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3.53/5 (sur 54 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Le Havre , le 11/02/1975
Biographie :

Aymeric Patricot est un essayiste et écrivain.

Diplômé d’HEC et de l’EHESS, il travaille au Bureau du Livre de l’Ambassade de France au Japon avant de passer l’Agrégation de Lettres modernes. Il enseigne pendant dix ans la littérature dans des collèges et lycées de la région parisienne, puis devient professeur de culture générale en classe préparatoire.

En 2006, il publie son premier roman "Azima la Rouge" aux éditions Flammarion, suivi de "Suicide Girls" (Éditions Léo Scheer) en 2010.

Dans son essai "Autoportrait du professeur en territoire difficile" (Gallimard, 2010), il fait un bilan provisoire de son expérience de professeur en banlieue parisienne.

Dans ses livres suivants, il varie les genres et les styles. Son essai "Les petits blancs" (Plein Jour, 2013) fait le pari de décrire une réalité méconnue de la sociologie française, la figure du Blanc pauvre. "J'ai entraîné mon peuple dans cette aventure" (Anne Carrière, 2015), roman épique, raconte l'histoire véridique de cette île du Pacifique, Nauru. En 2019, il signe un essai autobiographique, "Les Bons Profs".

site officiel : http://www.aymericpatricot.com/
son blog : http://www.aymericpatricot.com/dotclear/
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Source : //www.editionsducygne.com
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Bibliographie de Aymeric Patricot   (14)Voir plus


Entretien avec Aymeric Patricot, à propos de son ouvrage Les Bons Profs


12/04/2019

Après la controverse autour de son livre Les Petits Blancs, mais aussi la parution d`autres essais et romans, Aymeric Patricot signe un essai autobiographique en partant d`une question simple : qu`est-ce qu`on pourrait appeler aujourd`hui un « bon prof » ? L`occasion de revenir sur sa scolarité très studieuse, son métier de prof, ainsi que l`histoire de l`enseignement et des différentes méthodes d`apprentissage.

Plus qu’un questionnement sur ce que peut être un « bon prof », votre livre apparaît comme une autobiographie professionnelle et scolaire, où les considérations sur le métier sont doublées d’un récit biographique parfois très intime. Quelle était votre idée de départ avec ce livre, et comment a-t-elle évolué durant l’écriture ?

Je voulais effectivement écrire un livre très personnel, qui permette certes une réflexion sur le métier aujourd’hui mais qui corresponde aussi et surtout à une sorte de bilan sur mon rapport à la profession, après quinze ans d’exercice. Comme dans Autoportrait du professeur en territoire difficile (Gallimard, 2011), je voulais écrire pour préciser mes propres idées tout en proposant un travail littéraire : il s’agissait de trouver le ton juste entre autobiographie et essai. J’avais l’ambition d’écrire un beau livre, et pas seulement un essai didactique sur le monde de l’enseignement, comme il en existe d’ailleurs de très nombreux – et parfois de très bons. Curieusement, c’est d’ailleurs avec mes deux livres sur le métier de professeur que j’ai sans doute développé l’écriture la plus littéraire, alors que dans mes romans ou d’autres essais je cherchais peut-être avant tout une forme d’efficacité.



Vous convoquez donc autant votre expérience d’étudiant que de professionnel pour tenter de définir ce que pourrait être un « bon prof ». Or, comme vous l’expliquez, on n’attend plus de ce métier les mêmes résultats qu’il y a quelques décennies. L’école apparaît aujourd’hui avant tout comme un lieu de conformation aux règles de la société (codes sociaux), un laboratoire d’insertion (au monde du travail notamment) et, quelque part, de domestication de la jeunesse. Il n’est plus vraiment question de « faire ses humanités »…

Il est vrai que les ambitions sont désormais avant tout sociales, économiques et politiques : il s’agit de faire de l’élève un bon citoyen et un individu doté de ces fameuses « compétences » qui lui permettront de trouver du travail. Loin de moi d’ailleurs d’ironiser sur ces deux dimensions-là. Cependant il existe une autre dimension, la dimension proprement humaniste, qui est moins explicite dans les objectifs que se fixe l’école et dont je suis persuadé qu’elle reste malgré tout déterminante dans la vocation des enseignants. Au fond de lui, le professeur garde ce rêve d’élever les élèves vers une conception plus riche et plus épanouie d’eux-mêmes, le rêve de développer toutes les potentialités de l’individu. Même si la figure de cet éminent professeur du Cercle des poètes disparus en agace plus d’un, je pense qu’il incarne bel et bien l’un des idéaux du métier – avec tous les risques qu’il comporte.


