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Critique de PhilippeCastellain


Une élégante visite au coeur de la culture japonaise traditionnelle. Nous sommes à Kyoto, l'antique capitale impériale, là où même les marchands de tissus constituent de vénérables dynasties. La plus ancienne et la plus respectée d'entre elles, la famille Sata, voit ses affaires lentement péricliter au fur et à mesure que les parents vieillissant se désintéressent des questions matérielles. Ils n'ont pas eu d'enfants mais ont une fille adoptive, Chieko. Abandonnée à la naissance, ils l'ont recueillie, élevée, aimée, en ont fait la jeune personne élégante et cultivée typique de leur monde.

Un jour par hasard Chieko découvre qu'elle a une soeur jumelle, Naeko. Leurs parents, des paysans pauvres depuis décédés, l'ont abandonné à la naissance et ont gardé la soeur. le hasard a fait de l'abandonnée une jeune fille choyée et impeccablement éduquée, et de celle qui avait été choisie une ouvrière illettrée… Cette dernière vie dans un village de la montagne spécialisée dans la production de bois de cryptomère (un arbre spécifique au Japon, où il a de nombreux usages et une forte symbolique). de loin en loin, les soeurs retrouvées font connaissance. D'un côté une robuste ouvrière, de l'autre une fine lettrée de la haute bourgeoisie… Rien de plus étrange dans un pays où les liens familiaux priment sur tout, mais où les différences sociales dressent d'infranchissables barrières ! Mais on peut toujours compter sur la politesse et la discrétion japonaise pour désamorcer les situations gênantes, tant qu'elles sont le fait de la fatalité.

Non, ce qui est vraiment dérangeant dans ce petit univers de soie, ce sont ces cars de touristes étrangers bruyants et vulgaires qui commencent à débarquer en masse. Et pire, de voir certaines personnes abandonner les convenances dans l'espoir de leur vendre pacotille et gadgets. Si cet esprit triomphait, le monde deviendrait bien laid…

Grâce à ce livre, j'ai compris une chose sur le Japon. Il y a là-bas une bourgeoisie d'une catégorie très particulière, et qu'on retrouve également en France : celle qui place au-dessus de tout son héritage culturel, aime à s'entourer d'objets anciens, et cultive méticuleusement les souvenirs familiaux accumulés au fil des générations. Les petites turpitudes morales des uns et des autres, c'est sans importance. L'argent, cela va et cela vient, au rythme des affaires et des aléas du monde. Mais le patrimoine culturel, c'est la seule chose qui compte - et rien n'importe plus que de le transmettre de génération en génération.

Cet esprit, je l'ai retrouvé quasiment à l'identique dans ce texte, mais avec une différence notable : en France la référence ultime culturelle reste le XVIIème siècle, vu comme l'âge d'or de la création artistique. le siècle qui vit l'éclosion du raffinement, la définition de premiers standards de qualité et la naissance des grandes manufactures. Pour leurs homologues japonais c'est plutôt le XIIème ou le XIIIème siècle !

Au Japon, les séismes n'ont pas été trop généreux avec les bâtiments anciens. Mais cela n'a en rien gêné la transmission du patrimoine culturel. Et grâce à ce roman, j'ai réalisé à quel point celui-ci reposait sur des canons anciens.
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