fusaient en écho, il me semblait entendre l'exact opposé à ce que pour quoi un chien entre dans nos vies.
Un instructeur qui sentait fort la testostérone s'est approché de moi et m'a fait l'article de l'école. Bien sûr, Ubac lui donnait toutes les raisons d'estimer que son cas méritait un cursus prolongé. Il n'avait que l'anarchie à la bouche : l'essentielle anarchie sans laquelle toute relation homme-chien n'est pas viable, l'anarchie comme ça l'est dans la nature, l'anarchie qui n'est plus à la mode dans notre monde actuel si vous voyez ce que je veux dire ... Je trouvais cela joliment décalé, inattendu et séduisant, un nouveau courant sans doute, mi-martial, mi-débridé. (...)
J'ai petit à petit compris que c'est à la hiérarchie qu'il vouait une adoration pédagogique. Faux amis, je l'ai salué poliment.
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Ce chien me réapprend à lire le vivant autour, à écouter les musiques de la nature, ses amplitudes, ses respirations, à mesurer ses états, à déchiffrer ses codes. L’ai-je su un jour ?
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« Mais j’ai toujours pensé que dans une relation bien considérée, c’était le chien qui élevait son « maître » et non l’inverse. »
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Nous allons apprendre à nous connaître, à construire un langage intermédiaire. Il manquera la parole mais il y aura mieux. Il y aura les regards, les bruits infimes, les courbures du corps, le sens du poil, ces signaux discrets, perçus de nous seuls et offrant à des êtres si différents de dialoguer. Ubac, qui sait, m'apprendra les phéromones. On touchera alors l'altérite, pas ce grand mot brandi pour faire joli mais dont on sait que l'ambition déguisée est de nous conforter au mieux dans la divine opinion que l'on a de soi-même ; non, l'altérité vraie, celle d'êtres si dissemblables que rien de soi n'est un recours pour déchiffrer l'autre et percer qui il est. […]

Une couche de hardiesse, voilà ce que ce chien a de plus à son péricarde, une anomalie du cœur et qui luit jusqu'à moi. Car lorsque l'on croit en un être qui croit à ce point en vous, lorsqu'une vie si estimable semble vous estimer, alors on glane, ébahi, de précieux motifs pour s'envisager comme quelqu'un d'à peu près valable. Le jour où ce cœur culotté décidera qu'il est temps de flancher, j'ignore dans quel autre être d'os et de chair je pourrai retrouver le centième de cet éloge et le millième de cet élan, ce dont je suis certain, c'est qu'il faudra un second miracle. […]

Notre vie commune mérite mieux que de lui trouver des mots qui font joli mais ''enlumineur'' te va si bien (pp. 76, 180, 286).
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L'amour dont il s'agit sera sans conditions. Il s'en fichera de beaucoup, de mon rang, de mes richesses, de mes vertus et de mes manques. Il m'aidera à défricher les importances et nous réduirons ensemble cette existence au luxe de l'essentiel. Il sera là à ensauvager mes jours et ni lui ni moi ne serons plus jamais seuls. Cela peut suffire à être heureux. Qu'il advienne le meilleur ou le pire, les larmes ou les rires, les honneurs ou les blâmes, il voyagera dans sa constance et les ondulations de mon existence sans jamais céder à notre histoire un pouce de sa loyauté, sans me juger, prêt à donner la sienne si nécessaire. Il m'augmentera.
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Ce chien me réapprend à lire le vivant autour, à écouter les musiques de la nature, ses amplitudes, ses respirations, à mesurer ses états, à déchiffrer ses codes.
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Eux aussi, je les voudrais éternels, nous saurions quoi faire de l'infini.
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Au zinc, on parle fort, il est question d’une géopolitique nuancée ; pouvoir tout expliquer en désignant un seul coupable semble rendre la vie confortable.
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Une minute au moins après l’embouteillage des onze, il apparaît, il le chien. Comme sorti des abysses, aveugle et lumineux. Seul, détaché du reste et aussi peu pressé que possible de me voir. Une apparition, oui, osons le titre, sans autres idoles que de croire aux rencontres. Il pourrait de ses yeux débutants fixer cent merveilles autour, une feuille virevoltante, un frère au hasard ou cette dame à l’odeur familière, mais c’est à moi qu’il offre la fixité de son regard, comme si j’étais la seule opacité de ce monde. Nous nous regardons, aimantés, sans cligner, et ce jeu d’enfants où le premier baissant les yeux perd la partie, prétexte à tant d’idylles naissantes, débute pour ne s’achever qu’à la seconde où l’un d’entre nous les fermera pour toujours. Ce chien ne me lâchera jamais de son œil attentif et je sais que par ces lucarnes de l’âme, au-delà de voir, il regardait et savait tout de moi dont ce que je m’efforçais à rendre invisible.

Ces secondes se déroulent-elles ainsi parce qu’on l’a souhaité si ardemment qu’on a jusque secoué le réel, est-ce la suffisante réalité ou une reconstruction bienveillante de notre imaginaire ? Cette question taraude les hommes si peu convaincus de leur pouvoir à bousculer les destins. On s’en moque en vérité, de la poule, de l’œuf et des farces de l’hippocampe, c’est ainsi, il m’a regardé, je l’ai regardé, nous nous sommes dit c’est toi et la terre a changé d’axe, les mystères d’une vie plus ample que nous, voilà tout.
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Un chien a vocation à protéger de l'immobilité, il est un antidote à la fossilisation.
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Prendre un chien, c'est se saisir d'un être de passage, s'engager pour une vie ample, certainement heureuse, irrémédiablement triste, économe en rien.
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