« La misère du professeur est aussi sa grandeur : certes à côté de la société, il en est l’un des tuteurs ; veillant sur la jeunesse, il jouit du contact avec cette sorte de vitalité essentielle. »



Vous avez des mots assez durs au début du livre sur le métier de professeur, lorsque vous évoquez une conversation avec un ami, alors que vous étiez étudiants. On retrouve ce même regard âpre sur le professorat à la fin de l’ouvrage, cette fois vu de l’intérieur. Pouvez-vous nous rappeler ce qui vous a mené à cette profession, et nous expliquer comment vous tenez le coup depuis ?

Effectivement, je développe en début et en fin d’ouvrage l’idée qu’il existe une certaine « misère » de l’enseignement : après tout, l’enseignant passe sa vie à former d’autres personnes, il travaille auprès d’enfants, parfois de jeunes adultes, pour les aider à accéder pleinement à la maturité ; mais lui, quelle fonction exercice-t-il vraiment au sein de la société ? Il peut avoir le sentiment de rester au seuil de la vie réelle, d’autant qu’il se voit vieillir alors que son public, lui, paraît doté d’une éternelle jeunesse. C’est cette dimension-là du métier qui m’a surtout retenu de l’épouser lorsque j’avais vingt ans. Cependant, aujourd’hui, même si j’insiste sur ce visage du métier dont on parle finalement assez peu, c’est pour souligner qu’il en est l’une des servitudes mais au même titre que pour n’importe laquelle des professions : chaque métier comporte ses duretés, ses spécificités, et cela n’annule en rien ses beautés. Disons même que le rêve de chaque métier paraît être le décalque de ses défauts. Ainsi, la misère du professeur est aussi sa grandeur : certes à côté de la société, il en est l’un des tuteurs ; veillant sur la jeunesse, il jouit du contact avec cette sorte de vitalité essentielle.


En tant qu’élève « studieux jusqu’à l’absurde », comme vous l’expliquez, vous avez visiblement développé un regard assez ambivalent sur l’école en tant qu’établissement, et l’enseignant comme « passeur de feu », regard dans lequel se mêlent passion et rejet. Quel conseil donneriez-vous aujourd’hui à un étudiant très (trop ?) travailleur, qui consacre sa jeunesse à contenter ses profs et l’institution ?

Dans le livre j’ironise effectivement sur l’élève que j’étais, timide et travailleur, qui aura toujours obtenu d’excellentes notes et qui aura d’ailleurs obtenu nombre de diplômes. Mais ça ne l’aura pas rendu très heureux, ça l’aura même d’une certaine façon aveuglé puisque les facilités l’auront empêché d’identifier ce qui l’intéressait vraiment. Par ailleurs, j’ai rarement senti, contrairement à ce que l’on pourrait croire, de réelle bienveillance de l’institution envers ses « bons élèves », et c’est une source d’interrogation pour moi. Quoi qu’il en soit, je ne conseillerais bien sûr à personne de déserter l’école ; et je pense que l’école, quoi qu’on en dise, cherche à mieux tenir compte du bien-être des élèves. Cependant il me paraît important de suggérer à ceux qui seraient tentés de consacrer leur jeunesse au travail scolaire de réserver une part conséquente de leur vie à tout le reste : c’est une question de bonheur tout autant que de lucidité et de force.


Si vous deviez proposer une réforme du système scolaire, et une seule, au ministère de l’Education nationale, laquelle serait-ce ?

Sans parler de revalorisation du métier, qui me paraît un préalable à toute réforme puisque sans elle les enseignants ont le sentiment qu’on se moque d’eux, je pense que le maillon faible du système est le collège : c’est à ce niveau d’étude me semble-t-il que certains établissements connaissent une forme de naufrage et que la plupart des élèves décrocheurs prennent la voie de l’abandon. Le dédoublement de certaines classes de CP a été célébré à juste titre comme une excellente réforme, la réforme actuelle du lycée m’a l’air de devenir une sacrée usine à gaz – l’avenir immédiat nous le dira. Je me demande si nous ne continuons pas à nous aveugler, en revanche, sur le collège. Le hashtag #pasdevague de l’hiver dernier serait-il le signe que les langues se délient enfin et que nous entrons dans une phase de réelle prise de conscience, préalable à l’action ?



Aymeric Patricot à propos de ses lectures



Quel est le livre qui vous a donné envie d`écrire ?

Tous. Et un titre, en particulier : L’amour est un chien de l’enfer de Charles Bukowski.



Quel est le livre que vous auriez rêvé écrire ?

Un parmi ceux de Marcel Proust, Louis-Ferdinand Céline, William Faulkner, Sidonie-Gabrielle Colette, Philip Roth



Quelle est votre première grande découverte littéraire ?

La Nausée de Jean-Paul Sartre, L’Ile au trésor de Robert-Louis Stevenson.



Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?

Le Pur et l’Impur de Colette.



Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?

Belle du Seigneur d’Albert Cohen – du moins, pas en entier.



Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?

Chroniques des quais, de David Wojnarowicz.



Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ?

Candide de Voltaire, Gulliver de Jonathan Swift, et pas mal de classiques contemporains.



Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?

Tous les aphorismes d’Oscar Wilde, qui me font toujours un effet sidérant.



Et en ce moment que lisez-vous ?

Beaucoup d’essais pour en préparer un nouveau, mais j’ai hâte de renouer avec la littérature, la vraie.



Découvrez Les Bons Profs d`Aymeric Patricot aux éditions Plein Jour :




Entretien réalisé par Nicolas Hecht.






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Vidéo de

Suite 3/3 des portraits et de l'interview des Vies enchantées et suite sur les Petits Blancs.


Citations et extraits (73) Voir plus Ajouter une citation
Aymeric Patricot
Ce métissage de fait, beaucoup plus avancé dans les quartiers pauvres que dans les quartiers bourgeois contrairement au cliché voulant que le petit Blanc soit toujours raciste, provoque son lot d'histoires heureuses mais aussi de crises passionnelles.(...) Sans vouloir faire oeuvre de sociologie, cette série de portraits a pour seule ambition d'esquisser en creux une réalité en partie occultée de la société française, avec des traits pathétiques, ses tentations détestables mais ses grandeurs aussi.p.15
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L'immigration renforce leur pouvoir. Tandis que ça limite le mien.

....Que voulez-vous que je pense de la discrimination positive.? C'est une discrimination contre moi, bien sûr. Vous vous doutez bien que ce ne sont pas les
enfants de bourgeois qui se verront limités dans leurs carrières. Mais des gens comme moi et mes propres enfants.
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L’approfondissement du chômage et la relative désindustrialisation du pays ont fait le reste : la classe ouvrière s’est paupérisée. Moins nombreuse, moins bien organisée, elle a cessé de se faire appeler « classe ouvrière ». Le Parti socialiste, lui, a cessé de s’intéresser exclusivement à elle, marquant ses distances avec une population qu’il ne savait plus comment aider, Mitterrand déclarant par exemple que tout avait été fait contre le chômage. On reprochait par ailleurs à ces gens un manque à la fois de discernement politique – des dérapages vers l’extrême droite, un certain désintérêt pour les questions sociétales – et de bon goût existentiel. En fait, on était déçu que certaines couches populaires ne s’embourgeoisent pas. L’ouvrier ne comprenait plus ceux qui parlaient en son nom, ces derniers ne le comprenant plus eux-mêmes et ne cherchant d’ailleurs plus à le faire.
Le coup de grâce a été porté en 2011 par une note de Terra Nova, think tank proche du Parti socialiste : Gauche : quelle majorité électorale pour 2012 ? Cette dernière estimait que la cible du Parti socialiste devait être fondée, désormais, sur une nouvelle coalition, celle de la « France de demain, plus jeune, plus diverse, plus féminisée ». Non seulement l’électorat ouvrier voyait son poids démographique s’effondrer, mas il ne votait plus majoritairement à gauche. Et le rapport dénonçait un divorce des valeurs entre un monde ouvrier fragilisé, tenté par le conservatisme et le repli sur soi, et cette « Nouvelle France » plus moderne, plus métissée :il ne faisait qu’entériner, par une déclaration solennelle, l’exclusion des ouvriers loin des centres d’intérêts du Parti socialiste.
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Elle avait cependant du mal à mettre des mots sur ce qui lui plaisait vraiment dans la présence de Gentil. Sa joie ? Ses enfants n'en étaient pas avares. Ses aboiements ? Elle ne pouvait dire qu'elle les aimait. Ses bonds, ses courses, ses halètements ? Chaque chose prise séparément la laissait perplexe ; c'était l'ensemble qui la séduisait, un ensemble étrange et presque inquiétant, rayonnant au centre de l'appartement comme un diamant reflétant sur chacune de ses facettes un aspect du luxe environnant.
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Tout a commencé par des coups de fil anonymes : je restais suspendu, dans la pénombre, à percevoir au combiné des respirations douces, des respirations dont j'étais sûr qu'elles étaient féminines, et qui me faisaient beaucoup plus peur. J'y percevais de l'acharnement. Pour une fois, la violence d'un homme m'aurait semblé plus facile à affronter. Je ne me mettais pas en colère, persuadé que la personne en ressentirait du plaisir, mais surtout que ça l'encouragerait à aller plus loin.
Une nuit, j'ai perçu des frottements contre la porte d'entrée. Le coeur battant, je suis allé jusqu'à l'oeilleton, mais la nuit me cachait le spectacle. Je me suis assis dos contre la porte et les grattements ont repris. Je ne sais pas ce qui m'a retenu d'ouvrir la porte : peut-être la peur de couvrir de ridicule la femme qui se serait trouvée là, accroupie sur le paillasson. Peut-être aussi le plaisir de laisser grandir en moi les frissons qui me traversaient à chaque grattement, des frissons de terreur et de honte, des frissons qui me rappelaient combien j'étais maudit.
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Chapitre La sévérité - page 115 :
Rousseau n'a pas attendu les pédagogues de la rue de Grenelle pour déconseiller les réprimandes : "Avertissez-le de ses fautes avant qu'il y tombe : quand il y est tombé, ne lui reprochez point; vous ne feriez qu'enflammer et mutiner son amour-propre. Une leçon qui révolte ne profite pas." (Emile ou De l'éducation).
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Chapitre Le fantasme des contenus - page 40 :
Tout d'abord, les classiques de la littérature, parmi lesquels je piochais des choses abordables, ce qui n'est d'ailleurs pas toujours facile. Comment trouver, par exemple, de courts romans dans une langue moderne et belle, certes de qualité soutenue, mais relativement divertissants, de manière à permettre au plus grand nombre d'avoir la satisfaction de les lire ? Il m'arrive encore de me creuser la tête à ce sujet. Zola ? Trop touffu. Balzac ? Trop technique. Hugo ? Trop long. Proust ? Trop verbeux. Céline ? Trop sordide. Colette ? Trop précieuse. Kessel ? Trop factuel. Modiano ? Trop fade. Le Clézio ? Trop rêveur. Le professeur finit toujours par lutter contre les trop.
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Chapitre La course aux méthodes - page 27 :
Pour avancer dans une réflexion, ne faut-il pas toujours partir d'un présupposé donné, lui apporter des objections pour tenter d'élargir le propos ? De même, toute discussion, tout débat public n'ont-ils pas pour finalité de confronter les points de vue dans l'espoir qu' une sorte d'intelligence collective relève les contradictions, en comprenne la nature et les dépasse ?
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La paysagiste
Je n'ai jamais été déçue. Je pensais me divertir, les jardins sont entrés dans ma vie. Leur fanfare m' a fait oublier certaines déconvenues. Mieux, elle a pris la place d'autres passions.(...)Encore une fois, je ne m'oublie pas dans ce jardin : je grandis mon corps à ses dimensions et je les laisse entrer en moi. C'est un bonheur instinctif, comme privé de parole.
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Ces dialogues expriment une palette très large de sentiments : haine, amours,désirs, angoisses, espoirs...Entre les deux extrêmes du spectre, il y a une vaste zone d'affects et d'approches craintives, cette zone où les identités vacillent, se mêlent, virent à la sublime étreinte ou à la folie. p.14
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